Bangladesh : des panneaux solaires apportent l'informatique à des réfugiés isolés
Bangladesh : des panneaux solaires apportent l'informatique à des réfugiés isolés
CAMP DE RÉFUGIÉS de NAYAPARA, Bangladesh, 14 janvier (HCR) - Elle vit dans un camp de réfugiés où l'électricité est encore une denrée rare. Toslima, âgée de 15 ans, n'avait jamais utilisé un ordinateur de sa vie il y a à peine trois mois. Elle savait toutefois que les compétences en informatique permettaient d'accéder à un univers de connaissances aux antipodes du camp de réfugiés fermé où elle a passé toute sa vie après que ses parents aient fui le Myanmar, leur pays d'origine.
« Si vous savez utiliser un ordinateur, vous pouvez acquérir des compétences et réussir votre vie », a indiqué Toslima, une réfugiée de l'Etat de Nord-Rakhine au Myanmar. Avec une liberté de mouvement et une éducation limitées, elle avait toujours douté pouvoir un jour accéder aux technologies de l'information qu'un si grand nombre d'entre nous considère comme acquises.
Toutefois Toslima est aujourd'hui ébahie des progrès qu'elle a réalisés en peu de temps. Elle est désormais aide-enseignante au nouveau centre communautaire d'accès aux technologies (CTA) de Nayapara au Bangladesh, l'un des deux camps de réfugiés qui hébergent au total 28 000 réfugiés enregistrés originaires du Myanmar.
Avec 24 panneaux solaires étincelants posés sur la toiture, le CTA utilise l'énergie renouvelable pour alimenter 15 ordinateurs. Cette solution durable est innovante dans un environnement présentant des défis importants. Piloté dans des conditions d'isolement et des régions au relief accidenté au Bangladesh et au Rwanda, le projet de CTA est un nouveau partenariat entre le HCR, Microsoft et PricewaterhouseCoopers qui apportera en 2010 les technologies de l'information et de la communication dans des camps de réfugiés localisés dans neuf nouveaux pays.
Ici à Nayapara, au sud de Cox's Bazar à la frontière avec le Myanmar, de jeunes réfugiés passionnés travaillent six jours par semaine à l'ordinateur, discutant ensemble avec passion et montrant à l'écran leurs compétences nouvellement acquises. Durant une formation de dix semaines, 150 étudiants apprennent les rudiments de l'informatique, ce qu'ils n'auraient pu imaginer dans un camp fermé ; Toslima a été si rapide lors de l'apprentissage qu'elle a été nommée comme aide-enseignante pour expliquer les leçons et suivre les progrès des autres élèves.
« Microsoft Word, PowerPoint, Excel », a indiqué Toslima, listant les marques des logiciels qu'elle a appris à utiliser. « Je peux utiliser ces programmes pour la comptabilité ou pour construire des tableaux de résultats », a-t-elle ajouté. Elle utilise aussi le logiciel d'encyclopédie et elle cite les images et les notions qu'elle a récemment découvertes : les premiers pas sur la lune, le nombre de pays membres des Nations Unies, les rues de Londres, une carte de l'Italie.
Dans une société culturellement conservative, Toslima a un rôle vital en tant que modèle pour d'autres adolescentes dans le camp, qui sont encore confrontées à une pression significative pour quitter l'école à la puberté et pour se marier à un âge précoce. Avec 30 autres jeunes filles fréquentant le centre, elle représente une nouvelle génération montrant qu'il existe une alternative au mariage précoce et à une vie confinée entre quatre murs d'une petite hutte.
« Nous voulons la paix et nous voulons l'éducation pour nos enfants », a indiqué le père de Toslima, l'un des parents - en nombre croissant dans le camp - qui prônent, pour leurs filles, une éducation prolongée et rendue possible via des projets comme le CTA.
Environ la moitié des réfugiés présents à Nayapara sont nés au camp et ne connaissent pas d'autre vie. Depuis 18 ans, l'éducation formelle au camp de Nayapara s'arrête à la fin de l'école primaire. Ensuite de nombreux réfugiés sont obligés de vendre leurs rations alimentaires pour que leurs enfants puissent être scolarisés dans des écoles informelles au sein desquelles enseignent d'autres réfugiés du camp. Toutefois ce système est très éloigné d'une éducation digne de ce nom.
L'apprentissage de l'informatique est un début. Le projet consiste à ce que les ordinateurs soient utilisés pour enseigner des matières additionnelles comme les langues et la microfinance, afin de former des réfugiés bénévoles dans les secteurs de l'éducation, le développement communautaire et la santé.
« Avant qu'une solution durable ne soit trouvée pour les réfugiés, les projets comme le CTA sont essentiels à leur développement », a expliqué Saber Azam, le délégué du HCR au Bangladesh. « Ces formations leur font connaître le monde qui existe au-delà des camps et donnent à la communauté l'espoir d'un avenir meilleur. »
Il suffit d'écouter Toslima parler de ses nouvelles compétences : « En tant que formatrice en informatique, je peux enseigner dans ma communauté et améliorer la vie d'autres réfugiés », a-t-elle expliqué, sereine. « Je veux que tous les réfugiés aillent dans un lieu où ils trouveront la paix et où ils pourront réussir leur vie. »
Par Min Wah Voon a Nayapara, Bangladesh