En Colombie, la région de la rivière San Juan tourmentée entre déplacement et blocus
En Colombie, la région de la rivière San Juan tourmentée entre déplacement et blocus
QUIBDÓ, Colombie, 27 août 2004 (UNHCR) - Cette semaine, des membres de l'UNHCR, du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA) et de l'administration colombienne se sont rendus dans la région de la rivière San Juan, au centre de la Colombie, dans le cadre de la première mission humanitaire à se rendre sur place depuis les affrontements qui avaient obligé près de 1 200 Afro-colombiens à fuir leurs foyers. La région, l'une des plus pauvres et des plus isolées du pays, consiste en une forêt tropicale dense, à 280 km au nord-ouest de la capitale Bogota.
La mission, organisée par les autorités municipales et provinciales avec le soutien de l'UNHCR, est allée apprécier la situation humanitaire dans la région, effectuer un recensement de la population déplacée et évaluer les besoins. Plus tôt ce mois-ci, le maire de la municipalité de Medio San Juan, dans la province de Chocó, avait lancé un appel à l'aide après les affrontements entre guérillas d'extrême gauche et paramilitaires d'extrême droite, qui avaient causé la fuite d'au moins 1 200 personnes.
Ces combats ont provoqué une profonde crise humanitaire qui pourrait affecter jusqu'à 6 000 personnes, selon les autorités locales. Aux déplacés de ce récent conflit, viennent s'ajouter des milliers d'autres personnes qui souffrent d'un blocus économique imposé par les groupements armés illégaux pour empêcher les groupes ennemis de recevoir l'approvisionnement essentiel.
La mission a visité 15 communautés afro-colombiennes et indigènes le long de la rivière San Juan et quelques-uns de ses affluents, identifiant au passage 606 personnes déplacées qui n'avaient pas encore été recensées ni n'avaient reçu d'assistance à cause du blocus. A Itsmina, la plus importante ville de la région, 640 autres personnes qui s'étaient réfugiées au début du mois d'août ont, elles, pu recevoir une assistance humanitaire d'urgence fournie par les autorités locales, le diocèse et le CICR.
Le nombre de personnes déplacées dépasse maintenant les 1 200, y compris les personnes récemment identifiées par la mission. Selon des témoignages obtenus pendant la mission, beaucoup d'autres déplacés seraient cachés dans la forêt ou auraient fui vers les montagnes. Les agences humanitaires travaillent à mettre sur pied des secours pour les 606 nouveaux déplacés identifiés par la mission, y compris une équipe médicale qui devait se rendre sur place aujourd'hui.
Les membres de la mission ont également pu constater d'eux-mêmes les effets du blocus économique imposé par un groupe armé illégal depuis début juillet. La rivière San Juan et ses affluents étant les seules voies de transport dans la région, le blocus, qui a considérablement réduit les mouvements de population, de nourriture, de médicaments et des produits de base tels que l'essence, le sucre et le sel, a fortement affecté la sécurité alimentaire, l'état de santé et l'éducation des communautés en aval.
Les rares services de santé existants dans cette région ont été désorganisés et la pénurie de médicaments a encouragé la prolifération de maladies telles que la malaria, la tuberculose et les infections parasitaires. Peu de professeurs ont pu reprendre leur poste après les vacances et les enfants ont manqué plus de 30 jours d'école. Encore plus inquiétant, des combattants des groupes armés illégaux ont utilisé les écoles comme campements et ont endommagé les bâtiments. Même si aujourd'hui, le blocus est partiellement levé, la situation humanitaire et la sécurité demeurent précaires.
La mission était composée de membres des cabinets de l'ombudsman et du Procureur général colombiens, du Réseau de solidarité sociale (l'agence gouvernementale qui coordonne l'assistance aux déplacés) ainsi que du département provincial de la santé, du diocèse d'Itsmina, de l'OCHA et de l'ONG CODHES.
Une fois de plus, l'UNHCR appelle toutes les parties au conflit en Colombie à respecter la population civile et à éviter toute action qui pourrait la mettre en danger ou réduire sa liberté de mouvement et son accès aux produits et services essentiels.