Au Bangladesh, les Rohingyas surmontent l'adversité grâce aux liens communautaires
Au Bangladesh, les Rohingyas surmontent l'adversité grâce aux liens communautaires
COX'S BAZAR, Bangladesh – Sahar,18 ans, est orpheline après avoir fui la violence au Myanmar, tout comme plus de 640 000 Rohingyas. Sa mère, son père et son frère ont été brûlés vifs avant qu'elle n'échappe au carnage, vivante mais dans le plus grand dénuement.
Sahar vit désormais seule dans l’installation de réfugiés de Kutupalong et, comme les autres réfugiés, elle tente tant bien que mal de reprendre le cours de sa vie. Elle passe ses journées dans l'ombre, en s'inquiétant pour son avenir et se demandant si elle se mariera un jour.
Afin de mieux comprendre les préoccupations des réfugiés comme Sahar, le HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, vient de mener une enquête auprès de plus de 500 résidents des camps et installations de Kutupalong, Nayapara et Kerontoli/Chakmarkul.
Selon les résultats de cette étude, les conditions de vie exiguës et défavorisées suscitent de nombreuses préoccupations parmi les réfugiés. Malgré les difficultés, ils se sentent toutefois généralement en sécurité dans ces zones préservées où ils ont trouvé refuge par rapport à la situation qu'ils ont fui, et ils s’entraident.
Sahar personnifie les deux aspects de la vie du camp. Elle est seule la nuit dans son abri fait de perches de bambou et de bâche en plastique, craintive à l'idée de s'aventurer dans le noir. Et sa journée se déroule en compagnie de sa voisine immédiate, une veuve avec deux enfants. Elles effectuent ensemble les tâches quotidiennes, pour aller collecter de l'eau et du bois de chauffage ou transporter de la nourriture.
« Je m'inquiète beaucoup, mais je sais où trouver de l'aide en cas de besoin. »
Sahar a de la chance par rapport à d’autres réfugiés. Elle a une prise électrique, ainsi qu’une carte du Programme alimentaire mondial. Et le chef de la communauté locale, ou mazhis, garde un oeil sur elle. « Je m’inquiète beaucoup, mais je sais où trouver de l’aide en cas de besoin », explique-t-elle, avec un léger sourire.
L’étude, portant sur les hommes et les femmes, incluait également des dirigeants communautaires, des femmes célibataires, des personnes âgées ou handicapées. Menée avec des partenaires le mois dernier, elle visait à identifier les cas les plus vulnérables, informer sur les programmes du HCR et établir les priorités pour les efforts d’aide à venir.
Les résultats ont mis en lumière plusieurs sujets de préoccupation, notamment l’insécurité nocturne, compte tenu de la fragilité des abris de fortune et du manque d’éclairage ; la crainte des vols et des enlèvements d’enfants ; le manque d’interaction avec les communautés d’accueil, néanmoins considérées comme favorables, et le fait que l’information dépend des dirigeants communautaires.
De plus, les infrastructures d’assainissement limitées entraînent des files d'attente et une utilisation excessive des latrines, ainsi que de l'anxiété chez certaines femmes sur le manque d'espaces privés pour se laver.
Marzia, une veuve avec trois enfants, doit marcher plusieurs centaines de mètres autour d'un étang fétide pour accéder à un espace d’hygiène réservé aux femmes. Elle ne se lave donc qu'une fois par semaine, deux fois au maximum. Et il n'y a qu'une seule latrine pour les femmes dans son secteur. « Nous n’avons que très peu d’espaces privés », indique-t-elle. « Et, la nuit, il n’y a pas assez de lumière. »
Les longues files d'attente pour les distributions de produits de première nécessité sont considérées comme l'un des aspects les plus difficiles de leur vie en tant que réfugiés. « Nous cuisinons avant le coucher du soleil, mais nous n'avons pas assez d'ustensiles, d'épices, de poisson, de viande ou de légumes pour les enfants. »
Parallèlement, les enfants travaillent, collectent de l’eau potable aux points d'eau et se rendent dans des forêts éloignées pour le bois de chauffage, en tant que porteurs, peut-on encore lire dans les résultats de l’étude menée par le HCR. Les parents et les enfants sont impatients d’accéder à l'éducation et aux espaces récréationnels.
« La nuit, il n’y a pas assez de lumière... nous cuisinons avant le coucher du soleil. »
Le manque d'information sur les services de santé les préoccupe également. Souvent, les personnes atteintes de maladies chroniques ne prennent pas leurs médicaments du fait de l’éloignement des dispensaires. Des sentiments persistants de dépression et de rejet ont été identifiés, surtout chez les personnes âgées et handicapées; les jeunes sont inquiets et incertains quant à leur avenir.
Malgré toutes ces préoccupations et ces privations, le fait d'être contraint de fuir massivement semble avoir renforcé la cohésion sociale. Les membres de la communauté, en particulier les femmes et les jeunes, expliquent qu'ils partagent la nourriture et s'entraident dans les tâches quotidiennes, notamment en aidant les malades à se rendre à la clinique et en cuisinant.
Le HCR utilise les résultats de cette étude pour établir de meilleurs points d'information et renforcer le personnel d'aide ainsi que les partenariats; intensifier la communication bilatérale sur les services; créer des centres communautaires où peut être fourni un soutien psychologique; ajouter des installations pour les soins de santé chronique et mentale; et sensibiliser à la violence sexuelle et sexiste ainsi qu’à la protection de l'enfance.
Le HCR révise déjà son système de distribution afin de réduire les files d’attente et d’offrir une distribution directe aux personnes handicapées, tout en proposant des alternatives au bois de chauffage pour lutter contre le travail des enfants et aux problèmes environnementaux ainsi qu’en ajoutant des installations d’hygiène et des latrines pour les femmes.
D'autres projets comprennent la fourniture de kits d'abris améliorés avec des serrures, l'ajout de lampadaires dans les allées, des plantations et le renforcement des berges pour prévenir les glissements de terrain, ainsi que des activités de développement des compétences.
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