Un plongeur se souvient de l'horreur après le naufrage d'un bateau de réfugiés au large de l'Égypte
Un plongeur se souvient de l'horreur après le naufrage d'un bateau de réfugiés au large de l'Égypte
ROSETTE, Égypte – Emad Fath El Bab était le premier plongeur à se mettre à l'eau après le naufrage du bateau. Au terme de la première journée, son équipe de 14 hommes avait déjà récupéré six corps. « Je n'oublierai jamais le premier corps que j'ai trouvé », se souvient-il. « C'était un choc. Mais on devait continuer les recherches. »
Conçu pour transporter 40 personnes, le bateau avait embarqué plus de 350 réfugiés et migrants originaires de Syrie, d'Érythrée, du Soudan, de Somalie et d'ailleurs. Au total, 203 personnes ont péri, noyées, lors du naufrage au large de Rosette, en Égypte, le 21 septembre 2016.
« J'ai été le premier à plonger et il a fallu que j'y reste, sinon l'équipe n’aurait pas suivi. Nous avions tous peur, ce n'était pas notre spécialité. Ce n'était que la deuxième fois pour nous. Le bateau n’était qu’à huit kilomètres au large de Rosette, et il se trouvait à 12,5 mètres de profondeur », ajoute-t-il.
Des pêcheurs ont posé des filets autour du bateau pour empêcher les corps d'être entraînés par le courant et une petite entreprise de plongeurs a été engagée pour chercher des survivants et récupérer les corps. Une barge équipée d’une grue de 100 tonnes a également été dépêchée sur les lieux pour aider à renflouer le bateau et récupérer les corps. « Nous avons récupéré trente-cinq corps – trente-deux hommes, une femme et deux enfants », se souvient Emad, 43 ans. « Nous avons finalement pu renflouer le bateau le 27 septembre. Le travail a été très bien mené, mais nous avions tous le cœur serré à cause des circonstances.
« Nous avions tous peur. »
« C'est triste que des gens envisagent de faire ça, de courir de tels risques. Ça ne devrait pas se passer. »
Hasina*, une jeune Somalienne de 21 ans, est l’une des survivantes. Cette nuit-là, elle tentait pour la troisième fois de quitter l'Égypte pour gagner l’Italie par la mer. Après avoir grandi en Ouganda en tant que réfugiée, elle vivait en Égypte avec trois amies somaliennes depuis avril 2016, et elle essayait de trouver le moyen de rejoindre un oncle au Royaume-Uni. Ses trois amies sont mortes en mer ce jour-là.
« On a vu flotter la robe bariolée que portait Anestaha, mais on n'a pas pu l’atteindre», explique Hasina. « On pense qu'elle est morte, mais on n'a pas trouvé sa photo parmi celles des corps qui ont été récupérés. »
« Dans l'eau, ça a été la lutte pour la vie, non seulement parce que je ne sais pas nager, mais parce que des gens essayaient de me prendre mon gilet de sauvetage. Quelqu'un m'a mordu la main. »
Après enquête, 56 personnes liées à la catastrophe ont été inculpées. Les prévenus ont été accusés d'homicide, de trafic, de fraude, et d'utilisation de bateaux à des fins non autorisées.
En octobre 2016, moins de deux mois après le naufrage, le parlement égyptien a adopté une loi contre le traite des êtres humains, qui prévoit de lourdes peines pour les passeurs et trafiquants. Le nombre de réfugiés, de demandeurs d'asile et de migrants qui partent de la côte nord de l'Égypte pour rejoindre l'Europe a considérablement diminué en 2017.
« Nous félicitons le gouvernement pour les poursuites qu’il a engagées contre les passeurs et les trafiquants qui profitent de la misère des réfugiés qui fuient la persécution et les violations des droits de l'homme », a déclaré Karim Atassi, le représentant du HCR en Égypte.
En Égypte, le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, coopère avec le gouvernement pour renforcer la protection des demandeurs d'asile et des réfugiés en Égypte.