Déclaration liminaire à la 66e session du
Comité exécutif du Programme du Haut Commissaire
de
M. António Guterres,
Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés
Déclaration liminaire à la 66e session du
Comité exécutif du Programme du Haut Commissaire
de
M. António Guterres,
Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés
Telle que prononcée
Monsieur le Président,
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Il y a 10 ans, lorsque je prenais mes fonctions de Haut Commissaire, il y avait 38 millions de personnes déplacées par les conflits et les persécutions dans le monde, mais le HCR aidait plus d'un million de personnes à rentrer chez elles chaque année. Le nombre de réfugiés dans le monde diminuait. D'anciens conflits venaient de se calmer en Angola, au Libéria, en Sierra Leone et au Soudan du Sud pour laisser place à la reconstruction et à l'espoir. Certains de mes collègues se demandaient même si le HCR allait avoir un avenir dans ces circonstances.
Toutefois, les choses ont changé pour le pire. Aujourd'hui, il y a dans le monde plus de 60 millions de réfugiés, de demandeurs d'asile et de déplacés internes à cause des conflits et des persécutions. L'année dernière, 126 000 réfugiés ont été en mesure de rentrer dans leurs pays, ce qui représente 11 % du chiffre de 2005. Si au cours des cinq dernières années, quinze conflits ont éclaté ou repris, aucun des anciens n'a été réglé. Pendant ce temps, le nombre de personnes déplacées chaque jour par les conflits dans le monde s'est multiplié pratiquement par quatre, passant de près de 11 000 en 2010 à 42 500 l'année dernière.
Pendant ces 10 ans, le monde a changé. La croissance économique a été significative, le nombre de personnes vivant dans une pauvreté absolue a diminué jusqu'à son niveau le plus bas, comme la Banque mondiale l'a annoncé ce matin, et le progrès technologique a apporté de nombreux avantages. Toutefois, dans le même temps, le monde est devenu plus fragile, et les conflits se sont propagés d'une manière imprévisible et sont devenus de plus en plus complexes. L'une des conséquences de ce phénomène est le rétrécissement de l'espace humanitaire qui a rendu beaucoup plus difficile et dangereux le travail des organisations comme le HCR.
Les grandes crises interconnectées en République arabe syrienne et en Iraq, qui ont déraciné plus de 15 millions de personnes, constituent une bonne illustration de cette évolution, et il ne s'agit pas du seul cas. Uniquement au cours des 12 derniers mois, 500 000 personnes ont fui leurs maisons au Soudan du Sud, et 190 000 au Burundi. Environ 1,1 million de personnes se sont nouvellement déplacées à l'intérieur du Yémen ou hors de ce pays, et 300 000 en ont fait de même en Libye. Dans la région Asie-Pacifique, 94 000 personnes ont traversé depuis 2014 le golfe du Bengale et la mer d'Andaman en quête de protection et d'une vie plus digne. Des dizaines de milliers de personnes, dont bon nombre sont des enfants, fuient des graves violences et abus commis par des gangs en Amérique centrale. Les crises touchant la République centrafricaine, le Nigéria, l'Ukraine ou la République démocratique du Congo n'ont pas connu d'amélioration, si oui peu.
Par le passé, nous avions des situations d'urgence et des situations de réfugiés prolongées ; aujourd'hui, il semble que nous avons de plus en plus des situations d'urgence prolongées. Depuis des années, nous nous efforçons, pas toujours avec succès, de faire inscrire le déplacement sur l'agenda politique mondial. Toutefois, après les dramatiques événements ayant eu lieu cet été sur les plages et aux frontières de l'Europe, personne ne peut maintenant ignorer la crise de réfugiés qui couvait depuis longtemps, alors que certains n'en étaient pas conscients. Il est honteux que cette crise ait atteint ce niveau, même si le fait n'est pas surprenant. Malheureusement, George Orwell ne blaguait pas lorsqu'il disait que, si tous les hommes sont égaux, certains sont plus égaux que d'autres. Je pense qu'il en va de même pour les continents.
