Le nombre de réfugiés est à son niveau le plus bas depuis 25 ans mais de nouveaux défis se dessinent, annonce le HCR
Le nombre de réfugiés est à son niveau le plus bas depuis 25 ans mais de nouveaux défis se dessinent, annonce le HCR
LONDRES, 19 avril (UNHCR) - Le nombre de réfugiés dans le monde a atteint son niveau le plus bas depuis 25 ans mais le système international gérant les déplacements humains traverse une période critique du fait des nouveaux défis auxquels il est confronté, selon un rapport publié mercredi par l'agence des Nations Unies pour les réfugiés.
« Les réfugiés dans le monde : les déplacements humains au cours du nouveau millénaire » (Oxford University Press) a été lancé à Londres par le Haut Commissaire pour les réfugiés António Guterres et le Secrétaire d'Etat britannique au développement international Hilary Benn.
Cette publication examine l'évolution du déplacement au cours des cinq dernières années. Bien que le nombre de réfugiés - 9,2 millions - soit à son niveau le plus bas depuis un quart de siècle, ce livre explique que le système international gérant les déplacements humains traverse une période cruciale dans un monde de plus en plus globalisé. Parmi les défis auxquels il doit faire face figurent le sort de dizaines de millions de personnes déplacées internes, la confusion généralisée entre migrants et réfugiés, des politiques d'asile de plus en plus restrictives et l'intolérance croissante.
Dans la préface de l'ouvrage, António Guterres remarque que les conflits interétatiques sont aujourd'hui moins fréquents que les conflits internes et la guerre civile. Il en résulte que les réfugiés traversant une frontière internationale sont moins nombreux mais que davantage de personnes sont déplacées à l'intérieur de leur propre pays. Bien que les quelque 25 millions de déplacés internes ne tombent pas sous le champ d'application de la Convention de 1951 sur les réfugiés, ils ont néanmoins un besoin urgent d'aide.
« Les personnes qui chercheraient refuge dans des pays voisins sont plus fréquemment obligées de rester dans les frontières de leur propre pays, le plus souvent dans des conditions similaires à celles des réfugiés », écrit António Guterres. Selon le Haut Commissaire, le déplacement interne est le « plus grand échec » de la communauté internationale dans le domaine de l'action humanitaire. « Deux conflits très longs en Afrique - en République démocratique du Congo et au Soudan - sont responsables, à eux seuls, du déplacement interne d'environ 7,5 millions de personnes en 2005. »
Le livre remarque cependant que les Nations Unies ont fait de notables efforts pour aider les déplacés internes, ce qui inclut la décision prise par l'ONU l'année dernière de répartir les responsabilités par secteur entre agences spécifiques.
« Le rôle dévolu à l'UNHCR dans cette nouvelle division du travail est essentiel car il est centré sur la protection, domaine où les lacunes sont les plus importantes », précise le livre. « En effet, après 55 ans d'existence, l'UNHCR traverse une période cruciale de son histoire, l'agence ayant accepté de développer son rôle de manière substantielle pour englober les personnes déplacées. Pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, un régime général est en cours d'élaboration pour répondre aux besoins des migrants forcés de se déplacer d'un côté ou de l'autre d'une frontière. »
Hilary Benn, qui s'était joint au Haut Commissaire à l'occasion du lancement du livre, a remarqué que la tâche de protection des réfugiés incombant aux employés de l'UNHCR les exposait parfois au danger. Il a salué le dévouement du personnel de l'agence humanitaire et a rendu hommage à Nabil Bahjat Abdulla, tué le mois dernier au Sud-Soudan, et aux 21 autres membres de l'UNHCR ayant péri dans l'exercice de leurs fonctions depuis 1990.
« La sécurité des réfugiés et du personnel humanitaire est l'un des défis auquel est confronté l'UNHCR. Il y a encore quelques années, appartenir aux Nations Unies offrait une sorte de protection. Désormais nous sommes des cibles », a ajouté le Haut Commissaire.
Des millions de réfugiés et de demandeurs d'asile ont quand même pu, ces cinq dernières années, bénéficier de la protection internationale et de diverses solutions telles que le rapatriement, l'intégration dans leur pays de premier asile ou la réinstallation dans un pays tiers. Plus de quatre millions de réfugiés sont ainsi rentrés en Afghanistan et des centaines de milliers d'autres en Angola, en Sierra Leone, au Burundi et au Libéria. Le Sud-Soudan, qui lutte pour renaître après deux décennies de guerre civile, pourrait assister au retour de plus de quatre millions de déplacés internes et de réfugiés pendant les prochaines années.
S'assurer que ces personnes puissent rentrer chez elles et y rester nécessite une attention durable de la communauté internationale, de la phase du retour à celle de la reconstruction et du développement sur le long-terme. Dans ce processus, il est essentiel de combler toute lacune afin d'éviter que ces Etats ne tombent à nouveau dans un cycle de violence et de déplacement. Le développement joue un rôle vital pour permettre à la paix et au renouveau économique de s'enraciner.
Ce livre se penche aussi sur le sort des millions de réfugiés pour lesquels aucune solution n'est en vue. Il précise qu'il existe au moins 33 situations de réfugiés prolongées impliquant des groupes d'au moins 25 000 personnes vivant en exil depuis au minimum cinq ans. Au total, ils représentent 5,7 des 9,2 millions de réfugiés dans le monde.
« Aujourd'hui, la majorité des réfugiés vivent en exil depuis bien trop longtemps, confinés dans des camps ou menant une existence difficile dans des centres urbains dans les pays en développement », indique la publication. « La plupart d'entre eux sont tombés dans l'oubli ... »
Dans ses remarques prononcées à l'occasion du lancement du livre mercredi, António Guterres a indiqué que le lien entre asile et migration était l'un des plus importants défis auxquels était aujourd'hui confronté l'UNHCR.
« Au cours des dernières années, les problèmes d'asile et la protection des réfugiés sont devenus étroitement liés à la question de la migration internationale, et en particulier de la migration clandestine », a-t-il ajouté. « Dissocier les deux nécessite des interventions de protection au moment adéquat pour identifier les personnes dont les besoins sont fondés. »
« L'UNHCR ne prévoit pas de devenir une agence pour la migration. Mais, la migration requiert notre attention - nous devons être vigilants quant à ses effets sur le droit d'asile. L'UNHCR reconnaît que le contrôle des frontières et la gestion des migrations sont des prérogatives étatiques. Toutefois, ces mesures ne devraient pas exclure le droit, pour ceux qui ont un réel besoin, d'accéder à des mécanismes appropriés, en accord avec le droit international. »
Le nombre de migrants internationaux est évalué à plus de 175 millions de personnes, les demandeurs d'asile et les réfugiés ne représentant qu'une toute petite portion de cet ensemble, indique le livre. Mais la distinction entre réfugiés, demandeurs d'asile et migrants s'est effacée et toutes ces catégories sont désormais dépeintes sous un jour négatif par certains médias et hommes politiques.
« Dans l'opinion publique, un flou s'est installé entre la migration clandestine, les problèmes de sécurité et les questions liées à l'asile et aux réfugiés », indique le Haut Commissaire. « Cela démontre l'importance de combattre l'intolérance et de remettre en question l'idée selon laquelle les réfugiés et les demandeurs d'asile sont des causes d'insécurité, au lieu d'en être les victimes. »
L'UNHCR, qui a reçu à deux reprises le prix Nobel de la paix, s'occupe de quelque 19 millions de réfugiés et autres personnes relevant de sa compétence - y compris plus de 5,5 millions de personnes déplacées - dans plus de 116 pays.