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COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA TRENTE-NEUVIEME SEANCE

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA TRENTE-NEUVIEME SEANCE
E/AC.32/SR.39

27 Septembre 1950
Présents :
Président :M. LARSEN (Danemark)
Rapporteur :M. WINTER (Canada)
MEMBRES :
BelgiqueM. HERMENT
BrésilM. PENTEADO
ChineM. CHA
Etats-Unis d'AmériqueM. HENKIN
FranceM. JUVIGNY
IsraëlM. ROBINSON
Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du NordSir Leslie BRASS
TurquieM. NURELGIN
VenezuelaM. PEREZ PEREZO
Observateurs :
ItalieM. MALFATTI
SuisseM. SCHURCH
Représentants d'institutions spécialisées
Organisations internationale du travailM. KARLIKOW
Organisation internationale pour les réfugiésM. WEIS
M. KULIMAN
Représentants d'organisations non gouvernementales.
Catégorie B et Registre :
Conseil consultatif d'organisations juivesM. KARLIKOW
Guilde internationale des coopératricesMlle ROSSIER
Comité de liaison des grandes organisations internationales fémininesMlle ROSSIER
Représentants d'organisations non gouvernementales (suite)
Catégorie B et Registre (suite)
Ligue internationale des femmes pour la paix et la libertéMme BAER
Congrès juif mondialM. BIENENFELD
M. LIBAN
Secrétariat :
M. HumphreyDirecteur de la Division des droits de l'homme
M. Girauddépartement juridique
M. HoganSecrétaire du Comité

TEXTES PROPOSES POUR UN PROJET DE CONVENTION RELATIVE AU STATUT DES REFUGIES (E/1618, E/1618/Corr.1, E/1703/Add.1, E/1818, E/AC.32/2, E/AC.32/6, E/AC.32/6/Corr.1, E/AC.32/7, E/AC.32/L.3, E/AC.32/L.40 et E/AC.32/NGO/1) (suite)

Le Comité pour suit son examen du projet de convention figurant à l'annexe I de son premier rapport (E/1618).

Article 23 : Titres de voyage

Le PRESIDENT attire l'attention du Comité sur les observations des Gouvernements autrichien, chilien et italien (E/AC.32/L.40, pages 14 et 50) ainsi que du Gouvernement australien (E/1703/Add.7, page 3). Il suggère que le Comité commence par discuter le principe de l'article 23 avant de passer à l'examen, paragraphe par paragraphe, de l'annexe qui concerne cet article de la Convention (E/1618, pages 30 et 33).

Pour ce qui est de l'observation du Gouvernement chilien, le Président fait remarquer que ce Gouvernement n'est pas seul à avoir institué un passeport spécial pour les réfugiés, mais que même si tous les Gouvernements l'avaient fait, il y aurait avantage à adopter le système unifié que prévoit l'article 23. En outre, rien n'empêche que la majorité des pays adoptent ce système, même si l'un ou l'autre d'entre eux préfère conserver sa législations nationale.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) espère que les pays comme le Chili accepteront les dispositions de l'article 23, d'abord pour les raisons qu'a mentionnées le Président, ensuite parce qu'il paraît douteux que le titre de voyage délivré par ces pays autorise le détenteur à y revenir après en être parti.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) espère, comme le représentant des Etats-Unis, que le titre délivré par le Gouvernement chilien prévoit la possibilité du retour. Il espère également que ce titre est tel que les autorités des autres Etats puissent facilement le reconnaître.

Le PRESIDENT suggère que, comme l'article 23 ne semble appeler aucune modification, le Comité passe à l'examen du paragraphe 1 de l'annexe.

Il en est ainsi décidé.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) croit n'être pas seul à se demander pourquoi le français serait seul employé en plus de la langue de l'autorité délivrant le titre de voyage à l'exclusion de toute autre langue. Il lui semble que l'anglais devrait l'être également, puisque c'est l'autre langue de travail des nations Unies.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) partage le sentiment du représentant des Etats-Unis. Il pense que s'il est seulement fait mention du français, c'est pour des raisons historiques, à savoir que les dispositions des conventions antérieures s'appliquaient surtout à l'Europe.

M. HERMENT (Belgique) partage les opinions exprimées par les deux orateurs précédents. Il estime, toutefois, qu'il serait préférable de s'en tenir provisoirement au français afin d'épuiser les stocks de titres de voyage déjà imprimés dans cette langue. Les nouveaux titres pourraient comporter une traduction en anglais.

Le PRESIDENT relève que le paragraphe 2 de l'article 23 prévoit la reconnaissance de titres de voyage délivrés en vertu d'accords antérieurs, et pare en conséquence au cas de tous les titres de voyage imprimés qui ont déjà été délivrés.

Il rappelle qu'au cours des débats antérieurs de Lake Success, il a déclaré ne pas voir pourquoi il serait obligatoire de libeller les future titres de voyage dans la langue nationale de l'autorité qui les délivre ; le français et l'anglais répondent ensemble à tus les besoins internationaux. Il propose donc, en a qualité de représentant du Danemark, que les mots « deux langues au moins : langue française et langue (s) nationale (s) l'autorité qui le délivre » soient remplacés par les mots « deux langues au moins : le français et l'anglais ».

M. HERMENT (Belgique) rappelle que certaines mentions manuscrites doivent être portées sur les titres de voyage. Si l'on adoptait la proposition du Président, on forcerait les autorités de certains pays à rédiger ces mentions dans une langue qui n'est pas la leur.

Le PRESIDENT répond que les blancs du titre de voyage devront certainement, en tout cas, être remplis en français et en anglais. Des détails concernant par exemple le signalement du titulaire, s'ils étaient donnés en danois, seraient inintelligibles hors du Danemark.

M. WEIS (Organisation internationale pour les réfugiés, rappelle que le modèle de titre de voyage adopté lors de la première session du Comité était conforme, à de légers changements près, à celui qui est délivré en vertu de l'Accord de Londres. S'il est nécessaire d'y ajouter une nouvelle langue, il deviendra impossible de continuer à délivrer ces titres. Il faudra en imprimer de nouveaux, ce qui n'ira pas sans perte de temps ni d'argent. En raison des délais d'impression, il s'écoule parfois plusieurs mois entre l'adhésion d'un gouvernement et la délivrance effective du titre par ses services.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) croyait qu'il faudrait de toute façon adopter un nouveau document, et que l'addition de l'anglais ne présentait par suite aucune difficulté.

Répondant au représentant de la Belgique, il fait remarquer que, même en vertu des accords actuels, les titres doivent être remplis en français, même si ce n'est pas la langue du pays, et que les services de délivrance ne seront pas gênés par le fait qu'ils devront également employer l'anglais.

Il se déclare favorable à la formule proposée par le Président, sous réserve d'une légère modification qui en ferait : « deux langues au moins, dont le français et l'anglais ». Cela indiquerait clairement que les titres doivent être remplis en français et en anglais mais que rien ne s'oppose à ce qu'on emploie, en outre, d'autres langues si on le désire.

