Des services bancaires pour la première fois dans l'une des plus anciennes installations de réfugiés en Afrique
Des services bancaires pour la première fois dans l'une des plus anciennes installations de réfugiés en Afrique
Mayukwayuka (Zambie) – Grâce au sens des affaires d’un ancien réfugié angolais entreprenant, les réfugiés de l’installation de Mayukwayukwa et les participants à un programme d’intégration locale pour les réfugiés en Zambie, dans le district de Kaoma (province Occidentale), peuvent bénéficier pour la première fois de services bancaires.
William Ngonga Kasoka, homme d’affaires et self-made man de 59 ans, est à l’origine de cette initiative. Il pourrait être considéré, selon les critères de la région reculée de Mayukwayukwa, comme l’un de ses résidents nantis.
« J’ai quitté la province de Moxico en Angola pour me rendre en Zambie avec mes parents, mes frères et mes sœurs en 1966. J’avais huit ans à l’époque », raconte William. « Nous étions parmi les premiers réfugiés à arriver dans l’installation. Je vis ici depuis presque toujours, depuis 51 ans », explique‑t‑il.
Le gouvernement de la Zambie a ouvert officiellement l’installation de Mayukwayukwa en 1966 pour accueillir les réfugiés angolais ayant fui la guerre civile. Aujourd’hui, l’installation accueille des ressortissants d’autres pays, en particulier des Congolais, des Rwandais, des Burundais et des Ougandais.
William Ngonga Kasoka vient tout juste d’être officiellement intégré en Zambie. Il propose des services bancaires en tant qu’employé de la Zambia National Commercial Bank (ZANACO), l’une des trois plus grandes banques commerciales de la Zambie.
Les installations de réfugiés figurent parmi les collectivités rurales les plus exclues financièrement (en termes de services bancaires) en raison de leur éloignement, de la liberté de circulation restreinte des réfugiés et de l’accès limité aux installations par les personnes de l’extérieur.
La banque la plus proche est située à 90 kilomètres, dans la ville de Kaoma, dont fait partie Mayukwayukwa, ou à plus de 200 kilomètres, à Mongu, la capitale de la province Occidentale, qui compte plusieurs banques.
« Je suis fier d’aider à rapprocher, pour la première fois, la collectivité de tels services. La plupart des personnes ici n’ont jamais bénéficié de services bancaires dans leur vie. »
« Je suis fier d’aider à rapprocher, pour la première fois, la collectivité de tels services », dit William. « La plupart des personnes ici n’ont jamais bénéficié de services bancaires dans leur vie. J’espère que cette graine que j’ai plantée germera et donnera naissance à un grand arbre, car les gens ici réalisent petit à petit l’importance de la banque. Grâce aux services proposés, j’ai bon espoir que de nombreux résidents de Mayukwayukwa et les habitants des collectivités avoisinantes commenceront à effectuer des opérations bancaires. »
William Ngonga Kasoka est client de ZANACO depuis 1984. Il a créé l’agence ZANACO à Mayukwayukwa en 2016 seulement. Il propose plusieurs services bancaires à ses clients, notamment le retrait d’espèces, le dépôt d’espèces, la consultation du relevé bancaire, le virement de fonds entre comptes détenus à la banque et l’ouverture de nouveaux comptes.
L’avantage de l’activité bancaire de William est qu’elle se déroule dans son magasin ou, lorsqu’il y a trop de monde dans le magasin, juste à l’extérieur sur une petite table. William n’a besoin que d’un accès à un réseau de téléphonie mobile pour offrir ses services. Il compte parmi ses clients des réfugiés, des anciens réfugiés et des travailleurs humanitaires dans l’installation, de même que des fonctionnaires, comme des enseignants, des travailleurs de la santé et des ouvriers agricoles, ainsi que des personnes à faible revenu habitant les collectivités avoisinantes.
