Avec l'apaisement des tensions, des déplacés rentrent à Bangui
Avec l'apaisement des tensions, des déplacés rentrent à Bangui
SITE DE CARMEL, République centrafricaine – Antoine Nambeyam s'achemine péniblement sur ses béquilles vers le début de la file qui permettra finalement à cet amputé de rentrer chez lui après trois ans passés dans un site de fortune où ont trouvé refuge des milliers de personnes déplacées par le conflit à Bangui, capitale de la République centrafricaine (RCA).
Il est venu récupérer auprès du HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, une allocation en espèces de 80 dollars grâce à laquelle cet homme de 60 ans et sa famille pourront reconstruire leur existence et leur maison démolie à Bangui, à une quinzaine de kilomètres au nord du site de Mont-Carmel où les déplacés internes ont été hébergés.
« On est resté là trois ans parce qu'on n'avait pas le choix. L'insécurité était telle qu'il fallait préserver nos familles », explique-t-il. « Maintenant que les violences ont cessé à Bangui, on est tous heureux de rentrer chez nous », ajoute ce père de quatre enfants, exilé dans son propre pays, qui a perdu une jambe faute de pouvoir travailler pour acheter les médicaments nécessaires au traitement de son diabète avancé.
« Maintenant que les violences ont cessé à Bangui, on est tous heureux de rentrer chez nous. »
Environ 80 000 habitants de Bangui sont encore déplacés. Antoine Nambeyam compte parmi plus de 4250 résidents qui ont profité d'un programme de retour volontaire mis en place dans la première semaine de janvier par le HCR et les autorités locales. Il y avait 3000 déplacés du site de Carmel parmi ceux qui sont retournés à la capitale dans le cadre de cette opération. Les équipes du HCR et du gouvernement aideront d'autres personnes à rentrer chez eux dans les jours à venir.
Un programme distinct de retour volontaire, administré par le gouvernement avec l'appui technique du HCR, a permis à 15 000 autres déplacés de quitter les conditions sordides du camp de l'aéroport international de M’Poko, à Bangui — où ils vivaient dans une situation précaire, dangereusement près du trafic aérien — et de rentrer chez eux.
La RCA a plongé dans le chaos dans les mois suivant la prise de pouvoir par les ex-rebelles de la Séléka en mars 2003, entraînant le renversement de François Bozizé, alors Président du pays et, par conséquent, les brutales exactions des milices anti-balaka en décembre de cette année-là.
Ce conflit et les violences ultérieures ont provoqué le déplacement de plus d'un million de personnes et condamné des quartiers entiers de Bangui au pillage et à la destruction. Environ 475 000 résidents ont fui vers les pays voisins et plus de 434 000 personnes sont allées se réfugier dans des régions plus sûres du pays.
Revenir à Bangui n'est pas chose facile, vu les souvenirs douloureux liés aux explosions de violence ayant conduit les gens à fuir pour leur survie. Antoine Nambeyam, qui est retourné depuis s'installer dans le quartier de Boeing avec l'aide de membres de sa famille, explique pourquoi il a choisi de revenir dans la capitale.
« Même si ma maison a été détruite, je suis soulagé d'avoir quitté le site de Carmel où les conditions de vie étaient extrêmement difficiles. On dormait sur des plaques de carton et il faisait très froid la nuit. » Il raconte que le HCR a donné aux habitants déplacés des couvertures, des bâches, des batteries de cuisine et d'autres articles, mais ils les ont vendus pour acheter à manger.
Quand il a atteint le début de la queue et empoché son allocation, Antoine a dit qu'une partie de cet argent lui servirait à acheter deux matelas sur lesquels il pourra dormir avec les siens dans les décombres de leur maison vidée par les pillages.
« Après le retour des rapatriés, l'étape suivante sera de favoriser leur réinsertion. »
« Après le retour des rapatriés, l'étape suivante sera de favoriser leur réinsertion, » déclare Charles Mballa, le Représentant adjoint du HCR. « Le HCR et ses partenaires souhaitent axer leurs interventions sur les programmes favorisant la cohésion sociale et la réconciliation, les moyens d'existence, la remise en état des logements et la mobilisation d'autres acteurs œuvrant pour le rapatriement des déplacés afin que ces derniers puissent recommencer dignement une nouvelle existence. »
Le HCR intervient déjà dans le cadre de projets de réinsertion dans diverses parties du pays, comme les préfectures d'Ouham-Pendé et de Lobaye dans l'ouest du pays, où il travaille aux côtés de ses partenaires à la reconstruction des logements et des infrastructures pour donner des bases pérennes au rapatriement des déplacés internes et des réfugiés.
Toutefois, la RCA reste fragile un an après les élections démocratiques qui ont porté le Président Faustin-Archange Touadéra au pouvoir. Durant le second semestre de 2016, de nouveaux affrontements ont encore déplacé quelque 150 000 personnes dans une zone allant de Bria, Alindao et Bambari à Ippy et Bakala, ce qui a fait grimper le nombre de déplacés internes au chiffre record de 434 174 personnes à la fin du mois de novembre 2016. Avec les retours vers Bangui, ce chiffre est retombé à 411 785 personnes à la mi-janvier.