Une collectivité canadienne aide à panser les plaies de la guerre
Une collectivité canadienne aide à panser les plaies de la guerre
Enfants, Houssam et Noura Eshadi étaient voisins et ils sont tombés amoureux pendant leur adolescence à Alep, en Syrie. Mariés, avec une petite fille et un bel avenir devant eux, ils n’auraient jamais cru qu’ils devraient un jour s’enfuir et qu’ils deviendraient des réfugiés.
Cependant, peu après le premier anniversaire de la petite Bayan, les combats se sont transportés dans la rue, et leur quartier est devenu une zone de guerre. Les attaques à la roquette et les explosions ont commencé à faire partie du quotidien. « Chaque fois que mon téléphone sonnait, je croyais que quelque chose était arrivé à ma fille », se souvient Houssam.
Aujourd’hui, les habitants d’une collectivité locale au Canada se rassemblent pour offrir à la famille une nouvelle chance d’avoir une vie heureuse, ce qui, il y a quelques mois à peine, paraissait impossible.
« Parfois, nous avons l’impression de rêver, dit Houssam. Nous avons peur de nous réveiller, car c’est un beau rêve. »
« Nous avons seulement fait ce qu’a dicté notre cœur. »
Le nouveau groupe d’amis proches des Eshadi au Canada sait que les choses auraient pu tourner différemment.
« Ils nous ont raconté certaines des choses qu’ils ont vécues depuis le début de la guerre », dit Joe Edwards, un ancien employé d’IBM à la retraite qui, avec sa femme, Tanna, consacre l’essentiel de son temps libre à aider la famille. « C’est très effrayant de penser qu’ils ont dû traverser toutes ces épreuves. »
Avant de fuir, le couple a voulu croire en la fin de la guerre. Il s’efforçait de vivre une vie normale, au milieu des bombardements. Les soirs d’été, on les voyait tous les deux sur la moto d’Houssam.
« Je lui disais : ‘Tu m’amènes où tu veux. Je m’en fiche’ », se rappelle Noura.
Puis, en 2011, lorsqu’un tir de roquette a touché la mosquée voisine le premier jour de l’Aïd, Houssam et Noura ont compris qu’ils devaient partir. Ils ont parcouru le nord de la Syrie dans tous les sens, avant de se rendre en Turquie, où ils ont passé plusieurs années dans un camp de réfugiés. Husam s’est alors cassé le dos en travaillant de longues heures sur une ferme, désespéré qu’il était de payer leur passage en Grèce à bord d’une frêle embarcation. Mais la stabilité restait toujours hors de portée.
Les passeurs demandaient 3 000 dollars US pour le périlleux voyage en bateau. Même si ni Noura ni sa petite fille ne savaient nager, et même si rien ne garantissait que la famille arriverait en Grèce saine et sauve, le risque valait la peine d’être pris, aux yeux d’Husam et de Noura.
« La mort nous attendait déjà, dit Noura. Nous serions morts si nous étions restés en Syrie. Alors qu’avions‑nous à perdre ? »
Un appel téléphonique a tout changé.
La famille Eshadi fait partie des 31 000 Syriens que le Canada a accueillis depuis l’année dernière. Elle est arrivée à Peterborough, une ville de 79 000 habitants entourée de lacs et de forêts, en mai 2016, avec ses rares possessions et aucune idée de ce qui l’attendait. Au grand soulagement de la famille, la bienveillance manifestée par les 15 bénévoles chargés de l’accueillir lui a fait se sentir comme chez elle.
Pour les bénévoles, l’expérience a dissipé les idées fausses et fait naître un sentiment d’empathie envers les millions de personnes déplacées par le conflit. L’année dernière, ils ont aidé plus de 60 familles syriennes à se réinstaller à Peterborough ; quinze autres familles doivent arriver dans les prochains mois. « J’ai été surpris de voir qu’un si grand nombre de personnes voulaient aider les nouveaux Canadiens », dit Joe.
On entend les mêmes histoires partout au Canada, où la politique gouvernementale permet aux personnes et aux groupes de parrainer la réinstallation de réfugiés. Même si cela coûte de l’argent et suppose des obligations, les résidents de Peterborough ne se sont pas laissé décourager.
« Nous avons seulement fait ce qu’a dicté notre cœur », dit Tanna, qui, avec son mari, Joe, propose souvent à la famille Eshadi de l’aider pour ses déplacements ou ses courses. Elle l’invite aussi fréquemment à sa table.
Aujourd’hui, Houssam et Noura vivent dans une maison en bardeaux, avec un petit jardin, très loin de tout drame. La naissance de leur deuxième enfant, Adam, n’a fait que les enraciner davantage dans la collectivité, et les bénévoles appellent le garçon « notre bébé canadien ». Dave, l’un des bénévoles, a embauché Houssam comme peintre à temps partiel, tandis que la femme de Dave, Jennifer, rend souvent visite à la famille pour s’assurer que tout le monde va bien. Une autre bénévole, Helen, apprend l’anglais à Noura.
« Je sais que les réfugiés sont heureux d’être en sécurité au Canada », dit Winston, qui fait aussi partie du groupe de bénévoles. « Nous pouvons nous estimer chanceux, nous, les Canadiens, de les avoir ici. Nous nous en portons que mieux. »
La famille Eshadi n’oubliera jamais ce qu’elle a enduré dans son pays d’origine ou les proches qu’elle a quittés. La nuit, Houssam dit qu’il ne rêve plus, et il fait souvent les cent pas. Mais l’amour et la chaleur humaine des résidents de Peterborough ont permis à Houssam et à Noura de croire en un avenir heureux et prometteur, de nouveau.
« J’ai trouvé la sécurité, dit Husam. J’ai trouvé des amis. »
Ton histoire est une épopée est une série de profils concernant des citoyens canadiens qui ont accueilli des réfugiés syriens avec compassion et soutien. A travers tout le pays, des étrangers, des amis, des familles et des communautés créent de puissants liens d'amitié qui transcendent le langage et la culture.