Rapatriement librement consenti - RAPPORT DE LA TABLE RONDE SUR LE RAPATRIEMENT LIBREMENT CONSENTI
Rapatriement librement consenti - RAPPORT DE LA TABLE RONDE SUR LE RAPATRIEMENT LIBREMENT CONSENTI
EC/SCP/41
1. La question du rapatriement librement consenti a été examinée pour la première fois par le Sous-Comité plénier sur la protection internationale à la trente et unième session du Comité exécutif. Depuis, la communauté internationale s'est de plus en plus intéressée au rapatriement librement consenti en tant que solution aux problèmes des réfugiés et, à sa trente-quatrième session, le Comité exécutif a demandé au Haut Commissaire de poursuivre ses efforts pour trouver des solutions durables à ces problèmes, en particulier par le rapatriement librement consenti qui a été jugé être la solution durable la plus souhaitable, quand les circonstances la rendaient possible.
2. Par la suite, le Haut Commissaire a examiné la question avec un certain nombre de gouvernements et, en consultation avec le Président du Comité exécutif, il a pris des dispositions pour qu'une Table Ronde sur le rapatriement librement consenti ait lieu à San Remo (Italie) du 16 au 19 juillet 1985. La Table Ronde, qui a été convoquée par le HCR et organisée en collaboration avec l'Institut international de droit humanitaire à San Remo, a regroupé des experts des questions de réfugiés représentant toutes les régions du monde.
3. Les participants à la Table Ronde ont examiné une vaste étude de la question, établie par un expert à la demande du HCR. Le rapport de la Table Ronde, avec les conclusions qui y ont été adoptées, est reproduit ci-après à l'intention du Comité exécutif pour examen et, éventuellement, suite à donner.
ANNEXE : RAPPORT DE LA TABLE RONDE SUR LE RAPATRIEMENT LIBREMENT CONSENTI San Remo (Italie), 16-19 juillet 1985
1. Une Table Ronde sur le rapatriement librement consenti, convoquée par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en coopération avec l'Institut international de droit humanitaire, a eu lieu à San Remo du 16 au 19 juillet 1985. Elle devait permettre de présenter des observations et des conclusions sur le rapatriement librement consenti au Comité exécutif du Programme du Haut Commissaire.
2. Ont participé à la Table Ronde des ministres de différents pays, des juristes et des fonctionnaires gouvernementaux ainsi que des représentants d'organisations intergouvernementales spécialisées dans les problèmes des réfugiés. Les participants ont assisté à la Table Ronde à titre individuel, le débat ayant gardé un caractère informel et impersonnel.
3. Le présent rapport renferme les observations formulées à la Table Ronde ainsi que les conclusions de tous les participants.
4. Le Président de l'Institut, M. J. Patrnogic, a présidé la Table Ronde et le Directeur de la protection internationale du HCR, M. Michel Moussalli, a prononcé l'allocution d'ouverture.
5. Les participants ont examiné un document d'information établi pour la Table Ronde par M. G.J.L. Coles, qui a assumé les fonctions de rapporteur.
6. On trouvera ci-joint la liste des participants.
7. Les participants à la Table Ronde ont réaffirmé que le rapatriement librement consenti était en principe la meilleure solution à tout problème de réfugiés et qu'il était souhaitable et opportun d'en souligner l'importance et de développer la coopération internationale pour la promouvoir.
8. Les participants ont estimé que le bien-être de l'homme devait être le point de départ de la conception internationale du rapatriement librement consenti. Pour la protection du bien-être de l'homme, il était essentiel d'assurer le respect de l'appartenance qui est une réalité.
9. Insister sur l'importance du rapatriement librement consenti ne revenait en aucune manière à affaiblir l'idée fondamentale qu'il ne fallait pas forcer les réfugiés à regagner leur pays contre leur volonté. Quand on insiste sur les grandes considérations de droits de l'homme qui s'appliquent à la situation des réfugiés dans son ensemble, on ne peut que souligner l'importance du principe du non-refoulement.
