Les bateliers de l'Indus en quête de stabilité après les inondations
Les bateliers de l'Indus en quête de stabilité après les inondations
DERA GHAZI KHAN, Pakistan, 5 mai (HCR) - Dilbar et Sakina ont presque toujours vécu à bord de bateaux fluviaux sur le fleuve Indus. Ils ont désespérement besoin d'aide mais ne peuvent bénéficier des programmes d'assistance du Gouvernement pakistanais.
Les inondations dévastatrices de l'année dernière ont aggravé la situation précaire de la petite communauté Jam comptant environ 100 familles (1 000 personnes) dans la province du Punjab au sud du pays et un grand nombre de ses membres, y compris Dilbar et Sakina, veulent désormais faire évoluer leur mode de vie, construire une maison en dur et recevoir une aide de l'Etat pour recommencer une nouvelle vie.
« Il est très difficile de supporter les nuits glacées l'hiver. Avoir une maison et commencer une nouvelle vie, c'est le rêve des gens comme nous, qui sont nés et qui ont grandi sur des bateaux », a indiqué Dilbar, âgé de 55 ans qui porte une barbe blanche, tout en fumant un hookah (une pipe à eau). Sa famille élargie compte quatre enfants et quatre petits-enfants.
« Nous buvons l'eau de la rivière », a indiqué Sakina aux visiteurs, elle est âgée de 50 ans et soufffrante. « Nous n'avons pas de logement décent, pas d'opportunités de moyens d'existence, pas de dispensaire, pas d'installations sanitaires, pas d'éducation, pas de cimetière, pas de mosquée et pas d'identité », a-t-elle ajouté, en listant la myriade de problèmes auxquels ils sont confrontés.
Le personnel du HCR a pu fournir aux membres de cette communauté une aide matérielle, y compris des articles de secours pour s'équiper contre les conditions hivernales, après les avoir identifiés pour la première fois durant les efforts humanitaires auprès des victimes des inondations de l'année dernière. Et maintenant le HCR espère les aider à s'enregistrer officiellement en tant que citoyens pakistanais et à recevoir des cartes nationales d'identité pour qu'ils puissent jouir de leurs droits juridiques, sociaux, économiques, civils et politiques et bénéficier des programmes d'aide du gouvernement pour les victimes des inondations.
La communauté Jam a vécu dans le district de Dera Ghazi Khan dans le Punjab durant des décennies. Ils vivaient de la pêche, de la vannerie et de l'agriculture. Ces dernières années, ils ont construit des habitations sur les berges des rivières pour héberger une population croissante, mais ils n'avaient jamais été enregistrés. Quand ils arrivaient à vivre de façon autonome, ils n'en avaient pas besoin.
Toutefois leur mode de vie a été menacé par deux inondations dévastatrices en 10 ans ainsi que la croissance industrielle le long de la rivière, la construction de barrages, la dégradation de l'environnement et les restrictions sur la pêche, qui ont affecté leurs moyens d'existence.
La coordonnatrice du HCR sur le terrain Tehmina Rohi a indiqué que les inondations avaient non seulement causé des destructions énormes mais également fait connaître le sort de communautés marinières comme les Jam aux autorités, après qu'elles aient passé des années dans l'ombre.
« Les communautés oubliées, comme ces mariniers, ont alors fait surface et elles ont tout autant besoin de soins et d'appui », a-t-elle indiqué, ajoutant qu'elles vivaient sans pièces d'identité ni accès aux services basiques et humanitaires - car elles n'avaient pas de terrains ni une zone d'installation définie.
Les inondations il y a neuf ans et celles de l'année dernière ont poussé les Jam à commencer à réévaluer leur mode de vie itinérant. Ils aspirent à davantage de stabilité et d'assistance pour eux-mêmes et leurs enfants. Après les premières inondations, ils ont commencé à partager leur temps entre leurs bateaux et des habitations modestes sur les berges.
Lorsque les inondations ont frappé Dera Ghazi Khan en août dernier, leurs logements de fortune ont été détruits et la plupart de leurs récoltes et de leurs possessions ont été balayées. Certains de leurs bateaux ont également été endommagés, toutefois les Jams les utilisaient toujours pour aider dans les tout premiers efforts de secours et l'aide humanitaire.
« Alors que nous étions occupés à sauver les possessions des autres, nos propres huttes et biens ont été emportés par les inondations. Les femmes et les enfants de notre communauté avaient trouvé refuge dans des lieux plus en altitude à l'abri des eaux pour sauver leur vie », s'est rappelé Dilbar. Il a affirmé qu'aucun d'entre eux n'avait été rétribué pour l'aide apportée et qu'ils n'avaient reçu aucune indemnisation pour réparer les bateaux endommagés.
Comme ils n'ont pas de documents d'identité, ils n'ont pas pu bénéficier du programme d'aide gouvernementale aux victimes des inondations et la communauté Jam a eu du mal à se remettre de cette catastrophe naturelle. Lorsque le HCR a eu connaissance de leurs besoins, l'agence leur a distribué au début de cette année du matériel pour s'équiper contre les conditions hivernales, y compris des duvets, des couvertures, des châles, des vêtements et des kits d'hygiène pour chaque famille.
De plus, les Jams ont reconstruit certaines de leurs maisons sur les berges, mais leurs besoins restent significatifs y compris l'accès à l'eau potable, aux dispensaires et aux installations sanitaires, à la nourriture, aux moyens d'existence et à l'éducation pour les enfants.
« Nous sommes désormais fâchés avec cette rivière », a indiqué Dilbar, en faisant référence aux inondations et aux restrictions sur leurs moyens d'existence. Il est également inquiet pour la santé de Sakina et la sécurité de ses petits-enfants sur leur bateau. Avec l'aide du HCR et d'autres organisations, il espère désormais que les Jam pourront commencer un nouveau chapitre de leur vie, plus stable et plus propice au développement.
Le HCR mène des initiatives de sensibilisation pour la protection de leurs droits auprès du gouvernement et d'autres agances soeurs des Nations Unies.
Par Qaisar Khan Afridi à Dera Ghazi Khan, Pakistan