Le HCR appelle la Colombie à enquêter sur le meurtre de 17 indigènes
Le HCR appelle la Colombie à enquêter sur le meurtre de 17 indigènes
BOGOTA, Colombie, 10 février (UNHCR) - Le HCR a demandé mardi une enquête approfondie après les meurtres, la semaine dernière, de 17 indigènes awas dans une région isolée du sud-ouest de la Colombie.
« Nous lançons un appel pressant à toutes les parties impliquées pour qu'elles respectent la législation humanitaire internationale et nous demandons au Gouvernement colombien de remplir ses obligations pour la protection des civils et de prendre des mesures spécifiques pour la préservation des peuples indigènes », a expliqué un porte-parole du HCR.
Selon les premières informations émanant des autorités provinciales et locales, les victimes, deux femmes et un enfant, ont été tuées la semaine dernière sur le territoire collectif des Awas dans la région colombienne de Nariño. Le reste de la population est maintenant extrêmement apeuré, dans un contexte de préoccupations accrues sur un déplacement massif de population dans les jours à venir.
La région, située le long de la rivière Telembi entre les villages de Ricaurte et de Barbacoas, est isolée et extrêmement difficile à atteindre. Dans certaines parties de cette région, il y aussi de nombreuses mines antipersonnel. Selon les premières informations, qu'il n'est pas possible de vérifier pour l'instant, les 17 indigènes ont été assassinés au cours d'une attaque de représailles menée par un groupe armé irrégulier contre la population civile après l'arrivée de forces armées colombiennes.
Le bureau de terrain du HCR à Nariño travaille en étroite collaboration avec la population awa qui, comme de nombreux groupes indigènes colombiens, tente tant bien que mal depuis des années de se tenir à l'écart du conflit interne survenant dans le pays. Les Awas, dans cette partie de Nariño, vivent sur un territoire collectif protégé, mais cela n'a pas empêché les groupes armés d'entrer sur leurs terres.
En conséquence, ils sont victimes de graves violations de leurs droits, notamment une pression constante et des persécutions, des meurtres répétés et le déplacement forcé. Ils ont été contraints à plusieurs reprises de fuir leurs terres ancestrales ces dernières années. Certains ont franchi la frontière pour trouver refuge en Equateur voisin. L'usage des mines antipersonnel par des groupes armés irréguliers sur leur territoire est une autre source de terreur et de déplacement forcé.
Ron Redmond, le porte-parole en chef du HCR, a indiqué aux journalistes à Genève mardi que l'agence pour les réfugiés était « choquée et bouleversée par la nouvelle des meurtres perpétrés et qu'elle exprime ses condoléances à la population awa, réitère son soutien à leurs droits à vivre en paix sur leur propre territoire et réaffirme son engagement à continuer à travailler avec eux. »
« Nous demandons également une enquête urgente et indépendante sur ce drame ainsi que des mesures immédiates et efficaces de prévention, telles qu'esquissées dans une série d'alertes déjà publiées à plusieurs reprises par le Bureau de l'Ombudsman de Colombie pour la région de Nariño. »
Avec 21 000 individus, les Awas constituent le plus important groupe indigène à Nariño, un département qui subit les pires violences et le plus haut niveau de déplacement forcé en Colombie. Durant les deux années précédentes, Nariño a connu plus de 10 % de l'ensemble des nouveaux cas de déplacement forcé dans le pays.
Plus de 300 000 personnes ont été déplacées en Colombie en 2007 et les premiers chiffres de 2008 montrent une tendance similaire, portant le nombre total de personnes déplacées internes enregistrées à plus de 2,8 millions.
Le peuple awa est l'un des 87 groupes indigènes en Colombie. Plus d'un tiers de ces groupes sont en danger d'extinction, majoritairement à cause du conflit armé et du déplacement forcé. Leur survie dépend principalement de leur possibilité de demeurer sur leurs territoires ancestraux et de maintenir leurs liens étroits avec leurs terres. La Constitution colombienne les reconnaît comme des populations ayant des droits particuliers et des besoins spécifiques de protection.
Avec 12 bureaux en Colombie, le HCR travaille avec l'Etat dans ses efforts déployés pour remplir ses obligations dans le domaine de la protection ainsi qu'avec des organisations indigènes à travers tout le pays. Dans le cadre de ces efforts, une campagne menée actuellement alerte l'opinion sur l'importance d'une crise qui risque malheureusement de se poursuivre année après année.
Par Marie-Hélène Verney à Bogota, Colombie