Le camp de Jalozaï grossit, la crise de déplacement s'amplifie au Pakistan
Le camp de Jalozaï grossit, la crise de déplacement s'amplifie au Pakistan
PESHAWAR, Pakistan, 11 février (UNHCR) - Plus de 100 familles, soit environ 500 personnes, affluent chaque jour au camp de Jalozaï au Pakistan pour y chercher abri, alors que la pression s'intensifie sur ceux qui étaient déjà des déplacés internes, dans un contexte de combats incessants dans les régions montagneuses au nord du pays.
Quand les combats ont commencé en août dernier dans la région de Bajaur Agency située dans les zones tribales sous administration fédérale, quelque 260 000 personnes se sont d'abord déplacées vers des zones plus sûres dans la Province frontière du Nord-Ouest.
Avec l'escalade du conflit dans le district de Swat, dans la Province frontière du Nord-Ouest et d'autres parties des zones tribales sous administration fédérale ainsi que selon les toutes dernières estimations, le nombre des déplacés s'élève maintenant à 450 000 environ. Ce chiffre inclut des personnes qui sont devenues des sans-abri après les inondations survenues en août. Selon les Nations Unies, le nombre des déplacés pourrait atteindre le chiffre de 600 000 ces prochaines semaines.
Cette région était déjà l'une des plus pauvres au Pakistan, mais l'escalade du conflit et la crise économique générale, qui a vu les prix augmenter de 22 pour cent, met à rude épreuve les ressources des déplacés ainsi que celles des communautés hôtes. Alors que la plupart des familles fuient vers des zones urbaines, louant des logements ou étant hébergées chez des proches, de plus en plus de civils comme Nauman, un fermier âgé de 56 ans, se déplacent maintenant dans les camps car leurs réserves s'épuisent.
Nauman*, et sa famille comptant 14 personnes, ont fui il y a deux mois leur maison située dans la région de Mohmand Agency, pour échapper au regain de violences entre les forces du gouvernement et les militants. Ils ont trouvé une maison dans la ville de Mardan, mais Nauman n'a plus les moyens de payer le loyer. Par conséquent, il a demandé à contrecoeur à être enregistré dans le camp de Jalozaï, où l'agence des Nations Unies pour les réfugiés fournit maintenant une assistance à des déplacés internes pakistanais.
Il ne sait pas combien de temps il devra rester. « Cela dépendra de la situation chez nous », a dit Nauman. « Je ne sais pas si je pourrai trouver du travail ici dans le district de Peshawar avant une amélioration de la situation sécuritaire qui nous permettrait de rentrer chez nous. »
Ali* et sa famille comptant 11 personnes sont eux aussi des déplacés internes. Ils viennent d'être enregistrés au camp de Jalozaï, après avoir été hébergés durant deux mois chez des proches à Mardan. « Nous sommes obligés de vivre ici [à Jalozaï] », a expliqué cet homme de 39 ans originaire de la Mohmand Agency. « Nous ne pouvons plus vivre chez nos proches. Ils sont aussi 11 comme nous, et leur maison n'a qu'une seule pièce. »
Parallèlement, alors que le HCR travaille pour accroître la capacité des camps comme Jalozaï afin de faire face au nouvel influx, l'agence a aussi intensifié sa distribution d'articles humanitaires de base pour aider les personnes vivant en dehors des camps - où résident 80 pour cent des déplacés internes pakistanais enregistrés - dans le cadre d'un effort humanitaire conjoint avec d'autres agences.
Le HCR a déjà aidé plus de 6 000 familles en distribuant des articles comme des nattes de couchage, des couvertures et des batteries de cuisine dans les districts de Mardan, Nowshera, Swabi, Lower Dir, Upper Dir et Kohat.
Zarsanga, qui est originaire du district instable de Swat, était heureuse de recevoir des biens de secours fournis par le HCR. Cette femme âgée de 44 ans et ses sept enfants sont hébergés par une famille vivant à Mardan, depuis qu'ils ont fui leur maison. Pour les remercier de leur accueil, Zarsanga fait le ménage chez ses hôtes, pendant que son mari se trouve actuellement dans la région pakistanaise des plaines du Punjab à la recherche d'un travail.
« Combien de temps pouvons-nous encore dépendre des autres pour survivre ? » a demandé Zarsanga. « Maintenant que j'ai mes propres biens ménagers, je peux rendre à nos hôtes les ustensiles qu'ils nous avaient prêtés. Ils se sont montrés très prévenants à notre égard », a-t-elle ajouté.
Kilian Kleinschmidt, délégué assistant du HCR au Pakistan, a indiqué que, malgré la distribution d'articles humanitaires actuellement en cours, l'agence a reconnu que les personnes avaient besoin de davantage d'aide encore.
« La communauté humanitaire dans son ensemble, en collaboration avec le Gouvernement du Pakistan, a besoin d'accroître l'assistance que nous pouvons fournir, afin que les gens puissent louer des maisons, gagner à nouveau de l'argent et accéder aux services. Ils ont besoin de retrouver leur dignité », a-t-il souligné.
Plus de 64 500 personnes se trouvant dans 12 camps situés dans la Province frontière du Nord-Ouest ont déjà été enregistrées par le Gouvernement du Pakistan, avec l'aide du HCR, soit une augmentation d'environ 15 000 personnes par rapport au mois précédent. Environ 245 000 personnes vivant par ailleurs en dehors des camps ont été enregistrées. Beaucoup d'autres devraient encore être enregistrées ces prochaines semaines.
L'enregistrement d'une part significative des personnes déplacées est une étape cruciale dans la gestion de cette crise. « L'enregistrement est toujours une tâche complexe, et nous disposons maintenant de meilleures informations, ce qui nous permet de prévoir et de distribuer l'assistance requise », a indiqué Kilian Kleinschmidt.
L'enregistrement des personnes déplacées dans les villes de Karachi, Islamabad/Rawalpindi et Lahore commencera bientôt. Dans le cadre de l'appel global des Nations Unies aux donateurs, le HCR demande la somme supplémentaire de 16,8 millions de dollars pour intensifier l'aide fournie aux civils pakistanais déracinés. L'appel global des Nations Unies, publié la semaine dernière, vise à recueillir la somme de 98 millions de dollars.
* Les noms ont été changés pour des raisons de protection
Par Ariane Rummery et Rabia Ali à Peshawar, Pakistan