Un forgeron se construit une nouvelle vie dans un camp au Niger
Un forgeron se construit une nouvelle vie dans un camp au Niger
AGANDO, Niger, 23 avril (HCR) - Lorsqu'Ali Mahmoud a fui son foyer dans l'est du Mali l'année dernière, il a emporté un savoir-faire qui l'a aidé à survivre, prospérer et même trouver une femme pendant son exil dans l'ouest du Niger.
Cet homme de 40 ans a utilisé son talent de forgeron pour gagner confortablement sa vie dans le site de réfugiés d'Agando depuis qu'il a quitté son foyer il y a huit mois à Méneka, de l'autre côté de la frontière, dans la province de Gao au Mali.
Son entreprise est encouragée par le HCR, qui a lancé des projets d'autosuffisance dans les camps cette année. « Nous avons commencé à financer des activités génératrices de revenus dans les camps, non seulement pour donner aux réfugiés des opportunités de gagner de l'argent, mais aussi pour leur permettre de contribuer à leur subsistance et de ne pas dépendre uniquement de l'assistance », explique Karl Steinacker, Représentant du HCR au Niger.
Ali se spécialise dans la fabrication des couteaux et des épées décoratives qui font partie de la culture touareg et présente fièrement quelques unes de ses oeuvres aux visiteurs du HCR. « Voici le style de lames que je fabrique généralement », déclare-t-il, en ajoutant qu'il répare aussi les outils en fer.
Les affaires marchent bien et il estime gagner l'équivalent d'environ 50 dollars par jour. « Tout homme ici possède une épée ou souhaite en avoir une », explique Galio, le père d'Ali, également forgeron.
Ali affirme qu'il lui faut trois ou quatre jours pour fabriquer un couteau ou une épée de décoration avec des gravures. Il achète du métal, notamment du fer et du cuivre, au marché [à Agando] et façonne, fait tremper et fait les finitions des lames à l'aide de marteaux et d'une simple enclume installée à l'extérieur de son abri fait de paille et de branches. Un bon couteau se vend 50 dollars, tandis que le prix d'une épée et d'un fourreau peut atteindre 100 dollars.
Les gens viennent aussi faire réparer leurs outils et lames endommagés et une file d'attente se forme devant chez lui dès le début de la matinée. Il accepte le troc - généralement de la nourriture - de la part de ceux qui n'ont pas les moyens de payer en espèces.
« Personne ne travaille le fer aussi bien qu'Ali », déclare Hawlata en échangeant plus d'un demi-kilo de farine contre ses couteaux de cuisine réparés et aiguisés. « C'est un professionnel qualifié », ajoute Habba, son voisin, qui a apporté une hache pour la faire réparer.
A Agando, le succès d'Ali lui rapporte beaucoup plus qu'à Méneka, où tout ce qu'il gagnait servait à subvenir aux besoins de ses parents, de ses deux frères et d'une soeur. Aujourd'hui, pour la première fois, il gagne suffisamment pour pouvoir se marier. Et il a choisi une fiancée, Anata, 18 ans, originaire de son village natal.
« Je suis très heureux d'avoir rencontré Anata », déclare-t-il, en ajoutant qu'il a économisé environ 600 dollars pour payer la dot. « Je l'aime beaucoup », affirme le forgeron épris, en sirotant un petit verre de thé chaud.
Pour l'heure, Ali se prépare à partir dans un camp plus sûr situé plus à l'intérieur du Niger, à Intikan, à quelque 80 kilomètres de la frontière. Le HCR va aider au transfert d'environ 17 000 réfugiés maliens vers le nouveau site, où il sera aussi plus facile de leur fournir protection et assistance.
Il a hâte de partir et il est sûr que ses affaires prospèreront là-bas aussi. « Je suis impatient d'aller à Intikan, où j'espère que le nombre de mes clients va doubler voire tripler », dit Ali. Si les affaires marchent bien, il espère pouvoir embaucher d'autres réfugiés.
Ses voisins et ses amis sont contents car ils pourront continuer à compter sur ses services dans le nouveau camp. « Il est un atout pour notre communauté et nous sommes heureux de pouvoir nous déplacer vers Intikan avec lui », déclare Habba. Quant à Ali, il espère pouvoir bénéficier là-bas du programme du HCR de soutien aux activités génératrices de revenus.
Actuellement plus de 50 000 réfugiés maliens vivent au Niger.
Par Bernard Ntwari à Agando, Niger