M. NURELGIN (Turquie) fait remarquer que dans son pays les titres de voyage délivrés aux réfugiés sont libellés en deux langues, le français et le turc. On devrait s'efforcer de trouver une solution qui permette d'utiliser les stocks d'imprimés existants.

Le PRESIDENT dit qu'en ce qui concerne la question de savoir si les titres déjà imprimés mais non encore délivrés pourront être utilisés dans l'avenir, il lui semble qu'il vaudrait mieux borner le débat actuel à la question des titres qui seront imprimés ultérieurement.

M. JUVIGNY (France) ne pense pas qu'il soit nécessaire d'examiner ces deux questions séparément. Si le Comité décide que le titre de voyage sera rédigé en deux langues au moins - le français ou l'anglais, et la langue de l'autorité qui le délivre - tous les stocks pourront être utilisés.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) dit que pour aider le Comité à parvenir à un compromis, il acceptera la suggestion que l'on vient de faire. Il propose donc qu'au paragraphe 1 de l'annexe, les mots « deux langues au moins : langue placés par les mots « deux langues au moins, dont l'une sera obligatoirement le français ou l'anglais ».

Il en est ainsi décidé.

Le paragraphe 1 de l'Annexe, ainsi amendé, est adopté à l'unanimité.

Le paragraphe 2 de l'Annexe est adopté à l'unanimité, sans discussion.

M. HERMENT (Belgique) se demande si, à première vue au moins, le paragraphe 3 ne contredit pas l'article 24 du projet de convention. Le paragraphe 3 de l'article 24 prévoit, en effet, que « les Etats contractants se réservent le droit d'assujettir les réfugiés à une taxe spéciale ». Cette taxe spéciale risque de rendre les droits à percevoir pour la délivrance au titre plus élevés que le tarif le plus bas appliqué aux passeports nationaux.

Le PRESIDENT rappelle que, lors de la première session du Comité, le paragraphe 3 de l'article 24 a reçu l'appui du représentant de la France qui voudrait peut-être répondre à l'observation que vient de faire le représentant de la Belgique.

M. JUVIGNY (France) dit que le paragraphe 3 de l'annexe ne contredit pas, mais complète, le troisième paragraphe de l'article 24.

M. ROBINSON (Israël)suggère de parer à l'objection du représentant de la Belgique en modifiant le paragraphe 3 de l'Annexe de la façon suivante : « Sous réserve des dispositions du paragraphe 3 de l'article 24, les droits à percevoir. .. ».

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) dit qu'à la première session, il a combattu l'idée de modifier le paragraphe 3 de l'Annexe, qui est tiré de l'Accord de Londres, à moins que ce ne fût absolument nécessaire, il persiste à penser qu'il vaudrait sans doute mieux amender le paragraphe 3 de l'article 24 qui deviendrait ; « Sans préjudice pour le paragraphe 3 de l'Annexe à l'article 23, les Etats contractants se réservent le droit ... ».

M. HERMENT (Belgique) ne croit pas que la suggestion émise par le représentant des Etats-Unis soit aussi satisfaisante que celle du représentant d'Israël.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) fait remarquer que le paragraphe 3 de l'Annexe et le paragraphe 3 de l'article 24 traitent de deux questions absolument distinctes. Le paragraphe 3 de l'Annexe concerne une redevance administrative, un droit dont le produit est versé au Trésor du pays qui délivre le titre ; le paragraphe 3 de l'article 24 au contraire concerne une redevance perçue à des fins charitables, au bénéfice des réfugiés en général ou de certaines catégories de réfugiés.

Le représentant du Royaume-Uni avait cependant l'intention de demander, lorsque le Comité aborderait ultérieurement l'examen de l'article 24, si le représentant de la France désire toujours maintenir le paragraphe 3 de cet article.

M. JUVIGNY (France) considère qu'il s'agit d'une question de fond. Le Comité estime-t-il que les dispositions du paragraphe 3 de l'Annexe découlent logiquement du troisième paragraphe de l'article 24 ? Ou bien estime-t-il nécessaire de prévoir, en plus de l'article 24, le paragraphe 3 de l'Annexe ?

M. HERMENT (Belgique) rappelle au Comité que la délivrance du titre de voyage actuellement employé, c'est-à-dire le certificat Nansen, donne lieu d'une part à la perception d'un droit par le gouvernement du pays qui le délivre, et d'autre part au versement d'une taxe spéciale (timbre Nansen) au profit des réfugiés. En ce qui concerne le titre de voyage actuellement envisagé, il n'est pas question de timbre.

Le PRESIDENT, tout en reconnaissant qu'il serait peu souhaitable de modifier sans nécessité les dispositions empruntées à l'Accord de Londres, pense que si, de l'avis du Comité, le gouvernement ont l'intention d'exiger des réfugiés un double paiement - d'une part pour frais administratifs et d'autre part à des fins charitables - les dispositions relatives à ces deux paiements pourraient fort bien figurer dans le même paragraphe. L'Accord de Londres n'est pas forcément plus sacro-saint qu'un autre, et rien n'empêche que les partisans du paragraphe 3 de l'article 24 en ajoutent les dispositions au paragraphe 3 de l'Annexe.

M. HERMENT (Belgique) accepte la solution suggérée par le Président.

M. JUVIGNY (France) déclare qu'il acceptera également cette solutions si la majorité du Conseil s'y rallie.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) déduit de leur acceptation de la suggestion émise par le Président que les représentants de la France et de la Belgique désirent maintenir une disposition prévoyant la perception d'un droit à des fins charitables.

Après diverses autres interventions, il est convenu que le paragraphe 3 de l'Annexe sera amendé comme suit : « Sous réserve des dispositions du paragraphe 3 de l'article 24, les droits à percevoir ... »,

Le paragraphe 3 de l'Annexe, ainsi amendé, est adopté à l'unanimité.

Les paragraphes 4 et 5 de l'Annexe sont adoptés à l'unanimité sans discussion.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) se demande pourquoi le paragraphe 6 fixe à six mois la durée de la période pendant laquelle les autorités diplomatiques et consulaires « auront qualité » pour proroger la validité des titres de voyage.

Les mots « auront qualité » signifient implicitement que ces autorités ne seront pas nécessairement obligées de procéder à cette prorogation ; dans ces conditions, on ne voit pas pourquoi on ne porterait pas à un an la durée. De la période pendant laquelle cette prorogation sera laissée à leur discrétion.

