Le HCR exprime son mécontentement quant aux nouvelles directives de l'Union européenne sur la réunification familiale
Le HCR exprime son mécontentement quant aux nouvelles directives de l'Union européenne sur la réunification familiale
Le 23 septembre 2003
Genève - Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés a aujourd'hui fait part de ses réserves en ce qui concerne l'adoption, au terme de plus de trois ans de négociations, par les Etats membres de l'Union européenne, de la dernière série de mesures visant à uniformiser leurs politiques en matière d'asile, tout en soulignant que les normes d'harmonisation avaient été considérablement diluées au cours du long processus de négociations.
Le HCR a déclaré que la dernière directive, qui détermine les conditions de réunification des réfugiés et des migrants avec leurs familles, discriminait certains réfugiés en risquant de les maintenir séparés de leurs femmes et de leurs enfants sans raison valable.
Le HCR s'est dit satisfait du fait que la directive présente moins de restrictions pour la réunification des familles de réfugiés que pour celles des autres migrants. Par exemple, contrairement aux migrants, les réfugiés ne sont pas obligés de prouver qu'ils peuvent se procurer un logement et bénéficier d'une assurance médicale, ni qu'ils disposent d'une source de revenus stable et régulière. Toutefois, ces justifications peuvent être exigées dans le cas où un réfugié n'a pas présenté de demande de réunification familiale dans les trois mois après avoir obtenu le statut de réfugié. En outre, les réfugiés sont exemptés de l'obligation, faite aux migrants, d'avoir résidé deux ans dans un pays avant que leur famille ne vienne les rejoindre.
Toutefois, le HCR a dit regretter que certaines des mesures restreignant la réunion des familles de migrants touchent également les familles de réfugiés.
Selon le HCR, les normes de base et le degré réel d'harmonisation des nouvelles directives ont été considérablement dilués par rapport au premier projet esquissé par la Commission européenne en 1999.
« La réunification familiale peut être refusée pour des raisons de politique nationale, de la sécurité de l'Etat, ainsi que pour des raisons ayant trait à la santé publique », a déclaré Raymond Hall, directeur du bureau pour l'Europe du HCR. « Mais le problème réside dans le fait que la notion de 'politique nationale' est un terme très vague qui pourrait être invoqué pour maintenir les familles séparées, sans réelle justification. »
Par exemple, la directive contient à présent une définition étroite de l'unité familiale, ce qui permettra aux Etats membres de réduire les membres de la famille autorisés à rejoindre leurs conjoints et leurs enfants mineurs. En vertu de cette directive, les Etats ne sont pas obligés d'admettre les enfants adultes, les parents âgés ou d'autres proches même s'ils sont entièrement dépendants du réfugié en question.
En outre, la directive est dotée d'une disposition stipulant que les réfugiés et les migrants ne sont pas automatiquement habilités à être réunis avec leur épouse si les deux conjoints ne sont pas âgés de 21 ans, ce qui risque de séparer des jeunes couples qui ont peut-être déjà des enfants.
Le HCR critique également les dispositions stipulant que les membres des familles réunifiées des réfugiés reconnus comme tels peuvent être empêchés de travailler jusqu'à près d'un an pour des raisons « liées à la situation du marché du travail ».
Finalement, le HCR s'est dit très déçu par le fait que la nouvelle directive n'accorde aucun droit à la réunification familiale aux personnes ayant obtenu « des formes subsidiaires de protection ». Une forme subsidiaire de protection est un statut qui devrait être similaire au statut de réfugié, mais qui est octroyé aux personnes ne remplissant pas strictement les conditions demandées dans la Convention de 1951 sur les réfugiés, notamment la notion que les réfugiés doivent craindre une persécution individuelle, plutôt que, par exemple, la violence généralisée ou les bombardements aveugles lors d'une guerre civile.
Le HCR soutient que les personnes qui ont été reconnues comme ayant besoin d'une protection internationale devraient avoir droit à un traitement selon les normes de base, y compris le droit de vivre avec leur famille, qu'elles bénéficient d'une protection selon les termes de la Convention de 1951 ou d'une forme alternative de protection.
« Nous ne voyons pas de justification à l'exclusion des bénéficiaires de la protection subsidiaire, de la portée de la directive », a déclaré Raymond Hall, « car les besoins de ces personnes sont souvent aussi incontestables que ceux des réfugiés. »
Ainsi, une personne qui a fui une persécution individuelle en Bosnie au début des années 90 aurait droit à faire venir sa famille dans son pays d'asile dans l'Union européenne, tandis qu'une personne ayant échappé aux bombardements incessants des villes assiégées de Bosnie, comme Sarajevo ou Gorazde, pourrait se voir octroyer une forme subsidiaire de protection. Aux termes de la nouvelle directive de l'Union européenne, cette dernière personne n'aurait pas droit à la réunification familiale.