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Avec une formation professionnelle en main, les réfugiés soudanais se préparent au retour chez eux

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Avec une formation professionnelle en main, les réfugiés soudanais se préparent au retour chez eux

L'accord de paix signé en janvier 2005 entre le gouvernement du Soudan et le Mouvement de libération du peuple soudanais a mis fin à plus de vingt ans de guerre civile et ouvre la voie au retour chez eux pour les réfugiés dans les pays voisins. Au Kenya, nombre d'entre eux sont prêts à rentrer au Sud-Soudan même si, pour d'autres, le niveau de destruction et le défaut d'infrastructures restent dissuasifs.
26 Octobre 2005
Dans le camp de Kakuma, de nombreuses formations professionnelles sont proposées, notamment celle d'électricien.

CAMP DE KAKUMA, Kenya, 26 octobre (UNHCR) - Dans la chaleur du camp de réfugiés de Kakuma, au nord-ouest du Kenya, des réfugiés soudanais sont optimistes quant à leur retour chez eux. La majorité d'entre eux a vécu dans ce camp pendant plus de dix ans. La plupart des enfants ne connaissent pas leur pays d'origine et ne connaissent du Soudan que les histoires racontées par leurs parents ou leurs frères et soeurs plus âgés.

« Ma famille vient du comté de Bor dans le Sud-Soudan », dit Nywon Pal, âgé de 11 ans. La famille de Nywon a quitté le Soudan en 1993 fuyant les combats de plus en plus intenses dans la région de Bor. Nywon est né un an plus tard dans le camp de Kakuma et, à ce jour, il n'a encore jamais vu le Soudan. Aujourd'hui, lui et sa famille font partie des réfugiés soudanais enregistrés par l'UNHCR pour rentrer chez eux.

Egalement prêt pour le retour, Isack Mayen, 22 ans. Isack est venu à Kakuma depuis la région de Bar-el-Gazal en 1995, seul avec son frère Michaël Milwa. Cependant, Michaël a été tué par un assaillant inconnu qu'ils suspectent être venu du Soudan, laissant derrière lui sa femme Malwal, 19 ans et leur fillette de 2 ans. Selon les traditions dinka, comme leur père a été tué par l'armée soudanaise en 1994, la responsabilité de prendre soin de la famille de son frère incombe maintenant à Mayen, qui estime que les conditions de vie dans le camp de réfugiés de Kakuma ne sont pas favorables pour soutenir la jeune famille de son frère et construire la sienne.

« Nous n'avons aucune source de revenus ici mis à part ce qui nous est donné par l'UNHCR », dit Isack Mayen qui n'a même pas pu finir l'école en primaire. « Si il y a vraiment la paix, je pourrai trouver un travail et ainsi soutenir ma famille. »

Plus de 1 200 réfugiés soudanais à Kakuma se sont enregistrés pour être rapatriés avec l'agence des Nations Unies pour les réfugiés. Les réfugiés sont nombreux à penser que la vie pourrait être meilleure chez eux comparée à celle qu'ils ont dans le camp de Kakuma. Le camp, qui a été ouvert en 1991, couvre une longue bande de terrain (15 km de long sur 1 km de large). Il accueille plus de 90 000 réfugiés, dont des Somaliens, des Ethiopiens, des Erythréens, des Burundais, des Ougandais et des Congolais. L'endroit est très aride et ne permet pas le développement d'une activité agricole.

Daniel, âgé de 26 ans, attend le retour avec impatience. Il travaille actuellement comme volontaire de santé avec Comité internationale de sauvetage. Daniel espère trouver un emploi avec l'une des ONG qui travaillent actuellement au Sud-Soudan et voit le retour au Soudan avec optimisme.

« On va là où il pleut, nous pourrons alors cultiver et manger », dit-il. « Ici, il ne pleut pas. »

Avant de venir au camp de Kakuma il y a 4 ans, Daniel travaillait comme travailleur social volontaire au Soudan, après avoir suivi une formation de 9 mois en éducation à la santé. Le Mouvement de libération du peuple soudanais (MLPS) avait mis en place des programmes de santé dans de nombreuses régions du Sud-Soudan, et il employait des volontaires comme Daniel pour informer sur les problèmes de santé. « L'ennui, c'est qu'il n'avait pas d'argent pour nous payer », dit Daniel. Il espère que cette fois, il aura un salaire.