10. De l'avis des participants, insister sur cette importance n'équivalait pas non plus à nier la nécessité dans certains cas d'installer les réfugiés dans un autre pays. C'était seulement affirmer que le retour dans le pays était normalement la meilleure solution et qu'il fallait faire le maximum pour la mettre en oeuvre. Les participants ont estimé que la coopération et la solidarité internationales devaient être axées avant tout sur la solution du retour.
11. On s'est accordé à reconnaître que le refus injustifié de satisfaire le besoin d'appartenance d'un individu, d'un groupe ou d'un peuple, par l'expulsion ou l'exil, la privation de la nationalité ou de la citoyenneté, l'interdiction du retour dans le pays ou l'existence provoquée ou autorisée de conditions qui empêchaient ce retour, causait de graves torts aux intéressés. En effet, presque tous les droits de l'homme s'en trouvaient forcément déniés.
12. Les participants ont affirmé l'existence et l'importance du droit fondamental de chacun de retourner de son plein gré dans son pays d'origine.
13. Les participants ont estimé que pour placer le problème des réfugiés clans une perspective globale et équilibrée, il fallait tenir compte de tous les aspects du problème, y compris les causes et les solutions, ainsi que des aspects intermédiaires que sont la protection et l'assistance. Les causes constituent un aspect essentiel de la solution, tout comme des aspects intermédiaires : aussi les efforts internationaux doivent-ils être axés sur l'élimination des causes des mouvements de réfugiés.
14. On a avancé l'idée qu'en séparant effectivement les causes de la solution pour définir l'action à entreprendre, la communauté internationale avait été amenée dans le passé à accorder une trop grande importance à l'installation à l'extérieur et à n'en pas accorder assez à la situation dans le pays d'origine et à la responsabilité de ce pays, ou d'autres pays par rapport à ce dernier.
15. On a déclaré que les causes des mouvements de réfugiés devraient être examinées plus à fond, à un niveau international informel, par une réunion d'experts. Il importait tout particulièrement de tenir compte des vues des pays d'origine pour préparer cet examen.
16. On a estimé qu'il faudrait aussi procéder à un examen plus poussé, au même niveau informel, des aspects tenant à la prévention, compte tenu en particulier des possibilités d'action internationale concertée et des moyens d'améliorer les efforts que la communauté internationale fait actuellement dans ce domaine, à l'échelle mondiale ou régionale.
17. Les participants ont estimé que, dans son action globale internationale face au problème des réfugiés, la communauté internationale devrait tenir compte de tout l'éventail des droits de l'homme et des autres considérations pertinentes, afin de garantir le caractère à la fois humain et équilibré de cette action. Toute conception de la solution du rapatriement librement consenti faisait intervenir, outre la volonté du réfugié, un élément fondamental qui était la situation dans le pays d'origine. Si les conditions dans ce pays changeaient pour le mieux, le retour spontané se produirait normalement.
18. Les participants ont souligné que la communauté internationale devrait confirmer les responsabilités qui incombent aux Etats à l'égard de leurs nationaux et les obligations qu'ont les autres Etats de promouvoir le rapatriement librement consenti. L'action internationale en faveur du rapatriement librement consenti, au niveau mondial ou régional, devrait bénéficier du plein appui et de l'entière coopération de tous les Etats directement intéressés, selon qu'il conviendrait. On s'est accordé à reconnaître que la prévention des mouvements de réfugiés et la promotion du rapatriement librement consenti en tant que solution aux problèmes des réfugiés étaient subordonnées à une condition, à savoir que les Etats directement intéressés aient la volonté politique suffisante de s'attaquer à des problèmes tels que le respect des droits de l'homme, le non-recours à la force, le règlement pacifique des différends et le développement économique et social. C'était là une responsabilité qui incombait avant tout aux Etats.
19. Il y avait une autre condition essentielle à l'efficacité de l'action internationale visant à promouvoir le rapatriement librement consenti : c'était l'arrêt de l'érosion de multilatéralisme, associé à une évolution vers un plus grand sens de la solidarité et de la coopération internationales pour la promotion de la paix, de la justice et du développement dans le monde entier.
