Chaque jour, deux enfants en moyenne se noient durant leur quête de sécurité en Europe
Chaque jour, deux enfants en moyenne se noient durant leur quête de sécurité en Europe
Dans un communiqué conjoint publié ce jour à Genève, le HCR, l'UNICEF et l'OIM ont averti que le nombre de décès d'enfants est en hausse et ont appelé à davantage de mesures pour accroître la sécurité des personnes fuyant le conflit et la misère.
Depuis septembre dernier, quand la mort tragique du jeune enfant Aylan Kurdi avait capté l'attention du monde entier, plus de 340 enfants – dont beaucoup d'entre eux étaient des bébés et de jeunes enfants –sont morts noyés dans l'est de la Méditerranée. Selon les organisations, le nombre total d'enfants décédés est peut-être encore plus élevé, leurs corps sans vie s'étant perdus en mer.
Houda, une fillette afghane agée de sept ans, a disparu dans un naufrage au large de l'île grecque de Kos à la fin janvier. Sa mère, son père, ses deux sœurs et l'un de ses frères avaient quitté Kaboul pour Istanbul au début du mois après que son père, un officier de police, ait reçu des menaces de mort.
En Turquie, la famille a payé un passeur qui leur a promis un « voyage sûr à bord d'un grand bateau spacieux » vers la Grèce. Pour payer le voyage, le père de Houda avait vendu sa maison et emprunté de l'argent à sa famille et à des amis.
Une nuit, dans une baie sombre alors qu'ils se préparaient à partir, ils ont vu le bateau était à peine plus grand qu'un cercueil. Le bateau était petit, impropre à la navigation et massivement surpeuplé, avec près de 80 passagers couvrant ses quelques mètres de pont.
Ils ont essayé de ne pas monter à bord, mais ils y ont été contraints par le passeur qui se trouvait à bord du bateau. Les passeurs ne permettent pas les changements de dernière minute.
Aïcha, la sœur de Houda, et son frère Aziz ont survécu à ce voyage mortel ainsi que 26 autres, mais le père, la mère et une sœur aînée ont péri. Leurs corps ont été retrouvés.
Celui de Houda n'a jamais été retrouvé. Aïcha et Aziz, âgés respectivement de 16 ans et 15 ans, avaient appris à nager à l'école et c'est qui les a sauvés.
Le bras de la mer Egée entre la Turquie et la Grèce fait partie des itinéraires les plus meurtriers à travers le monde pour les réfugiés et les migrants. La mer agitée en hiver, les conditions de surcharge des embarcations, la mauvaise qualité des bateaux et des équipements de sauvetage augmentent le risque de chavirer, ce qui rend le voyage encore plus dangereux.
« Ces décès tragiques en Méditerranée sont intolérables et doivent cesser », a déclaré le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Filippo Grandi. « Des efforts supplémentaires sont clairement nécessaires pour lutter contre les passeurs et la traite d'êtres humains. De plus, comme la plupart des enfants et des adultes sont morts en tentant de rejoindre des proches en Europe, organiser des voies légales et sûres, grâce à des programmes de réinstallation et de regroupement familial par exemple, devrait être une priorité absolue si nous voulons réduire le nombre de morts », a-t-il ajouté.
Les enfants représentent désormais 36 pour cent de la population en déplacement. La probabilité pour eux de mourir noyés durant la traversée de la mer Égée depuis la Turquie vers la Grèce a donc augmenté proportionnellement. Durant les six premières semaines de 2016, 410 personnes se sont noyées sur les 80 000 ayant traversé l'est de la Méditerranée. Cela équivaut à 35 fois plus que la même période en 2015.
Aïcha et Aziz sont désormais hébergés dans un centre de transit que le HCR gère avec une ONG nationale spécialisée dans les services aux enfants réfugiés non accompagnés en Grèce jusqu'à ce qu'ils soient envoyés dans une installation permanente. Ils souhaitent retrouver dès que possible les membres restants de leur famille. Ils ont un frère en Allemagne et ils espèrent un jour pouvoir le rejoindre.
« Ces enfants ont été admirables de dignité et de courage tout au long des nombreux défis auxquels ils ont été confrontés après le naufrage. Après avoir identifié les cadavres des membres de leur famille avec les garde-côtes, Aziz a insisté pour voir davantage de photos afin de reconnaître d'autres voyageurs et aider à leur identification pour que leurs familles puissent également comprendre ce qui leur était arrivé. Ils m'ont exprimé leur gratitude à plusieurs reprises ainsi qu'à d'autres collègues pour l'aide que nous leur fournissons », a déclaré Georgios Papadimitriou, employé du HCR en charge de la protection.
Marco Procaccini, chef du HCR du bureau à Kos, a déclaré : « Je suis impressionné par la résilience et le courage d'Aziz et Aïcha depuis que nous les avons rencontrés au port où ils ont été amenés par le navire des garde-côtes qui les avait sauvés durant cette nuit terrible. Bien qu'ils aient vécu le pire en tant qu'enfants, ils restent toujours très polis et gentils. »
Aziz a remercié le HCR, d'autres ONG et les volontaires locaux pour l'aide que lui et sa sœur ont reçue durant cette période difficile et il a dit qu'il reviendrait un jour avec le reste de la famille pour visiter les tombes de ceux qui ont été trouvés et aussi dire une prière pour Houda.