Journée mondiale du réfugié et aggravation des déplacements de populations
Journée mondiale du réfugié et aggravation des déplacements de populations
GENÈVE, 20 juin (HCR) - C’est avec un sombre avertissement, en toile de fond, sur l’incapacité de la communauté internationale à faire face à un nombre record de personnes déracinées par les guerres et la persécution qu’ont lieu les événements marquant la Journée mondiale du réfugié samedi.
« Nous en arrivons maintenant à un moment de vérité », a indiqué le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés António Guterres dans une déclaration (disponible ici en anglais : http://rfg.ee/OtEbI)
« La stabilité du monde s’effrite, générant des déplacements de populations d’une ampleur sans précédent. Les puissances mondiales sont devenues des observateurs passifs ou des acteurs lointains dans les conflits poussant tant de civils innocents à fuir leurs maisons. »
António Guterres vient de se rendre à la frontière entre la Turquie et la Syrie pour se rendre compte par lui-même de l’arrivée de Syriens fuyant la toute dernière escalade des combats et rejoignant le sud de la Turquie. Il a souligné que le nombre de personnes ayant fui l’an dernier était plus élevé que jamais depuis que les enregistrements avaient commencé au HCR, portant le nombre total de personnes déracinées à l’échelle mondiale à un niveau impressionnant de 59,5 millions.
« A travers le monde, environ 60 millions de personnes sont désormais déplacées par le conflit et la persécution. Près de 20 millions d’entre elles sont des réfugiés et plus de la moitié sont des enfants. Leur nombre augmente et la tendance s’accélère, chaque jour, sur chaque continent », a-t-il ajouté dans sa déclaration.
António Guterres est arrivé en Turquie pour célébrer la Journée mondiale du réfugié pour marquer son soutien au pays qui, l’année dernière, a dépassé le Pakistan en tant que pays hôte du plus grand nombre de réfugiés au monde, principalement en raison des conflits en Iraq et en Syrie où la guerre est entrée dans sa cinquième année.
La Turquie accueille aujourd’hui plus de deux millions de réfugiés au total et dépense plus de six milliards de dollars pour la seule aide aux réfugiés syriens.
« Quinze ans après le début du nouveau millénaire qui, selon notre souhait, aurait pu être le théâtre de la fin des guerres, la propagation de la violence au niveau mondial pourrait mettre en péril le fondement même de notre système international », a-t-il ajouté.
En 2014, chaque jour, en moyenne 42 500 personnes sont devenues des réfugiés, des demandeurs d’asile ou des déplacés internes - c’est quatre fois plus qu’il y a tout juste quatre ans. Ces personnes comptent sur nous pour survivre et retrouver l’espoir. Elles se rappelleront de ce que nous aurons mis en oeuvre pour leur venir en aide.
L’ampleur de la crise actuelle met à rude épreuve les organisations internationales humanitaires. Cependant, au vu de cette tragédie, certains des pays pourtant en mesure d’apporter une aide ferment leurs portes aux personnes en quête d’asile.
« Les frontières se ferment, les refoulements augmentent tout comme l’hostilité à l’égard des personnes déracinées. Les opportunités pour fuir légalement s’amenuisent. Et les organisations humanitaires comme la mienne fonctionnent sur des budgets restreints, ne pouvant répondre à l’augmentation considérable des besoins d’une population massive de victimes », a-t-il également prévenu.
António Guterres a appelé « tous ceux pouvant actionner des leviers sur les parties à ces conflits qu’ils mettent de côté leurs différences et se rassemblent pour créer les conditions qui feront cesser les bains de sang. »
« Le monde doit également partager collectivement la charge de l’aide aux victimes de la guerre, ou risquer de ne rien faire alors que des pays et des communautés les moins riches - qui abritent 86 pour cent des réfugiés dans le monde - deviennent dépassés et instables », a-t-il déclaré.
Depuis les débuts de notre civilisation, nous sommes venus en aide aux réfugiés car ils méritent notre protection, a indiqué Antonio Guterres mais il a regretté « qu’aujourd’hui, certains des plus riches d’entre nous contestent ce principe ancien, considérant les réfugiés comme des resquilleurs, des demandeurs d’emploi ou des terroristes. Ceci est une voie dangereuse d’action, à court terme, moralement répréhensible, et - dans certains cas - en violation des obligations internationales. »
« Il est temps d’arrêter de se cacher derrière des mots trompeurs. Les pays riches doivent reconnaître les réfugiés pour les victimes qu’ils sont. Ils ont fui les guerres qu’ils n’ont pu empêcher ni faire cesser », a-t-il conclu.
Le tout dernier Rapport du HCR sur les Tendances mondiales, publié jeudi, fait état d’une hausse considérable du nombre de personnes forcées à fuir, avec 59,5 millions de déracinés à la fin 2014 en comparaison de 51,2 millions l’année précédente et 37,5 millions il y a une décennie. L’augmentation depuis 2013 est la plus importante jamais enregistrée en une seule année.
A travers le monde, un humain sur 122 est désormais soit un réfugié, soit un déplacé interne ou encore un demandeur d’asile. Si cette population correspondait à celle d’un pays, celui-ci se classerait au 24e rang au niveau mondial.
Parallèlement, après plusieurs décennies d’instabilité et de conflits en Afghanistan, en Somalie et ailleurs, des millions de ressortissants de ces pays demeurent déracinés ou - et ce, de plus en plus souvent - bloqués durant des années en marge de la société et dans l’incertitude de la vie en tant que déplacé interne ou réfugié.
Parmi les conséquences récentes et visibles des conflits à travers le monde ainsi que des terribles souffrances qu’ils causent, on observe une croissance spectaculaire du nombre de réfugiés en quête de sécurité qui entreprennent des traversées périlleuses en mer, y compris en Méditerranée, dans le golfe d’Aden et en mer Rouge, ainsi qu’en Asie du Sud-Est.