20. On a appelé l'attention sur les travaux du Groupe d'experts gouvernementaux sur la coopération internationale en vue d'éviter de nouveaux courants de réfugiés, en particulier sur l'alinéa viii) des recommandations provisoires du Groupe, dans lequel il était fait état du droit qu'ont les réfugiés de retourner dans leurs foyers de leur plein gré et en toute sécurité. De l'avis des participants à la Table Ronde, il conviendrait de reconnaître expressément dans cet alinéa la compétence et l'expérience du HCR dans le domaine de la promotion du rapatriement librement consenti. On a aussi émis l'idée que le Groupe d'experts gouvernementaux devrait demander au HCR, selon qu'il conviendrait, de faire part de ses vues, en particulier sur la question des conditions à créer aux fins du rapatriement librement consenti.
21. Les participants à la Table Ronde ont souligné que l'organisme des Nations Unies qui avait pour mandat précis de trouver une solution permanente au problème des réfugiés était le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, qui était aussi le principal organisme des Nations Unies dans le domaine du rapatriement librement consenti.
22. A propos de l'action à lancer pour promouvoir la solution du rapatriement librement consenti, les participants ont estimé que le Haut Commissaire était bien placé, conformément à son mandat, pour favoriser cette solution.
23. Les participants ont été d'avis que le Haut Commissaire était aussi bien placé, conformément à son mandat, pour promouvoir le dialogue entre les principales parties en présence, y compris les réfugiés. Le Haut Commissaire pourrait faciliter les consultations entre les parties, servir d'intermédiaire ou de pôle de communication. Il importait que le Haut Commissaire établisse autant que possible des contacts avec les principales parties et s'informe de leurs points de vue. Il devrait en particulier se renseigner sur les désirs des réfugiés eux-mêmes. Toutes les parties devraient reconnaître et respecter les préoccupations humanitaires du Haut Commissaire en qui ils devraient placer leur confiance quand il s'emploie à s'acquitter de ses tâches humanitaires.
24. De l'avis des participants à la Table Ronde, quand le Haut Commissaire avait à traiter avec une entité du pays d'origine, il ne devait pas être indûment gêné par le statut officiel de cette entité, Si son souci pour le bien-être fondamental de ceux qui relèvent de son mandat l'imposait, il devrait être prêt, au besoin, à traiter avec des entités non reconnues qui avaient la mainmise sur la totalité au une partie du pays d'origine. Il pourrait le faire de manière à ne pas violer la règle de l'impartialité, ni à interférer indûment dans les affaires intérieures d'un Etat.
25. On a avancé l'idée que, conformément à sa fonction qui consiste à chercher une solution permanente au problème des réfugiés, le Haut Commissaire devrait en permanence maintenir activement à l'étude la possibilité d'assurer le rapatriement librement consenti, total ou partiel, d'un groupe de réfugiés. Il devrait en particulier définir dès que possible les circonstances qui pourraient se révéler propices à la promotion éventuelle du rapatriement librement consenti.
26. Les participants ont estimé qu'il était important que le Haut Commissaire participe pleinement dès les premiers stades aux activités de préparation et de mise en oeuvre du rapatriement. En aucun cas, il ne serait satisfaisant de n'associer le Haut Commissaire à un programme de rapatriement que lorsque ce programme aurait été arrêté, en détail ou dans ses grandes lignes, par les Etats parties directement intéressés.
27. En ayant le droit de prendre des initiatives en vue de cette solution, le Haut Commissaire avait le moyen de veiller à ce qu'un programme éventuel de rapatriement soit conçu dans un cadre multilatéral propre à sauvegarder les intérêts essentiels des réfugiés tout comme ceux des autres parties.
28. Les participants ont proposé que le Haut Commissaire envisage de choisir un groupe consultatif ad hoc informel qui pourrait lui fournir des conseils et un appui quand, à son avis, la promotion du rapatriement librement consenti d'un groupe spécial de réfugiés posait un grave problème. Le groupe consultatif serait nommé par le Haut Commissaire en consultation avec le président de son Comité exécutif et serait composé de représentants d'Etats membres du Comité exécutif et d'autres Etats intéressés.
