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Un sanctuaire contre la violence pour les réfugiés colombiens en Equateur

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Un sanctuaire contre la violence pour les réfugiés colombiens en Equateur

Chaque mois, plus de 600 demandeurs d'asile colombiens s'enregistrent auprès de l'UNHCR en Equateur. L'agence fournit un hébergement temporaire aux cas les plus désespérés pour qu'ils réapprennent à vivre en paix.
26 Septembre 2006
A Lago Agrio, un enfant réfugié colombien joue à cache-cache près de l'abri de l'UNHCR, sa maison depuis plus d'un an.

LAGO AGRÍO, Equateur, 25 septembre (UNHCR) - A quelques kilomètres de la frontière colombienne, à Lago Agrío, l'abri de l'UNHCR offre un premier point d'escale et un foyer temporaire aux réfugiés les plus vulnérables arrivés dans l'est de l'Equateur. Disposant d'une capacité d'accueil de 250 personnes, à laquelle s'ajoute la possibilité de loger sous tente 250 personnes supplémentaires en cas d'urgence, l'abri est rarement vide.

Sonia est arrivée en Equateur il y a moins d'un mois. Elle pleure sans arrêt. Cette jeune femme de 22 ans a fui sa maison, dans le sud de la Colombie, après que des membres d'un groupe armé irrégulier aient tué son frère et kidnappé sa mère.

La jeune Colombienne était en train de faire la vaisselle à l'arrière de la maison lorsque les assaillants sont arrivés. Elle s'est cachée sous l'évier dès qu'elle a entendu des tirs et les cris de sa mère. « J'ai attendu tout le reste de la journée avant de trouver le courage de quitter ma cachette. Je suis partie à la recherche de ma mère et, quand je suis sortie de la maison, j'ai découvert le corps de mon frère étendu dans la rue. Personne n'avait osé l'aider. Je ne sais toujours pas ce qui est arrivé à ma mère », se souvient-elle.

Sonia n'est jamais retournée dans sa maison. Elle a marché pendant des heures, pleurant sans arrêt, jusqu'à ce qu'une femme l'arrête et lui demande ce qui n'allait pas. Elle lui a alors donné de l'argent pour prendre le bus jusqu'à la frontière équatorienne. Sonia s'est ensuite rendue au bureau de l'UNHCR à Lago Agrío, d'où elle a été immédiatement emmenée à l'abri.

« En moyenne nous enregistrons plus de 200 nouveaux demandeurs d'asile par mois. Il n'y a pas assez de place pour tout le monde dans l'abri », raconte Oscar Butragueño du bureau de l'UNHCR à Lago Agrío. « Nous donnons la priorité aux gens qui sont le plus dans le besoin. Sonia était complètement traumatisée ; c'est une jeune femme seule, sans argent. Elle ne connaît personne ici. Dans son cas, il n'y avait aucune autre alternative. »

Un psychologue de l'Hebrew Immigrant Aid Society, l'un des partenaires d'exécution de l'agence pour les réfugiés en Equateur, tente de venir en aide à Sonia. Elle bénéficie également d'autres soins.

L'abri est géré sur une base coopérative et Sonia fait à tour de rôle la cuisine et le ménage avec d'autres réfugiés. L'implication des réfugiés dans la vie quotidienne de l'abri a un effet thérapeutique sur nombre d'entre eux. La majorité vient de régions de Colombie où le tissu social a été détruit par des années de violence.

En partageant des tâches avec d'autres Colombiens, les réfugiés apprennent lentement à vivre en paix et à faire confiance aux autres, parfois pour la première fois de leur vie. Aujourd'hui, Sonia partage la cuisine avec Maria Teresa, une jeune mère de deux enfants qui a fui la Colombie trois semaines auparavant.

Le groupe armé irrégulier qui a persécuté Maria Teresa et sa famille pendant des années est le pire ennemi de celui qui a tué le frère de Sonia. En Colombie, les deux femmes auraient eu bien trop peur pour oser se parler, mais ici elles peuvent s'exprimer librement et partager leur peine.

Toutes deux sont inquiètes pour leur avenir. Dans quelques semaines, elles devront quitter l'abri, les réfugiés pouvant rester trois mois au maximum, six dans les cas extrêmes. Mais les deux femmes, qui ne savent pas de quoi sera fait leur avenir, sont encore davantage préoccupées par les six enfants abandonnés avec qui elles partagent l'abri.

L'histoire de ces quatre frères et deux soeurs est déchirante. Ils sont arrivés en Equateur deux ans auparavant avec leur père, qui avait fui après avoir été sévèrement battu et menacé par des membres d'un groupe armé irrégulier. Leur mère était morte peu de temps avant leur départ.

Comme de nombreux Colombiens parmi les quelque 250 000 relevant de la compétence de l'UNHCR en Equateur, leur père avait trop peur pour se faire connaître auprès des autorités à leur arrivée. Pendant plusieurs mois, il a essayé de subvenir tout seul aux besoins de sa famille.

« Nous avons été alertés par l'église locale et quand nous sommes arrivés dans la maison, nous avons trouvé les enfants dans une pièce, sans nourriture », a indiqué Oscar Butragueño. « Le plus âgé avait alors 13 ans et il est handicapé mental. Le plus jeune avait moins de trois ans. Nous les avons immédiatement transférés dans l'abri. »

C'était il y a plus d'un an. Il y a deux mois, leur père est parti et n'est jamais revenu. L'orphelinat local a donné son accord pour prendre en charge quelques-uns des enfants, ceux âgés de 10 ans et moins, mais l'UNHCR recherche une solution pour ne pas séparer la fratrie.

Pendant cette période de vacances d'été, les enfants passent la plupart de leur temps à regarder la télévision et à jouer ensemble. Ils sont très calmes. « C'est bien ici », a expliqué l'aînée. Le plus jeune, âgé de quatre ans, joue à cache-cache avec les visiteurs. Chaque fois que quelqu'un s'en va, il demande à monter dans la voiture jusqu'au portail de l'abri. « Je veux venir avec vous », dit-il à l'équipe de l'UNHCR qui lui rend visite, « mais ma soeur m'a dit que je ne peux pas aller plus loin que le portail. »

Par Marie-Hélène Verney à Lago Agrío, Equateur