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Une ancienne réfugiée colombienne ouvre sa porte aux Vénézuéliens à leur tour dans le besoin

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Une ancienne réfugiée colombienne ouvre sa porte aux Vénézuéliens à leur tour dans le besoin

Angelica Lamos avait été bien accueillie au Vénézuéla quand elle a dû fuir les rebelles armés de son pays. Aujourd'hui de retour en Colombie, elle ouvre sa porte aux Vénézuéliens qui sont à leur tour dans le besoin.
31 Août 2017
Angelica Lamos discute avec des Vénézuéliens qu'elle accueille chez elle à Cúcuta, en Colombie

Angelica Lamos Ballesteros, 51 ans, avait été accueillie au Venezuela, lorsque des guérilleros armés l'ont obligée à fuir sa maison dans les montagnes du nord du département de Santander en Colombie. Aujourd’hui de retour en Colombie, elle a ouvert sa porte aux Vénézuéliens qui sont à leur tour dans le besoin.


« C'est à mon tour de faire quelque chose », explique Angelica Lamos depuis sa maison campée sur une colline poussiéreuse de la banlieue de Cúcuta, une ville de Colombie, à l'ouest du fleuve Táchira, qui marque la frontière avec le Vénézuéla à son tour en pleine crise.

Cela fait des années que la région vit au rythme des gens qui fuient la violence le long de cette frontière perméable de plus de 2200 km entre le Vénézuéla et la Colombie.

Ne connaissant que l'agriculture, Angelica — dont la petite stature cache une confiance et une détermination d'acier – était repartie à zéro au Vénézuéla, après avoir traversé la frontière avec un sac de vêtements pour seul bagage, il y a 14 ans.

Pourtant, alors qu'elle y avait fait sa vie et élevé sa famille, elle a été forcée de rentrer en Colombie en août 2015 lorsque le Vénézuéla a donné l'ordre d’expulser les Colombiens depuis la région frontalière. Cette mesure a forcé quelque 20 000 Colombiens à quitter le pays – dont de nombreuses personnes déracinées par la longue guerre civile en Colombie.

« Les gens arrivent ici sans rien. Le plus important, c'est donc de leur offrir un endroit où loger. »

« J'ai ouvert ma porte il y a deux ans, dès que les expulsions ont commencé », explique Angelica. « J'y ai vécu, j'y ai travaillé, j'y ai fait ma vie et je sais ce que c'est de devoir tout abandonner. Les gens arrivent ici sans rien. Le plus important, c'est donc de leur offrir un endroit où loger. »

L'inflation galopante, la pénurie généralisée de nourriture et de médicaments, les troubles politiques et la violence font fuir les Vénézuéliens par dizaines de milliers. Ils sont nombreux à suivre la même route qu'Angelica, et à traverser la frontière à pied pour se rendre à Cúcuta, dans l'espoir de trouver une vie meilleure, et pour certains de déposer une demande d'asile.

Depuis son retour en Colombie, Angelica vit dans une maison de style colonial, où elle accueille des Vénézuéliens qui fuient la crise. Elle leur offre un abri, de la nourriture et la solidarité. La cour intérieure de la maison est le lieu où les résidents se retrouvent et prennent quelquefois les repas ensemble. Les pièces sont spacieuses et certaines familles partagent un lit.

Des femmes et des enfants partagent un repas dans la maison de l'ancienne réfugiée Angelica Lamos à Cúcuta, en Colombie.

« Pour le moment, une dizaine de Vénézuéliens vivent ici », raconte-t-elle, d’une voix animée et en gesticulant. « Certains restent un mois, d'autres trois mois, jusqu'à ce qu'ils parviennent à s'en sortir tout seuls. Nous les aidons à comprendre quels sont leurs droits en Colombie, nous les aidons à avoir des papiers en règle. »

Selon les estimations du gouvernement colombien, quelque 300 000 Vénézuéliens vivent actuellement dans ce pays andin qui n'est doté que de très peu d'infrastructures, en dépit de la mise en place récente de permis de travail temporaires pour ceux qui ont traversé légalement la frontière et ont dépassé la durée de séjour de leur visa.

Plus de 650 000 Vénézuéliens viennent régulièrement faire leurs achats en Colombie grâce à une carte de mobilité frontalière, principalement pour acheter de la nourriture et d'autres produits de première nécessité. Depuis début 2017, 32 000 Vénézuéliens ont déposé une demande d'asile dans le monde, le rythme s'étant nettement accéléré par rapport au total de 34 000 demandes pour l’ensemble de l'année dernière.

« La Colombie a longtemps été un pays générateur de réfugiés. Le pays doit maintenant s'adapter à sa condition de pays d'accueil. »

« La Colombie a longtemps été un pays générateur de réfugiés », explique Josef Merkx, le représentant du HCR, l'agence des Nations Unies pour les réfugiés. Il y a dans le monde plus de 340 000 réfugiés colombiens, auxquels s'ajoutent les sept millions de personnes déplacées internes à cause du conflit. « Le pays doit maintenant s'adapter à sa condition de pays d'accueil. »

Dans leur effort personnel pour accueillir les réfugiés, Angelica et sa famille organisent chaque mois un déjeuner gratuit pour la communauté. Elle facture un loyer plancher de 1 USD par mois à ses locataires et se montre compréhensive lorsque quelqu'un ne peut pas payer. « Nous les encourageons également à travailler, à faire du porte-à-porte pour trouver quelque chose à faire et s'occuper. »

Le Vénézuélien Oswell Mujica se trouve devant l'auberge de jeunesse gérée par Angelica Lamos à Cúcuta, Colombie. Il vend une boisson fermentée sucrée appelée mazato, fabriquée par des femmes de l'auberge pour payer son loyer et ses frais de logement.

Oswell Mujica, un étudiant vénézuélien de 19 ans, figure parmi ceux qu'elle a accueillis. Il a fui Caracas en janvier et est arrivé sans rien à Cúcuta. « Je cherchais du travail, mais il n'y en avait pas. Le gouvernement a laissé tomber les gens », dit-il, s’exprimant à voix basse dans la cour intérieure de la grande maison d’Angelica.

« Quand je suis arrivé à Cúcuta, j'ai dû dormir dans la rue, et puis j'ai trouvé cette maison. » Il explique qu'il a eu faim pendant les premières semaines qu'il a passées en Colombie. « C'était comme au Vénézuéla quand je suis arrivé ici. »

Si bon nombre de ceux qui passent par la maison d’Angelica ont fui la famine et la violence, certains affirment que c'est la menace de violence politique qui les a forcés à partir de chez eux. Keener González, 21 ans, se souvient des manifestations auxquelles il a assisté à Caracas et de la réaction impitoyable qu'elles entrainaient.

« Là-bas, on n’a pas le droit de critiquer le gouvernement », dit-il devant la maison d’Angelica où il assiste à une réunion sur les droits des nouveaux arrivants vénézuéliens. « Ils brutalisent les manifestants, ils arrêtent ceux qui prennent des photos… Je ne peux pas vivre dans un pays comme ça. »

Pour Angelica, la décision d'ouvrir sa porte a été simple à prendre. « Les Vénézuéliens sont dans une passe très difficile pour le moment et ça me peine. J'y ai vécu et j'y ai toujours été bien traitée... Mais maintenant, les autorités se comportent de manière horrible », explique-t-elle. « Nous sommes tous des êtres humains, et nous avons des droits. »