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La détermination et le dur labeur des rapatriés burundais de 1972

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La détermination et le dur labeur des rapatriés burundais de 1972

Au Burundi, d'anciens réfugiés, revenus après 36 ans d'exil, sont confrontés à de nombreux défis alors qu'ils essayent de reconstruire leur vie.
3 Juin 2008
Le rapatrié Abel Ntibuhezwa, âgé de 75 ans, s'entretient avec une employée de l'UNHCR près de la maison qu'il est en train de construire sur son terrain dans le sud du Burundi.

SHANGA, Burundi, 3 juin (UNHCR) - Abel Ntibuhezwa a passé la majeure partie de sa vie à l'étranger, même si son pays d'origine est le Burundi. Après avoir vécu près de la moitié de sa vie en Tanzanie, cet homme âgé de 75 ans est revenu dans sa province natale de Rutana au sud du Burundi, pour commencer un nouveau chapitre de sa vie, qui est exceptionnellement longue.

Un large sourire illuminait le visage du vieil homme alors qu'il montrait récemment à des membres de l'équipe de l'UNHCR sa maison en construction dans le petit district de Shanga. A son âge, la plupart des gens du monde industrialisé profitent de leur retraite et la majorité des hommes au Burundi, un pays où la durée de vie moyenne est de 48 ans, sont déjà décédés.

« Construire une telle maison représente vraiment du travail à mon âge. Nombre des membres de ma famille sont morts. Normalement, ils auraient fait tout ce travail pour moi », a-t-il expliqué, en ajoutant que l'aide de sa communauté facilite les choses. « Nous avons été accueillis chaleureusement ici dans notre village. Nos voisins ont partagé avec nous leurs quelques possessions, et ils ont promis de m'aider pour construire le toit. »

Au-delà de son âge et de son énergie hors du commun, Abel Ntibuhezwa est aussi une personnalité à part, car il fait partie des « Burundais arrivés en 1972 », un groupe ethnique hutu burundais qui a fui son pays en 1972 et qui a trouvé refuge en Tanzanie. Au contraire des vagues de réfugiés arrivées par la suite, la plupart ont indiqué qu'ils ne souhaitaient pas rentrer.

En mars, l'agence des Nations Unies pour les réfugiés a cependant lancé une nouvelle opération de rapatriement pour plus de 46 000 des Burundais arrivés en 1972. Quelque 1 500 Burundais, y compris Abel Ntibuhezwa, sa femme, sa fille et leurs deux petits-enfants, sont déjà rentrés avec l'aide de l'UNHCR.

L'UNHCR en février avait lancé un appel pour un montant de 21 millions de dollars pour financer le rapatriement, l'intégration locale et la naturalisation des Burundais arrivés en 1972 en Tanzanie. En juin, les donateurs ont pourvu à 47 pour cent des fonds demandés. Le programme de deux ans vise à mettre fin à l'une des situations de réfugiés les plus anciennes au monde.

Les Burundais arrivés en 1972 en Tanzanie habitent à Katumba, à Mishamo et à Ulyankulu, des sites connus comme leurs anciennes zones d'installation. La plupart d'entre eux, soit quelque 172 000 personnes, ont indiqué qu'ils veulent rester et demander la nationalité tanzanienne.

L'une des filles d'Abel Ntibuhezwa faisait partie de ceux qui ne voulaient pas retourner au Burundi. Mais le septuagénaire n'avait jamais abandonné son rêve de rentrer un jour dans son pays qu'il avait fui lorsqu'une série de massacres à grande échelle avait enflammé le sud. Son espoir n'a jamais fléchi, en dépit des vagues successives de violence survenues ensuite, ayant occasionné la perte de dizaines de milliers de vies humaines.

Il pense que les choses ont changé en mieux au Burundi depuis que les bandes rivales ont signé un accord de paix en 2003. « La situation est bonne, la paix a été rétablie là-bas. Je suis revenu car je ressentais une nostalgie », a expliqué Abel Ntibuhezwa, ajoutant : « J'ai souvent écrit des lettres depuis le camp de réfugiés aux enfants de mon frère, qui habitaient toujours au Burundi. »

Après être rentré chez lui, Abel Ntibuhezwa a réclamé son ancien carré de terrain puis il a commencé à construire et à cultiver la terre. « Nous étions chanceux, car les membres de ma famille avaient veillé à ce que mon terrain reste libre. Personne ne l'a jamais occupé », a-t-il dit, en faisant référence à un problème auquel ont été confrontés de nombreux Burundais de 1972 lors de leur retour.

Nombre d'entre eux ont trouvé que leur terrain avait été occupé et, le plus souvent, revendu puis divisé en lots. Pour trouver des solutions à ce problème complexe, l'UNHCR prend un rôle plus important dans les programmes visant à une résolution pacifique des querelles portant sur les terrains.

L'agence pour les réfugiés travaille aussi avec les autorités afin de trouver des solutions pour ceux qui ont des difficultés à retrouver l'usage de la terre, qui est une ressource rare dans ce petit pays au milieu de l'Afrique.

Abel Ntibuhezwa et d'autres rapatriés reçoivent une aide de l'UNHCR et d'autres agences humanitaires jusqu'à ce qu'ils réussissent à devenir autonomes. En tant que famille vulnérable de rapatriés appartenant au groupe de 1972, ils sont éligibles pour recevoir des rations alimentaires de la part du Programme alimentaire mondial.

De plus, la famille a aussi reçu des allocations en espèces d'un montant de près de 45 dollars par personne de la part de l'UNHCR, pour acheter de la nourriture et des articles non alimentaires. Abel Ntibuhezwa a indiqué que le soutien à la réintégration était vital. « Si nous ne l'avions pas reçu, nous serions déjà morts », a-t-il dit.

L'UNHCR a rapatrié plus de 310 000 Burundais depuis des camps de réfugiés spécifiques en Tanzanie, dans le cadre d'une première opération lancée en 2002. De plus, des dizaines de milliers de réfugiés burundais sont aussi rentrés chez eux par leurs propres moyens, depuis la Tanzanie et d'autres pays voisins, portant le nombre total des réfugiés revenus au Burundi à environ 400 000.

L'agence des Nations Unies pour les réfugiés s'attend à ce que le nombre des retours s'accélère cette année, suite à la décision de la Tanzanie de fermer au moins deux des trois camps restants qui accueillent des réfugiés burundais et avec l'espoir d'une paix durable au Burundi.

Par Andreas Kirchhof à Shanga, Burundi