Il suffit de peu pour faire la différence en Afrique, comme l'ont observé des cadres d'entreprises privées
Il suffit de peu pour faire la différence en Afrique, comme l'ont observé des cadres d'entreprises privées
CAMP DE LUKOLE, Tanzanie, 22 mars (UNHCR) - Si vous cherchez en vain un médecin ou une infirmière à l'hôpital NPA dans ce camp de réfugiés à l'ouest de la Tanzanie, allez à la bibliothèque.
« Dès que l'occasion se présente, c'est ici qu'ils viennent, même pour 15 minutes pendant leur pause café, ou 30 minutes pendant l'heure du déjeuner », explique Fauster Munyankambi, infirmière en chef de l'hôpital géré par Norwegian People's Aid (NPA). « Ils étudient tout le temps pour améliorer leur travail. »
La grande attraction est la bibliothèque médicale remarquablement mise à jour et documentée. Elle a été financée par le groupe pharmaceutique Merck Sharp & Dohme (MSD), en collaboration avec le Conseil international des infirmières (CII). La bibliothèque de Lukole fait partie de la phase pilote du projet des Bibliothèques des soins infirmiers pour la santé des réfugiés, inauguré récemment par le CII et l'UNHCR. Ces bibliothèques mobiles prêtes à l'emploi ont été créées pour mettre à disposition les dernières informations sur les soins infirmiers. Elles proposent aussi une formation pour le personnel médical travaillant avec la population réfugiée en Afrique.
« Des interventions simples peuvent avoir un impact fort », a expliqué Jeffrey L. Sturchio, vice-président de MSD, en charge des affaires extérieures, qui a eu l'occasion la semaine dernière d'entendre Fauster Munyankambi ainsi que d'autres médecins et infirmières témoigner de l'utilité de la contribution apportée par son entreprise.
Il a voyagé dans les camps de réfugiés au Kenya et en Tanzanie avec le Conseil des dirigeants d'entreprise de l'UNHCR, composé de cadres de haut niveau appartenant à cinq des plus grandes entreprises au monde. Cette structure conseille l'agence des Nations Unies pour les réfugiés sur la rationalisation de ses opérations et la meilleure utilisation de ses fonds, afin d'optimiser l'aide aux 19,2 millions de réfugiés et autres personnes que l'agence assiste dans le monde. Le groupe était conduit par la Haut Commissaire adjointe de l'UNHCR Wendy Chamberlin. Il cherche aussi à développer des partenariats innovants entre le secteur privé et la communauté humanitaire.
Jeffrey L. Sturchio et les autres représentants du Conseil des dirigeants d'entreprise de l'UNHCR ont eu pour la première fois la possibilité d'apprendre, des réfugiés eux-mêmes, quels sont leurs besoins et leurs souhaits. « L'enthousiasme des infirmières et des médecins pour cette bibliothèque me donne envie de faire plus et plus vite ! » a indiqué Jeffrey L. Sturchio. Des projets sont déjà en cours comme l'acheminement de 50 autres bibliothèques vers les camps de réfugiés et les centres locaux de santé en Tanzanie, ainsi que la formation d'infirmières travaillant pour les réfugiés et la population locale.
MSD est persuadé que le savoir dispensé dans le cadre du projet des bibliothèques peut faire la différence pour les patients accueillis dans des hôpitaux manquant de médicaments et surchargés comme celui-ci, où deux ou trois patients sont obligés de partager un même lit.
« Si nous pouvons démontrer que ce savoir mis à la disposition du personnel médical fait vraiment la différence pour la santé des réfugiés, alors nous pourrons peut-être élargir le projet rapidement afin qu'il concerne tous les camps de réfugiés en Afrique, ce qui profitera à plusieurs millions de personnes », a ajouté Jeffrey L. Sturchio.
Dans un autre camp de réfugiés près de Ngara, dans l'ouest de la Tanzanie, les cadres de haut niveau ont visité un centre de formation où un ordinateur est partagé parfois par cinq étudiants, ce qui ne diminue en rien leur enthousiasme. Cette école d'informatique est un endroit extrêmement populaire, malgré les problèmes d'électricité et l'absence de connexion Internet.
En tant que représentant du géant du secteur des logiciels, Patrick De Smedt, qui est Directeur de Microsoft pour l'Europe, le Moyen-Orient et l'Afrique, a été assailli par les étudiants réfugiés lui demandant un autographe.
