Des élèves réfugiés de RDC au Burundi passent l'examen d'Etat de fin de lycée
Des élèves réfugiés de RDC au Burundi passent l'examen d'Etat de fin de lycée
BUJUMBURA, Burundi, 19 mai 2005 (UNHCR) - Il est 10h00. A l'Ecole Congolaise de Bujumbura au Burundi, Kayago, réfugié de la République Démocratique du Congo (RDC), se présente devant une classe primaire, inscrit quelques mots sur le tableau puis demande à un enfant de conjuguer le verbe « lire ». Assis au fond de la classe, des examinateurs évaluent sa performance.
Ce matin-là, la cour de cette école accueille des visiteurs exceptionnels : une centaine de jeunes réfugiés congolais s'y pressent. Comme Kayago, ils ont temporairement quitté l'un des deux camps de l'UNHCR au Burundi pour les épreuves de l'examen d'Etat congolais qui comportent un oral et une dissertation de français, ainsi que de la pratique. Cet examen, qui clôture six ans de cycle secondaire, leur permettra d'enseigner en primaire ou alors de poursuivre des études universitaires, quand ils pourront rentrer en RDC.
Au même moment, dans toute la RDC, les élèves se soumettent aussi à l'épreuve pratique d'enseignement dans une école. Une inspectrice venue a Bujumbura tout spécialement d'Uvira, en RDC, repartira avec les écrits qui seront corrigés de l'autre côté de la frontière. Avant d'obtenir leur diplôme d'Etat, une autre épreuve écrite attend encore les élèves en juillet.
En 2004, 16 des 88 candidats venus des camps de réfugiés ont réussi cet examen. Pour la seconde année consécutive, en collaboration avec l'Ecole Congolaise de Bujumbura et les autorités scolaires nationales de la RDC, l'UNHCR a organisé leur participation aux épreuves congolaises.
Le directeur de l'école secondaire du camp de Gasorwe, au nord-est du Burundi rappelle inlassablement à ses étudiants que, dès leur retour au camp, ils devront redoubler d'ardeur afin de passer avec succès l'épreuve écrite finale. Mais leur participation à cette épreuve n'est pas encore assurée car le port de l'uniforme est exigé. Or, les moyens pour se procurer ces tenues leur font encore défaut. Un uniforme coûte l'équivalent de 14 dollars. Pour l'instant, l'UNHCR n'a pas les fonds nécessaires mais a engagé des démarches pour qu'une coopération ou une ambassade consentent à verser ce montant.
Pour l'heure, les élèves sont surtout satisfaits de prendre part à la première série d'épreuves. Dans la cour de l'Ecole Congolaise de Bujumbura, les visiteurs venus des camps ne se distinguent pas de leurs pairs uniquement par leur absence d'uniforme.« Ces élèves que nous appelons autodidactes, car leurs écoles ne sont pas officiellement reconnues par la RDC, sont en général sensiblement plus âgés que les autres », remarque l'inspectrice. « Vous savez, ils ont dû par moments interrompre leurs études ... »
Et leurs études, ils les reprennent aujourd'hui dans des conditions pour le moins particulières. « Cet oral de français était un peu difficile car, au camp de Mwaro, nous n'avons aucun matériel pédagogique pour nous préparer », commente Serge, réfugié au Burundi depuis 2002. « Tout ce que nous avons, ce sont des cahiers de notes que nous avons emportés quand nous avons fui le Congo. »
Pour affronter les épreuves, les 216 élèves du cycle secondaire de Mwaro ont ainsi mis en commun le savoir contenu dans ces précieux cahiers. Cette école, les réfugiés l'ont créée eux-mêmes afin de poursuivre leurs études. Les matières enseignées dans le camp en cycle secondaire sont celles du programme congolais : le français, la géographie, l'histoire, la chimie, la biologie, la morale, l'anglais, les mathématiques, la physique et la pédagogie générale. Le cursus scolaire congolais y est dispensé en français et en swahili, tout comme en RDC.
La majorité des professeurs, rétribués symboliquement, sont aussi réfugiés. Anciens enseignants en RDC, la violence des affrontements entre groupes politico-militaires opposants les a forcés à fuir, avec des dizaines de milliers de leurs compatriotes.
Plus de 28 000 réfugiés originaires de RDC, principalement de l'est du pays, se trouvent aujourd'hui au Burundi. Quelque 7 500 vivent dans les camps de Mwaro (au centre du Burundi) et de Gasorwe.
Le directeur de l'école secondaire du camp de Gasorwe, diplômé en sciences de l'éducation, accompagne une cinquantaine de candidats. Pour motiver ses étudiants, Boromée leur parle du futur dans le pays où ils ont grandi. « Je leur explique que c'est eux qui feront l'avenir de la RDC. Ils doivent étudier sérieusement parce que, demain, la RDC aura besoin de gens intelligents et capables. »
Par Catherine-Lune Grayson