29. Les participants ont estimé que la création de commissions tripartites était un bon moyen d'assurer une coopération générale satisfaisante. La commission tripartite, qui devrait être composée de représentants des pays d'origine et d'asile et du HCR, pourrait s'associer aux activités conjointes de préparation et d'exécution du programme de rapatriement. C'était aussi un moyen efficace d'assurer que des consultations aient lieu entre les principales parties en cause sur tout problème qui pourrait se poser par la suite.
30. Les participants ont admis à l'unanimité qu'il était essentiel de reconnaître que le Haut Commissaire, compte tenu de sa fonction de protection, avait le droit légitime de se soucier des conséquences du retour, en particulier quand ce retour fait suite à une déclaration d'amnistie ou à toute autre forme de garantie de sécurité. Il fallait en effet considérer que le Haut Commissaire était en droit de faire valoir cette préoccupation légitime à l'égard de l'issue de tout retour qu'il avait facilité. Il devrait aussi avoir directement et librement accès aux rapatriés et être en mesure d'assurer le respect des déclarations d'amnistie, des garanties ou des assurances sur lesquelles les réfugiés s'étaient fondés pour retourner chez eux. Ces droits devraient être considérés comme faisant partie de son mandat.
31. Les participants ont estimé qu'il conviendrait généralement d'envisager, dès le début de tout mouvement de réfugié, la possibilité d'un retour à plus ou moins longue échéance.
32. Les participants ont affirmé que dans toute action internationale, au niveau mondial ou régional, visant à promouvoir le rapatriement librement consenti, il fallait dès le début d'un mouvement de réfugiés examiner la situation dans le pays d'origine ainsi que dans le pays d'accueil. Il ne fallait pas exclure la possibilité d'une amélioration sensible et bénéfique des conditions dans le pays d'origine à la suite d'une intervention internationale opportune et utile, de nature politique ou économique. Il importait aussi de placer le problème des réfugiés sous l'angle à la fois du pays d'origine et du pays d'asiles. Pour cette seule raison, il fallait en particulier que le Haut Commissaire établisse dès que possible des contacts avec toutes les parties et qu'il mette tout en oeuvre pour suivre de très près la situation dans le pays d'origine ainsi que dans le pays d'accueil. Son action devrait bénéficier du plein appui et de l'entière coopération de tous les Etats directement concernés et des autres Etats intéressés, s'il y avait lieu.
33. L'action internationale, même si elle ne faisait pas directement obstacle au retour, pouvait le faire indirectement dans certains cas si elle portait exclusivement, ou trop, sur l'aide d'urgence et/ou l'aide au développement dans le pays d'accueil au détriment de toute mesure susceptible d'être prise pour éliminer ou atténuer, dans le pays d'origine, les conditions qui avaient provoqué un problème de réfugié. Dans ces cas, un déséquilibre dans la forme ou l'orientation de l'action internationale pourrait aussi aggraver une situation de réfugiés en faisant prendre de l'ampleur à l'exode. En particulier, dans le cas où la possibilité de bénéficier d'une aide d'urgence joue un rôle déterminant dans la décision de franchir une frontière, le HCR devrait encourager d'autres institutions compétentes à fournir les secours voulus dans le pays d'origine.
34. Les participants à la Table ronde ont souligné que les réfugiés ne devraient être rapatriés que s'ils en exprimaient eux-mêmes librement le désir. A elles seules, les considérations de droits de l'homme, indépendamment des dispositions précises des instruments internationaux relatifs aux réfugiés, interdisent l'expulsion ou le renvoi d'une personne dans son pays d'origine ou vers un autre pays dans des conditions où la mesure prise équivaudrait à un traitement cruel, inhumain ou dégradant.
35. On a émis l'idée que même si les circonstances qui avaient conduit une personne à devenir réfugié disparaissaient, il ne s'ensuivait pas automatiquement qu'elle puisse être tenue de quitter le pays d'asile. Qu'il s'agisse d'une question d'humanité ou de droit, les autorités de l'Etat d'accueil devaient aussi tenir compte de la situation de l'intéressé et comparer ses intérêts à ceux de l'Etat. C'est ainsi qu'il serait pertinent de tenir compte de la durée du séjour dans l'Etat, des liens personnels et sociaux, de l'éducation et d'autres éléments particuliers.
