La situation globale des réfugiés évolue rapidement et nécessite de nouvelles approches
La situation globale des réfugiés évolue rapidement et nécessite de nouvelles approches
GENÈVE, 8 décembre (HCR) - Le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, António Guterres, a lancé un avertissement mercredi sur les lacunes grandissantes dans le cadre mondial de la protection de millions de personnes déracinées et apatrides à travers le monde, et il a appelé la communauté internationale à s'y adapter et à y répondre d'urgence.
Dans une allocution prononcée à Genève devant des délégués gouvernementaux et d'autres personnalités à l'occasion du Dialogue du Haut Commissaire, un rassemblement majeur se déroulant chaque année sur les politiques relatives au déplacement, António Guterres a déclaré que les certitudes héritées de la Deuxième guerre mondiale et de la Guerre froide ne suffisaient plus à assurer que toute personne ayant un besoin en matière de protection internationale en bénéficie.
« Les défis d'aujourd'hui sont interconnectés et complexes », a indiqué António Guterres. « L'accroissement démographique, l'urbanisation, le changement climatique, la rareté des ressources en eau ainsi que l'insécurité alimentaire et énergétique exacerbent un conflit et se rapprochent sur des modes nouveaux obligeant des personnes à fuir leurs pays. »
António Guterres, qui s'exprimait quelques jours avant le 60e anniversaire du HCR le 14 décembre prochain, a identifié trois domaines exigeant une attention particulière pour l'année prochaine et au-delà : « les lacunes en matière de protection » dans le système international pour la protection des personnes déracinées ; la charge disproportionnée incombant aux pays pauvres dans la responsabilité d'assurer une aide aux réfugiés ; et, les manquements de nombreux Etats pour réduire les cas d'apatridie - un fléau privant, à travers le monde, des millions de personnes de la nationalité et d'autres droits humains.
Concernant les lacunes en matière de protection, António Guterres a affirmé que celles-ci découlaient de l'inadéquation des modalités de mise en oeuvre des traités existants, du nombre insuffisant d'adhésions aux instruments internationaux pertinents ainsi que de lacunes dans le cadre applicable en matière de protection internationale.
António Guterres a également souligné la nécessité d'agir pour répondre à la liste de plus en plus longue des problèmes sur le déplacement pour lesquels aucune solution concertée d'envergure internationale n'existe actuellement. Ces problèmes concernent notamment les catastrophes naturelles, le changement climatique, les crises économiques et autres désastres causés par l'homme, les victimes de violences des gangs et la vulnérabilité naissant de l'incertitude des situations post-conflit.
Au sujet du partage de la charge, le Haut Commissaire a réitéré son appel lancé en octobre sur une « nouvelle entente » s'inscrivant dans une perspective selon laquelle les pays les plus exposés à l'arrivée de demandeurs d'asile depuis des Etats voisins ne restent pas isolés dans la gestion d'un déplacement. Actuellement, ce sont des pays en développement qui accueillent environ 80 % des réfugiés dans le monde.
António Guterres a indiqué que des modèles pour l'amélioration du partage de la charge existaient déjà, et il a souligné les efforts menés au niveau régional en Amérique latine et en Asie, notamment en Amérique du Sud avec l'initiative des « villes solidaires » qui favorise l'autosuffisance pour les réfugiés, ou une autre initiative intitulée « les frontières de la solidarité » et destinée à assurer que les situations d'afflux massif ne portent pas préjudice aux intérêts de la population d'accueil ainsi qu'en Asie, avec le processus de Bali visant à favoriser une approche élargie pour répondre aux mouvements complexes de populations et de réfugiés.
Sur l'apatridie, António Guterres a indiqué que la priorité absolue était d'encourager davantage de pays à adhérer, et à mettre en oeuvre, les deux principales conventions relatives à l'apatridie. Après un demi-siècle voire davantage depuis leur création, la Convention de 1954 relative au statut des apatrides ne compte que 65 Etats contractants, alors que la Convention de 1961 sur la réduction des cas d'apatridie en compte tout juste 37.
« L'absence de nationalité constitue déjà, en elle-même, la privation d'un droit humain fondamental », a indiqué António Guterres. « Par conséquent, l'accès des personnes ne pouvant exercer ce droit est inévitablement entravé à un large éventail d'autres droits. Il est possible qu'elles ne puissent pas travailler légalement ou voyager. Elles peuvent par ailleurs ne pas accéder aux soins de santé ou obtenir une éducation pour elles-mêmes ou leurs enfants. »
António Guterres a indiqué que le HCR souhaite que les Etats travaillent conjointement sur ce problème en 2011 pour des avancées concrètes dans tous ces domaines, et ce dans l'objectif d'une réunion ministérielle sur la protection internationale proposée en décembre l'année prochaine. Ces progrès pourraient notamment inclure des annonces d'adhésion aux conventions ou la levée de réserves, l'adoption de législations visant à améliorer la mise en oeuvre des conventions au niveau national, l'aide à la résolution de situations prolongées en matière de déplacement ou d'apatridie ainsi que la collaboration avec d'autres Etats pour répondre à des défis rencontrés à l'échelle régionale.
Par Adrian Edwards à Genève