Le représentant des Etats-Unis Craint qu'il ne se produise des cas où un pays refuserait de proroger la validité d'un titre de voyage délivré à un réfugié alors que le nouveau pays de résidence de ce réfugié ne serait pas encore disposé à lui en délivrer un pour la première fois. Pour empêcher que ce réfugié ne tombe ainsi entre deux selles, M. Henkin propose d'ajouter au paragraphe 6(I) les mots suivant : « Aucun titre de voyage ne sera annulé ou sa prorogation refusée aussi longtemps que le titulaire n'aura pas reçu un nouveau titre des autorités de son nouveau pays de résidence ».

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) craint que la proposition des Etats-Unis n'aille trop loin. Le titre de voyage a pour objet, entre autres, de permettre à un réfugié de quitter le pays où il se trouve et de se remettre sur pied dans un autre. Si le premier de ces pays doit attendre, pour annuler le titre qu'il a délivré, qu'un nouveau titre ait été délivré par le nouveau pays de résidence, il est peu probable qu'il soit jamais dégagé de ses obligations. Le représentant du Royaume-Uni estime qu'il incombe au deuxième pays, dès qu'il a admis le réfugié comme résident, d'assumer les responsabilités qui incombaient jusque là au premier.

Le PRESIDENT est également de cet avis.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) est d'accord, d'une façon générale, avec le représentant du Royaume-Uni. Il se demande toutefois ce qu'il adviendra du réfugié que son ancien pays de résidence considère comme installé dans un nouveau pays, mais que ce second pays n'a pas encore admis comme résident. Toutefois, il n'insistera pas sur ce point si le problème qu'il a soulevé n'offre pas de difficulté réelle, et il espère que le représentant de l'Organisation internationale pour les réfugiés sera en mesure d'exprimer un avis sur la question.

M. WEIS (Organisation internationale pour les réfugiés) reconnaît que la situation délicate évoquée par le représentant des Etats-Unis pourrait, en effet, se présenter. Une difficulté supplémentaire pourrait résulter du fait que les autorités diplomatiques et consulaires en question ne sont pas tenues d'accorder une prorogation. La question qui se pose actuellement est, en fait, de savoir si, de l'avis du Comité, les gouvernements seront, pour la plupart, disposés à aller plus loin que ne leur enjoignent, en matière de renouvellement ou de prorogation de titre de voyage, les dispositions du paragraphe 6 ce problème est étroitement lié aussi à la validité de la disposition du paragraphe 13 qui prévoit le retour sans visa. On se rappelle que la période pendant laquelle un réfugié sera autorisé à rentrer pourra, dans certains cas exceptionnels, être réduite à trois mois.

M. JUVIGNY (France) estime que, bien que l'Annexe ait un caractère technique, il serait possible d'y insérer la proposition du représentant des Etats-Unis sous forme de recommandation.

M. WINTER (Canada) voit, à la proposition du représentant des Etats-Unis, les mêmes inconvénients que le représentant du Royaume-Uni ; cette proposition étendrait indéfiniment la durée de validité des titres de voyage ; elle aurait pour double effet que les gouvernements hésiteraient à délivrer ces titres et qu'ils feraient peut-être aussi plus de réserves à l'égard de l'article 23.

M. HERMENT (Belgique) approuve l'avis exprimé par le représentant du Canada et considère que le Comité doit s'en tenir aux dispositions qui lui sont soumises.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) se déclare prêt à accepter que, conformément à la suggestion du représentant de la France, son amendement soit inséré dans l'Annexe sous forme de recommandation.

Le PRESIDENT propose que le Comité décide d'abord s'il désire adopter l'amendement des Etats-Unis aux dispositions du paragraphe 6 de l'Annexe, et ensuite, à supposer qu'il se soit prononcé contre cette adoption, s'il veut inclure l'amendement à titre de recommandation. Il met donc aux voix la proposition d'ajouter aux dispositions du paragraphe 6 les mots : « Aucun titre de voyage ne sera annulé ou sa prorogation refusée aussi longtemps que le titulaire n'aura pas reçu un nouveau titre des autorités de son nouveau pays de résidence ».

Cette proposition est rejetée par 5 voix contre 4 2 abstentions.

Le PRESIDENT met aux voix la proposition tendant à charger le Comité de rédaction d'inclure ce même amendement, plus ou moins modifié, dans le paragraphe 6 sous forme de recommandation.

Cette proposition est adopté par 6 voix contre 3 avec 2 abstentions.

Sous réserve de cette décision, le paragraphe 6 de l'Annexe est adopté à l'unanimité.

M. ROBINSON (Israël) se demande quelle est la corrélation entre le paragraphe 7 de l'Annexe et le paragraphe 2 de l'article 23 lui-même. Le paragraphe 1 de l'article prévoit la reconnaissance des titres de voyage délivrés conformément aux dispositions de la Convention, tandis que le paragraphe 2 prévoit celle des titres délivrés en vertu d'accords antérieurs. Ces deux paragraphes prévoient donc ensemble la reconnaissance des deux espèces de titres qui pourront se trouver en circulation. Le paragraphe 7 de l'Annexe ajoute-t-il quelque chose de nouveau à ces disposition ?

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) considère les dispositions du paragraphe 1 de l'article 23 et celles du paragraphe 7 de l'Annexe comme complémentaires. Le paragraphe 1 de l'article a trait à la délivrance ultérieure de titres, le paragraphe 7 de l'Annexe prévoit la reconnaissance de ces titres par d'autres Etats.

M. ROBINSON (Israël) estime que les dispositions du paragraphe 7 de l'Annexe devraient être incorporées au paragraphe 1 de l'article 23, qui deviendrait : « Les Etats contractants délivreront et reconnaîtront mutuellement ... ».

M. WEIS (Organisation internationale pour les réfugiés) pense que, même si, d'un point de vue strictement juridique, le paragraphe 7 peut 'être superflu, il est susceptible d'avoir un effet psychologique, celui de stimuler la reconnaissance des titres de voyage délivrés en vertu de la présente Convention ou d'accords antérieurs.

Le paragraphe 7 de l'Annexe est adopté à l'unanimité.

Le paragraphe 8 de l'Annexe est adopté à l'unanimité sans discussion.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) suggère de remplacer, au paragraphe 9, les mots « du territoire » par les mots « d'un territoire ».

Il en est ainsi décidé.

Le paragraphe 9 de l'Annexe, ainsi amendé, est adopté à l'unanimité.

Le paragraphe 10 de l'Annexe est adopté à l'unanimité sans discussion.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) craint qu'au paragraphe 11 du texte anglais les mots « will be transferred » ne donnent l'idée d'une action positive. Il conviendrait d'y substituer une expression du genre de « becomes transferred » pour bien montrer que le transfert en question se fera automatiquement sans que personne doive y procéder.

Le PRESIDENT pense que l'on pourrait parer à l'objection du représentant des Etats-Unis en remplaçant, dans le texte anglais, les mots « will be transferred to the competent authority of that territory » par « shall be in the competence of the authority of that territory ».

Il en est ainsi décidé.

Le paragraphe 11 de l'Annexe, ainsi amendé dans son texte anglais, est adopté à l'unanimité.

