Un cordonnier syrien crée une entreprise florissante au Maroc
Un cordonnier syrien crée une entreprise florissante au Maroc
CASABLANCA, Maroc – En Syrie, la cordonnerie est un métier transmis de père en fils et Diyaa et les siens fabriquaient des chaussures depuis des décennies lorsque la guerre les a forcés à fuir leur foyer de Damas, la capitale syrienne.
Contraint de reconstruire sa vie en tant que réfugié en exil, Diyaa a monté un atelier dans une ruelle de Casablanca, une ville dynamique du littoral marocain où il s'est installé avec sa femme et leurs deux enfants. Il est parti de rien et a consacré de longues heures à la fabrication de sandales, de sabots et de nu-pieds.
« Au début, je travaillais entre 18 et 20 heures par jour et je vivais à 20 kilomètres de Casablanca, » raconte-t-il. « J’avais tous les jours deux heures de transport pour arriver au travail. »
« Petit à petit, les choses se sont améliorées. Aujourd'hui, j'ai quatre employés marocains. »
La persévérance de Diyaa a fini par payer et sa détermination à s'en sortir lui a permis de fidéliser des clients et d'obtenir davantage de commandes grâce à l’allocation que lui a versée le HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, qui lui a permis d'acheter sa première machine à coudre.
« Au début, je travaillais seul. Puis, le HCR m'a donné une première machine à coudre dans le cadre d'un programme de développement des activités rémunératrices pour les réfugiés. Ça m'a donné un sacré coup de pouce. Petit à petit, les choses se sont améliorées. Aujourd'hui, j'ai quatre employés marocains. »
Diyaa, 37 ans, a choisi d'employer des Marocains qu'il considère comme des « frères ». « J'ai toujours eu confiance dans les Marocains, » dit-il. « Maintenant que j'en emploie, ça me rassure de travailler avec eux la main dans la main. »
Plus de six ans de combats ont déplacé plus de 6 millions de personnes en Syrie et contraint plus de 5 millions de syriens à fuir à l'étranger. La plupart ont cherché refuge en Turquie, au Liban, en Jordanie et ailleurs tandis que le Maroc a accueilli environ 3500 déracinés syriens.
En janvier 2016, Diyaa a remporté le prix de l'Association marocaine d'appui à la promotion de la petite entreprise (AMAPPE) en reconnaissance des efforts qu'il a engagés en tant que réfugié pour contribuer à l'avancement de son pays d'accueil.
D'abord hésitant, il a déclaré en recevant le prix : « Je ne m'attendais pas à recevoir un prix. Je suis venu au Maroc les poches vides. Ce n'est pas de zéro que je suis parti, mais de moins cent. »
Il ajoute : « contre toute attente, ce prix vient couronner mes efforts et mon dur labeur. Grâce à mon travail, ma famille et moi-même avons pu progresser et retrouver un peu d'objectivité dans notre existence. Chaque fois que j'ai eu des difficultés, je me suis dit de ne jamais baisser les bras, de continuer d'avancer la tête haute et de me relever chaque fois que je tombais. Finalement, c'est le bien-être de ma famille qui m'a motivé à continuer d’aller de l'avant.
Lors de son évaluation, l'AMAPPE a constaté non seulement que Diyaa employait de jeunes marocains issus d'un quartier pauvre, mais qu'il aidait aussi des Syriens à établir un autre atelier de cordonnerie non loin de là.
« L'un des éléments de la vision d'AMAPPE est de promouvoir des projets collectifs parce qu'ils ont un bon potentiel de viabilité, » explique Mohammed Anwar, conseiller de l'AMAPPE pour l'entreprenariat et la coopération.
« On n'est jamais aussi bien que chez soi. »
« Nous avons vraiment été convaincus par l'esprit d'entreprise de Diyaa et c'est un modèle que nous pourrons institutionnaliser et reproduire avec de nouveaux bénéficiaires. »
Diyaa et son épouse, qui l’a suivi au Maroc depuis la Syrie, ont deux enfants, un garçon de quatre ans et une fille de cinq ans. Les deux enfants fréquentent une école privée marocaine à Casablanca. Diyaa a décidé de ne pas aller en Europe car, dit-il, « les Marocains sont très hospitaliers et accueillent les Syriens dans leur pays les bras ouverts. » Malgré tout, il aimerait rentrer en Syrie quand les choses s'amélioreront. « On n'est jamais aussi bien que chez soi, » dit-il dans un soupir.
Avant, Diyaa n'avait pas de voiture et son petit revenu ne lui permettait pas grand-chose. Aujourd'hui, il trouve le Maroc confortable. Il peut subvenir aux besoins de sa famille et loue un appartement plus proche de son travail.
Durant les dernières années, des milliers de réfugiés syriens ont trouvé au Maroc un refuge, mais également un peu de répit. « Les gens ici ne nous considèrent pas comme des réfugiés, mais comme des êtres humains, » dit Diyaa installé à son étal au marché de Casablanca. « Je n'ai plus le sentiment d'être un étranger, je suis heureux parmi les Marocains. »