Une directive de l'Union européenne pourrait entraîner une dégradation des standards de l'asile
Une directive de l'Union européenne pourrait entraîner une dégradation des standards de l'asile
Le 2 décembre 2005
GENEVE - L'agence des Nations Unies pour les réfugiés a exprimé sa préoccupation au sujet d'une directive controversée sur les procédures d'asile qui pourrait être à l'origine d'une sérieuse dégradation des standards de l'asile au sein de l'Union européenne et au-delà. Les 25 pays membres de l'Union européenne ont formellement adopté la directive sans discussion, jeudi à Bruxelles.
La directive sur les procédures de l'asile met en place des normes minima sur la manière dont les décisions concernant les demandes d'asile dans les pays membres de l'Union européenne devraient être prises.
« Nous sommes préoccupés par l'application de cette directive qui pourrait ouvrir des brèches dans la législation internationale relative aux réfugiés si aucune garantie de sécurité additionnelle n'est introduite, et il sera plus difficile pour les réfugiés d'avoir accès à une procédure de demande d'asile en Europe », a souligné Pirkko Kourula, directrice du bureau pour l'Europe à l'UNHCR.
Madame Kourula a aussi lancé une mise en garde quant aux implications plus larges de la directive, précisant qu'elle pourrait même éroder les standards internationaux de la protection des réfugiés au-delà de la seule Union européenne.
L'UNHCR a soutenu le processus d'harmonisation des politiques d'asile en Europe depuis son début en 1999. Mais l'agence exprime sa déception quant à l'échec des pays membres de respecter leur engagement vis-à-vis des standards internationaux de l'asile. Lors d'une réunion à Tampere en 1999, les pays de l'Union européenne s'étaient engagés au respect absolu du droit de demander l'asile et à l'application pleine et entière de la Convention de Genève de 1951.
Source répétée d'inquiétudes de l'UNHCR durant les négociations, le texte final contient de sérieuses failles. L'UNHCR est particulièrement préoccupé par certaines règles permettant aux Etats de désigner « des pays tiers sûrs » en dehors de l'Union européenne, dans lesquels les demandeurs d'asile pourront être renvoyés, sans même que leur demande d'asile soit traitée dans un pays membre de l'Union européenne.
La directive ne parvient pas non plus à énoncer clairement le fait que les demandeurs d'asile ne peuvent pas être renvoyés dans leur pays d'origine tandis qu'ils attendent le résultat de la procédure d'appel. Ceci leur ôte ainsi le droit à un recours en cas d'une éventuelle erreur.
La directive autorise aussi toute une série de pratiques restrictives hautement controversées qui ne figurent actuellement que dans les législations nationales de deux pays membres, mais qui pourraient être introduites dans le corpus législatif de 25 pays membres de l'Union européenne. Le HCR exhorte les pays membres à ne pas opter pour le plus bas dénominateur commun autorisé par la directive en question, lorsqu'ils adoptent les principes au niveau législatif. L'UNHCR leur demande de faire tout leur possible pour assurer la mise en place de garanties adéquates et de standards élevés en matière de protection des réfugiés.
Une grande partie des préoccupations de l'UNHCR figurent dans un rapport critiquant la directive publiée par le Parlement européen le 27 septembre dernier. Toutefois, aucun des amendements proposés par le Parlement n'a été pris en considération.
La directive adoptée est la dernière des cinq principaux instruments de la législation européenne constituant la première phase du processus d'harmonisation de la politique d'asile au sein de l'UE. Un accord politique relatif au texte de cette directive a déjà été conclu le 29 avril 2004, quelques jours avant la clôture de cette première phase.