Forte augmentation des retours vers le Burundi, selon le HCR
Forte augmentation des retours vers le Burundi, selon le HCR
MABANDA, Burundi, 12 août 2005 (UNHCR) - Nuit après nuit pendant de longues années dans un camp de réfugiés en Tanzanie, Salvator Gasage, un réfugié burundais, et des douzaines d'amis réunis autour de sa précieuse radio FM n'attendaient qu'une nouvelle : celle annonçant un possible retour en sécurité chez eux, dans un minuscule pays ravagé par la guerre.
Jeudi, serrant contre lui sa grande radio enveloppée dans une pochette en tissus usagé amoureusement fabriquée par lui-même, le vieil homme âgé de 70 ans a de nouveau foulé le sol burundais.
« Je suis très content », dit-il avec un large sourire. « Je suis rentré à la maison avec l'aide de Dieu. Je remercie Dieu de m'avoir permis de rentrer chez moi. »
Le bon déroulement des élections communales au Burundi, à la fin du mois de juin, a constitué le signal attendu par Gasage et des milliers d'autres réfugiés burundais.
« Nous faisons face à une nette augmentation du nombre de réfugiés burundais qui rentrent depuis les camps de Tanzanie, c'est un témoignage de leur confiance envers le retour de la paix au Burundi », a indiqué Jennifer Pagonis, porte-parole de l'UNHCR, aux journalistes à Genève ce jour.
Alors qu'en juin et juillet le nombre de Burundais rentrant dans le sud du pays se situait entre 600 et 800 rapatriés par semaine, l'agence des Nations Unies pour les réfugiés a assisté, pour cette seule semaine, plus de 4 200 rapatriés dans trois provinces du sud, dont 3 600 en provenance de Tanzanie et 600 depuis le Rwanda.
Pour le mois d'août, l'agence estime à 20 000 le nombre de personnes de retour dans cette zone grâce à des convois de l'UNHCR, soit six fois plus que les 3 116 retours comptabilisés en juin. Depuis 2002, plus de 255 000 réfugiés burundais sont rentrés chez eux, principalement depuis la Tanzanie.
Bien que l'UNHCR n'encourage pas le retour au Burundi, l'agence aide au transport depuis les camps de Tanzanie vers les villages d'origine des réfugiés. Les réfugiés de retour chez eux sont aussi assistés pour démarrer une nouvelle vie dans leur patrie, ils reçoivent une provision de nourriture pour trois mois, ainsi que des bâches en plastique, des matelas, des couvertures, des vêtements, du matériel sanitaire, des bidons, du savon, et une houe, puisque la plupart d'entre eux sont fermiers.
Les élections communales, qui constituent en théorie la dernière étape d'une longue période de transition pour atteindre la paix et la démocratie, ont rassuré beaucoup de réfugiés.
« Oui, oui, les élections », dit Rosatta Nyabenda, une veuve de 44 ans, rentrée chez elle jeudi avec ses quatre enfants avec un convoi de l'UNHCR. « J'écoutais moi aussi la radio avec les autres et les élections nous ont donné confiance. Sans cette confiance, nous ne serions pas rentrés. »
Elle raconte que chaque réfugié a pris sa décision en fonction de « sa propre perception de la situation. Pour ma part, je ne pouvais plus attendre encore un mois. J'ai senti que je devais rentrer maintenant. Je suis revenue car il y a la paix. C'est tout. »
Bien que son mari soit décédé de maladie pendant les neuf années qu'a duré son exil, elle envisage l'avenir avec confiance. A ses pieds se trouve un carton en lambeaux avec quelques poulets à l'intérieur, le bénéfice d'un petit commerce rentable qu'elle gérait dans le camp en Tanzanie, formant son maigre capital pour une nouvelle vie au Burundi.
« Si c'est possible, je deviendrai fermière », dit-elle, ajoutant qu'elle n'a pas d'autre famille que ses enfants ; seulement l'espoir que d'autres réfugiés, eux aussi de retour, l'aideront. « Ma famille, ce sont les gens qui retournent au pays avec moi. »
Nyabenda et Gasage faisaient partie des 498 Burundais rentrés jeudi du camp de Kasulu, en Tanzanie, et leur joie était manifeste. Exprimer ses émotions est rare au Burundi, pourtant la plupart des Burundais ont commencé à entonner spontanément des chants de fête dès qu'ils ont atteint le point de frontière à Mugina.
Près du centre de transit de Mabanda, ils ont été accueillis par un membre du gouvernement burundais qui leur a dit : « Vous avez quitté votre pays lors d'une période trouble et vous connaissez la difficulté de la vie en exil. Maintenant vous êtes revenus pour participer au relèvement de votre pays. »
Calinie Bigirimana, mère de six filles, a entendu ses paroles et acquiesce : « Les choses ont changé ces derniers mois, car nous avons entendu qu'il y a de bonnes relations entre les autorités et les citoyens. C'est pourquoi nous avons décidé de rentrer maintenant. »
Gasage, l'heureux propriétaire de la radio, nourrit de grands espoirs pour le futur, mais a vécu trop de difficultés pour être complètement confiant. « Je souhaite seulement un futur en paix pour mes enfants », dit-il en désignant ses deux garçons âgés de 13 et 16 ans. « Sans la paix, il n'y a pas d'avenir. »
Et son pays, sera-t-il toujours en paix ?
« Au Burundi, vous ne savez jamais », indique le vieil homme en haussant les épaules. « Si la paix ne dure pas, nous retournerons en Tanzanie. »
Près de 238 000 réfugiés burundais se trouvent encore dans les camps en Tanzanie et 198 000 autres vivent dans des installations à l'ouest du pays.
Par Kitty McKinsey à Mugina et Mabanda, Burundi