36. Il incombait à toutes les parties intéressées qui avaient une obligation à assumer dans le domaine de la protection d'assurer la fourniture des renseignements pertinents. Il ne saurait être suffisant de fournir aux réfugiés les renseignements émanant du pays d'origine. Toutes les parties qui avaient une obligation à assumer en matière de protection devaient veiller à ce que les renseignements soient suffisants et présentés d'une façon objective et équilibrée.
37. Les participants ont estimé qu'il était essentiel aussi, du point de vue de la protection, de ne fournir à aucun moment au pays d'origine une liste générale des réfugiés à partir de laquelle le pays pourrait par la suite savoir qui a finalement décidé de rentrer ou de ne pas rentrer. La seule liste qui devrait être fournie au pays d'origine, à tout moment, était celle des réfugiés qui avaient décidé de rentrer de leur plein gré.
38. Les participants ont reconnu l'importance du retour spontané en tant que voeu librement exprimé par les réfugiés et ont estimé qu'il importait d'éviter les mesures de nature à créer des obstacles au rapatriement spontané ou non organisé. Il a été convenu que les Etats intéressés devraient faire tout leur possible, notamment en apportant une assistance au pays d'origine, pour encourager le mouvement de retour toutes les fois qu'il était jugé servir les intérêts des réfugiés concernés.
39. On a reconnu que l'assistance matérielle fournie par la communauté internationale à la réintégration des rapatriés dans le pays d'origine était un facteur important de la promotion du rapatriement librement consenti. Il était peu probable qu'un réfugié veuille retourner chez lui si, malgré un changement dans la situation qui a provoqué le mouvement de réfugié, les conditions économiques et matérielles dans le pays d'origine étaient bien pires que dans le pays de refuge, surtout si ce réfugié devait être confronté à l'indigence ou à des difficultés à son retour. Là en particulier où un élément de migration rendait une situation de réfugié encore plus compliquée, l'existence de bonnes conditions matérielles au retour et la prise de dispositions suffisantes pour assurer la réinstallation et la réintégration dans la vie économique et sociale du pays d'origine étaient souvent indispensables pour qu'un mouvement de retour puisse se produire. A cette fin, les participants ont estimé que le HCR devrait avoir des fonds à sa disposition pour venir en aide aux rapatriés dans le pays d'origine. En ce qui concerne l'assistance internationale, les facteurs temps ne devraient pas être arbitraires au point de compromettre le succès d'une opération de rapatriement.
40. Les participants ont réaffirmé l'importance de la conclusion du Comité exécutif sur le rapatriement volontaire qui reflète le droit international et la pratique générale suivie au niveau international (conclusion No 18 (XXXI)). Ils se sont aussi félicités des dispositions de la Déclaration de Carthagène sur les réfugiés (22 novembre 1984), dont les auteurs ont adopté intégralement les dispositions de l'Accord de Contadora pour la paix et la coopération en Amérique centrale et ont affirmé le caractère volontaire et individuel du rapatriement librement consenti ainsi que la nécessité d'assurer ce rapatriement dans des conditions de sécurité et de dignité absolues, de préférence au lieu de résidence du réfugié dans son pays d'origine.
41. Les dispositions en vigueur et la pratique internationale constituaient certes déjà un cadre solide qui permettait de régir la coopération des Etats dans le domaine de la promotion du rapatriement librement consenti, mais il s'agissait maintenant d'envisager sérieusement de mettre au point un cadre multilatéral de dispositions régissant le rapatriement librement consenti, que l'ensemble de la communauté internationale devra adopter. Il était nécessaire de corriger le déséquilibre qui existait dans la déclaration de principes qu'offraient les instruments internationaux de caractère général sur le statut des réfugiés et l'asile, car ils ne traitaient que de là solution de l'installation à l'extérieur. Il était vrai qu'aucun instrument juridique ne modifierait la situation générale dans le monde, mais il importait d'avoir au moins un cadre multilatéral formel dans lequel serait reconnue la valeur de la réconciliation et de la normalisation et qui compléterait le cadre multilatéral nécessaire, qui existe déjà depuis de nombreuses années, pour traiter de la séparation et de l'aliénation qui en résulte.