Rentrer chez soi après des années dans un camp de réfugiés peut impliquer d'énormes problèmes personnels d'adaptation. L'agence des Nations Unies pour les réfugiés a commencé à préparer les réfugiés soudanais à leur rapatriement depuis le camp de Kakuma, qui devrait commencer dès la fin de l'année. Ce sera assurément un immense défi pour les réfugiés de rentrer chez eux et de commencer une nouvelle vie, après avoir été habitués à une nourriture gratuite et aux services médicaux et d'éducation disponibles dans le camp. L'UNHCR et ses partenaires ont également assuré la promotion des droits des réfugiés pendant les 14 années d'existence du camp. Les femmes, en particulier, sont très inquiètes de savoir si elles pourront continuer à disposer des mêmes droits lorsqu'elles seront de retour au Soudan. A Kakuma, les femmes et les filles sont encouragées à prendre leurs propres décisions et à les mettre en pratique.

Avec le soutien du gouvernement kényan, l'UNHCR assure actuellement un programme de formation des enseignants qui devrait bénéficier à plus de 400 professeurs réfugiés, qui ont enseigné dans le camp sans avoir vraiment de formation. Le but de ce cours est d'adapter et rendre plus performants leurs outils d'enseignement. Le manque d'enseignants au Sud-Soudan demeure un très grand problème.

« La seule façon pour encourager les Sud-Soudanais à rentrer chez eux est de rendre possible dans leur pays l'accès à l'éducation », dit Cosmas Chanda, responsable du bureau de l'UNHCR à Kakuma. « Les Soudanais sont avides d'éducation. » Le premier groupe aura achevé sa formation d'enseignant dans 18 mois, puis sera rapatrié au Soudan.

L'UNHCR, avec l'ONG italienne Don-Bosco, est également concentré sur le développement d'autres types de compétences. Des réfugiés suivent des formations en informatique, sur la façon de réaliser une charpente, le travail de l'électricité, la plomberie, la mécanique et l'agriculture. Les diplômés sont ensuite envoyés dans certaines institutions au Kenya pour acquérir davantage d'expérience.

L'UNHCR a également mis en place d'autres activités, notamment le programme d'information sur le danger des mines en coopération avec Handicap International. Ce programme a pour but de former les réfugiés qui rentrent chez eux dans des régions minées au Sud-Soudan, à être capable d'appréhender les risques liés aux mines. Handicap International estime qu'il y aurait plus de 5 millions de mines enterrées au Sud-Soudan, principalement près des routes, des sources d'eau et des garnisons. Plus de 5 000 personnes handicapées vivent actuellement à Kakuma, la majorité d'entre elles sont des Soudanais victimes des mines.

« Sans une éducation sur les risques liés aux mines, le processus de rapatriement sera très compliqué », dit Cosmas Chanda. « Nous devons les préparer au mieux au retour vers les terres de leurs pâturages et leurs fermes, qui sont généralement minées. »

D'autres activités préparatoires, notamment les programmes d'information sur le VIH/SIDA sont actuellement en cours par le Comité international de sauvetage. Il est à espérer que les réfugiés formés selon ces programmes deviendront ensuite des relais de ce type d'information, une fois rentrés dans leur région natale au Soudan.

Au Sud-Soudan, l'UNHCR et d'autres agences travaillent dur pour préparer le retour des réfugiés. Des activités telles que l'exploitation de sources d'eau, la construction de cliniques, la réhabilitation d'hôpitaux et le travail avec les autres agences pour assurer la protection et les droits des rapatriés. Les besoins de cette région dévastée par la guerre sont immenses.

L'ironie de tout cela, c'est que pendant que certains réfugiés s'enregistrent auprès de l'UNHCR pour rentrer chez eux, de nouveaux réfugiés Soudanais arrivent encore dans le camp de Kakuma en provenance du Sud-Soudan. Depuis la signature de l'accord de paix le 9 janvier 2005, plus de 6 000 Soudanais sont arrivés au camp.

La plupart d'entre eux se plaignent de la faim, du manque d'éducation et de services médicaux au Soudan. Opeiw Ojulu, âgé de 22 ans, est arrivé à Kakuma il y a trois semaines depuis Pochala dans le sud du Soudan. Il a marché durant 5 jours depuis Pochala à Narus puis il a réussi à trouver une voiture gratuitement qui l'a amené jusqu'à Lokichoggio, une ville frontalière entre le Kenya et le Soudan.

« Des personnes souffrent », dit Opeiw alors qu'il aide de nouveaux arrivants à construire leur nouvelle maison. « Il n'y a pas de nourriture, pas d'hôpitaux et pas d'écoles. » Opeiw n'est pas du tout optimiste quant à la possibilité de rentrer bientôt au Soudan. « Si les conditions au Sud-Soudan s'améliorent, alors je pourrai rentrer. »

En août, le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, António Guterres, pendant sa visite dans le camp de Kakuma a assuré aux réfugiés que l'UNHCR demeurerait auprès d'eux jusqu'à ce que chacun soit rentré chez lui en toute sécurité et dignement.

Par Emmanuel Nyabera, dans le camp de Kakuma au Kenya