Selon William, qui a investi dans plusieurs autres petites entreprises installées dans l’installation, les résidents de Mayukwayukwa ont d’abord réagi timidement lorsqu’ils ont appris l’existence de services bancaires. « Les choses se sont beaucoup améliorées », explique‑t‑il. « Plusieurs de mes clients veulent retirer de l’argent chaque jour, en particulier en fin de mois. Jusqu’à présent, 60 personnes, des Zambiens, d’anciens réfugiés et des réfugiés, ont ouvert de nouveaux comptes. Ils signent des formulaires ici et je les apporte à ZANACO à Mongu pour finaliser l’ouverture des comptes. Parfois, je manque d’argent à mon terminal point de vente (un petit gadget électronique portatif qui utilise une carte SIM pour offrir des services bancaires par Internet). Cependant, comme j’ai des fonds dans mon compte commercial, je vire habituellement de l’argent pour pouvoir continuer d’effectuer des opérations ici », explique‑t‑il.
Pour ouvrir un compte, il faut verser 50 kwacha (l’équivalent de cinq dollars environ) et remplir un formulaire. Pour un Zambien, la seule condition est de présenter une carte nationale d’identité. Les réfugiés doivent présenter une photocopie de leur carte de réfugié. Les anciens réfugiés intégrés dans le pays doivent présenter leur passeport.
William Ngonga Kasoka a reçu une formation de ZANACO, à Lusaka, la capitale zambienne, située à environ 500 kilomètres de l’installation, avant de créer son activité. Il utilise un terminal de point de vente fourni par la banque pour effectuer les opérations financières. Toutes les opérations sont gratuites pour les clients, mais des frais de dossier doivent être versés pour ouvrir un compte. William touche une commission de la banque pour chaque transaction qu’il effectue.
Le HCR et ses organisations partenaires ont permis à William et à d’autres réfugiés et anciens réfugiés de participer à différents programmes de formation et de développement des compétences dans le domaine des affaires et de l’entrepreneuriat au fil des ans. William a utilisé les connaissances qu’il a acquises lors de ces stages pour dynamiser ses commerces.
« Pour m’aider à gérer mes entreprises, j’ai recruté des réfugiés et d’anciens réfugiés. »
« La formation que j’ai reçue me permet d’avoir quelques magasins. Je vends une gamme variée d’articles. Je suis présent dans l’agriculture et j’exploite des sociétés de transport. J’aide les réfugiés à se déplacer entre l’installation de Mayukwayukwa et la ville la plus proche, Kaoma, ainsi que la capitale provinciale, Mongu. Pour m’aider à gérer mes entreprises, j’ai recruté des réfugiés et d’anciens réfugiés. »
La fourniture de services bancaires aux résidents des deux installations de Meheba et de Mayukwayukwa et aux participants aux programmes d’intégration locale devrait avoir du succès. Les réserves d’argent dans les deux installations sont limitées mais les résidents du camp, les participants aux programmes d’intégration locale et les habitants des collectivités avoisinantes sont principalement des agriculteurs qui perçoivent des revenus agricoles saisonniers. Il y a aussi des petits commerçants ou des fonctionnaires, notamment des enseignants, des médecins ou des travailleurs de la santé. Enfin, il y a les employés des agences humanitaires. Ces groupes ont un revenu mensuel garanti.
« Étant moi‑même un ancien réfugié angolais, je remercie le gouvernement de la Zambie et les Zambiens, ainsi que le HCR, de nous permettre de vivre en Zambie en tant que réfugiés depuis toutes ces années. Je remercie aussi les autorités d’envisager, généreusement, d’intégrer certains d’entre nous. Nous leur en serons toujours reconnaissants. Au nom des autres anciens réfugiés angolais, je veux assurer à nos hôtes que nous continuerons d’être de bons membres de la société zambienne et de vivre en harmonie avec eux », déclare William.
L’un des clients de William, un enseignant de l’école secondaire de Mayukwayukwa, exprime sa joie de pouvoir effectuer des opérations financières dans le camp. « C’est très pratique. Avant, nous devions nous rendre à Koama et à Mongu pour pouvoir utiliser un guichet automatique », dit‑il.
Laura LoCastro, la Représentante du HCR en Zambie, note que : « Le but premier du HCR est de veiller à ce que les réfugiés et les anciens réfugiés soient autonomes. Pour cela, les résidents du camp et les participants au programme d’intégration locale doivent pouvoir exercer diverses activités génératrices de revenus. »
La Zambie accueille actuellement plus de 56 000 réfugiés, demandeurs d’asile et anciens réfugiés, qui résident principalement dans les installations de réfugiés de Mayukwayuka ou de Meheba et qui participent aux programmes avoisinants pour l’intégration locale.