En 1956, l'Europe et le HCR ont fait face à la première grande crise de réfugiés après la fin de la Seconde Guerre mondiale, lorsque 200 000 Hongrois avaient fui vers l'Autriche et la Yougoslavie. Non seulement ces réfugiés avaient été bien reçus, plus de 150 000 d'entre eux avaient été réinstallés dans d'autres pays d'Europe et plus loin encore, uniquement en quatre mois. Ce qui fut alors possible, lorsque l'Europe récupérait encore de la pire guerre de l'histoire humaine, devrait également être possible aujourd'hui.
Depuis le mois de janvier, plus d'un demi-million de personnes sont arrivées sur les côtes européennes. Pour un continent de plus de 500 millions d'habitants, 5 000 personnes qui arrivent chaque jour est un chiffre très important, mais gérable à condition de bien s'y prendre. La décision prise par l'Union européenne de relocaliser au plan interne 160 000 demandeurs d'asile est une étape importante dans la bonne direction. Toutefois, il faut en faire beaucoup plus pour que ce système marche bien, en particulier créer des centres d'accueil adéquats près des points d'entrée, ayant la capacité suffisante de recevoir des dizaines de milliers de personnes, de les aider, de les enregistrer et d'examiner leurs cas. Il faudra aussi prévoir plus de possibilités légales pour les personnes en quête de protection ainsi que pour les migrants économiques, afin qu'ils puissent être en mesure d'avoir accès au territoire européen.
Cette crise est à la fois une crise de migration et une crise de réfugiés. Toutes les personnes qui arrivent aujourd'hui en Europe jouissent, comme tout le monde, de la dignité humaine et des droits humains qui doivent être respectés. Selon le droit international, les États ont l'obligation d'accorder la protection aux réfugiés fuyant les conflits et les persécutions.
Cette année, les arrivées en Italie revêtent manifestement un caractère mixte. Les conflits en Afrique, le chaos en Libye, mais également le déséquilibre des tendances économiques et démographiques entre l'Afrique et l'Europe ont contribué à ces mouvements.
Le prochain Sommet Union européenne-Afrique sur la migration qui aura lieu à Malte donnera l'occasion de concevoir un nouveau pacte de politiques communes de coopération pour le développement, tenant mieux compte de la mobilité humaine. L'Europe et l'Afrique ont besoin d'une stratégie commune d'investissement permettant aux personnes d'avoir un avenir dans leur propre pays, différente de certains projets ayant, par inadvertance, contribué à les déraciner. La migration doit être un choix et non une nécessité, une expression de l'espoir et non du désespoir.
La crise en Méditerranée orientale est très différente de celle observée du côté italien. La grande majorité des personnes qui arrivent en Grèce proviennent de quelques-uns des 10 principaux pays d'origine des réfugiés, surtout de République arabe syrienne, d'Iraq et d'Afghanistan. À elle seule, la Grèce a reçu plus de 400 000 personnes cette année, c'est à dire un chiffre plus de neuf fois supérieur à celui de 2014, une accélération principalement due à la crise syrienne.
Le grand afflux cette année de réfugiés syriens vers l'Europe est principalement dû à trois facteurs, dont deux sont des tendances à long terme et le troisième un déclencheur plus récent. Premièrement, beaucoup ont perdu l'espoir qu'une solution politique soit bientôt trouvée pour mettre fin à la guerre. Deuxièmement, après beaucoup d'années passées en exil, leurs ressources se sont épuisées et leurs conditions de vie se sont considérablement détériorées. Au Liban, sept réfugiés syriens sur 10 vivent dans l'extrême pauvreté, tandis qu'en Jordanie, le pourcentage de réfugiés en zones urbaines vivant en dessous du seuil jordanien de pauvreté est de 86 %. Dans la région, les réfugiés ne peuvent pas travailler légalement et plus de la moitié de leurs enfants ne vont pas l'école.
Le troisième facteur, déclencheur, est le déficit de financement de l'aide humanitaire. Le HCR s'efforce de continuer à soutenir un nombre croissant de familles extrêmement vulnérables, en leur fournissant des espèces et des abris, surtout en préparation de l'hiver qui arrive. Toutefois, lorsque le manque de financement a obligé le Programme alimentaire mondial à réduire son assistance de 30 % il y a quelques mois, bon nombre de réfugiés ont eu le sentiment que la communauté internationale commençait à les abandonner.