Le paragraphe 12 de l'Annexe est adopté à l'unanimité sans discussion.

Le PRESIDENT, prenant la parole en tant que représentant du Danemark, dit qu'il craint que le paragraphe 13 sous sa forme actuelle n'incite les autorités qui délivreront le titre de voyage à faire, en quelque sorte, des réserves mentales. Tout pays qui admet sur son territoire un étranger titulaire d'un passeport national sait qu'aussi longtemps que ce passeport reste valable, il peut renvoyer le titulaire dans le pays d'où il est venu, même si l'intéressé n'a pas le visa de retour que certains pays exigent, même de leurs nationaux, pour des raisons de fiscalité et de sécurité. Lorsqu'un réfugié, au contraire, sort de son pays de résidence, la première question qui vient à l'esprit des autorités du pays qui l'admet est de savoir si on pourra se débarrasser de lui. Ces autorités savent que si le réfugié est encore dans le pays après que son titre de voyage sera arrivé à expiration, le pays a délivré ce titre de voyage pourra décliner désormais toute responsabilité à son égard ; mais aussi longtemps que le titre de voyage reste valable, le titulaire sera admis parce qu'il sera entendu qu'un pays au moins le recevra de nouveau. Si l'on supprime cette dernière protection accordée aux pays qui admettent sur leur territoire des réfugiés titulaires de titres de voyage délivrés par leur pays de résidence, les visas d'entrée ne seront accordés qu'après examen attentif des chances qu'a le réfugiés d'être autorisé à rentrer dans son pays de résidence.

L'article 23 a pour objet de permettre à un réfugiés de voyager hors de son pays de résidence avec la même facilité relative que les nationaux de la plupart des pays ; et si les pays où il voyage se voient privés de leur unique sauvegarde, son titre de voyage deviendra sans valeur. C'est pourquoi la délégation danoise voudrait supprimer du paragraphe 13 de l'Annexe les mots « sous la seule réserve des lois et règlement applicable aux titulaires de passeports dûment visés ». Si ces mots étaient supprimés, le pays qui permettrait à un réfugié de voyager à l'étranger, mais ne voudrait pas l'autoriser à rentrer sur son territoire, serait obligé de lui fournir un document spécial indiquant clairement la situation et avertissant comme il se doit les pays qui pourraient apposer leur visa sur ce document.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique), tout en partageant le sentiment du Président, n'est pas sûr de bien comprendre ses objections à l'endroit du paragraphe 13. Il croyait que la durée de validité d'un titre de voyage devait être indiquée sur ce titre. Les dispositions du paragraphe 13, telles qu'il les comprend, permettent aux Etats contractants de réduire d'un an à trois mois la période pondant laquelle un réfugié pourra rentrer, mais cette réductions ne saurait faire l'objet d'aucun réserve mentale ; il faut qu'elle soit expresse.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) pense qu'en faisant porter ses objections sur les mots « sous la seule réserve des lois et règlements applicables aux titulaires de passeports dûment visés », le Président a voulu dire que, selon la rédaction actuelle du paragraphe 13, il est loisible à tout pays qui a délivré un titre de voyage à un réfugié de refuser à ce réfugié l'autorisation de rentrer, dans les mêmes conditions que s'il s'agissait d'un étranger titulaire d'un passeport dûment visé, et cela même si le titre de voyage est encore valable.

Le PRESIDENT remercie le représentant du Royaume-Uni d'avoir fort exactement expliqué les motifs de la proposition danoise.

M. HERMENT (Belgique) déclare qu'il serait plutôt enclin à appuyer les observations du représentant des Etats-Unis. En effet, si le titre de voyage ne comporte pas de mention contraire, il donne à son titulaire le droit de rentrer pendant la période de validité du titre dans le pays qui l'a délivré.

D'autre part, si ce pays veut réduire cette période de validité, il peut le faire en apposant sur le titre de voyage un visa restrictif. Certains pays le font même pour leurs ressortissante.

Le PRESIDENT, prenant la parole en qualité de représentant du Danemark, ne pense pas que les mets dont il a proposé la suppression puissent s'interpréter dans le sens que veut leur donner le représentant de la Belgique.

D'après la législation danoise, un étranger qui n'a pas de moyens d'existence ne peut être admis dans le pays, même s'il est titulaire d'un passeport valable et dûment visé. L'article 13 mettrait le détenteur d'un titre de voyage sur le même pied, alors que, selon le représentant du Danemark, les détenteurs de titres de voyage devraient être réadmis, même s'ils sont sans ressources ou atteints de maladie contagieuse, dans le pays qui a délivré les titres sur la foi desquels d'autres pays ont admis les intéressés sur leur territoire.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) craint d'avoir, en comprenant mal la pensée du Président, induit en erreur le représentant de la Belgique. Si les objections du Président visent uniquement le membre de phrase « sous la seule réserve des lois et règlements applicables aux titulaires de passeports dûment visés » le représentant des Etats-Unis en approuvera la suppression.

Le PRESIDENT, parlant en tant que représentant du Danemark, dit qu'il voudrait également supprimer la deuxième phrase du paragraphe 13 (I). un réfugiés ne se verra délivrer un titre de voyage que s'il a l'intention de voyager à l'étranger, et il n'y a aucune raison de ne pas lui donner le visa de retour au moment où le titre lui est délivré. Si le réfugié doit solliciter le visa une fois qu'il a quitté le pays, il est à craindre que son passeport n'expire avant que le visa n'ait été accordé, auquel cas un autre pays deviendrait responsable de l'intéressé.

M. WEIS (Organisation internationale pour les réfugiés) dit que la deuxième phrase du paragraphe 13 (I) a été ajoutée pour tenir compte de la situation spéciale de la Turquie, où un visa était nécessaire pour le retour des nationaux ; on n'a pas cru devoir accorder aux réfugiés, à cet égard, un régime plus favorable qu'aux nationaux. Mais comme la Turquie a maintenant renoncé à exiger ce visa de ses nationaux, et comme la disposition en question ne se trouve pas dans l'accord de Londres, M. Weis pense que l'on pourrait supprimer la deuxième phrase.

M. NURELGIN (Turquie) confirme que le visa de retour a été aboli en Turquie.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) dit que puisque la Turquie n'a plus besoin de la disposition qui faisait l'objet de la deuxième phrase, la délégation du Royaume-Uni est favorable à la suppression de la phrase en question.

