Le manque critique de financement compromet gravement le rapatriement de milliers de réfugiés burundais
Le manque critique de financement compromet gravement le rapatriement de milliers de réfugiés burundais
GENEVE, 28 octobre (UNHCR) - L'UNHCR a signalé vendredi qu'elle devra bientôt réduire, voire suspendre, sa plus grande opération de rapatriement en Afrique, à moins de recevoir d'urgence les fonds sollicités pour aider des centaines de milliers de réfugiés burundais à rentrer chez eux. L'agence a aussi indiqué que, faute de fonds, elle devra également suspendre son soutien pour les activités de réintégration au Burundi.
Depuis 2001, avec l'aide de l'agence pour les réfugiés, quelque 285 000 Burundais sont rentrés chez eux, dont 58 000 depuis le début de 2005. C'est la plus grande opération de rapatriement volontaire menée par l'UNHCR à travers le monde après l'Afghanistan. Néanmoins, il y a toujours au moins 400 000 réfugiés burundais en Tanzanie voisine ; beaucoup d'entre eux souhaiteraient rentrer chez eux.
« Ce serait vraiment tragique de ne plus pouvoir aider les réfugiés burundais à réaliser leur rêve de retour à cause d'un manque de fonds », a dit vendredi à Genève le Haut Commissaire adjoint Wendy Chamberlin. « Ce serait très pénible pour le personnel de l'UNHCR de décevoir tant de réfugiés, et, dans les prochains jours, nous allons faire tout ce que nous pouvons pour que la communauté internationale entende notre appel et en comprenne l'enjeu. »
Sur les 62 millions de dollars US que l'UNHCR a demandés d'urgence pour financer cette opération de rapatriement volontaire au Burundi en 2005, seuls 29 millions ont été reçus, soit un manque d'environ 52 %. L'UNHCR utilise actuellement les fonds d'urgence puisés sur sa réserve opérationnelle de façon à poursuivre ses activités. Cependant, l'agence avertit qu'elle ne pourra utiliser ces fonds que pendant quelques semaines tout au plus. La réserve opérationnelle est de plus considérablement diminuée par l'aide fournie au Pakistan suite au tremblement de terre, et elle doit être renflouée pour pouvoir réagir si d'autres catastrophes venaient à se produire.
« Cette crise de financement ne pourrait pas arriver à un pire moment pour le déroulement de l'opération et pour la région », a ajouté Wendy Chamberlin. « Elle arrive juste quand le Burundi retrouve paix et sécurité et s'attaque à l'énorme tâche de la reconstruction et de la stabilisation. »
L'élection du Président Pierre Nkurunziza en août 2005 a traduit dans les faits la transition politique entamée au Burundi avec les accords de paix d'Arusha en 2001, dans lesquels Nelson Mandela joua un rôle capital.
L'élection de Pierre Nkurunziza a été accompagnée d'une augmentation remarquable du nombre de réfugiés rapatriés. Depuis août, entre 12 000 et 15 000 personnes ont été rapatriées chaque mois, la plupart depuis la Tanzanie voisine, où elles avaient fui les violences qui ont déchiré le Burundi au milieu et à la fin des années 90. Quelques réfugiés burundais s'y trouvent même depuis le début des années 70, après avoir fui une précédente vague de violences.
Le nouveau gouvernement burundais doit faire face à d'immenses défis dans ses efforts pour assurer une paix durable : la reconstruction des maisons et des infrastructures, la création de systèmes de santé et d'éducation, ainsi que la réintégration de centaines de milliers de réfugiés rapatriés et de personnes déplacées internes.
Cette année, l'UNHCR a prévu de construire quelque 23 000 maisons, 48 écoles, avec un total de 245 salles de classe et 14 centres de santé.
« A cause du manque de fonds, nous avons dû revoir nos objectifs et nous limiter à 43 écoles et 11 centres de santé, mais si la crise financière actuelle persiste, nous devrons stopper nos programmes de construction » a déclaré le porte-parole principal de l'UNHCR, Ron Redmond. « Les programmes d'activités génératrices de revenus et de formation professionnelle dont bénéficient quelque 10 000 personnes seront également suspendus. »
Malgré les nombreux retours vers le Burundi ces dernières années, la Tanzanie accueille toujours à elle seule plus de 400 000 réfugiés burundais, ainsi que 150 000 réfugiés congolais. La plupart des réfugiés burundais vivent dans de grands camps à l'Ouest du pays et ont dû faire face à de nombreuses reprises au manque de nourriture. Cette année, l'UNHCR et le Programme alimentaire mondial ont déjà lancé un appel urgent aux fonds pour éviter de devoir diminuer une nouvelle fois les rations alimentaires.
« Au vu de la situation, devoir annoncer une suspension de ce rapatriement volontaire à cause d'un financement insuffisant pourrait faire naître de sérieuses questions sur l'engagement de la communauté internationale à partager les responsabilités de l'assistance envers les réfugiés », a souligné Ron Redmond. « La Tanzanie se trouvant elle-même en pleine période électorale, cela pourrait envoyer un message négatif dans une période particulièrement sensible pour un pays qui montre depuis longtemps une très grande générosité envers les réfugiés. »