Des réfugiés accueillent à leur tour des déplacés sud-soudanais
Des réfugiés accueillent à leur tour des déplacés sud-soudanais
INSTALLATION DE GOROM, Soudan du Sud, 30 janvier (HCR) - Ce ne sont pas toutes les familles qui pourraient accueillir chez elles 16 invités du jour au lendemain. C'est ce que vient de faire le réfugié éthiopien Mengistu avec son oncle - un ressortissant sud-soudanais - qui était déplacé par la violence déchirant son pays.
Mengistu, âgé de 33 ans, avait trouvé refuge au Soudan du Sud en 2006. Un jour, le mois dernier, il a reçu un appel de son oncle, Akway, lui disant que lui, ses deux épouses et leurs 13 enfants avaient fui à pied Bor, leur ville d'origine, et qu'ils marchaient déjà depuis plus de deux jours. Les forces gouvernementales disent avoir désormais repris le contrôle de Bor aux forces d'opposition. Des reportages TV montrent que la ville a été rasée.
Akway, âgé de 48 ans, est infirmier en salle d'opération à l'hôpital. Il ne s'est pas attardé à Bor durant les affrontements. A l'éruption des premières violences au Soudan du Sud à la mi-décembre, il est allé chercher sa famille et ils ont fui.
« Nous habitions dans le meilleur endroit possible, mais nous avons fui », explique-t-il en anglais. « J'ai tout abandonné. Ces vêtements, je les ai reçus de quelqu'un », dit-il, en montrant le costume gris qu'il porte aujourd'hui dans l'installation de réfugiés. « Sur la route, mes épouses nourrissaient les enfants seulement avec des biscuits cassés que d'autres avaient laissé tomber dans la poussière quand ils fuyaient aussi. »
Peu après, les enfants, âgés entre trois et 20 ans, ont commencé à avoir des diarrhées, qu'il a soignées avec des racines trouvées le long de la route, en ayant recours à la médecine traditionnelle ainsi qu'à sa formation médicale. La distance depuis Bor vers Juba est de plus de 200 kilomètres. Avec des tirs tout autour d'eux, ses enfants qui pleuraient et ses épouses qui lui reprochaient la situation, il a finalement téléphoné à Mengistu après au moins deux nuits passées en plein air.
Mengistu est chauffeur et, ce qui est peu courant pour un réfugié dans cette région du monde, il est propriétaire d'une voiture à quatre roues motrices. Il l'a reçue en cadeau de la part d'un homme dont la vie avait été sauvée par le père de Mengistu, aujourd'hui décédé.
C'est dans cette voiture qu'il est allé chercher son oncle, Akway, et qu'il y a fait rentrer la famille toute entière pour les ramener vers son humble abri qu'il partage avec sa femme et leurs deux enfants à Gorom, une installation accueillant 2 400 réfugiés éthiopiens et localisée à 25 kilomètres de Juba, à l'ouest de la capitale du Soudan du Sud. Depuis l'éruption des combats à travers le pays, environ 500 Soudanais du Sud y ont également trouvé abri.
En se rappelant de la soirée où il a ramené la famille élargie de son oncle à la maison, Mengistu explique : « Quand ils sont arrivés, ils avaient peur mais nous leur avons dit, 'faisons confiance à Dieu, car notre Dieu est avec nous'. »
La famille de Mengistu est heureuse de partager ses rations alimentaires avec tous ses invités. « Le problème, c'est que nous n'avons pas assez de vivres », dit-il. « Nous les hébergeons depuis une semaine maintenant. Cette semaine, nous avons partagé la nourriture et, maintenant, nous n'avons plus de réserves. Je ne sais pas comment trouver une solution. »
Des employés du HCR pour les services communautaires se sont récemment rendus après de la famille pour évaluer leurs besoins afin qu'ils puissent continuer à accueillir la famille. Ils se sont également informés du bien-être de tous les réfugiés ainsi que des Sud-Soudanais qui ont trouvé refuge ici.
« Selon nos informations, ils ont fini les vivres qu'ils avaient avant la fin du mois car ils les ont partagés pour venir en aide aux nouveaux arrivants », explique Joyce Nduru, employée du HCR en charge des services communautaires.
Mengistu relève l'ironie de la situation avec des réfugiés hébergeant des citoyens de leur pays d'accueil où il a trouvé la protection ainsi que d'autres Ethiopiens. Mais il dit qu'il pourrait difficilement refuser d'accueillir ses proches sud-soudanais.
« Quand ils sont venus ici, nous ne les avons pas chassés », explique Mengistu. « Nous les acceptons, car nous ne faisons qu'un. Nous avons déjà vécu ce qui leur est arrivé. »
Par Kitty McKinsey à l'installation de Gorom, Soudan du Sud