La plaine de Shomali reprend vie grâce aux rapatriés
La plaine de Shomali reprend vie grâce aux rapatriés
BAGH-E-ALAM, Afghanistan, 28 juillet 2004 (UNHCR) - Les maisons en torchis que les ex-réfugiés ont construit au milieu des ruines du village de Bagh-E-Alam témoignent à la fois des dévastations causées par la guerre et de la volonté de voir renaître cette région au nord de la capitale afghane.
« Ici, vous ne pouvez même pas trouver un chat qui miaule », dit Attah Mir, le chef de la shura, le conseil des Anciens, représentant Bagh-E-Alam ainsi qu'une vingtaine de petits hameaux alentour. « Les maisons ont été brûlées et tous les arbres ont été coupés. Tout ici a été détruit ».
Mais depuis la défaite en 2001 du régime taliban qui avait causé beaucoup de dégâts dans cette région, Bagh-E-Alam a repris vie. Ce village et les quelques maisons alentours, qui avaient vu leur population chuter de 4 000 familles à zéro, sont maintenant repeuplés de 3 000 familles avec les personnes déplacées qui sont revenues des autres régions d'Afghanistan et les réfugiés qui sont rentrés d'Iran ou du Pakistan.
Cette renaissance a été assistée par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés qui a fourni du matériel pour reconstruire les maisons et installé des pompes pour fournir de l'eau.
Dans la plaine fertile de Shomali où se trouve Bagh-E-Alam - autrefois appelée le « Jardin de Kaboul » - l'UNHCR a aidé près de 14 000 familles à reconstruire leurs maisons depuis la chute des taliban, il y a presque 3 ans. L'UNHCR a également installé plus de 300 points d'eau collectifs.
Cet investissement important de l'UNHCR est une partie d'un programme national conçu pour permettre la réintégration des réfugiés et des déplacés qui ont été chassés de chez eux par vingt-cinq années de violences. Plus de 3 millions d'Afghans sont rentrés chez eux depuis le début du programme il y a maintenant deux ans et demi.
Bien évidemment, les réfugiés rencontrent encore de nombreux obstacles sur le chemin du retour. La sécurité dans les provinces demeure incertaine, la sécheresse continue de gêner le redémarrage de l'agriculture et des années d'investissement et de reconstruction seront nécessaires pour effacer les effets d'une telle dévastation.
Dans la plaine de Shomali, une ligne de front au cours du conflit avait été établie entre les taliban au pouvoir à Kaboul et l'Alliance du Nord. On estime à environ 50 000 le nombre de maisons détruites. Mais le nombre de personnes qui continuent de rentrer dans cette région est un signe d'espoir.
« Quand nous sommes partis, il y avait la guerre mais la maison était encore debout. Nous l'avons retrouvée complètement détruite lorsque nous sommes rentrés d'Iran » dit Sheragha, qui est revenu avec sa femme et ses 7 enfants pour repartir de zéro. « Nous n'avons rien pris avec nous quand nous sommes partis et lorsque nous sommes revenus après 8 ans d'absence, tout avait disparu. »
Sa nouvelle maison de 2 pièces, en construction avec l'aide de l'UNHCR, se trouve à l'ombre des ruines de son ancienne demeure à 2 étages, détruite par les taliban. Ces vestiges évoquent une période plus prospère.
Sheraga est de ceux choisis par la shura pour le programme d'aide à la reconstruction de l'UNHCR. Ce pauvre paysan soutient la veuve de son frère et attend le retour d'un autre de ses frères, qui a perdu une jambe en sautant sur une mine avant de partir pour l'Iran.
Comme dans tous les programmes d'assistance, l'UNHCR fournit des matériaux de construction. Parfois une petite aide financière est également versée pour payer la main d'oeuvre, par exemple pour des veuves qui ne peuvent faire la construction elles-mêmes.
Près de la nouvelle maison de Sheragha, l'UNHCR a participé à la reconstruction d'un petit groupe de maisons qui accueille maintenant quatre familles. Trois d'entre elles sont rentrées en 2003 et la quatrième est arrivée en 2004 après sept ans d'exil au Pakistan.
« Nous avons décidé de rentrer car ici c'est notre terre, et maintenant nous nous y sentons plus en sécurité » explique Bahlol Shah, qui a dû fuir avec sa famille quand le village a été transformé en champ de bataille.
Au même moment, son père est engagé, contre un salaire, sur un autre projet de l'UNHCR qui présente un double avantage, celui de faire réparer un karez (un ancien réseau souterrain de distribution d'eau) et celui d'injecter des revenus dans une communauté qui se bat pour revivre.
Sur le chantier du karez, les ex-réfugiés ont nettoyé un kilomètre de tunnel, endommagé par des années de détritus accumulés, d'absence d'entretien et de destruction délibérée par les taliban, alors qu'ils chassaient la population de cette région.
Malgré les difficultés que les ex-réfugiés peuvent rencontrer dans leur réinstallation dans la plaine de Shomali, ils ne semblent pas regretter d'être rentrés d'exil. Pour eux c'est déjà un grand pas d'avoir la sécurité ; ils savent qu'il faudra des années avant que la vie ne redevienne comme avant.
Le long de la route qui traverse la plaine vers Kaboul, un autre rapatrié, Ajmal, a profité d'une formation de soudeur, dans le cadre d'un programme de l'UNHCR, pour ouvrir une petite boutique dans un ancien container.
Même si les affaires marchent plus lentement que l'année dernière, quand les agences internationales lui commandaient de nombreux cadres de fenêtre, Ajmal est heureux que lui et sa famille de 12 personnes ne soient plus à Karachi, l'immense métropole pakistanaise de 14 millions d'habitants où ils avaient trouvé refuge.
« Beaucoup de réfugiés rentrent. C'est mieux qu'ils reviennent dans leur pays, » dit Ajmal qui a lui aussi reçu l'aide de l'UNHCR pour reconstruire sa maison l'année dernière. « S'ils reviennent, ils trouveront du travail, les choses vont en s'améliorant et non plus en s'aggravant. »