42. Enfin, les participants ont exprimé leurs remerciements au HCR et à l'Institut international de droit humanitaire pour avoir convoqué la Table ronde. Ils ont estimé que l'examen du rapatriement librement consenti était une initiative opportune et précieuse et ont espéré que les travaux de la Table ronde se révéleraient utiles lors de l'examen de la question par des organismes intergouvernementaux.
CONCLUSIONS
1. Les participants à la Table ronde réaffirment l'importance de la conclusion du Comité exécutif sur le rapatriement volontaire de 1980 qui reflète les principes fondamentaux de la pratique et du droit internationaux.
2. Le droit fondamental de toute personne de retourner librement dans son pays d'origine est réaffirmé, et il est instamment demandé que la coopération internationale soit développée et axée sur la solution du retour.
3. Les réfugiés ne doivent être rapatriés que s'ils en expriment librement le désir.
4. Les causes des mouvements de réfugiés constituent un aspect essentiel de la solution, et les efforts internationaux doivent aussi être axés sur l'élimination de ces causes. Il convient de se préoccuper davantage des causes et de la prévention des mouvements de réfugiés, notamment de la coordination des efforts actuellement menés par la communauté internationale.
5. Il faut que la communauté internationale confirme les responsabilités qui incombent aux Etats à l'égard de leurs nationaux et les obligations qu'ont les autres Etats de promouvoir le rapatriement librement consenti. L'action internationale en faveur du rapatriement librement consenti, au niveau mondial ou régional, doit bénéficier du plein appui et de l'entière coopération de tous les Etats directement intéressés, s'il y a lieu. La prévention des mouvements de réfugiés et la promotion du rapatriement librement consenti en tant que solution aux problèmes des réfugiés sont subordonnées à une condition, à savoir que les Etats directement en cause aient la volonté politique suffisante de s'attaquer à des problèmes tels que le respect des droits de l'homme, le non-recours à la force, le règlement pacifique des différends et le développement économique et social. C'est là une responsabilité qui incombait avant tout aux Etats.
6. Le Haut Commissaire a un mandat qui est suffisant pour lui permettre de promouvoir le rapatriement librement consenti en prenant des initiatives à cette fin, en favorisant le dialogue entre les principales parties, en facilitant les échanges entre elles et en servant d'intermédiaire ou de pôle de communication. Il importe que le Haut Commissaire établisse, autant qu'il le peut, des contacts avec les principales parties et se renseigne sur leurs points de vue. Dès le moment où une situation de réfugié apparaît, le Haut Commissaire doit en permanence maintenir activement à l'étude la possibilité d'un rapatriement librement consenti, total ou partiel, du groupe de réfugiés et, chaque fois qu'il le juge approprié, il doit promouvoir concrètement cette solution.
7. Toutes les parties doivent reconnaître et respecter les préoccupations humanitaires du Haut Commissaire, qui doit bénéficier d'un appui sans réserve dans ses efforts pour s'acquitter de son mandat humanitaire qui consiste à assurer la protection internationale des réfugiés et à chercher une solution à leurs problèmes.
8. Quand le Haut Commissaire doit traiter avec une entité du pays d'origine ou d'asile, il ne doit pas être indûment gêné par le statut officiel de cette entité. Si son souci pour le bien-être fondamental des personnes dont il s'occupe le lui impose, il doit être prêt, au besoin, à traiter avec des entités non reconnues, sans que cela implique aucunement une forme de reconnaissance.
9. Dans tous les cas, le Haut Commissaire doit être appelé à participer pleinement, dès les premiers stades, aux activités de préparation et de mise en oeuvre du rapatriement.
10. L'importance du retour spontané dans le pays d'origine est reconnue et l'action visant à promouvoir le rapatriement volontaire organisé ne doit pas faire obstacle au retour spontané des réfugiés. Les Etats intéressés doivent faire tous les efforts possibles, notamment en apportant une assistance au pays d'origine, pour encourager le mouvement de rapatriement à chaque fois qu'il est jugé servir les intérêts des réfugiés concernés.
