Les déplacés centrafricains attendent que la vie reprenne son cours
Les déplacés centrafricains attendent que la vie reprenne son cours
Les installations de déplacés dénommées « Élevage » et « Alternatif » dans la ville de Bambari semblent, à première vue, relativement normales. Mais la vie de leurs résidents a été vidée de son sens.
Ils font partie de l'importante population de quelque 600 000 personnes déplacées en République centrafricaine (RCA).
« Tout ça a été un désastre », affirme Rose Yazoro, ou « Mama Rose », aux habitant du site Alternatif pour personnes déplacées. Elle est mère de 13 enfants et grand-mère de 27 petits-enfants.
« Le conflit, la violence, c'était épouvantable », dit-elle. En 2014, le conflit armé l'a chassée, elle et sa famille, de leur foyer.
« Ils ont tué deux de mes enfants », raconte-t-elle, ajoutant que du bétail a également été tué lors d'attaques.
Beaucoup des personnes attaquées étaient des bergers peuls. Les sites de Bambari sont devenus leurs refuges. Maintenant, ceux-ci sont comme des lieux hors du temps, où la vie avance au ralenti. Les gens passent leurs journées à attendre. Il y a peu de travail. Des abris et de la nourriture ont été fournis, en partie par le HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, et d'autres partenaires des Nations Unies.
« Ma vie ressemble à celle d’un prisonnier. Il n'y a pas de travail. On attend, c'est tout. »
Les personnes déplacées à Bambari, réparties dans sept sites, sont au nombre de 36 000. La bonne nouvelle, c'est que leur nombre a diminué par rapport aux 50 000 d'il y a deux ans. La paix n'est plus une perspective lointaine, c'est une réalité qui se met en place jour après jour. Certains ont pris acte de cette réalité et sont retournés dans leurs foyers, qu’ils avaient dû abandonner.
Au cours de sa visite lundi dernier, le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Filippo Grandi, accompagné par la ministre centrafricaine de l'Action humanitaire et de la Réconciliation nationale, Virginie Baïkoua, a rencontré des réfugiés de retour au pays. Mardi, ils ont rencontré et écouté des déplacés internes de différentes communautés.
L’ambiance était festive, avec des enfants qui brandissaient des drapeaux et un groupe d'hommes qui dansaient et jouaient de la musique avec des cornes de vache.
Hamadou Gada, un éleveur peul de 50 ans qui a perdu son bétail, a résumé la frustration des résidents avant les que les rencontres plus formelles ne débutent.
« Ma vie ressemble à celle d’un prisonnier. Il n'y a pas de travail. Nous attendons », a-t-il dit.
Les rencontres organisées ont permis à d'autres frustrations d’être exprimées. Avec le peu de moyens dont ils disposent, les familles ont du mal à acheter des médicaments pour leurs malades. Le coût de l'envoi des enfants dans des écoles payantes est un autre problème. La plus grande difficulté, ont-ils dit, est d'entreprendre les démarches pour retourner dans leurs zones d’origine. Ils disent avoir besoin de l'aide du gouvernement pour reconstruire leurs maisons et reconstituer leurs troupeaux.
Filippo Grandi leur a dit qu'il avait bien reçu leur message.
« En plus de l'aide humanitaire fournie », a-t-il dit, « je me suis engagé avec le gouvernement à mobiliser autant de ressources que possible pour relever ce défi. »
Le commentaire a été accueilli par une salve d'applaudissements.
« Pas de paix sans retour. Pas de retour sans paix. »
Le Haut Commissaire a également souligné la nécessité d'une meilleure protection des femmes.
« Alors que nous passons progressivement d’une phase d’aide humanitaire d’urgence à la reconstruction de la vie de ces personnes dans leurs foyers, une attention particulière doit être accordée aux femmes pour les éloigner de la pauvreté et limiter leur exposition à l'exploitation et à la violence », a-t-il déclaré.
Mais Filippo Grandi a aussi encouragé les communautés à vivre ensemble. Les troubles civils qui ont éclaté en 2013 ont déplacé plus d'un quart de la population et contribué aux tensions entre les deux communautés.
Il a conclu par un message d'espoir prudent.
« Il n'y aura pas de paix sans le retour d'une grande partie de la population déplacée, mais il n'y aura pas de retour sans paix. »
Le message, bien que nuancé, avait malgré tout quelque chose d’attrayant pour Mama Rose.
« Rentrez chez nous. Bien sûr, si nous pouvions obtenir de l'aide », dit-elle. « Je serais prête à y aller aujourd'hui même si nous en recevions. »