De ce fait, de plus en plus de personnes se sont engagées dans des voyages désespérés vers l'Europe, malgré les risques et les coûts énormes que cela comporte. Pour être honnête, dans les mêmes circonstances, j'en ferai autant avec ma famille.
Distingués délégués,
Pendant l'année écoulée, le HCR a dû se concentrer - et encore - sur la réponse d'urgence qui exerce des pressions sur les capacités et les ressources de l'Organisation. Nous avons renforcé notre capacité institutionnelle de réponse d'urgence, par une restructuration et un nouveau cadre d'orientation qui clarifie les responsabilités, ainsi que des arrangements internes en matière de leadership et de coordination. En 2014 et 2015, nous avons déployé plus de 600 missions d'urgence et soutenu des opérations d'urgence grâce à notre réseau de sept stocks mondiaux.
En matière de protection, nous avons aidé les États à mettre au point leurs systèmes nationaux d'asile et accompli des progrès dans la mise en oeuvre de la Stratégie mondiale sur les alternatives à la détention, lancée l'année dernière. Le nombre de demandes d'asile d'enfants non accompagnés ayant atteint des niveaux sans précédent, la protection de l'enfant demeure également un domaine prioritaire de notre travail. D'importants progrès ont été accomplis en matière d'éducation, avec notamment l'accès à l'école de 260 000 nouveaux enfants dans le cadre du programme « Educate A Child », et une meilleure intégration des réfugiés dans plusieurs systèmes nationaux d'éducation. Le HCR a également renforcé sa capacité en matière de prévention et de lutte contre les violences sexuelles et de genre, dès le déclenchement des crises, grâce au projet « Safe from the Start ».
En novembre dernier, nous avons lancé notre campagne mondiale pour mettre fin à l'apatridie d'ici 2024. Depuis 2011, près de 50 adhésions aux conventions relatives à l'apatridie ont été enregistrées, ce qui constitue une évolution remarquable. Plusieurs États ont réalisé des progrès encourageants dans le règlement des situations prolongées, en mettant au point des procédures de détermination du statut d'apatride et en prévoyant l'égalité des sexes dans les lois relatives à la nationalité. J'espère que tous les États vont nous soutenir dans l'atteinte des objectifs ambitieux mais réalisables de cette campagne décennale.
Nous avons également réalisé des progrès en changeant l'approche d'assistance humanitaire, notamment les stratégies, pour passer du modèle « soins et entretien », dans une certaine mesure dépassé, à une approche plus professionnelle, systématique et axée sur le marché pour l'autonomie et les moyens d'existence, chaque fois que cela est possible. Les opérations du HCR ont reçu les outils leur permettant de mieux évaluer le potentiel de l'application des alternatives aux camps dans leurs pays respectifs, et un certain nombre d'États ont réalisé des progrès notables pour intégrer les réfugiés dans les services publics nationaux. Nous progressons aussi rapidement vers un recours répandu et systématique aux interventions en espèces pour remplacer ou compléter l'assistance en nature.
Toutefois, tous ces efforts sont remis en cause par un grave déficit financier. Avec la croissance exponentielle des besoins humanitaires qui dépassent inévitablement le niveau d'appui très généreux de nos donateurs, l'écart entre les besoins et les ressources disponibles ne cesse de s'élargir.
Permettez-moi d'être clair : le système humanitaire n'est pas en panne - comme certains le prétendent -, il est de loin plus efficace que beaucoup d'autres, comme les domaines du développement ou de la sécurité. Il est plutôt financièrement en panne. Nous ne sommes plus en mesure de satisfaire même les besoins absolument minimums de protection essentielle et d'assistance vitale permettant de préserver la dignité humaine des personnes que nous prenons en charge. Le niveau actuel de financement de 33 appels des Nations Unies en vue d'accorder l'assistance humanitaire à 82 millions de personnes à travers le monde n'est que de 42 %. Cette année, le HCR ne s'attend à recevoir que 47 % de fonds dont il a besoin. Nous avons pu éviter d'importantes réductions de notre aide directe aux familles réfugiées, mais à un coût élevé pour nos autres activités.
