A Madaoua, entre une crise silencieuse et l'engagement du HCR pour soutenir des milliers de réfugiés nigérians en quête d'aide et de protection
A Madaoua, entre une crise silencieuse et l'engagement du HCR pour soutenir des milliers de réfugiés nigérians en quête d'aide et de protection
Dans la région de Tahoua au Niger, des populations de réfugiés du Nigeria cherchent désespérément protection et assistance. En dépit d'une apparente stabilité, une réalité poignante se dessine à mesure que les réfugiés affluent, semaine après semaine. Ils endurent des périples éreintants, marchant pendant des heures, jusqu'à ce qu'ils atteignent enfin les premiers villages au Niger, où les communautés locales les accueillent chaleureusement.
Située à seulement 50 kilomètres de la frontière avec le Nigeria, la ville de Madaoua, dans la région de Tahoua, a vu arriver plus de 14 000 réfugiés nigérians depuis le début de l'année 2023, répartis dans divers villages d'accueil.
Le HCR, l’Agence des Nations unies pour les réfugiés, est la seule agence onusienne présente dans la région, et depuis novembre 2022, elle a renforcé son engagement en ouvrant un nouveau bureau. Cette initiative vise à répondre de manière plus efficace à l'afflux ininterrompu de réfugiés nigérians fuyant l'insécurité persistante qui sévit de l'autre côté de la frontière. Cette présence du HCR et de ses partenaires permet d'apporter une aide plus proche et plus adaptée aux besoins de ces familles vulnérables.
L'insécurité à la frontière entre les deux pays a débuté en 2013 lorsque des groupes armés non étatiques ont déclenché des hostilités dans les États du nord du Nigeria, notamment Sokoto, Zanfara et Katsina, contribuant ainsi à la détérioration de l'environnement sécuritaire.
« Nous avons fui notre pays il y a deux ans, et chaque jour, nous voyons de nouveaux arrivants traverser la frontière, fuyant les pillages, les enlèvements pour rançon et la mort d'innocents », déclare Fatima Youssouf, 55 ans, originaire du Nigeria, qui a trouvé refuge à Bangui en 2021 avec ses trois enfants. Malgré sa petite taille, cette mère de famille, qui était enseignante d'anglais dans son pays, rayonne de détermination et d'audace.
Le HCR et ses partenaires, en collaboration avec les autorités locales, travaillent inlassablement pour répondre aux besoins des réfugiés, mais aussi pour les intégrer le plus rapidement au tissu social et économique local. « Je préside un comité de trente femmes, composé de 15 réfugiées et 15 membres de la communauté hôte, raconte Fatima. Grâce au soutien du HCR, nous sommes plusieurs à avoir pu développer une petite entreprise et générer des petits revenus qui nous permettent de vivre au quotidien. Je suis reconnaissante envers le Niger pour nous permettre de vivre en sécurité", confie-t-elle.
Ici, loin des frontières conventionnelles que nous connaissons, il n'y a ni ne contrôle de documents ni passeports. Les maisons sont construites en terre rouge séchée par le soleil, les villages sont petits, et les arbres sont rares, séparés par de petites rivières ou des sentiers tracés par le mouvement des personnes et des animaux. Les habitants le long de la frontière entre le Niger et le Nigeria vivent dans des conditions précaires, avec une terre aride et rocailleuse, une pluie rare, et la constante menace des incursions de groupes armés.
Depuis 2021, le HCR a enregistré plus de 31 000 réfugiés et demandeurs d'asile nigérians qui se sont installés à Bangui, à seulement 2 kilomètres de la frontière.
Un jour de mai, alors que tout le monde était dans les champs, la pluie attendue depuis des mois était enfin tombée. En passant par le petit village de Maikourou, on pouvait voir les agriculteurs et leurs familles s'atteler à la préparation de leurs terres pour cultiver le mil et le sorgho.
Pour de nombreuses personnes de la région, cela aurait pu ressembler à une journée ordinaire. Cependant, à côté, des milliers de femmes, d'enfants et de personnes âgées étaient réunis, vêtus de tenues lumineuses et colorées, dans l'attente de recevoir des articles de première nécessité et une assistance médicale dispensée par le HCR et de ses partenaires.
Salamu Aboubakar, une jeune femme de 35 ans, fait partie de ces personnes qui ont marché pendant une semaine pour atteindre les abords de Madaoua. Elle se souvient du jour où tout a basculé dans sa vie : « J'entendais des cris partout. Avec l'aide de mon voisin Amadou, j'ai sauté par-dessus le mur de ma maison et j'ai fui avec mes enfants », raconte-t-elle. « Nous avons tout abandonné dans notre village et j'ai marché pendant une journée avec mes cinq enfants pour atteindre Maikouru. Les enfants n'arrêtaient pas de me demander où était leur père. Aujourd'hui encore, je ne sais pas où il est. Il n'était pas là quand nous avons été attaqués, mais je devais réagir rapidement et sauver mes enfants, alors nous sommes partis. »
En route vers le Niger, ils sont d'abord arrivés dans le village de Sabon Birni, où les habitants les ont aidés en leur fournissant un véhicule de transport de bétail pour atteindre le village de Maikourou. Ce n'était pas facile, mais ils se sentent désormais en sécurité. « Nous venons de recevoir des bâches, des moustiquaires et des seaux en plastique, ce qui nous permettra de survivre pendant la saison des pluies qui vient de commencer. »
Abdou Maidawa Ado, 42 ans, maire de la commune de Bangui, déclare : « Notre ville est un endroit où les deux communautés vivent en paix ensemble. Notre engagement envers nos frères et sœurs du Nigeria permet à la commune de Bangui de continuer à se développer. Nous bénéficions du soutien du HCR pour les infrastructures, telles que le centre de santé, le centre communautaire et les écoles, afin de répondre à la forte demande des nouveaux arrivants. Nous espérons être un exemple de soutien et d'assistance aux réfugiés. »
Depuis 2020, le HCR et ses partenaires ont mis en place des services essentiels, facilitant l'intégration des réfugiés auprès de leurs hôtes. Cependant, l’impact du changement climatique, l'instabilité à la frontière entre le Niger et le Nigeria, les attaques de bandits, les enlèvements et les demandes de rançon continuent de dégrader les conditions de vie des populations, provoquant un flot incessant de réfugiés nigérians. Aussi le HCR appelle ses partenaires et la communauté internationale à intensifier les efforts pour protéger et assister ces populations vulnérables et contribuer au développement de cette région.