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Fuir l'horreur dans sa ville natale au Soudan du Sud

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Fuir l'horreur dans sa ville natale au Soudan du Sud

Rencontrez quelques-unes parmi les milliers de personnes ayant fui les combats dans des provinces auparavant pacifiques au Soudan du Sud, où des meurtres, des viols et des pillages sont perpétrés par des milices.
7 Mars 2016
Faustina Joseph a fui en RDC avec son bébé après que son mari ait été tué.

Un soir, alors qu'il célébrait la naissance de son premier fils une semaine plus tôt, Philip Bati répond alors qu'on frappait à la porte de sa maison à Yambio, au Soudan du Sud.

Il s'attendait à la visite de personnes amies mais, bien au contraire, il a trouvé à sa porte des hommes armés des fusils, qui ont exigé de l'argent. Comme il avait beaucoup dépensé cette semaine-là depuis la naissance de son fils, Philip, 35 ans, n'avait plus d'argent. Il n'a pas eu la chance de plaider pour sa vie.

« Il a été tué par balles à la porte de notre maison, car il n'avait rien à leur donner », déclare Faustina Joseph, l'épouse de Philip. Elle se trouvait juste à côté de lui, car elle montrait le bébé à des voisins. « Ils ont poussé son corps à l'intérieur, ont bloqué la porte et ont mis le feu à la maison où son corps a également brûlé. »

Le couple vivait à Yambio, la grande ville située au sud du Soudan du Sud et loin des marécages ainsi que des savanes au nord et à l'est du pays qui ont été ravagés depuis deux ans de rébellion. Ces combats, entre le gouvernement et les forces loyales à son Vice-Président, ont causé la mort de 10 000 personnes et ont poussé 2,3 millions de personnes à fuir leurs maisons, ce qui a également causé une famine catastrophique.

Le sud du pays était demeuré paisible. Mais les personnes fuyant les violences déclarent que la violence y règne désormais comme au nord du pays. Faustina, 35 ans, a saisi ses enfants et a fui vers la République démocratique du Congo, où ils vivent aujourd'hui dans un camp spontané de réfugiés près du village de Bitima, à la frontière avec le Soudan du Sud. Mboringba, son fils autrefois en bonne santé, est aujourd'hui allongé sur un lit dans le dispensaire rudimentaire. Il souffre de malnutrition aiguë. Sa fille a le paludisme.

Ils font partie des dizaines de milliers de victimes d'une forte hausse de meurtres, de viols, d'enlèvements d'enfants et de pillages qui a conduit à une nouvelle crise de réfugiés dans la région, à peine remarquée par la communauté internationale bien qu'elle se soit propagée au-delà des frontières de quatre pays d'Afrique centrale.

La nuit, les rebelles sortent de leurs bastions ruraux et maraudent dans les villes contrôlées par les forces gouvernementales, violant les femmes et les filles, pillant les biens et kidnappant des enfants. Ceux qui résistent sont tués. Pendant la journée, l'armée se venge, en ciblant des partisans réels ou supposés des rebelles.

« Ils ont poussé son corps à l'intérieur, ont bloqué la porte et ont mis le feu à la maison où son corps a également brûlé. »

Les combats avaient commencé en mai 2015, s'enflammant à nouveau en août, à Noël et au Nouvel An, et plus récemment à la mi-février. C'est la première fois que des témoignages de survivants sont diffusés à une audience mondiale.

James Wamwite, un mécanicien de Yambio, est arrivé dans la ville congolaise de Dungu, dans l'est du pays, le 14 février. Trois jours avant, les tout derniers combats avaient causé la mort de sa grand-mère qui s'était fait trancher la gorge. Sa maison avait également été réduite en cendres et son entreprise pillée.

Il a franchi la frontière à moto avec ses quatre jeunes enfants accrochés, après avoir été forcé de quitter sa femme terrifiée et leur nouveau-né aux soins de proches.

Eunice et son bébé Chance ont fui la ville de Yambio au Soudan du Sud avec son mari et leurs six enfants après avoir été témoins de violences dans son quartier.

Emmanuel, 13 ans, construit son propre abri avec des branches de palmiers à Bitima. Des centaines de réfugiés du Soudan du Sud ont trouvé refuge dans ce petit village congolais près de la frontière.

Les enfants du Soudan du Sud sont enregistrés en tant que réfugiés dans la ville de Dungu en RDC. Leur père se trouve toujours au Soudan du Sud et leur mère a été tuée par balles.

Des abris de réfugiés dans le village de Bitima. Les familles, principalement des femmes et des enfants, ont fui le conflit ayant éclaté à Yambio et d'autres régions de l'Ouest-Equateur.

Soeur Angélique, lauréate de la distinction Nansen 2013 du HCR, donne la communion à la messe du dimanche à la cathédrale de Dungu.

Une famille de réfugiés du Soudan du Sud va chercher de l'eau au puits situé près de la maison de la famille congolaise qui leur fournit un abri à Dungu.

« Peut-être vous ne me croirez pas, mais si vous vous rendez dans certains quartiers de Yambio aujourd'hui, ce que vous trouverez partout, c'est l'odeur des cadavres, ce sont des tombes de personnes qui ont été brûlées et des maisons réduites en cendres », déclare James, 33 ans. Son visage est marqué par les nuits blanches.

