Des centaines de milliers de personnes déplacées par les combats dans la vallée de Swat au Pakistan
Des centaines de milliers de personnes déplacées par les combats dans la vallée de Swat au Pakistan
DISTRICT DE MARDAN, Pakistan, 8 mai (HCR) - L'agence des Nations Unies pour les réfugiés a fait état vendredi d'une situation de « déplacement massif » dans le nord-ouest du Pakistan, alors que s'intensifient les combats entre les forces gouvernementales et les militants et que les personnes profitent de levées partielles des couvre-feux pour se déplacer vers des zones plus sûres.
Le gouvernement provincial estime qu'entre 150 000 et 200 000 personnes sont déjà arrivées dans des zones plus sûres de la Province frontière du Nord-Ouest ces derniers jours. Par ailleurs, 300 000 autres personnes sont déjà en mouvement ou elles le seront très bientôt.
Ceux qui fuient cette dernière escalade des hostilités dans les régions de Lower Dir, de Buner et de Swat ont rejoint quelque 555 000 Pakistanais précédemment déplacés qui avaient fui leurs maisons dans les zones tribales et la Province frontière du Nord-Ouest depuis août 2008 et qui avaient déjà été enregistrées par le HCR et les autorités de la Province frontière du Nord-Ouest. La vaste majorité des précédents arrivants - soit plus de 462 000 personnes - louent des logements ou sont hébergés dans des familles d'accueil. Un autre groupe, comptant 93 000 personnes au total, est hébergé dans 11 camps assistés par le HCR, d'autres agences humanitaires des Nations Unies, des ONG et des organisations de la famille Croix-Rouge et Croissant-Rouge.
« Les nouveaux arrivants mettront à rude épreuve les ressources », a indiqué Ron Redmond, le porte-parole du HCR à Genève. « A ce jour, plus de 83 000 personnes des régions de Buner, de Dir et de Swat ont été enregistrées depuis le nouvel afflux : quelque 5 000 d'entre elles se trouvent dans trois nouveaux camps et plus de 78 000 personnes louent des maisons ou vivent au sein de familles d'accueil. »
Cependant, l'enregistrement dans les nouveaux camps se poursuit et les chiffres augmenteront rapidement. Selon d'autres sources d'information, des personnes de la région de Buner arrivent dans des camps existants de la région de Lower Dir. A Islamabad, Rawalpindi, Lahore et dans d'autres centres urbains du Punjab, le HCR a enregistré un autre groupe de 40 000 déplacés, principalement originaires de Bajaur, de Mohmand et de Swat ces deux dernières semaines.
Des équipes du HCR sur le terrain rapportent que les routes depuis Swat et Buner, quand elles convergent dans les districts de Mardan et de Swabi, sont très encombrées. Un voyage vers Mardan, qui dure normalement deux jours, dure maintenant le double car les routes sont surchargées.
Le camp de Jalala dans le district de Mardan est l'un des trois camps établis il y a six jours, en réponse à l'afflux de personnes fuyant les combats dans les régions de Buner et de Lower Dir. Ces deux derniers jours, un nombre croissant de familles originaires de Swat a rejoint le camp, voyageant à bord de rickshaws, de voitures, de petits camions ou de bus. La plupart n'ont emporté pratiquement rien, sauf les vêtements qu'ils portaient sur eux le jour de la fuite.
Les nouveaux arrivants ont indiqué aux employés du HCR dans le camp hier qu'ils avaient eu des problèmes pour trouver des moyens de transport et qu'ils avaient dû louer des véhicules au prix fort. Une famille de 20 personnes originaire de Buner a indiqué avoir payé 30 000 roupies (350 dollars) pour voyager vers le camp depuis leur maison. Un autre homme originaire de Mingora, dans la région de Swat, a conduit sa famille dans son rickshaw durant sept heures d'un voyage harassant, vers le camp de Jalala en quête de sécurité.
Mohammed, âgé de 16 ans, était à l'école dans son village de la vallée de Swat, quand le gouvernement a recommandé à la population de partir. Il est arrivé à Jalala jeudi en transportant ses livres scolaires car il ne voulait pas laisser tomber ses études. « Nous sommes venus ici car c'est un lieu sûr. Nous n'avions nulle part où aller. Mon père cultive les choux. Nous n'avons pas beaucoup de ressources ou d'économies et nous n'avions aucun autre choix que de venir ici », a-t-il dit au HCR.
L'adolescent a indiqué avoir vu un grand nombre de personnes sur la route et se bousculant pour trouver de la place dans des véhicules. « Pour la première fois de ma vie, j'ai vu des femmes accrochées aux flancs de véhicules », a-t-il indiqué, ajoutant : « Les gens ne pensent qu'à fuir et ils étaient désespérés de trouver un moyen de transport. » Lui-même a réussi à trouver plusieurs véhicules le long de son voyage.
Le voyage d'Amandullah, originaire du district de Buner, a duré quatre jours en voiture avant d'arriver à Jalala, car lui et sa famille ne pouvaient pas voyager durant les heures de couvre-feu. « Ma famille a été séparée durant le voyage et j'espère que mon père arrivera bientôt », a expliqué, inquiet, ce jeune homme âgé de 22 ans.
Parallèlement, un médecin travaillant pour le gouvernement provincial à Jalala a indiqué que les personnes arrivaient avec des problèmes respiratoires, la gale, des insomnies et des traumatismes. « Les gens ont laissé derrière eux les animaux et les volailles et, parfois même, des membres de leurs familles. Ils ont dû quitter leurs maisons soudainement. De nombreux enfants n'avaient même pas de chaussures. »
En plus de Jalala, le HCR a aussi aidé à établir le camp de Sheikh Shehzad à Mardan et celui de Yar Hussain dans le district de Swabi. « Nous aidons le Croissant-Rouge pakistanais à créer un quatrième camp à Swabi. Des planificateurs de site du HCR étudient actuellement dans la région, pour des camps supplémentaires, des terrains potentiels déjà identifiés par le gouvernement », a indiqué Ron Redmond à Genève.
Parallèlement, plus au sud dans la Province frontière du Nord-Ouest, des projets sont en cours pour étendre le camp existant de Jalozai, qui accueille actuellement quelque 48 000 personnes déplacées ayant fui les zones tribales depuis août 2008.
La semaine dernière, le HCR a travaillé avec le gouvernement pour établir 12 centres d'enregistrement dans les districts de Mardan, de Swabi et de Charsadda. Cependant, ce n'est pas suffisant et l'agence prévoit d'ouvrir 75 centres d'enregistrement dans la région et d'accroître le nombre des plateformes humanitaires, pour aider les personnes se trouvant en dehors des camps.
Jeudi, un nouveau centre de réception a été ouvert sur la route principale Malakand à Jalala pour donner aux personnes de la nourriture, de l'eau et des informations sur les camps et les centres d'enregistrement. C'est le premier de quatre autres centres de ce type qui sont prévus sur les routes principales empruntées dans le cadre de l'afflux, ceci pour aider les personnes quand elles arrivent dans des zones plus sûres. Des projets sont aussi menés actuellement pour fournir des soins médicaux et une assistance au transport dans les centres de réception.
Le HCR répond actuellement à la situation d'urgence en distribuant des biens de secours (tentes, bâches en plastique, seaux, jerrycans et batteries de cuisine) pour 100 000 personnes, tout en procédant à l'achat de matériel humanitaire supplémentaire pour 200 000 autres personnes.
Par Ariane Rummery dans le district de Mardan, Pakistan