Le chef du HCR rencontre des personnes déplacées par le conflit en Ukraine
Le chef du HCR rencontre des personnes déplacées par le conflit en Ukraine
MAYORSK (Ukraine) – Les queues sont longues au point de passage et il faut affronter le froid mordant.
« Ça fait une heure que j'attends », explique un homme à Filippo Grandi, le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés. « Il me faudra cinq heures en tout, juste pour passer de l'autre côté. »
C'est la première visite de M. Grandi en Ukraine depuis qu'il a pris ses fonctions en qualité de chef du HCR en janvier dernier. Le conflit qui fait rage depuis deux ans et demi a chassé de leurs foyers plus de deux millions d'Ukrainiens, déplacés vers d'autres régions du pays ou réfugiés en Russie.
Le conflit a divisé le pays en deux : à l'est, la région du Donbass qui échappe au contrôle du Gouvernement de Kiev, et la majorité du territoire qui demeure sous son contrôle.
« Ce sont les civils qui sont les plus piégés. »
Mayorsk est l'un des quelques points de passage par lesquels les gens peuvent désormais passer d'une zone à l'autre. C'est un processus lent et tortueux, mais ils sont des milliers chaque jour à entreprendre le voyage.
« Ce sont les civils qui sont piégés en fin de compte dans ce conflit », déclare Filippo Grandi.
Nombre de ceux qui font la queue pour passer vers le secteur non contrôlé ont été déplacés. Ils font le voyage pour rendre visite à des parents ou aller voir l'état de leurs maisons, souvent endommagées dans les combats et les bombardements.
Selon l'homme qui s'est adressé à M. Grandi, la plupart de ceux qui passent de l'autre côté sont des retraités, obligés de revenir dans la zone contrôlée par l'État pour percevoir leurs maigres pensions. Pour traverser, ils doivent présenter un badge électronique, ce qui fait avancer la file.
Juste avant, Filippo Grandi s’était rendu à Sviatohirsk dans un foyer qui accueille près de 200 handicapés et leurs soignants, tous déplacés et plusieurs fois pour beaucoup d'entre eux.
Officiellement, il y a en Ukraine 66 434 personnes déplacées enregistrées présentant des handicaps, soit plus de 4 % du nombre total de déplacés.
À Sviatohirsk, elles sont hébergées dans un sanatorium désaffecté de l'époque soviétique. Les résidents, certains en fauteuil roulant, d'autres aveugles, se sont rassemblés autour de Filippo Grandi. Leurs besoins immédiats sont couverts grâce à leurs prestations d'invalidité et s’ils ont du chauffage, ils n’ont pas d'eau chaude parce que d'énormes factures d'eau et d'électricité restent impayées.
« Nous devons vraiment travailler avec l'État pour mettre en place des systèmes. »
Les 35 employés n'ont pas été payés depuis deux ans et travaillent bénévolement. Les sanatoriums ne sont subventionnés ni par les collectivités locales, ni par l'État, comme c'était le cas sous l'ère soviétique.
Avec le concours des ONG partenaires, le HCR fournit à ces personnes déplacées du charbon et du bois, des couvertures, une aide juridique ainsi que des articles de première nécessité. Filippo Grandi, qui a rencontré lundi Petro Poroshenko, le président de l'Ukraine, a promis de réclamer une augmentation de l'aide au profit des personnes touchées par le conflit.
« Nous devons vraiment travailler avec l'État pour mettre en place des systèmes assurant des filets de sécurité pour les plus vulnérables : les personnes âgées, les handicapés et les personnes les plus pauvres », a-t-il indiqué.
Le Haut Commissaire a également rencontré Vlada, une adolescente de 15 ans, originaire d'une ville proche de Luhansk. Vlada est en fauteuil roulant et elle a insisté pour discuter avec Filippo Grandi en anglais, une langue qu'elle a apprise seule.
Elle a aussi appris toute seule à jouer du piano. Elle a expliqué au Haut Commissaire qu'elle avait appris l'anglais pour voir le monde, en ajoutant « maintenant je veux aller à l'école. »
Avant le conflit, elle fréquentait une école équipée de rampes d'accès pour les fauteuils roulants. Mais l'école de Sviatohirsk n'a pas d'accès handicapés et les salles de classe sont au deuxième étage. Alors, elle étudie dans sa chambre et des enseignants viennent parfois la voir pour lui donner des cours.
Filippo Grandi a déclaré que le HCR essaiera de trouver une solution pour lui permettre de reprendre ses études.
« Je trouve que tu as beaucoup de mérite », a-t-il expliqué à Vlada, « mais il faut que les organisations comme le HCR maintiennent leur engagement pour que des personnes comme toi aient accès aux services essentiels et pour garantir vos droits, y compris le droit à l'éducation et à une existence digne. »