Des flots de Zimbabwéens déterminés arrivent en Afrique du Sud
Des flots de Zimbabwéens déterminés arrivent en Afrique du Sud
POINT DE PASSAGE DU PONT BEIT, Afrique du Sud, 9 octobre (UNHCR) - Chaque jour, au crépuscule, une partie de cache-cache commence : des Zimbabwéens traversent le fleuve Limpopo, passent la clôture et se retrouvent en Afrique du Sud, où les autorités sud-africaines patrouillent le long de la frontière pour les intercepter et les expulser en quelques heures, par camions entiers.
En septembre, un mois comme les autres, quelque 7 300 Zimbabwéens ont été expulsés depuis la seule localité de Musina, la principale ville sud-africaine près du pont traversant le Limpopo vers le Zimbabwe. Chaque mois, plus de 20 000 Zimbabwéens accusés d'entrer illégalement en Afrique du Sud sont expulsés depuis toute l'Afrique du Sud - ces chiffres incluant probablement des personnes arrêtées plusieurs fois.
L'Afrique du Sud se trouve face à une situation complexe, avec une augmentation des chiffres à la fois de migrants économiques et de demandeurs d'asile provenant de nombreux pays d'Afrique. Environ un millier de personnes arrivent chaque mois en traversant le pont, le point de passage le plus fréquenté en Afrique du Sud, et demandent l'asile. Ces demandeurs d'asile - surtout originaires de République démocratique du Congo et de la Corne de l'Afrique - reçoivent des documents qui leur permettent de voyager jusqu'à Johannesburg, où ils peuvent présenter une demande formelle de statut de réfugié.
Lors des quatre derniers mois, toutefois, un seul Zimbabwéen a demandé l'asile aux autorités sud-africaines de l'immigration à la frontière. Plusieurs explications ont été avancées : les personnes sont peut-être réticentes à demander l'asile lorsqu'elles se trouvent si près du Zimbabwe, ou elles sont impatientes de rejoindre leur destination en Afrique du Sud. Elles peuvent aussi ne pas avoir l'opportunité de faire la demande car elle sont expulsées trop rapidement ou encore, elles ne souhaitent simplement pas assumer un statut impliquant qu'elles ne pourront pas visiter leur pays d'origine.
Un nombre considérable de Zimbabwéens présentent effectivement des demandes d'asile dans d'autres bureaux de réfugiés en Afrique du Sud - quelque 19 000 l'année dernière. Mais ces Zimbabwéens représentent un pourcentage relativement bas par rapport aux centaines de milliers qui arrivent dans le pays chaque année. Les personnes interceptées sont seulement une petite partie de tous les Zimbabwéens sans papiers qui rentrent illégalement en Afrique du Sud.
« La situation au Zimbabwe est complexe, tout comme les motifs invoqués par les personnes en fuite. Nous devons prendre en compte la dimension des droits de l'homme dans les récents développements au Zimbabwe. Certains Zimbabwéens demandent l'asile. Leur nombre est significatif en valeur absolue. Pour le moment, cependant, ils restent une proportion infime sur le très grand nombre de Zimbabwéens qui seraient actuellement hors de leur pays », a indiqué en août le Haut Commissaire pour les réfugiés António Guterres.
Les employés de l'agence des Nations Unies pour les réfugiés surveillent régulièrement les frontières du Zimbabwe - non seulement en Afrique du Sud mais aussi au Mozambique, au Botswana et en Zambie, des pays où se trouvent d'autres Zimbabwéens - pour voir comment les gens vivent et s'ils ont besoin de protection. Les pressions économiques sur les populations du Zimbabwe, où les magasins sont pratiquement vides, sont claires : le responsable du supermarché principal de Musina a indiqué que l'arrivée quotidienne de clients zimbabwéens a généré, ces derniers mois, des ventes proportionnelles à celles normalement observées durant la saison de préparation de Noël.
Les nouveaux arrivants zimbabwéens - principalement des hommes jeunes - indiquent qu'ils sont venus pour gagner de quoi subvenir aux besoins de leur famille qui est restée à la maison, où le chômage est estimé à 80 pour cent. Nombre d'entre eux rentrent au Zimbabwe régulièrement - ce qui ne leur est pas permis s'ils sont des réfugiés - et le nombre de Zimbabwéens interceptés augmente en début d'année car ils rentrent pour passer des vacances dans leur famille.
Il y a clairement une crise humanitaire lorsque tant de gens se sentent obligés de fuir leur pays. Même si le premier objectif de l'UNHCR est d'assurer que ceux qui ont besoin de protection après avoir subi la persécution ont accès au système d'asile, l'agence a encouragé les organisations d'aide aux Zimbabwéens dans le besoin arrivant en Afrique du Sud à leur fournir une assistance humanitaire.
L'UNHCR travaille aussi avec le Gouvernement sud-africain pour accélérer la gestion des demandes de statut de réfugiés, un problème de capacité qui a affecté tous les demandeurs d'asile. Avec environ 140 000 demandes de citoyens originaires d'un grand nombre de pays toujours en attente d'une décision, le ministère de l'intérieur sud-africain est en train d'embaucher de nouveaux employés et améliore les procédures. Heureusement, les document d'identité temporaires et renouvelables distribués à tous les demandeurs d'asile par le gouvernement permettent de rester en Afrique du Sud tant qu'ils attendent une décision.
Le nombre de gens qui souhaitent traverser les eaux dangereuses du Limporo - la saison des pluies qui vient de commencer accroît la menace des crocodiles - indique l'ampleur du problème auquel font face les Zimbabwéens. Le flux de migrants venant du Zimbabwe se terminera lorsqu'il y aura un regain économique et une stabilité sociale.
Sur l'autoroute nationale N1 allant vers le sud depuis le pont appelé du nom du magnat des mines, Alfred Beit, vers le coeur industriel de l'Afrique du Sud aux alentours de Johannesbourg, la police intercepte des Zimbabwéens qui ont échappé aux premiers points de surveillance situés près de la frontière. Mais les autorités admettent volontiers que ceux qu'ils ramènent vers le Zimbabwe le matin traversent probablement la frontière à nouveau dès la tombée de la nuit.
Par Jack Redden, au point de passage frontière de pont Beit, Afrique du Sud