« J'ai été impressionné par leur esprit de créativité et d'innovation pour faire face aux défis auxquels ils sont confrontés », a affirmé plus tard Patrick De Smedt. « Lorsque nous donnons des logiciels, une formation et du financement, ils facilitent bien des choses. Microsoft s'est engagé à aider les réfugiés, et maintenant nous allons examiner comment accorder au mieux nos programmes globaux pour répondre à leurs besoins spécifiques. »
Après la visite de quelques-uns des 127 000 réfugiés, des Somaliens pour la plupart, dans le désert à Dadaab, à l'est du Kenya, et après avoir suivi des Burundais rentrant vers leur pays après 10 ans ou plus de vie dans les camps de réfugiés en Tanzanie, « les mots 'résilience' et 'courage' me viennent à l'esprit », a raconté Hannah Jones, vice-présidente pour la responsabilité sociale de l'entreprise chez Nike, le fabriquant de produits de sport. « Les réfugiés passent la plupart de leur temps dans les camps, ce qui n'empêche pas les jeunes d'afficher ouvertement leurs ambitions de devenir président ou premier ministre lorsqu'ils seront de retour dans leur pays d'origine », a-t-elle ajouté.
« Nous en sommes repartis avec la conviction que l'éducation et le sport sont d'une importance capitale, de même le leadership et l'aptitude à renforcer la paix », a-t-elle encore dit. A Dadaab, Nike a construit des salles de classe, des latrines aménagées pour encourager les filles à aller à l'école, et finance actuellement des programmes sportifs pour renforcer la confiance en soi des jeunes filles. Toutes ces mesures sont mises en place pour « mettre au même niveau les filles et les garçons ».
« En créant plus de salles de classe, avec plus de pupitres, en organisant le sport dans le camp, en créant une tenue spéciale pour permettre aux jeunes filles somaliennes de faire du sport, nous pouvons voir l'impact de notre action auprès des filles », a expliqué Hannah Jones.
Richard Golding, partenaire en charge des relations avec les Nations Unies chez PricewaterhouseCoopers, dit « avoir été favorablement impressionné » par l'attitude des réfugiés et le dévouement des employés « vraiment sincères » de l'UNHCR travaillant dans des lieux d'affectation difficiles. « Je suis stupéfait de voir que dans des lieux aussi désolés, vous pouvez arriver à de si bons résultats », a-t-il confié.
Richard Golding, qui travaille sur la réforme globale du système des Nations Unies, a indiqué que la mission au Kenya, en Tanzanie et au Burundi avait été une bonne opportunité de voir comment l'UNHCR dépense l'argent collecté auprès de gouvernements donateurs pour la plus grande partie.
Il a déclaré que le Conseil des dirigeants d'entreprise de l'UNHCR pourrait utiliser la compétence de chacune des firmes participantes - des consultants en management, des produits pharmaceutiques, du support technologique, de l'expertise en marketing et en image de marque - pour aider l'UNHCR à rationaliser ses propres opérations et à trouver de nouvelles sources de financement. Actuellement 93 pour cent du financement de l'agence provient de gouvernements ; l'UNHCR a besoin de 1,3 milliard de dollars cette année, mais l'agence manque de plusieurs millions de dollars pour équilibrer son budget.
« Nous voulons travailler avec les cadres de l'UNHCR sur sa réforme qui, nous l'espérons, apportera de bonnes choses sur le terrain, ici dans les camps de réfugiés », a ajouté Richard Golding en Tanzanie.
A Nairobi, lors de la fin de leur mission, les membres du Conseil ont été rejoints par un cinquième membre, David Arkless, du bureau exécutif de l'agence de travail temporaire Manpower, qui s'est engagé à « influencer les clients, les fournisseurs et les employés (de Manpower) à multiplier leurs efforts pour collecter des fonds pour l'UNHCR et soutenir l'agence ».
Plus tôt la semaine dernière, alors qu'ils étaient au camp de réfugiés de Dadaab, les représentants du Conseil des dirigeants d'entreprise de l'UNHCR avaient été consternés d'apprendre que le Programme alimentaire mondial avait été forcé de réduire les rations alimentaires des réfugiés en-dessous des niveaux standard acceptables en raison d'un financement insuffisant.
« Même les besoins les plus élémentaires sont difficiles à couvrir », a indiqué Hannah Jones. La baisse des rations « ouvre la voie à la malnutrition et à la famine ».
« Je suis interloquée que la communauté internationale laisse diminuer l'assistance en-dessous du minimum vital », a-t-elle ajouté. « A quoi sert un standard s'il n'est pas respecté ? »
Par Kitty McKinsey, En Kenya, Tanzanie et Burundi