Des pluies torrentielles aggravent la situation précaire de 1 000 Awas déplacés
Des pluies torrentielles aggravent la situation précaire de 1 000 Awas déplacés
INDA SABALETA, Colombie, 8 octobre (UNHCR) - Luz Esperanza a pris un départ difficile dans la vie. Elle est née, il y a une semaine à peine, dans la communauté indienne d'Inda Sabaleta. La salle d'accouchement, un abri fragile et boueux, se situe dans les locaux d'une école, dans laquelle tous les enfants awas du territoire sont habituellement accueillis pour poursuivre leur scolarité dans le secondaire.
Les parents du bébé font partie d'un groupe de 1 047 Awas qui se sont réfugiés ici, après avoir fui les combats qui sévissent dans leurs terres ancestrales, au sud-ouest de la Colombie sur la côte Pacifique. Ces violences ont éclaté le 18 septembre entre les troupes gouvernementales et un groupe armé irrégulier.
Les bâtiments hébergeant les Awas - un vaste hangar en ciment et cinq abris - sont surpeuplés. Ils n'ont d'ailleurs jamais été conçus pour être des habitations. Les pluies torrentielles de ces derniers jours et le taux d'humidité toujours très élevé ont empiré cette situation humanitaire déjà difficile.
« Les cinq premiers jours ont été terribles : les enfants, surtout, avaient peur et ne comprenaient pas », dit Daniela, la grand-mère de Luz Esperanza. Elle ajoute que maintenant, sa principale préoccupation est la pénurie d'eau potable, et elle se demande si et quand elle pourra rentrer chez elle.
Le jour suivant leur arrivée à Inda Sabaleta, le gouvernement et les organisations humanitaires ont commencé à distribuer de la nourriture et des matelas aux centaines de déplacés awas - dont près de la moitié sont des enfants - ainsi qu'une assistance médicale. L'UNHCR a contribué en donnant cinq citernes d'eau, d'une capacité de 2 000 litres chacune.
Mais organiser la distribution d'eau et de nourriture pour un si grand nombre de personnes dans un endroit aussi petit est une tâche difficile. Les citernes d'eau doivent être remplies par les brigades locales de pompiers, situées à deux heures de route sur des chemins accidentés. Les conditions sanitaires sont particulièrement inquiétantes.
« C'est surprenant que, jusqu'à ce jour, nous n'ayons eu aucun problème sanitaire de grande échelle », indique un travailleur humanitaire appartenant à une organisation colombienne de défense des droits de l'homme, Defensoría del Pueblo. « On compte 500 enfants ici, et toute épidémie tournerait à la catastrophe. »
Malgré toutes ces souffrances, les Awas ne veulent pas partir ; Inda Sabaleta est toujours sur leur territoire, qui couvre quelque 6 000 hectares de terres protégées. Comme tous les groupes indigènes, ils sont attachés à leurs terres par des liens très forts à la fois culturels, historiques et sociaux.
« Le mieux pour nous est d'éviter de nous déplacer encore une fois ; cela ne ferait que causer davantage de souffrances et de craintes », a indiqué l'un des chefs traditionnels awas. « Nous avons besoin d'aide ici et, plus que tout, nous avons besoin d'être assurés que nous pouvons rentrer chez nous dans la sécurité et vivre en paix. C'est tout ce que nous demandons et c'est notre droit. »
Les Awas veulent rentrer chez eux, mais ils ont peur de la reprise de combats et de nouvelles mines antipersonnel. Ils demandent qu'une commission civile vérifie les conditions de sécurité. L'UNHCR a donné son accord pour y prendre part en tant qu'observateur.
« Si vous choisissez de rentrer chez vous, nous ferons tout notre possible pour vous aider, si vous êtes en mesure de le faire dans des conditions de dignité et de sécurité durable », a indiqué Roberto Mignone, le délégué adjoint de l'UNHCR en Colombie au groupe à Inda Sabaleta la semaine dernière.
Il a ajouté qu'il était important qu'il y ait deux véritables alternatives : rester ou rentrer. « Nous devons travailler à améliorer très rapidement les conditions ici, pour que vous puissiez vraiment choisir entre deux options dans des conditions de dignité et de sécurité », a-t-il dit.
On compte plus de 80 groupes indigènes en Colombie, qui représentent au total quelque 2,5 pour cent de la population totale du pays. Ils sont particulièrement vulnérables face aux conséquences du déplacement forcé et l'UNHCR travaille pour soutenir les efforts du gouvernement destinés à les protéger.
Par Marie-Hélène Verney à Inda Sabaleta, Colombie