11. Quand le Haut Commissaire estime que la promotion du rapatriement librement consenti d'un groupe donné de réfugiés pose un grave problème, il doit envisager de choisir pour régler ce problème particulier un groupe consultatif ad hoc informel, dont il désignera les membres en consultation avec le président de son Comité exécutif et qui pourra comprendre, s'il y a lieu, des Etats qui ne sont pas membres du Comité.
12. La création de commissions tripartites est un bon moyen d'assurer une coopération générale satisfaisante. La commission tripartite, qui doit être composée de représentants des pays d'origine et d'asile et du HCR, peut participer aux activités concertées de préparation et de mise en oeuvre du programme de rapatriement. C'est aussi un moyen efficace d'assurer que des consultations ont lieu entre les principales parties en cause sur tout problème qui pourrait se poser par la suite.
13. L'action internationale visant à promouvoir le rapatriement librement consenti exige l'examen de la situation dans le pays d'origine ainsi que dans le pays d'accueil. L'assistance à la réintégration des rapatriés fournie par la communauté internationale dans le pays d'origine est un facteur important de la promotion du rapatriement. A cette fin, le HCR doit avoir à sa disposition des fonds pour venir en aide aux rapatriés dans le pays d'origine.
14. Il y a lieu de reconnaître que le Haut Commissaire a le droit légitime de se soucier des conséquences du retour, en particulier quand ce retour fait suite à une déclaration d'amnistie ou à toute autre forme de garantie de sécurité. Il faut considérer que le Haut Commissaire est en droit de faire valoir cette préoccupation légitime à l'égard de l'issue de tout retour qu'il a facilité. Il doit aussi avoir directement et librement accès aux réfugiés et être en mesure d'assurer le respect des déclarations d'amnistie, des garanties ou des assurances sur lesquelles les réfugiés se sont fondés pour retourner chez eux. Ces droits doivent être considérés comme faisant partie de son mandat.
15. Il convient maintenant d'envisager sérieusement d'élaborer un cadre multilatéral qui régirait le rapatriement librement consenti aux fins d'adoption par l'ensemble de la communauté internationale.
LISTE DES PARTICIPANTS
A. Participants
M. C. Robin Ashwin, Ambassadeur d'Australie en République fédérale d'Allemagne, Bonn
M. Carl Beck, Département d'Etat; des Etats-Unis, Washington D.C.
The Honourable Frederick Mwela Chomba, Ministre de l'intérieur, Lusaka
M. Abdel Magid Bashir Elahmadi, Ambassadeur du Soudan en Jamahiriya arabe libyenne, Tripoli
M. Florentino Feliciano, Université des Philippines, Manille
M. Oscar Gonzalez, Ambassadeur, Coordonnateur de la Commission mexicaine d'aide aux réfugiés (COMAR), Mexico
M. Héctor Gros-Espiell, Directeur, Institut interaméricain des droits de l'homme, San José
M. Munir Husain, Secrétaire du Gouvernement pakistanais, Ministère des Etats et des régions frontières (SAFRON), Islamabad
M. Danilo Jimenez-Veiga, Ministre de la Présidence du Costa Rica, San José
His Honour M. Sansern Kraichitti, Président, Cour d'appel, Bangkok
M. Erik Nettel, Ambassadeur d'Autriche en France, Paris
M. Nagendra Singh, Président, Cour internationale de Justice, La Haye
B. Délégation du HCR
M. Michel Moussalli, Directeur de la protection internationale
M. Shamsul Bari, Chef de la Section des questions juridiques générales
M. Dennis McNamara, Chef de la Section pour l'Asie du Sud et du Sud-Est
M. Jorge Santistevan, Administrateur principal chargé de la protection, Section pour les Amériques
M. Taoufik Ouanès, Administrateur chargé de la protection, Section pour l'Afrique du Nord et le Soudan
C. Institut international de droit humanitaire
M. Jovica Patrnogic, Président
M. Ugo Genesio, juge, Secrétaire général
D. Rapporteur spécial
M. Gervase Coles, E. Secrétariat
M. Jean-Pierre Colombey, Secrétaire
Mme Armenia Xavier De Oliveira, Secrétaire adjointe
M. Drew Mahalic, M.
Ngo Quang Hien
Mme Cynthia Brzak