De nouveaux combats portent à 57 000 le nombre de personnes ayant fui Mogadiscio depuis février
De nouveaux combats portent à 57 000 le nombre de personnes ayant fui Mogadiscio depuis février
NAIROBI, Kenya, 28 mars (UNHCR) - Depuis début février, quelque 57 000 personnes ont fui la violence qui sévit à Mogadiscio, la capitale somalienne. Plus de 12 000 d'entre elles sont parties au cours de la semaine dernière, lorsque le regain de violence a causé la mort d'au moins 24 personnes. Ces chiffres ont été obtenus par l'UNHCR sur la base d'informations fournies par des ONG somaliennes.
Les partenaires locaux de l'UNHCR à Mogadiscio ont déclaré avoir vu, au cours du week-end, des centaines de personnes attendant avec angoisse dans les gares routières ou recherchant des chauffeurs de camion susceptibles de les conduire hors de la capitale, en proie à des troubles. D'autres ont entassé leurs maigres possessions sur des charrettes tirées par des ânes et sont parties en quête de sécurité.
L'exode hors de Mogadiscio se poursuit depuis début février, lorsque des groupes armés ont commencé à affronter les forces du Gouvernement fédéral de Transition, qui a investi la capitale en décembre aux dépens de l'Union des tribunaux islamiques. Des tirs de mortiers et d'autres armes ont depuis tué de nombreux civils dans les quartiers résidentiels ainsi que des personnes déplacées dans divers sites.
Cet exode s'est intensifié la semaine dernière et le gouvernement a demandé aux civils d'évacuer certaines zones de la ville, apparemment afin de pouvoir intensifier son offensive contre les insurgés. Au moins 24 personnes ont été tuées et des centaines d'autres blessées lors des derniers combats, tandis que 12 000 personnes environ ont fui la ville depuis mercredi dernier.
La plupart se sont dirigées vers le sud et la région voisine de Shabelle Hoose (Lower Shabelle), selon les partenaires locaux de l'UNHCR. La plupart des nouveaux arrivants sont des femmes et des enfants démunis, qui ne bénéficient pas du soutien de leur clan sur place et qui n'ont pas accès à l'aide humanitaire, y compris aux soins médicaux pour traiter les maux dont ils souffrent, tels que la diarrhée.
Ils ont faim et sont harcelés par des voleurs. Les mères de famille s'inquiètent aussi pour leurs enfants qui ne peuvent plus aller à l'école. Ceux qui peuvent se le permettre cherchent à louer une maison, mais la plupart s'abritent simplement sous des arbres. « Les loyers ont explosé dans la ville d'Afgooye et il n'y a plus de maison à louer dans celle de Merka », a déclaré l'un des partenaires locaux de l'UNHCR dans la région de Shabelle Hoose, faisant référence aux villes situées à l'ouest et au sud-ouest de Mogadiscio, où des milliers de personnes sont récemment arrivées.
Depuis le début du mois de mars, environ 2 250 habitants de la capitale somalienne ont parcouru plus de 700 kilomètres vers le nord-est du pays afin d'atteindre Galkayo, où l'UNHCR est présent. La majorité a atteint cette ville de la région autonome du Puntland après un voyage épuisant en camion qui dure jusqu'à cinq jours.
« Ces personnes sont en danger même après avoir quitté Mogadiscio », a expliqué un autre partenaire de l'UNHCR, en évoquant la situation des gens qui entreprennent ce long voyage. « Elles doivent passer des barrages routiers illégaux, tout en sachant que leurs biens peuvent attirer les voleurs, qu'elles peuvent être tuées ou voir leurs enfants adolescents être enlevés ou violés. »
A Galkayo, Alexander Tyler, chargé de protection de l'UNHCR, explique que la plupart des personnes qui arrivent de la capitale somalienne sont des femmes et des enfants qui ont de la famille ou des membres de leurs clans à Galkayo. Ils s'installent dans les maisons de leurs proches ou dans l'un des 14 sites où vivent déjà des personnes déplacées. Certains des habitants de Mogadiscio récemment arrivés ont déclaré qu'il était difficile pour les hommes d'entreprendre ce voyage, car il les amène à traverser des zones contrôlées par différents clans et les expose au risque d'être tués par vengeance.
Alexander Tyler explique que les personnes qui s'installent dans les sites de déplacés sont arrivées avec seulement des articles ménagers de base, et dépendent des autres déplacés pour survivre. « Les nouveaux arrivants doivent vivre dans les abris d'autres personnes déplacées et leur demander de la nourriture, ce qui accroît encore la pression sur la ville de Galkayo qui, avec des moyens limités, accueille déjà jusqu'à 25 000 personnes déplacées », a-t-il ajouté.
A Mogadiscio, les sites de déplacés accueillent quelque 250 000 personnes. Ils sont souvent localisés près d'installations militaires, de stations de police ou de bâtiments publics, qui ont été systématiquement pris pour cible au cours des deux derniers mois de combats. Après 10 à 15 ans de déplacement, certaines de ces personnes ont décidé de rentrer dans leur région d'origine, notamment à Baidoa, à 220 kilomètres au nord-ouest de Mogadiscio.
Ce nouveau déplacement de population aggrave encore une situation humanitaire tendue, dans la mesure où ni l'UNHCR ni les autres agences humanitaires n'ont accès à Mogadiscio et aux régions voisines en raison de l'insécurité rampante. Il y a actuellement 400 000 personnes déplacées en Somalie tandis que des dizaines de milliers d'autres ont fui vers les pays voisins.
Par Catherine Weibel à Nairobi, Kenya