Des réfugiés camerounais en quête de débouchés pour survivre au Tchad
Des réfugiés camerounais en quête de débouchés pour survivre au Tchad
Lorsque les violences ont éclaté dans la localité de Kidam, dans le nord du Cameroun, Vahindi Martin Assinga pensait avant toute chose à mettre sa famille en sécurité. Comme des milliers d'autres personnes fuyant les affrontements intercommunautaires meurtriers dans la région de l'Extrême-Nord du pays, Martin et sa famille ont cherché refuge au Tchad voisin.
Installé avec sa femme et ses 8 enfants sur un site d’accueil à Oundouma, localité frontalière avec le Cameroun, sans emploi et sans ressources, son attention se concentre désormais sur la survie dans ce nouvel environnement et les moyens pour subvenir aux besoins de sa famille.
« Au Cameroun, j’étais garde forestier bénévole. Cela me permettait de subvenir aux besoins de ma famille et de contribuer au développement de mon village. Je faisais partie du comité de développement du village. Nous avons notamment réussi à construire des bâtiments dans le collège et à l’école primaire », confie-t-il.
Pour lui, dépendre indéfiniment de l’aide n’est pas une option. « Il me faudrait une motopompe et un lopin de terre pour pouvoir cultiver et gagner dignement ma vie. »
C’est depuis le 5 décembre 2021 que des affrontements ont éclaté entre éleveurs, agriculteurs et pêcheurs dans le village d'Ouloumsa, dans l'Extrême-Nord du Cameroun. Les violences se sont rapidement étendues aux villages voisins avant d'atteindre Kousseri, centre administratif et principal pôle commercial du département du Logone-et-Chari. Bilan des affrontements : 44 morts, 111 blessés et 112 villages détruits.
- Voir aussi: La baisse de la pluviométrie dans le nord du Cameroun provoque conflits et déplacements de population
Les autorités tchadiennes estiment à environ 100 000 le nombre de personnes arrivées sur le territoire à la suite des affrontements, dont près de 36 000 réfugiés camerounais recensés par le HCR dans 31 localités frontalières du Tchad. Les femmes et les enfants représentent plus de 88% de ces réfugiés enregistrés.
Le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, a intensifié ses activités pour venir en aide aux personnes affectées au Cameroun et les nouveaux réfugiés au Tchad. Avec les autorités et d’autres partenaires humanitaires, le HCR fournit une aide vitale aux réfugiés et déplacés internes camerounais qui ont un besoin urgent de nourriture, d’abris, de couvertures, de nattes et de kits d’hygiène.
La plupart des réfugiés camerounais récemment arrivés au Tchad ont été pris de court et ont fui sans bagages et sans documents administratifs. Si certains peuvent compter sur la générosité des communautés d’accueil, nombre d’entre eux expriment le souhait de trouver un emploi ou de démarrer une activité professionnelle sur leur lieu d’accueil.
Avant de quitter le Cameroun pour se réfugier au Tchad, Khadidja Herre, veuve et mère de cinq enfants, a toujours trouvé le moyen de payer la scolarité de deux de ses enfants et de répondre tant bien que mal aux besoins de toute sa famille avec son commerce de poisson.
Sans activité depuis son arrivée au Tchad, elle dit trouver les journées longues. « Je ne fais rien depuis que je suis là et mes et mes enfants ne vont plus à l’école », déplore-t-elle.
Estimant que la situation sécuritaire ne lui permet pas d’envisager un retour immédiat au Cameroun, elle dit ne pas voir d’autre solution qu’une reprise de ses activités en attendant une amélioration de la situation.
« Reprendre mon commerce me permettra de vivre dignement de mon travail. Je pourrais également m’assurer que mes enfants reprennent l’école. »
En attendant une amélioration de la situation sécuritaire qui leur permettrait d’envisager de regagner leurs foyers respectifs, nombre de réfugiés camerounais au Tchad débordent d’inventivité et de courage pour gagner de quoi subvenir à leurs besoins les plus élémentaires.
Originaire de Kousséri, Issa Hassane, 25 ans gagnait sa vie en ramassant du bois mort qu’il revendait. Parallèlement, il vendait des vêtements de friperie.
Depuis son arrivée au Tchad, il s’est reconverti dans la réparation des téléphones mobiles. Un métier qu’il a appris sur le tas, en s’exerçant sur son propre téléphone.
« Je répare les téléphones de toutes les marques. Parmi mes clients, il y a aussi bien d’autres réfugiés que des Tchadiens », révèle-t-il. Cette activité lui permet de gagner quotidiennement entre 1000 et 1500 francs CFA (entre 1,73 et 2,60 dollars environ).
Si certains, comme Issa, ont trouvé des solutions pour subvenir à leurs besoins, des milliers d'autres dépendent de l'aide humanitaire. Le HCR a lancé un appel de fonds pour un montant supplémentaire de 59,6 millions de dollars afin de répondre aux besoins urgents des réfugiés et des personnes déplacées à l'intérieur du Cameroun pour les six prochains mois.