« Une des choses passe qui est difficile à décrire est quand ils viennent frapper à votre porte, puis ils rentrent dans la maison, ils vous attachent puis ils violent votre femme ou vos jeunes filles en votre présence. La chose difficile à savoir, c'est qui fait cela ? Il y a tellement de gens avec des fusils, qui est rebelle et qui est soldat ? Nous ne le savons pas. »

Eunice Romai, 29 ans, a fui les combats trois jours après son accouchement, la veille de Noël. Elle a nommé sa fille Chance. Bien qu'ayant encore besoin de soins médicaux, elle et sa famille ont marché pendant trois jours en quête de sécurité. Ils ont dormi sous les arbres, sans nourriture ni médicaments et ne pouvaient pas se laver. Dans le lit à côté d'elle à l'hôpital où Chance est née, il y avait une autre femme enceinte, enceinte de sept mois.

« Elle avait été violée par sept hommes armés », explique Eunice, la voix serrée d'une fureur contenue. « J'ai entendu dire qu'ils avaient également violé des religieuses à l'église catholique. C'est vraiment grave, je suis née et j'ai grandi au Soudan du Sud lorsqu'il y avait la guerre. Mais je n'ai jamais vu des choses comme ça, je n'avais jamais entendu le bruit des armes comme nous l'entendions tous les soirs là-bas ».

« Je suis née et j'ai grandi au Soudan du Sud lorsqu'il y avait la guerre. Mais je n'ai jamais vu des choses comme ça. »

Ces personnes ont maintenant besoin d'aide pour survivre ici en RDC - un pays lui-même ravagé par des années de guerres, de rébellions des milices et de négligences gouvernementales. L'aide est croissante, mais les ressources pour l'aide sont peu disponibles du fait de nombreuses autres crises.

Le HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, et les autorités congolaises s'apprêtent à enregistrer plus de 4000 Soudanais du Sud lors de missions dans des régions reculées du nord de la RDC fin février et début mars. Le HCR a déjà distribué des articles de première nécessité comme des casseroles, du savon et des boîtes d'eau potable. Le Programme alimentaire mondial a distribué des vivres et davantage de distributions sont prévues.

Des efforts similaires sont en cours dans d'autres lieux où ont fui les personnes déracinées par cette crise - au Soudan du Sud même, en République centrafricaine et en Ouganda.

Des familles sud-soudanaises retournent dans leurs abris, après avoir été enregistrés par des membres du personnel du HCR en tant que réfugiés en RDC.

Des employés du HCR procèdent à l'enregistrement de 600 réfugiés sud-soudanais dans le village de Bitima, sous la protection de la MONUSCO et de soldats congolais.

Un panneau de la MONUSCO signale le niveau d'évaluation de la sécurité à Dungu, en RDC. Depuis 2008, les rebelles sont restés loin de la ville, mais il y a toujours une menace dans la campagne des environs.

« Un meilleur accord est nécessaire », explique Josselyn Midadje, fonctionnaire du HCR en charge de la protection et dirigeant l'opération d'enregistrement en RDC. « Ce qui est important pour sauver des vies humaines, c'est maintenant que la communauté internationale regarde cette crise en face et lui accorde la même attention qu'à la crise libyenne ou la crise en Syrie dont nous parlons tellement », insiste-elle.

« Le monde passe sous silence cette crise au Soudan du Sud. Les civils vivent dans des conditions misérables. Je pense qu'en termes d'abris, de nourriture et de médicaments, nous avons besoin d'intervenir très rapidement. »

Les enfants, ciblés par les milices, continuent de souffrir, même après avoir rejoint la sécurité. Michael Agima, un jeune de 17 ans qui était le meilleur de sa classe en sciences et voulait être un ingénieur, a vu des garçons de sa classe être enlevés pour devenir des enfants soldats. Une fois enlevés, des commandants des rebelles les avaient contraints à faire appel à des amis, les incitant à sortir et à être kidnappés également. «Je suis inquiet car je pense que je ne pourrai pas terminer mes études », dit-il. « Mais je ne pouvais pas rester dans mon pays pour devenir un soldat. »

« Le monde passe sous silence cette crise au Soudan du Sud. »

Victoria Miidie, 16 ans, a vu ses amies être kidnappées également par les rebelles. « Certaines ont été violées, d'autres ont été contraintes de cuisiner pour les hommes armés », dit-elle. « Si vous refusez, alors ils vous coupent la tête ou vous abattent sur place dans la brousse. »

Le traumatisme des survivants est intense et chacun tente de faire face à sa façon. En janvier, la devanture de la maison de Justine Underete est devenue une ligne de front au cours d'une fusillade à Yambio, lorsque son mari était absent. Elle a saisi ses enfants et a fui vers la RDC. Depuis, elle n'a plus de nouvelles de lui.

« Les enfants me demandent des nouvelles de leur père et il leur manque », dit-elle. Elle fait une pause, perdue dans ses pensées. « Parfois, je tiens mon téléphone à l'oreille et je fais semblant de lui parler. Je leur dis qu'il dit qu'il va revenir bientôt. Ils disent alors : 'Ah bon, tu lui demandes de nous apporter des bonbons'. Bien sûr, je ne peux pas leur dire que je ne sais même pas s'il est vivant ou mort. »

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