En ce qui concerne le dernier membre de la première phrase, le Gouvernement du Royaume-Uni serait peut-être disposé à en admettre la suppression. Il convient de noter toutefois que cette restriction figurait déjà dans l'Accord de Londres et que de nombreux pays l'ont alors considérée comme importante. Si on la supprimait, cela pourrait inciter ces pays à formuler des réserves qui diminueraient l'intérêt que la Convention présentera en fin de compte pour les réfugiés. Cette restriction figure dans les accords de 1946, et n'a donné lieu à aucune difficulté parce que les Etats n'ont pas recouru aux pouvoirs qu'elle leur conférait. Il faut se rappeler que les Etats, pour leur sauvegarde, préfèrent avoir en réserve les pouvoirs que leur donne la clause en question, même s'ils ne s'en servent pas. Si on ne leur laisse pas ces pouvoirs, ils insisteront probablement pour faire une réserve. C'est pourquoi Sir Leslie juge souhaitable de maintenir cette clause.

M. PEREZ PEROZO (Venezuela) dit que les nationaux de son de son pays, lorsqu'ils y reviennent, ont besoin d'un visa délivré par les consulats du Venezuela à l'étranger. Si la seconde phrase est supprimée, le Gouvernement vénézuélien fera donc probablement une réserve à l'égard de ce paragraphe.

Le PRESIDENT, parlant en tant que représentant du Danemark, fait remarquer que la question de savoir si un personne a ou non besoin d'un visa pour entrer dans un certain pays, est une question purement intérieure qu'il appartient à chaque Etat de trancher. Si un homme entre ans son propre pays, ce pays est forcé de l'admettre, que l'intéressé soit ou ne soit pas titulaire d'un visa d'entrée ou même d'un passeport. Dans le cas d'un réfugié, toutefois, il n'y a aucun pays qui soit, de la même façon, obligé de l'admettre. Le représentant du Danemark voudrait éviter pareille situation et c'est pourquoi il a proposé de supprimer la dernière partie de la première phrase.

M. HERMENT (Belgique) fait remarquer que, d'après la deuxième phrase du paragraphe 13 (I), le visa de retour demandé par un réfugié doit lui être accordé sans délai.

Pour Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni), étant donné qu'un pays au moins considère évidemment la deuxième phrase comme importante et que cette phrase porte uniquement sur la procédure et constitue, dans l'intention de ses auteurs, une injonction, ainsi que le représentant de la Belgique l'a souligné, mieux vaut, dans l'intérêt des réfugiés, la conserver.

Le PRESIDENT met aux voix la deuxième phrase du paragraphe 13 (I).

La deuxième phrase du paragraphe 13 (I) est adopté par 7 voix contre une, avec 3 abstentions.

Le PRESIDENT met aux voix le dernier membre de la première phrase du paragraphe 13 (I), à savoir « sous la seule réserve des lois et règlements applicables aux titulaires de passeports dûment visés ».

Le dernier membre de la première phrase du paragraphe 13 (I) est adopté par 4 voix contre 2 avec 5 abstentions.

Le paragraphe 13 (I) de l'Annexe est adopté.

M. HERMENT (Belgique) se demande pourquoi le texte primitif du paragraphe 13 (2) a été modifié, et propose de remplacer les mots « à trois mois au moins » par les mots « ladite période ne devant pas être inférieurs à trois mois » qui figuraient dans le texte primitif.

Le PRESIDENT pense que la suggestion du représentant de la Belgique, comme elle vise uniquement à une modification de forme, devrait être examiné par le Comité de rédaction.

Il en est ainsi décidé.

M. WEIS (Organisation internationale pour les réfugiés) dit qu'à en juger par l'expérience de son Organisation, le droit que les Etats contractants se réservent, aux termes du paragraphe 13 (2), pour les cas exceptionnels, a parfois été exercé comme s'il constituait une règle générale. Il demande aux Etats de ne l'exercer, ainsi que le stipule le paragraphe 13 (2), que dans les cas exceptionnels, ou lorsque le séjour ou réfugiés n'est autorisé que pour une période déterminé.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) et M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) appuient la requête du représentant de l'Organisation internationale pour les Réfugiés.

Le paragraphe 13 (2) de l'Annexe est adopté à l'unanimité.

Les paragraphe 14, 15 et 16 de l'Annexe sont adoptés à l'unanimité sans discussion.

Le PRESIDENT invite les membres du Comité à continuer à présenter leurs observations générales sur l'Annexe.

M. WEIS (Organisation internationale pour les réfugiés) dit que l'article 23 présente une extrême importance, du fait que non seulement il stipule des droits qui sont extrêmement précieux pour les réfugiés mais encore il établit de relations entre Etats. D'ordinaire les Gouvernements se réservent le pouvoir discrétionnaire de permettre ou de ne pas permettre aux réfugiés de revenir sur leur territoire ; mais en vertu de l'annexe, les réfugiés auront à l'avenir le droit de retourner dans le pays dans lequel leur auront été délivrés des titres de voyage. Le représentant de l'OIR a été frappé par le fait que certains des Gouvernements intéressés ont déclaré qu'ils ne seraient pas en mesure d'accepter sans réserve l'article 23 et l'annexe et qu'ils n'ont pas toujours indiqué les raisons pour lesquelles ils formulaient ces réserves. Il demande instamment à tous les Gouvernements d'accepter l'article 23 et l'annexe. Tous les Gouvernements, ou presque tous les Gouvernements, délivrent des titres de voyage aux étrangers qui ne possèdent pas de passeport ; l'article 23 et l'annexe, s'ils sont acceptés, établiront l'uniformité et mettront en vigueur ce que l'on appelle la clause de « retour », qui n'est pas toujours stipulée dans les papiers délivrés par les divers pays.

Le PRESIDENT fait observer qu'au paragraphe 2 de l'introduction au modèle du titre de voyage (E/1618, page 30), li n'est rien dit de l'éventuelle nécessité d'un visa. Il n'est pas probable que les autorités qui auront à contrôler le titre de voyage, par exemple les services consulaires ou la police, seront forcément au courant des lois de leur pays en matière de visas. Il semble donc au Président qu'il est indispensable, tout au moins lorsqu'il s'agit de pays qui ne permettent pas le retour inconditionnel des réfugiés, de remanier le paragraphe de manière qu'on y puisse faire figurer une mention concernant les réglementations spéciales sur les visas.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) dit qu'il a souscrit à l'objection formulée par le Président à propos du dernier membre de la première phrase du paragraphe 13 (I) de l'annexe, mais que le Comité ne peut pas reprendre actuellement l'examen de cette question, qui a déjà été traitée. Il reconnaît aussi la valeur de l'observation du représentant du Royaume-Uni, qui a rappelé qu'en pratique, le comportement des divers Etats a été irréprochable. Le représentant des Etats-Unis estime toutefois que le texte du paragraphe 2 de l'introduction au modèle du titre de voyage pourrait peut-être être remanié en seconde lecture.

M. ROBINSON (Israël) fait observer que le texte du paragraphe doit être modifié pour être mis en harmonie avec le texte du paragraphe 13 de l'annexe. Il suggère que la question soit déférée au Comité de rédaction.

