La lutte d'une militante des droits de l'homme pour les apatrides en Thaïlande
La lutte d'une militante des droits de l'homme pour les apatrides en Thaïlande
Natee est née apatride, comme des milliers d'enfants des communautés tribales montagnardes au nord de la Thaïlande. L'apatridie peut aggraver les conditions de précarité, empêcher l'accès aux services de santé et d'éducation, favoriser la discrimination et, souvent, condamner les apatrides à une vie d'incertitude.
La vie de Natee a changé du tout au tout avec l'aide de Tuenjai Deetes qui est venue travailler dans son village comme bénévole en 1973 pour enseigner le thaïlandais.
« Tuenjai a aidé tout le monde dans mon village et dans les autres tribus montagnardes », dit Natee. « Elle nous a aidés à obtenir la nationalité thaïlandaise et les droits fondamentaux auxquels tout individu peut prétendre. »
Tuenjai a été nominée en vue de la distinction Nansen du HCR pour les réfugiés en tant que finaliste régionale pour l'Asie. Ce prix annuel vise à rendre hommage aux personnes qui n'ont épargné aucun effort pour soutenir les réfugiés, les demandeurs d'asile, les apatrides et les personnes déplacées internes.
La distinction tire son nom de Fridtjof Nansen, explorateur et humanitaire norvégien du XXe siècle qui a été le premier Haut Commissaire pour les réfugiés, nommé par la Société des Nations en 1921.
« Je rêvais d'une société inclusive où la diversité était bienvenue. »
Tuenjai avait 20 ans quand elle a commencé à travailler dans les communautés tribales pauvres dans les montagnes de la province de Chiang Rai. Au cours des 40 années suivantes, elle a peu à peu compris les énormes difficultés auxquelles l'absence de nationalité les condamnait et elle s'est attachée à les surmonter.
« Quand j'ai commencé à travailler il y a environ 40 ans, peu de gens en Thaïlande avaient conscience du problème ou se souciaient de mettre fin à l'apatridie », a expliqué Tuenjai, aujourd'hui âgée de 66 ans, au HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés.
« Je rêvais d'une société inclusive où la diversité était bienvenue et où chaque individu pouvait librement exercer ses droits et développer son potentiel. »
Elle a co-créé la Fondation pour le développement des zones montagneuses (HADF) qui a pour mission d'autonomiser les communautés et de promouvoir l'éducation, les pratiques d'agriculture durable et le leadership.
Depuis lors, elle a remporté de nombreux prix et distinctions. Elle a été élue sénatrice de la province de Chiang Rai en 2000, puis nommée membre de l'Assemblée législative nationale en 2006.
« J'ai pu faire des études, recevoir des soins médicaux et je me sens en sécurité quand je voyage. »
Dans ses fonctions législatives, elle s'est attachée à faire voter deux lois fondamentales sur la nationalité et l'enregistrement des actes d'état-civil, ce qui a ensuite permis à des centaines de milliers d'apatrides vivant en Thaïlande de demander la nationalité du pays.
À l'heure actuelle, au moins 10 millions de personnes dans le monde sont privées de nationalité. De ce fait, elles sont souvent privées de scolarité, de la possibilité de consulter un médecin, de travailler ou même de se marier. Au fil des années toutefois, l'apatridie a considérablement reculé en Thaïlande et, depuis 2008, plus de 90 000 personnes ont obtenu la nationalité. Natee en fait partie, grâce à Tuenjai.
« Quand on n'a pas la nationalité thaïlandaise, on a aucun droit, on est invisible », raconte Natee, aujourd'hui âgée de 42 ans. « Maintenant que j'ai obtenu la nationalité, j'ai les mêmes droits que tout le monde. J'ai repris confiance, je ne suis plus défavorisée. Ma qualité de vie s'est améliorée, j'ai pu faire des études, recevoir des soins médicaux et je me sens en sécurité quand je voyage. »
Tuenjai Deetes a été nommée présidente de la Commission nationale des droits de l'homme en 2015 et elle continue de faire campagne pour les apatrides, tout en s'employant à améliorer les conditions de vie des communautés tribales des montagnes.
« En tant qu'êtres humains, nous méritons tous d'être traités avec respect et dignité », dit-elle. « Nous avons tous droit à une nationalité. C'est pourquoi j'ai consacré ma vie entière à mettre fin à l'apatridie. »
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