La crise de l’accueil en Belgique est préoccupante et dure depuis deux ans, laissant de nombreux demandeurs d’asile sans toit ni accès aux services de base tels que l’eau potable, l’accès à des sanitaires et à une assistance médicale.
Le HCR, l’Agence des Nations unies pour les réfugiés, considère que l’accès à des conditions d’accueil appropriées pour les demandeurs d’asile – de la présentation de leur demande à la décision finale – est essentiel pour que les procédures d’asile soient équitables et efficaces. Il s’agit là d’une condition indispensable pour garantir l’accès efficace à la protection internationale pour les personnes qui en ont besoin. Grâce à des actions coordonnées et à long terme de la part de tous les acteurs – fédéraux, régionaux et communaux – il est possible de garantir un accueil adéquat, sûr et décent à toute personne fuyant la guerre, la violence et les persécutions.
La crise est due à une combinaison complexe de facteurs. L’une des raisons est la flexibilité limitée du système d’accueil. En raison d’une diminution des demandes d’asile au cours des années précédentes, plusieurs centres d’accueil ont fermé et la capacité d’accueil a donc été réduite. En raison de ce manque de places disponibles dans le réseau d’accueil, Fedasil n’est pas équipé pour faire face à l’augmentation des demandeurs d’asile depuis fin 2021. Cela signifie que les demandeurs d’asile ne peuvent pas assez rapidement être transférés du centre d’arrivée du Petit-Château vers d’autres centres d’accueil en Belgique, ce qui conduit finalement de nombreuses personnes à la rue.
De plus, le temps de traitement, parfois long, des procédures de détermination du statut en Belgique signifie également que les demandeurs d’asile en attente d’une décision occupent des places d’accueil qui pourraient être disponibles pour les nouveaux arrivants.
En outre, même après avoir reçu une décision positive, il est souvent difficile pour les réfugiés reconnus de trouver leur propre logement en raison de la pénurie aiguë de logements sociaux ou abordables. Cela empêche les réfugiés reconnus de quitter les centres d’accueil, ils occupent alors des lits destinés aux demandeurs d’asile.
D’autres facteurs, comme l’arrivée inattendue de plus de 70 000 réfugiés provenant d’Ukraine depuis le début de la guerre, les défis liés à la mobilisation des ressources et du personnel, ou la résistance qui peut exister au niveau local pour accueillir les réfugiés, font également partie des nombreux facteurs complexes et entreliés qui augmentent la pression sur le réseau d’accueil.
Le HCR est préoccupé par la dégradation de la santé mentale et physique de milliers de demandeurs d’asile qui sont forcés de dormir dehors sans accès aux sanitaires, aux examens médicaux, aux vaccins, à la protection ni à l’information. La situation précaire dans laquelle se trouvent de nombreux demandeurs d’asile aggrave les traumatismes que beaucoup ont déjà vécus dans leur pays d’origine ou sur la route vers l’Europe.
L’importance de fournir un accès à des conditions d’accueil adéquates est inscrite dans la législation nationale et de l’Union européenne et fait donc partie intégrante des obligations d’asile de la Belgique. Le HCR est également préoccupé par le fait que priver les demandeurs d’asile d’un accueil approprié, y compris le soutien mentionné ci-dessus, compromet le caractère juste et efficace de leur procédure d’asile. Sans accès à des nécessités de base comme la nourriture, un lit et des sanitaires, il est très difficile pour un demandeur d’asile d’être dans un état physique et mental approprié pour se préparer à l’entretien personnel dans le cadre de la procédure d’asile.
Le HCR est profondément préoccupé par le fait qu’en octobre 2022, l’accueil des enfants non accompagnés et séparés, ainsi que des familles avec enfants, considérés comme des profils vulnérables prioritaires, n’était plus systématiquement garanti. Les enfants qui ne sont pas identifiés, à qui on n’a pas attribué un tuteur ou qui ne bénéficient pas de conditions d’accueil adéquates sont particulièrement vulnérables notamment aux risques d’abus, d’exploitation ou même de traite d’êtres humains.
Le HCR regrette la récente décision de ne plus accueillir temporairement les hommes seuls dans le réseau d’accueil. S’il est important de garantir l’accueil des enfants non accompagnés, ainsi que des familles avec enfants, l’accès à des conditions d’accueil adéquates pour tous les demandeurs d’asile, y compris les hommes seuls, est essentiel à une procédure d’asile équitable et efficace.
