Des réfugiés centrafricains pleins d'espoir rentrent chez eux depuis la RD Congo
Vêtu d'une chemise à motifs confectionnée spécialement pour l'occasion, Firmin, 36 ans, a traversé avec sa famille le tarmac humide de l'aéroport de la ville de Gbadolite pour rejoindre l'avion des Services aériens humanitaires des Nations Unies (UNHAS) qui l'attendait pour un aller simple vers son pays.
Plus tôt ce jour-là, une pluie battante - peut-être un signe du ciel - avait accompagné Firmin et 40 autres réfugiés centrafricains sur les 45 kilomètres de trajet entre le camp d'Inke, dans la province congolaise du Nord-Oubangui, et l'aéroport. Ce camp les abritait depuis qu'ils avaient fui le conflit armé en République centrafricaine (RCA) en 2013.
« C'est vraiment une émotion forte de rentrer enfin chez soi après huit ans », a déclaré Firmin. « Nous avons trois enfants qui n'ont jamais rencontré leurs grands-parents et leurs oncles. Les revoir après tout ce temps sera fantastique. »
Alors qu'ils attendaient de décoller pour le court vol d'une demi-heure, Victoire, sa femme, s'occupait de leur bébé et de leurs autres enfants, tandis que Firmin se remémorait l'époque où lui et sa famille ont été contraints de fuir pour sauver leur vie.
« J'étais dans le quartier d'Obongo, à Bangui, la capitale », se souvient-il. « Les gens se faisaient tuer partout. Et il y avait des balles qui sifflaient dans tous les sens, des gens qui pleuraient, qui criaient, qui mouraient. C'était très difficile à vivre. »
Plus de 200 000 personnes ont fui la RCA pour se réfugier en RDC voisine après le déclenchement d'un violent conflit armé en 2013, lorsque les rebelles de la Seleka prenaient le contrôle de la capitale Bangui. Le processus de paix en RCA est en cours, et la situation s'est suffisamment calmée dans certaines régions pour que de nombreuses personnes ayant fui prennent la décision de rentrer chez elles.
Les retours volontaires ont débuté en juillet 2019 mais ont été interrompus en raison du Covid-19 et d'une résurgence de violence en marge du processus électoral en décembre 2020. Ils ont repris en octobre 2021, lorsque le HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, et ses partenaires ont facilité le retour librement consenti de plus de 5500 réfugiés centrafricains depuis les camps d'Inke, de Mole et de Boyabu dans les provinces du Nord et du Sud-Ubangi en RDC.
En 2022, le HCR prévoit de continuer à soutenir le rapatriement volontaire d'environ 20 000 réfugiés qui ont exprimé leur désir de rentrer dans des régions de la RCA jugées sûres. Le HCR est reconnaissant pour tous les efforts du gouvernement, de la société civile et des communautés d'accueil qui rendent possible à la fois l'accueil des réfugiés et leur retour dans la sécurité et la dignité.
Firmin et sa famille ont passé les huit dernières années dans le camp d'Inke, loin de la zone frontalière peu sûre entre les deux pays. Il y a environ 18 000 réfugiés centrafricains à Inke qui ont accès à des cliniques et des hôpitaux, des écoles, de l'eau potable et des installations sanitaires de base. Firmin y a reçu des outils pour l'aider à nourrir sa famille et à construire une maison pour s'abriter.
Grâce à une formation dispensée par l'Association pour le développement social et la sauvegarde de l'environnement (ADSSE), partenaire du HCR, Firmin a pu devenir enseignant dans une école locale. Bien qu'il soit reconnaissant d'avoir pu bénéficier de ces opportunités, le conflit en RCA a réduit à néant ses rêves d'étudier la géographie à l'université.
Au centre multimédia du camp, Firmin et ses compatriotes se tenaient au courant de l'évolution de la situation dans leur pays. Avec le retour progressif de la paix dans certaines régions, un nombre croissant de réfugiés ont exprimé leur intérêt pour un retour en RCA.
« C'est mon pays. Nous suivions les nouvelles en temps réel, alors je savais que le moment était venu, enfin, de rentrer et de rejoindre ma famille à nouveau », a expliqué Firmin.
Lorsqu'ils ont atterri à Bangui, Firmin et les autres rapatriés ont été accueillis par le gouvernement et le HCR. Après les formalités administratives et la distribution des sommes d'argent pour le transport vers leurs destinations finales, Firmin et sa famille ont rejoint la maison d'enfance de sa femme à Bangui. Firmin a été bouleversé par les changements survenus dans sa ville natale au cours des dernières années.
« En traversant la ville, nous avons vu de vieilles maisons, de nouvelles maisons, [et] un énorme embouteillage, parce qu'il y a beaucoup de monde », a-t-il dit. « La population a augmenté de façon spectaculaire à Bangui. »
En arrivant chez ses beaux-parents à Bangui, la famille de Firmin a été accueillie avec du café et un plat traditionnel de poisson, du chinchard, pour célébrer leur retour tant attendu. Ne disposant pas d'une connexion téléphonique locale, la famille de Firmin n'était pas au courant de son retour tant attendu, mais après avoir acheté une carte SIM, il a fini par les contacter pour leur annoncer la bonne nouvelle.
Malgré le soulagement d'être de retour chez eux, les rapatriés comme Firmin sont néanmoins confrontés à de nombreux défis car la plupart d'entre eux retournent en RCA comme ils l'ont quittée - avec presque rien.
Pour faciliter la transition, le HCR fournit à chaque famille de retour une aide financière pour le transport, les articles essentiels et la nourriture. Le gouvernement centrafricain leur donne des papiers d'identité. Cependant, un soutien plus important est nécessaire pour fournir des solutions à plus long terme qui aideront les rapatriés à recommencer leur vie.
« Le soutien apporté par le HCR nous aidera à nous installer, mais ensuite je devrai trouver un autre emploi pour que nous puissions survivre », a déclaré Firmin.
Il pense que les réfugiés centrafricains rentrant des pays voisins auront un rôle clé à jouer dans l'avenir du pays.
« Je voudrais exhorter mes frères réfugiés qui sont encore à l'extérieur de la RCA à être courageux et à revenir au pays pour travailler à son développement. Le même courage, la même résilience dont nous avons fait preuve pendant le temps passé en exil est le meilleur atout que nous pouvons donner à notre pays. »