M. WEIS (Organisation internationale pour les réfugiés) dit que ce paragraphe, tel que le comprend l'Organisation à laquelle il appartient concerne les cas mentionnés à la première phrase du paragraphe 13 (I) et au paragraphe 13 (2) de l'annexe, mais, non pas ceux dont il est question fans la deuxième phase du paragraphe 13 (1). Mais, comme la situation est la même pour les réfugiés et pour les étrangers ordinaires dans les pays qui exigent un visa de retour, il ne semble pas qu'il soit le moins du monde nécessaire de faire figurer une disposition spéciale dans le document.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) ne pense pas qu'il soit nécessaire que ces pays disposent d'une rubrique spéciale dans un titre de voyage, du fait de la deuxième phrase du paragraphe 13 (i), pas plus que ce n'est nécessaire dans un passeport. En revanche, il se peut qu'il soit indispensable de prévoir une mention correspondant à la dernière stipulation de la première phrase du paragraphe 13 (I). Le représentant des Etats-Unis appuie la proposition du représentant d'Israël tendant à laisser au Comité de rédaction le soin de décider de la question, mais seulement en ce qui concerne cette stipulation.

Le PRESIDENT propose qu'aucune modification ne soit apportée pour le moment et que la question soit renvoyée au Comité de rédaction.

Il en est ainsi décidé.

Article 24 : Charges fiscales

Le PRESIDENT précise qu'aucun pays n'a présenté d'observation sur les deux premiers paragraphes de l'article 24 ; le Chili a formulé des objections contre le paragraphe 3, mais, comme ce paragraphe se borne à réserver le droit des Etats contactants à assujettir les réfugiés à une taxe spéciale, il semble qu'il n'y ait aucune raison pour que le Comité n'adopte pas l'ensemble de l'article.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) déclare qu'en générale, son pays préférerait que le paragraphe 3 fût supprimé. Mais si les pays qui considèrent qu'il y a lieu de le maintenir persistent dans leur attitude, son Gouvernement ne soulèvera pas d'objection.

Le PRESIDENT, parlant en tant que représentant du Danemark, dit que son pays partage l'avis que vient de formuler le représentant du Royaume-Uni. Le Gouvernement du Danemark estime également que la taxe spéciale devrait être modique, afin d'empêcher les Etats de recourir à une telle taxe pour entraver la liberté de mouvement des réfugiés.

M. JUVIGNY (France) n'entend pas revenir sur les raisons de principe qui ont incité la délégation française à demander l'insertion du 3ème alinéa de l'article 24. Mais il tient I tient à préciser que cet alinéa permet simplement aux Etats contractants qui le désirent d'assujettir les réfugiés à une taxe spéciale. Il ne crée pas d'obligation générale. Il impose seulement à l'Etat qui établirait cette taxe spéciale l'obligation d'affecter intégralement le produit aux oeuvres d'assistance aux réfugiés.

La délégation française désire que cette disposition soit maintenue ; toutefois, si les représentants craignent que certains Etats ne soient tentés de fixer une taxe trop élevée, elle est prête à examiner le principe d'une limitation.

Le PRESIDENT fait observer que le timbre Nansen, qui constitue une taxe spéciale analogue sur les réfugiés, coûte 5 francs or il propose donc qu'une expression du genre de « d'un montant ne dépassant pas 5 francs or » soit ajoutée après les mots « une taxe spéciale ».

M. PEREZ PEROZO (Venezuela) soutient que, bien que le paragraphe 3 n'ait aucun caractère obligatoire et bien que son but soit de rendre service aux réfugiés il n'en constitue pas moins un taxe imposée aux réfugiés individuellement. Il ne sait pas dans quelle mesure les Etats pourront ou voudront l'appliquer, mais il lui semble que cette application pourrait bien exiger une procédure complexe et un personnel administratif nombreux. Il se peut aussi, comme l'a fait observer le Président, que la taxe spéciale soit trop élevée. Mieux vaudrait venir en aide aux réfugiés dans le cadre des mesures générales d'assistance prises dans un pays donnée. C'est pourquoi le représentant du Venezuela appuie la proposition de supprimer le paragraphe 3.

M. JUVIGNY (France) est prêt à admette une limitation qui serait fixée au moyen d'une référence au timbre Nansen ; cependant, il tient à appeler l'attention du Comité sur le fait que certaines législations nationales n'admettent, ni dans leurs textes du droit public, ni dans les contrats privés, une référence à l'étalon-or. Dans ces conditions, le représentant de la France se demande si une telle référence introduite dans une convention internationale ne risquerait pas de gêner certains pays. Pour éviter cette difficulté, le représentant de la France propose d'ajouter les mots « d'un montant modique », après les mots « une taxe spéciale », à la deuxième ligne du troisième alinéa de l'article 24.

Le représentant de la France considère que la plupart des objections présentées contre le paragraphe ne tiennent pas ; il ne croit pas notamment que la simple apposition d'un timbre sur un document et la répartition des fonds ainsi recueillis puissent entraîner des frais administratifs considérables.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) dit qu'il avait l'intention de proposer un amendement du genre de celui que vient de proposer le représentant de la France et de signaler que la taxe devrait être qualifiée de « restreinte » ou de « modique ». Il pourrait être également fait mention d'un timbre; car l'apposition d'un timbre marque d'ordinaire la perception de sommes d'un faible montant.

Sur la question de la suppression du paragraphe, la délégation des Etats-Unis n'a pas d'opinion bien arrêtée. Les timbres Nansen jouaient un rôle utile, et l'OIR n'a pas formulé d'objection contre l'insertion du paragraphe. L'orateur estime que, comme ce paragraphe constitue purement et simplement une réserve, le but visé pourrait être atteint si l'on remplaçait les mots « le droit d'assujettir » par les mots « le droit de continuer à assujettir ». Cette addition limiterait le droit en question aux Etats qui assujettissent déjà les réfugiés à une taxe spéciale.

M. CHA (Chine) dit que, dans son pays, une carte d'identité est délivrée à n'importe qui, ressortissant du pays ou réfugié, sans condition et sans frais. Les réfugiés ne sont pas des personnes particulièrement fortunées, et si la taxe spéciale dont il est question au paragraphe 3 n'a d'autre but que de venir en aide aux réfugiés, il vaudrait mieux s'adresser aux riches. D'autre part, les réfugiés sont des gens gui ont besoin d'assistance ; ils ne sont pas des gens sur lesquels il faille percevoir des taxes spéciales. Comme il n'y a pas de bonne raison pour les assujettir à une telle taxe spéciale, le représentant de la Chine appuie les représentants qui ont proposé la suppression du paragraphe.

M. HERMENT (Belgique) craint que le maintien du paragraphe 3 n'entraîne des difficultés d'ordre administratif car il conviendrait qu'il y eût un timbre uniforme émis par un organe officiel unique, par exemple le Haut-Commissariat pour les réfugiés.