Cela pourrait laisser à penser qu’il est impossible de résoudre cette crise. Ce n’est certainement pas le cas. Une action collective et coordonnée peut remédier à cette situation. La rapidité avec laquelle la Belgique et sa population ont réussi à fournir un abri à plus de 70 000 réfugiés provenant d’Ukraine montre ce qui peut être fait avec un bel esprit de décision. Le HCR espère que la solidarité sans précédent et la bonne pratique dans ce contexte conduiront à un changement positif pour tous les réfugiés.
Le HCR salue les efforts déployés pour créer plus de places d’accueil et augmenter la capacité du personnel des instances d’asile et reconnaît le contexte difficile dans lequel les instances d’accueil belges opèrent.
L’importance de la collaboration doit être soulignée. Toutes les parties prenantes tant au niveau européen, fédéral, régional que local doivent continuer à travailler ensemble pour assurer des solutions durables qui peuvent offrir des conditions de vie décentes à tous les demandeurs, y compris les hommes seuls. Par une action collective et coordonnée de tous les acteurs, des solutions immédiates et à long terme sont à portée de main pour mieux protéger les personnes fuyant la guerre, la violence et la persécution.
Il est donc essentiel que le réseau d’accueil évolue vers une plus grande flexibilité, afin de pouvoir répondre aux fluctuations naturelles de l’afflux de demandeurs d’asile. De plus, l’établissement d’un plan de contingence régulièrement mis à jour, comprenant des mesures d’atténuation et des mécanismes de financement adéquats, sont des éléments clés de cette approche.
Le HCR réitère également l’importance d’avoir des procédures d’asile rapides et équitables et soutient l’approche suivie par la Belgique pour rendre la procédure de détermination du statut plus rapide, tout en restant qualitative, afin de réduire la durée moyenne de séjour des demandeurs d’asile dans le réseau d’accueil. Cela permettra aux demandeurs d’asile de quitter plus rapidement le réseau d’accueil et de libérer des places destinées aux demandeurs d’asile qui séjournent actuellement au centre d’arrivée du Petit Château ou dans l’accueil d’urgence (de crise).
Enfin, la Belgique ne peut pas fournir de solutions isolément. Une pression croissante a en effet été observée sur les réseaux d’accueil de plusieurs États membres de l’UE. L’asile est, par définition, une question transfrontalière qui nécessite des solutions communes au niveau européen. C’est une preuve supplémentaire que nous avons besoin du Pacte de l’UE sur la migration et l’asile, qui représente une véritable opportunité de définir un terrain commun sur les questions d’asile dans l’UE.
La Belgique est responsable de la protection des demandeurs d’asile et des réfugiés sur son territoire.
Le travail du HCR en Belgique se concentre sur le soutien aux autorités et aux organisations travaillant avec les réfugiés, les demandeurs d’asile et les personnes apatrides en veillant à ce que la législation, les procédures, les politiques et les pratiques soient conformes aux normes de protection internationales et européennes.
Le HCR cherche à améliorer les conditions d’accueil en Belgique par le biais d’actions de plaidoyer, de consultation et de conseil auprès de divers organes gouvernementaux et d’autres acteurs concernés. Le HCR continue d’exhorter le gouvernement à trouver des solutions à la crise de l’accueil et à veiller à ce qu’aucun demandeur d’asile ne soit laissé pour compte.
Le HCR effectue des visites de suivi au centre d’arrivée et à divers centres d’accueil à travers la Belgique. Lors de ces visites, le HCR s’entretient avec les résidents et toutes les parties impliquées dans l’accueil. Il s‘agit d’une partie structurelle et essentielle de ses activités en Belgique.
Pour faciliter le dialogue entre les réfugiés et les autorités, le HCR préconise une approche qui implique activement les communautés de réfugiés en Belgique. En conséquence, le « Umbrella Refugee Committee » et dix autres comités de réfugiés ont été créés en Belgique, avec le soutien du HCR. Les comités de réfugiés participent à l’élaboration des politiques relatives aux politiques et pratiques d’asile, y compris l’accueil. Ils sont également impliqués dans un large éventail d’activités, en coopération avec les acteurs étatiques dans la Région de Bruxelles-Capitale. Ensemble, ils gèrent désormais un centre collectif, où les demandeurs d’asile résident dans une phase de pré-accueil, en attendant leur intégration dans le réseau Fedasil.
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