Une nouvelle vie à Ottawa, après les difficiles conditions du camp de Ruweished dans le désert jordanien
Une nouvelle vie à Ottawa, après les difficiles conditions du camp de Ruweished dans le désert jordanien
OTTAWA, Canada, 11 janvier (UNHCR) - Labiba Eisa et sa famille sont passés d'un extrême à l'autre. Après plus de trois ans d'incertitude et de souffrance dans un camp situé dans le désert jordanien, ces réfugiés ont été réinstallés au début du mois dernier dans les températures hivernales du Canada. Dans ce pays, les services fonctionnent bien, les magasins sont remplis, les gens vivent en harmonie et le seul aspect tangible de la guerre se trouve dans les pages « étranger » du journal local.
« Ma première impression à l'aéroport de Toronto a été d'arriver sur une autre planète. Des gens que nous ne connaissions même pas nous souriaient, leur gentillesse m'a laissée bouche bée », raconte cette mère de trois enfants, de formation universitaire.
Après leur arrivée au Canada, Madame Eisa, son mari et leurs enfants ont rapidement été transférés dans leur nouveau logement à Ottawa, la capitale. Cette famille fait partie d'un groupe de 63 Palestiniens qui étaient réfugiés dans le camp isolé de Ruweished. Le Gouvernement canadien a accepté leur réinstallation, et maintenant la plupart d'entre eux sont arrivés.
Cette réinstallation est la fin d'un long voyage qui a commencé à peine un mois après l'invasion de l'Iraq par les forces américaines, en mars 2003, suivie par la chute du régime du président Saddam Hussein. Labiba Eisa et sa famille sont d'origine palestinienne, mais l'Iraq était le pays où ils sont nés et où ils ont grandi. C'était leur pays.
Cependant les Palestiniens étaient associés à Saddam Hussein et ils sont devenus la cible de discriminations et de violences. La famille a été forcée de quitter l'appartement qu'elle louait et a décidé de partir pour la Jordanie, quand l'école primaire fréquentée par leur fille cadette a été attaquée par des tirs de mortiers. « Il était clair que les choses ne feraient qu'empirer pour nous », explique Labiba Eisa.
Ils sont enfin arrivés à Ruweished, un camp de tentes infesté par les scorpions et fréquemment exposé à des vents violents et des tempêtes de sable. Ils devaient supporter une température excessivement élevée durant l'été et un froid extrême la nuit. « Nous étions alors en sécurité, cependant nous nous sentions en prison avec les gardes qui surveillaient les entrées », a indiqué Labiba Eisa.
Le monde semblait avoir oublié cette famille ainsi que les autres Palestiniens, dont plusieurs d'entre eux avaient fini par décider de rentrer et de tenter leur chance en Iraq plutôt que de dépérir à Ruweished. Cependant l'UNHCR avait déjà commencé à s'occuper de leur cas, afin de trouver une solution à long terme pour les 150 Palestiniens hébergés à Ruweished.
Le Canada a répondu à l'appel, offrant la réinstallation pour 63 personnes de ce groupe. « Nous apprécions beaucoup que l'UNHCR ait travaillé pour nous aider à venir au Canada », a expliqué Eisa, ajoutant qu'elle ressentait de la tristesse pour ceux qui étaient restés en Jordanie avec lesquels elle avait créé de solides liens affectifs.
« J'ai appelé mes amis dès mon arrivée à Ottawa. Personne ne sait ce que l'avenir leur réserve, je ne pourrai jamais les oublier », a-t-elle expliqué. Ses parents ainsi que ses quatre frères et soeurs restés à Bagdad lui manquent aussi. Elle craint pour leur sécurité.
Sa priorité est maintenant d'inscrire ses trois enfants à l'école. « Ils n'ont pas été scolarisés normalement depuis quatre ans », a-t-elle expliqué, au sujet de ses filles, Hanin, 17 ans, et Ayat, 9 ans, ainsi que d'Ahmad, son fils de 16 ans. Au camp, ils n'ont pu suivre que des cours d'anglais.
Une fois cette tâche achevée, elle et son mari, Nayef Amoura, souhaiteraient trouver du travail. « Je suis optimiste car nous sommes au Canada. Ici tout le monde nous aide et personne ne nous critique ou nous montre du doigt », a-t-elle ajouté, en faisant référence à son voile islamique. Labiba Eisa était auparavant professeur de lycée à Bagdad, son mari était ingénieur.
Pour la première fois depuis des années, Labiba Eisa est optimiste et croit en l'avenir. « Lorsque nous étions dans le camp, le Canada avait la réputation d'être le meilleur pays d'accueil pour les réfugiés », a-t-elle dit. « Je suis très reconnaissante envers ce pays qui se montre à la hauteur de sa réputation. »
Par Nanda Na Champassak à Ottawa, Canada