D'autre part, les fonds ainsi recueillis devraient également être versés à un organe officiel qui pourrait aussi être le Haut-Commissariat. Quoi qu'il en soit, il serait nécessaire d'envisager des mesures d'ordre administratif ; c'est pourquoi la délégation belge est favorable à la suppression de cet alinéa.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) pense que l'amendement proposé par le représentant de la France constitue une solution de compromis satisfaisante, mais il propose que la question soit renvoyée au Comité de rédaction qui recherchera une formule acceptable pour tout le monde.

M. HERMENT (Belgique) demande si le Comité de rédaction ne pourrait pas examiner également quels seraient les moyens pratiques de mettre en oeuvre cette disposition.

Le PRESIDENT dit que dans l'état actuel des choses, certains groupes de réfugiés dépendent de l'Organisation Nansen et versent au pays qui leur délivre des titres de voyage la somme de 5 francs or qui sont virés au Bureau Nansen. Il a été reconnu à la session précédente du Comité qu'un tel transfert d'or était inacceptable pour la plupart des pays ; c'est pourquoi il a été décidé de ne pas insérer dans le texte une disposition prévoyant un transfert de ce genre. Il a été également indiqué que la suppression d'une telle disposition ne signifiait pas que les passeports ou les titres de voyage seraient délivrés aux réfugiés à un prix inférieur au prix actuel, et certains gouvernements ont estimé que les réfugiés devaient payer davantage que les ressortissants du pays. Les somme ainsi recueillies ne seraient pas virées au compte d'une organisation internationale, mais employées, dans le territoire du pays d'accueil, pour l'assistance aux réfugiés. L'aspect international de la question a ainsi disparu.

Les questions dont est actuellement saisi le Comité consistent à savoir d'une part si les droits payés par les réfugiés pour la délivrance de cartes d'identité, de permis de résidence, ou de titres de voyage doivent être supérieurs à la normale, et d'autre part, au cas où il en serait ainsi, si ces droits exceptionnels doivent être d'un montant limité.

M. HERMENT (Belgique) considère que la rédaction du 3ème alinéa de l'article 24 est beaucoup trop vague. En effet, de quelles oeuvres s'agit-il exactement ? Pour éviter tout abus, le représentant de la Belgique préférerait que les fonds ainsi recueillis fussent versés à un organisme officiel.

M. NURELGIN (Turquie) estime qu'il serait préférable de prendre un décision quant au maintien ou à la suppression de cet alinéa, avant de le renvoyer au Comité de rédaction. Quant à lui, il votera pour sa suppression.

Le PRESIDENT dit que la procédure devrait consister d'abord à déterminer si la taxe spéciale que pourraient imposer les Etats contractants devrait être d'un montant limité ou non, puis a décider s'il convient de supprimer le paragraphe 3 ; car il se peut que certains Etats consentent à accepter ce paragraphe si le montant de la taxe est limité.

M. PEREZ PEROZO (Venezuela) estime que la proposition du représentant de la France est tout à fait vague et équivoque ; car taxe qui peut paraître modique à un Etat ne semblera peut-être pas telle à un réfugié. Il pense que le paragraphe doit être supprimé.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) demande qu'en votant, les membres du Comité ne perdent pas de vue les difficultés particulières auxquelles se heurte la France. Ce pays a été mis dans un grand embarras par l'afflux des réfugiés et il n'en a pas moins fait preuve à leur égard d'une extrême générosité.

Le PRESIDENT dit que, comme il n'est pas d'usage que le Comité traite de questions de rédaction, et comme d'ailleurs le Comité aura encore l'occasion de présenter des observations portant sur des points particuliers, le Comité de rédaction les amendements portant sur des points particuliers, le Comité se bornant à voter sur le principe. La première question qu'il mettra aux voix est celle de savoir si la taxe spéciale dont il est question au paragraphe 3 devra être d'un montant limité.

M. HERMENT (Belgique) estime qu'il y aurait également lieu de mettre aux vois la question de l'affectation des fonds recueillis au moyen d'une taxe spéciale.

M. JUVIGNY (France) considère que, d'après le texte actuel du 3ème alinéa, le problème ne se pose pas exactement de la façon dont l'envisage le représentant de la Belgique. En effet, cet alinéa tend à donner aux Etats la possibilité de créer une taxe spéciale, et dans ces condition, le problème de la répartition des fonds n'est pas un problème d'ordre internationale, mais un problème d'ordre purement nationale.

Le représentant de la France ne peut pas dire, à l'avance, comment les fonds ainsi recueillis seraient repartis entre les oeuvres publiques d'assistance, les oeuvres semi-publiques et les oeuvres privées, car ces trois types d'oeuvres existent en France et probablement dans d'autres pays. L'affectation de ces fonds se ferait conformément aux buts indiqués à l'alinéa 3 de l'article 24, probablement par répartition entre les trois catégories qu'il a mentionnées. Quoiqu'il en soit, le représentant de la France estime que le problème doit être traité par le Comité, de la façon qu'a indiquée le Président.

M. CHA (Chine) dit que sa délégation est disposée a voter pour la limitation, pourvu que l'imposition du droit en question reste sur le plan national et non international.

Par 8 voix contre zéro, avec 3 abstentions, le Comité approuve le principe de la limitation de la taxe spéciale dont il est question à l'article 23 (3).

Le PRESIDENT met aux voix la question de savoir s'il y a lieu de maintenir ou de supprimer le paragraphe 3 de l'article 24, amendé de manière à ne permettre que la perception d'une taxe spéciale de montant limité.

Par 4 voix contre 3, avec 4 abstentions, le Comité décide de maintenir le paragraphe 3 de l'article 24 ainsi amendé.

Le PRESIDENT, parlant en tant que représentant du Danemark, dit que s'il a voté pour le maintien de ce paragraphe, c'est pour les mêmes raisons qu'a exposées le représentant du Royaume-Uni, à savoir pour permettre aux autres pays d'assujettir les réfugiés à une taxe spéciale. Le Danemark, quant à lui, ne les y assujettira pas.

La discussion sur l'article 24 est close.

Article 25 : Transfert des avoirs

Le Comité n'a été saisi d'aucune observation concernant l'article 25.

