Pour les Afghans du Pakistan, hébergement et travail sont les facteurs clés du retour
Pour les Afghans du Pakistan, hébergement et travail sont les facteurs clés du retour
ISLAMABAD, Pakistan, 31 mars (UNHCR) - Près de 9 000 Afghans sont rentrés chez eux depuis le Pakistan au cours de ce premier mois de l'opération de rapatriement facilité par l'UNHCR cette année. L'emploi et le logement sont les deux principaux facteurs qui ont pesé dans leur décision de rentrer.
Après une pause hivernale, l'agence des Nations Unies pour les réfugiés a repris le 1er mars, et pour la cinquième année consécutive, son opération de rapatriement volontaire vers l'Afghanistan. Un groupe de 5 218 Afghans a ainsi quitté la Province frontière du Nord-Ouest ; 1 840 d'entre eux sont rentrés de Baloutchistan, 1 422 de Sindh et 362 de Punjab et Islamabad.
Amir Bibi, 30 ans, a voyagé pendant plus de sept heures à bord d'un camion de Lahore, dans la province du Punjab, au centre de rapatriement volontaire de l'UNHCR à Tarnol, situé à la sortie d'Islamabad. A travers sa bourka bleue, elle explique qu'elle rentre à Nangarhar, dans l'est de l'Afghanistan, avec ses cinq enfants, son frère et des cousins.
« Mon mari était vendeur de popcorn à Lahore. Il y a trois mois, il est rentré à Jalalabad. Il y travaille comme garde dans une école » dit-elle. « Tout le monde préfère vivre dans son pays. Si nous avons attendu si longtemps, c'est parce que nous n'avons pas de terre ou de logement dans notre pays. Mais, maintenant que mon mari a trouvé du travail, nous partons. »
Akhter Mohammad, un homme de 45 ans qui vient de Karachi, confirme. « Je suis allé en Afghanistan deux fois au cours des 20 dernières années. Je voulais voir si je pouvais ramener ma famille dans notre pays car c'est là que je veux être enterré », déclare-t-il à un employé de l'UNHCR avant de prendre le chemin en direction de la frontière. « Il me semblait que les conditions n'étaient pas assez sûres pour ma famille. Mais, il y a quelques jours, mes parents, qui vivent à Paktika [dans l'est de l'Afghanistan] m'ont demandé de rentrer. Ils m'ont trouvé un travail de professeur de madrassah. »
Bien souvent, les réfugiés rejoignent des membres de leurs familles déjà rapatriés. « Mon père est en train de reconstruire notre maison », dit Attaullah, un colporteur de Quetta, en route vers Karg Bagh, dans la province de Ghazni située à l'est de l'Afghanistan. « Ici, ce n'est pas facile d'être un réfugié. Maintenant nous avons une chance de pouvoir rentrer. J'espère simplement que mes enfants pourront aller à l'école quand nous serons de retour. »
Nour Ahmed est journalier, sa famille habite Quetta depuis 20 ans. « Nous sommes heureux de rentrer. Après tout, le Pakistan n'est pas notre pays d'origine », a-t-il expliqué. « Pourquoi maintenant ? Notre village nous manque, et nous savons que c'est la dernière année de l'Accord tripartite. »
L'Accord tripartite actuel entre l'Afghanistan, le Pakistan et l'UNHCR qui encadre le rapatriement volontaire devait arriver à son terme en mars mais sa durée a été prolongée jusqu'en décembre 2006. Selon ses termes, chaque famille afghane de retour reçoit une allocation de voyage d'un montant se situant entre 4 et 37 dollars qui dépend de la distance à parcourir. Chaque personne reçoit 12 dollars d'aide à la réintégration.
Avec l'aval de la Commission tripartite, les autorités pakistanaises ont décidé de fermer les camps de Girdi Jungle et de Jungle Pir Alizai au Baloutchistan, ainsi que les camps de Katchagari et Jalozai dans la Province frontière du Nord-Ouest le 30 avril pour des raisons de sécurité et de développement. Les Afghans habitant dans ces camps peuvent choisir de rentrer chez eux avec l'aide de l'UNHCR ou d'être transférés vers d'autres camps sélectionnés par le Gouvernement pakistanais - celui de Mohammad Kheil au Baloutchistan ou 10 camps dans la Province frontière du Nord-Ouest.
Quelque 600 réfugiés ont été rapatriés depuis les quatre camps ces derniers mois ; la majorité des 250 000 Afghans concernés reste toujours indécise.
« Bien sûr, le camp va me manquer », a expliqué Hazrat Ali, un tailleur âgé de 20 ans qui vit à Katchagari. « Je suis né, j'ai grandi et me suis marié ici. Je ne veux pas vraiment partir, mais un jour il faudra bien que je rentre chez moi. » Il fabrique 100 à 150 tenues en un mois, il prévoit de continuer son affaire quand il sera de retour dans la ville de ses ancêtres à Jalalabad.
Dans ce même camp, certains disent qu'ils ont besoin de davantage de temps. A Katchagari, Saima Khan, originaire de Nangarhar, a expliqué : « Nous reviendrons, mais pas maintenant. Nous n'avons pas de maison là-bas. Mon frère est en dernière année d'université et nous ne pouvons pas interrompre ses études. Nous avons besoin d'une année supplémentaire. »
Au camp de Jalozai, les réactions sont également partagées. Bien que 20 familles aient déjà été rapatriées, d'autres évoquent les obstacles qui empêche leur retour. « Nous aimons tous notre pays mais il n'y a pas de paix et nos terres sont occupées par d'autres gens », a affirmé Abdoul Manan, 37 ans, originaire de la province de Jawzjan au nord de l'Afghanistan. « Quand je suis arrivé au Pakistan il y a 30 ans, j'avais une famille. Maintenant, j'en ai 25. »
Même si son magasin de chaussures à Jalozai ne fonctionne « pas très bien, je fais 800 à 1 000 roupies de vente par jour, mais la marge est vraiment très petite », Abdoul Manan ne prévoit pas de partir prochainement : « Nous sommes ici car il n'y a pas d'opportunité en Afghanistan. S'il y en avait, nous serions rentrés depuis longtemps. »
Plus de 2,7 millions d'Afghans sont rentrés chez eux depuis que l'UNHCR a commencé l'aide au retour vers l'Afghanistan en 2002. Environ 2,6 millions d'Afghans habitent toujours au Pakistan.
Par Vivian Tan à Peshawar, Quetta and Tarnol, au Pakistan