En Afrique, nous avons un déficit de 215 millions de dollars par rapport aux dépenses très urgentes déjà autorisées, notamment en vue de la création de 14 nouveaux camps et de l'élargissement de 7 autres, et ce déficit ne peut être couvert par nos ressources non affectées. Quand des dizaines de milliers de réfugiés traversent la frontière, démunis et sous-alimentés, et que les États d'accueil offrent généreusement du terrain pour les abriter, nous n'avons tout simplement plus l'option de dire non, même si les fonds ne sont pas disponibles. Nous disposons d'une trésorerie bien gérée, basée sur le principe consistant à « recevoir le plus tôt possible et à dépenser le plus tard possible », donc nous gérons bien. Toutefois, comme vous pouvez vous imaginer, cette manière d'agir comporte des limites. Aujourd'hui, nous faisons face à un dilemme existentiel quant à notre capacité de servir en Afrique, et j'en appelle aux donateurs pour qu'ils nous aident à réduire cet écart avant la fin de l'année.
Je n'ai pas besoin de répéter ici le grave impact que la réduction de fonds pour le Programme alimentaire mondial a eu sur des millions de réfugiés et d'autres personnes dépendant presque entièrement de l'aide alimentaire, qui ont vu leur ration diminuer en moyenne de 34 % en 2015. L'appui supplémentaire annoncé récemment sera utile, mais un énorme déficit reste à combler.
Je remercie vivement les donateurs du HCR, à savoir les gouvernements ainsi que les particuliers, les entreprises et les fondations, qui ont ensemble contribué un chiffre record de 3,3 milliards de dollars l'année dernière. Toutefois, de toute évidence, les budgets humanitaires sont très insuffisants pour couvrir ne serait-ce que le minimum des besoins, et nous commençons à voir ce qui en résultent. Il est nécessaire que le monde repense la manière de financer les réponses aux crises humanitaires, et cela ne peut se faire à long terme, nous devons commencer maintenant.
L'un des principaux éléments de cette réponse doit être un lien beaucoup plus étroit entre les interventions humanitaires et les interventions de développement, allant au-delà de l'idée classique de « combler le déficit ». Les acteurs du développement, soutenus par des budgets spécifiques, doivent travailler aux côtés des acteurs humanitaires dès le début d'une crise, afin de contribuer à prévenir d'autres conflits, de soutenir les communautés d'accueil et de préparer le terrain pour des solutions durables. Les crises humanitaires de grande ampleur peuvent créer des problèmes structurels énormes pour les pays d'accueil et menacer les acquis de développement de plusieurs années.
Pour prévenir une nouvelle spirale de fragilité et d'instabilité, les acteurs du développement doivent bénéficier de plus de souplesse et de meilleurs outils pour agir tôt et rapidement, afin de stabiliser la situation et construire la résilience. Pour atteindre cet objectif, nous devons fondamentalement revoir les stratégies et les politiques de coopération bilatérale et multilatérale pour le développement.
Les pays accueillant de grands nombres de réfugiés, produisant ainsi un bien public mondial, méritent une attention particulière. Bon nombre de ces États sont d'importants piliers de paix et de stabilité dans leur région, et avec les conflits et le terrorisme qui menacent de s'étendre au-delà des frontières, ils constituent de fait la première ligne de défense de notre sécurité collective. Toutefois, un nombre important de ces pays sont des pays à revenus intermédiaires, donc oubliés ou même exclus de plusieurs mécanismes de coopération pour le développement comme les dons de la Banque mondiale. Ils jouent cependant un rôle dont nous dépendons tous, comme la crise actuelle a montré. J'en appelle donc à tous les partenaires intéressés d'engager les forums comme le G7, le G20 et les conseils d'administration des institutions financières internationales pour le changement de politique nécessaire pour mieux soutenir ces pays.
Pour nous, les humanitaires, il est évidemment essentiel de préserver l'autonomie de l'espace humanitaire, afin d'être en mesure d'agir pour le compte de toutes les personnes ayant besoin de notre aide, dans le strict respect des principes d'indépendance, de neutralité et d'impartialité. Nous devons toutefois aussi reconnaître que, du point de vue de l'analyse stratégique, les questions humanitaires, de développement et de sécurité sont les trois faces d'une même réalité complexe. Les États doivent en tenir compte lorsqu'ils déterminent les objectifs et les priorités de leurs politiques et actions internationales. Tout comme l'assistance humanitaire ne saurait être séparée de la coopération pour le développement, la manière dont les États planifient l'assistance au développement ne peut être séparée des conséquences des conflits qui se multiplient à travers le monde.