Article 29 : Naturalisation

M. ROBINSON (Israël) se demande s'il existe une définition juridique du terme « assimilation ». Le terme « naturalisation » est bien connu et possède une signification précise ; mais le terme « assimilation », pour admis qu'il soit en sociologie, évoque une idée assez fâcheuse qui présente d'étroits rapports avec la notion de contrainte. Si l'on se propose seulement d'indiquer qu'il faut permettre aux réfugiés de disposer des moyens d'apprendre la langue du pays d'accueil, il n'y a rien à redire à cela. Mais, si l'assimilation est volontaire, il n'est point besoin d'en faire mention ; si elle ne l'est pas, elle portera atteinte à l'indépendance spirituelle du réfugié. Il importe de se souvenir que les véritables réfugiés sont les réfugiés politiques, par exemple les républicains espagnols. Il semble bien que le France ne se propose pas d'assimiler les républicains espagnoles réfugiés sur son territoire, pas plus que ces républicains eux-mêmes ne souhaitent être assimilés. Pour ces raisons, le représentant d'Israël propose la suppression des mots « l'assimilation et », à l'article 29.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) dit que le mot « assimilation » se trouve aussi bien dans la résolution qu'a votée l'Assemblée générale sur la question des réfugiés que ans le statut du Haut-Commissaire. Ce n'est pas forcément une raison pour conserver le mot ici ; mais il semble que la valeur particulière qui lui est donnée à l'article 29 soit désormais admise. Si toutefois le Comité tient à supprimer le mot, la délégation des Etats-Unis ne s'y opposera pas.

M. PEREZ PEROZO (Venezuela) mentionne une disposition des lois en vigueur au Venezuela en matière de réinstallation et d'immigration, où l'on trouve le mot « assimilation » employé sans aucune idée de contrainte. Le Venezuela, comme les autres jeunes républiques de l'Amérique latine, possède d'immenses espaces insuffisamment développés ; des perspectives illimitées s'offrent au développement économique, et le pays espère accueillir et accueillera très volontiers des immigrants. Mais il espère aussi que les immigrants t les réfugiés se fondront dans la communauté nationale et ne resteront pas isolés, en somme, il espère qu'ils s'assimileront. Le terme « assimilation », pour vague qu'en soit le sent juridique, possède donc en pratique une signification précise et l'orateur estime qu'il convient de la conserver.

M. JUVIGNY (France) appuie les observations formulées par le représentant du Venezuela. En effet, le but de cette convention, dans ses dispositions essentielles, est de conférer aux réfugiés un statut au moins égal à celui des étrangers en générale et, dans beaucoup de cas, très supérieur. L'objet de la recommandation qu'énonce l'article 29 est de conduire à la naturalisation du plus grand nombre possible de réfugiés. Certes, le terme « assimilation » a, d'une part, une signification sociologique et, d'autre part peut avoir certaines résonances désagréables. Cependant, dans son sens actuel et compte tenu du contexte, ce terme correspond tout à fait à fait à un certain stade de l'évolution de la vie du réfugié et de l'évolution générale du problème des réfugiés.

La Convention a pour but de donner aux réfugiés des moyens d'existence ; d'autre part, elle confère, notamment à ceux qui désirent s'établir dans un pays pour une certaine durée, un traitement plus favorable que celui dont jouissent les étrangers. En définitive, elle tend à permettre l'assimilation des réfugiés dans une communauté nationale, grâce à la procédure de naturalisation. En conséquence, le représentant de la France considère que le terme « assimilation » correspond bien à la condition que doit remplir le réfugié pour être naturalisé.

Pour ce qui est du sens juridique qu'a pris ce terme, l'orateur indique qu'il est plusieurs fois utilisé dans les dispositions nouvelles du code de la nationalité adoptées en France, non seulement dans l'exposé des motifs, mais également dans les dispositions expresses. Il est notamment employé lorsqu'il y a accession à la nationalité de façon automatique. C'est pourquoi le représentant de la France croit que, même si on a quelque doute sur le sens juridique de ce terme, il correspond parfaitement au stade intermédiaire entre l'établissement du réfugié sur le territoire et sa naturalisation. A son avis, il n'y a aucun inconvénient à l'employer dans l'article 29 qui a pour fin dernière la naturalisation du réfugié et qui. Au demeurant, n'est qu'une recommandation. Du point de vue de la délégation française, il y aurait même quelque intérêt à maintenir ce terme.

M. ROBINSON (Israël) estime qu'un terme comme « adaptation » ou un terme de ce genre serait préférable au terme « assimilation ». Il propose toutefois au Comité de laisser les choses telles quelles pour le moment, et de demander au Comité de rédaction d'examiner la possibilité d'employer un terme plus pertinent ; il est évident que tous les membres du Comité sont d'accord sur l'idée à exprimer.

M. CHA (Chine) dit que son pays est de ceux qui réussissent à merveille à assimiler les étrangers, envahisseurs ou réfugiées. Il estime que le terme « assimilation » doit être conservé, car il répond exactement aux fins de l'article.

M. WINTER (Canada) précise que dans son pays, le terme « assimilation » s'emploie couramment quant il s'agit d'installer des immigrants à demeure. Il faut se souvenir que des réfugiés non assimilés ne désireront peut-être pas être naturalisés, et que d'autre part, le pays d'accueil lui-même ne sera peut-être guère enclin à naturaliser des réfugiés non assimilée. Il estime qu'il faut conserver le mot.

Le PRESIDENT pense que le Comité de rédaction proposera peut-être certaines modifications de forme qui donneront satisfaction au représentant d'Israël.

M. SCHURCH (Suisse) précise que la législation fédérale suisse relative à la naturalisation ne prévoit pas un traitement différent pour les réfugiés. Ceux-ci sont considérés comme les autres étrangers, qui doivent avoir résidé régulièrement en Suisse pendant six ans au cours des douze dernières années, pour pouvoir présenter valablement une demande de naturalisation. Le séjour en Suisse en qualité de réfugié compte comme résidence régulière. En fait, une résidence plus longue est nécessaire pour assurer au requérant une assimilation suffisante, c'est pourquoi l'avant-projet de la nouvelle loi sur la nationalité prévoit une extension sensible du minimum légal de résidence régulière.

M. MALFATTI (Italie) renouvelle les réserves déjà exprimées par le Gouvernement italien au sujet de l'article 29. L'Italie subit une importante pression démographique dont les conséquences sont très graves dans le domaine économique comme dans le domaine social. Ceci oblige le Gouvernement italien à se montrer extrêmement sévère en matière de naturalisation ; c'est pourquoi, au cours des dernières années, le nombre des naturalisations a été réduit au minimum, même en ce qui concerne les étrangers résidant normalement en Italie. Il ne peut donc être question de naturaliser en masse plusieurs milliers de réfugiés.

Le représentant de l'Italie souligne que, d'un point de vue générale, le problème de la naturalisation des réfugiés ne se pose pas dans son pays qui, en raison de sa position géographique, et de certaines considérations particulières ne peut leur offrir qu'une hospitalité provisoire. A cet égard, le venir en aide aux réfugiés. C'est ainsi que le Gouvernement italien a toujours fait et continuera à faire son possible pour venir en aide aux réfugiés. C'est ainsi que le Gouvernement italien a conclu l'année dernière avec l'Organisation internationale pour les réfugiés un accord permettant le transit de 100 000 réfugiés, et qu'il vient de conclure avec le Gouvernement d'Israël un accord autorisant 60 000 juifs à s'embarquer dans des ports italiens à destination d'Israël.

La discussion sur l'article 29 est close.

La séance est levée à 17 h. 45.