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La loi de l'Union Européenne sur l'asile pourrait éroder les normes internationales, avertit Ruud Lubbers

Communiqués de presse

La loi de l'Union Européenne sur l'asile pourrait éroder les normes internationales, avertit Ruud Lubbers

24 Novembre 2003 Egalement disponible ici :

Le 24 novembre 2003

Le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Ruud Lubbers, a lundi lancé un sérieux avertissement contre une détérioration significative des normes d'asile qui pourrait résulter de l'adoption d'un texte crucial dans le cadre de la législation sur l'asile de l'Union européenne, au point même de s'inscrire en faux par rapport à la législation internationale reconnue. Dans sa critique, le HCR souligne aussi que le projet de directive ne procurerait, contrairement à son but avoué, qu'une harmonisation minimale des procédures au sein de l'Union européenne.

Dans une lettre adressée au Premier ministre italien Silvio Berlusconi, actuellement Président en exercice de l'Union, à la veille d'une réunion des ministres européens de l'intérieur qui doit se tenir le 27 novembre à Bruxelles, le Haut Commissaire estime qu'il serait peut-être même préférable de retirer de l'ordre du jour le texte de la directive jusqu'à un « moment plus propice », si son contenu ne peut être amélioré de manière significative.

Le HCR, a souligné M. Lubbers, a depuis toujours soutenu le processus d'harmonisation de l'Union européenne, qu'il considère comme un premier pas vers la construction d'un système d'asile commun en Europe, permettant d'assurer « une cohérence dans la gestion des demandes d'asile », pour le meilleur bénéfice des Etats comme des réfugiés.

« La directive sur les procédures d'asile doit avoir pour objectif des normes élevées de protection pour les réfugiés et doit s'efforcer d'atteindre un niveau d'harmonisation vraiment significatif » écrit R. Lubbers dans la lettre. « J'ai cependant le regret de dire ... que depuis lors le projet de directive n'a cessé de se déteriorer sur ces deux points », ajoutant que si le processus devait continuer ainsi, « cette directive se réduirait à un catalogue de dispositions facultatives qui constitueraient des manquements importants aux droits de l'homme, au droit international des réfugiés et aux principes établis depuis plus de 50 ans. »

Dans un aide-mémoire joint à la lettre, le HCR a extrait de la directive huit éléments préoccupants, détaillant trois de ces points en profondeur : le concept de « pays tiers sûr », les procédures à la frontière et le droit pour le demandeur d'asile de demeurer dans un pays pendant le recours en appel, ces trois points étant apparemment actuellement en cours de négociation.

Dans l'état actuel du texte, a prévenu le HCR, les demandeurs d'asile - y compris les réfugiés parmi eux - risquent d'être renvoyés dans des pays présentant des garanties insuffisantes pour leur protection effective et même, vers des pays par lesquels ils n'ont en fait jamais transité. L'aide-mémoire s'inquiète aussi de ce que la directive ne définit pas moins de 15 cas de figure dans lesquels les Etats de l'Union pourrait déroger au droit des demandeurs d'asile dont le dossier a été rejeté en première instance, de demeurer dans le pays pendant la procédure d'appel.

Le HCR souligne aussi que dans plusieurs pays européens, entre 30 et 60 % des réfugiés ne sont finalement reconnus qu'après une procédure d'appel venant contredire un rejet initial. En ce sens, la simple possibilité qu'un grand nombre de cas soient renvoyés de force avant même que l'appel n'entre en compte « constituerait un abaissement des normes dans la plupart des Etats de l'Union et augmenterait grandement la probabilité d'une mauvaise décision de justice », selon l'organisation. En outre, la section traitant des procédures aux frontières stipule que les demandeurs d'asile arrivant de pays supposés sûrs pourraient se voir purement et simplement refuser l'accès au territoire et à la procédure d'asile, sans qu'aucune vérification n'intervienne pour établir s'ils seraient effectivement en sûreté et si leur demande serait entendue dans ce pays supposé sûr. Dans le cas contraire, cette pratique s'inscrirait en faux par rapport à la législation internationale sur les réfugiés et en tant que telle serait inacceptable pour le HCR.

Un tel abaissement des normes aurait inévitablement des répercussions négatives hors des frontières de l'Union, prévient aussi le Haut Commissaire dans sa lettre, comme celle de contrecarrer les efforts entrepris pour améliorer les normes de protection dans les régions d'origine des réfugiés.

« Tels que présentés dans le projet de directive, le concept de 'pays tiers sûr' ainsi que les procédures à la frontière ont pour objet de transférer les charges des Etats membres de l'Union vers des pays lointains » note M. Lubbers. « Cette mesure n'aidera pas à convaincre les Etats dans les régions d'origine et de transit que l'Europe a vraiment l'intention de mettre en place des mécanismes globaux de partage des charges et des responsabilités incluant une meilleure protection dans les régions d'origine. »

Près des trois-quarts des 20 millions de personnes placées sous le mandat du HCR dans le monde - un chiffre qui inclut tant les réfugiés que les demandeurs d'asile - vivent dans les pays en voie de développement. Le nombre de demandeurs d'asile arrivant dans l'Union européenne au cours des six premiers mois de 2003 a considérablement décru par rapport aux années précédentes (environ 150 000 pour la période de janvier à juin) tandis que le nombre total de nouvelles demandes d'asile est bien inférieur aux années 90, lorsque l'Europe a subi les conséquences de la guerre des Balkans et où l'Allemagne en particulier recevait 438 000 demandeurs d'asile en un an.