Trois chefs des Nations Unies réclament un nouvel effort pour mettre un terme aux souffrances de millions de personnes dans la région africaine des Grands Lacs
Trois chefs des Nations Unies réclament un nouvel effort pour mettre un terme aux souffrances de millions de personnes dans la région africaine des Grands Lacs
Le 2 mars 2006
BUJUMBURA - Les chefs de trois des plus importantes agences humanitaires des Nations Unies ont lancé aujourd'hui un appel à la communauté internationale pour qu'elle accompagne les progrès politiques réalisés dans la région des Grands Lacs en renouvelant son engagement à mettre un terme aux souffrances de millions de personnes oubliées par le reste du monde.
Au terme d'un voyage de six jours en République démocratique du Congo (RDC), au Burundi et au Rwanda, les trois chefs d'agence ont indiqué que ce qu'ils avaient vu et entendu, au cours de cette première mission pour visiter leurs opérations communes, démontrait la nécessité d'une coopération plus étroite de tous les acteurs concernés afin d'aider les réfugiés, les déplacés internes et les rapatriés.
« Nous avons clairement entendu le message suivant : 'Ne nous abandonnez pas à ce moment crucial, sinon nous risquons de revivre le cauchemar meurtrier qui a été notre quotidien pendant tant d'années' », ont précisé dans leur déclaration commune James Morris, Directeur exécutif du Programme Alimentaire Mondial (PAM), Ann M. Veneman, Directeur exécutif de l'UNICEF et António Guterres, le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés.
« Le courage des peuples de la région des Grands Lacs a besoin de la solidarité de la communauté internationale. Le début de la fin de cette crise régionale est en vue mais pour y parvenir et reconstruire la vie des gens sur place, il est essentiel que nous les soutenions et que nous redoublions d'efforts. »
Les trois agences ont besoin d'un financement supplémentaire substantiel pour mener leurs opérations dans la région des Grands Lacs.
Chaque jour de leur visite, les chefs des trois agences ont vu aussi bien des signes d'espoir et que de désespoir. Mardi, ils ont accueilli, au port de Baraka, dans l'est de la RDC, 400 réfugiés congolais qui rentraient de Tanzanie. Une heure plus tard, ils ont entendu les témoignages de victimes de violences sexuelles, dont celui d'une fillette de 12 ans maltraitée par quatre hommes et celui d'une grand-mère qui a été violée après voir quitté sa maison pour chercher de la nourriture.
« C'est déplorable, c'est injuste et c'est tout simplement mal. Du fait de ces crimes horribles, les gens s'enfuient et les femmes ont trop peur pour sortir de chez elles, même pour cultiver leurs champs », a déclaré James Morris.
« Les femmes et les enfants doivent être protégés. La violence est inacceptable. Il faut y mettre un terme », a ajouté Mme Veneman.
La RDC a été le théâtre des combats les plus brutaux depuis la Seconde Guerre mondiale. Ce conflit, qui a duré six ans, a coûté la vie à quatre millions de personnes. Plus de 1 200 personnes meurent encore inutilement en RDC chaque jour. Au total, plus de 3,4 millions d'individus ont été déplacés de chez eux et 17 millions de personnes ne mangent pas régulièrement à leur faim.
Les chefs des trois agences ont précisé qu'il y avait un espoir, comme en témoignent le référendum constitutionnel en RDC et le fait que des millions de personnes se soient enregistrées pour voter en juin dernier pour la première élection présidentielle pluraliste du pays depuis 45 ans. Toutefois, pour que cette opportunité se concrétise, une assistance humanitaire conséquente est indispensable, à la fois pour les personnes rapatriées et pour celles qui sont toujours menacées dans l'est du pays.
A l'occasion de leur voyage dans les Grands Lacs, les chefs des Nations Unies ont rencontré les Présidents de la RDC, du Rwanda et du Burundi, ainsi que des bailleurs de fond, des responsables d'autres agences des Nations Unies et des organisations non gouvernementales partenaires. Ils ont aussi rencontré des personnes chassées de chez elles par les violences dans l'est de la RDC et d'autres qui ont choisi de rentrer dans leurs pays d'origine respectifs après des années d'exil.
« Il est très important de traiter les principaux problèmes que rencontrent les gens de la région dans une perspective régionale », ont ajouté les trois chefs d'agence. « Seule une approche régionale peut être efficace. »
Au Rwanda, les trois représentants des Nations Unies ont félicité le Président Paul Kagame et son gouvernement pour avoir conduit leur pays vers la paix, la réconciliation et le développement, après la tragédie du génocide de 1994 qui a fait environ 800 000 victimes. Les autorités rwandaises ont, quant à elles, estimé qu'un million de personnes auraient besoin d'aide alimentaire pendant les six premiers mois de l'année.
« C'est un fait établi que l'aide internationale va dans les régions qui reçoivent le plus de couverture médiatique et que cette région n'en a pas beaucoup bénéficiée », a ajouté António Guterres au cours de sa visite au Rwanda.
Les chefs des Nations Unies ont quitté le Rwanda mercredi pour s'envoler vers le Burundi, où 2,2 millions de personnes, parmi lesquelles des réfugiés et des rapatriés, ont besoin d'assistance alimentaire cette année, en raison des faibles pluies, des maladies qui ont frappé les semences et de la pauvreté. Ils ont eu des discussions avec le Président et ont visité un centre nutritionnel mis en place pour soigner les femmes et les enfants malnutris.
Ayant achevé leur mission conjointe dans les Grands Lacs à Bujumbura jeudi, James Morris et Ann M. Veneman se sont rendus au Kenya afin de rencontrer le Président Mwai Kibaki, António Guterres prenant, quant à lui, le chemin de la Tanzanie.