Le HCR travaille dur pour renforcer son partenariat avec les acteurs du développement. En dehors de nos liens étroits avec le Moyen-Orient, nous avons accompli beaucoup de progrès dans la coopération avec la Banque mondiale qui a abouti à un certain nombre d'études régionales sur le déplacement forcé et permis l'appui aux opérations comme en Éthiopie, au Kenya et en Ouganda. La Banque mondiale a également fourni aux gouvernements de la République démocratique du Congo et de la Zambie d'importants prêts concessionnels pour aider les déplacés internes ou intégrer d'anciens réfugiés. Nous travaillons également avec le PNUD dans le cadre de l'Alliance pour les solutions pour l'intégration des réfugiés dans les plans nationaux de développement, ainsi qu'avec le Centre du commerce international pour améliorer les possibilités économiques en faveur des réfugiés. Toutefois, beaucoup reste à faire pour qu'il y ait le changement de culture permettant de renforcer les liens entre les interventions humanitaires et les interventions de développement.
Ce changement est possible maintenant que les gouvernements se sont accordés sur les Objectifs de développement durable pour les 15 prochaines années. Ces objectifs constituent une importante avancée, même si, comme la plupart des politiques de coopération pour le développement, ils ne tiennent pas toujours suffisamment compte du fait qu'une grande partie du monde d'aujourd'hui reste plongée dans des conflits. Toutefois, le principe d'universalité, l'engagement à n'abandonner personne et la reconnaissance explicite que les réfugiés et les déplacés internes font partie des plus vulnérables constituent un important point de départ permettant de veiller à ne pas perdre de vue la dimension conflits dans les Objectifs de développement durable. Le HCR va identifier un certain nombre de pays où les réfugiés constituent au plan statistique une partie importante de la population, et travailler avec les autorités nationales et les donateurs pour atteindre les Objectifs de développement durable de façon à inclure tous les groupes de population.
Excellence, Distingués délégués,
Pour le HCR, n'abandonner personne signifie trouver des solutions durables permettant aux réfugiés de recommencer leurs vies et d'être des membres productifs de la société. Toutefois, pour la grande majorité des personnes que nous servons, il s'agit d'un rêve lointain. L'année dernière, le nombre de réfugiés ayant pu rentrer dans leurs pays, à savoir 126 000 comme je l'ai dit, a été le plus faible depuis plus de trois décennies. Même si environ 100 000 réfugiés ont été réinstallés en 2014, ce chiffre ne correspond qu'à 15 % des besoins globaux de réinstallation. Habituellement, le nombre de ceux qui bénéficient des possibilités d'intégration locale est même plus faible.
Le HCR s'est donc focalisé sur de nouvelles approches, mettant l'accent sur les stratégies de solutions globales et travaillant avec les partenaires et les gouvernements pour renforcer la résilience et l'autonomie chez les réfugiés dans un proche avenir, et préparer des solutions futures.
Toutefois, nous devons, plus que jamais, être en mesure de comprendre les causes profondes de déplacement et y faire face. Cette question sera le thème de notre Dialogue sur la protection de décembre, où nous allons examiner la multitude de facteurs provoquant le déplacement, dont les conflits pour le contrôle des ressources, la mauvaise gouvernance, les violations des droits de l'homme et l'inégalité d'accès aux avantages du développement, et explorer les voies et moyens par lesquels les gouvernements, les acteurs humanitaires et d'autres acteurs peuvent résoudre ce problème.
De toute évidence, les conflits armés continuent d'être le plus grand facteur de déplacement. Rien ne semble aujourd'hui plus difficile que de mettre fin à un conflit, ou de l'empêcher. Nous vivons dans un monde chaotique, sans système efficace de gouvernance, où les relations de pouvoir ne sont pas claires. Dans un tel contexte l'imprévisibilité et l'impunité règnent, et les guerres durent des années, entraînant le déplacement de millions de personnes.
Il ne peut y avoir de solutions humanitaires aux crises humanitaires - et nous ne le répéterons jamais assez -, surtout si ces crises sont provoquées par des conflits. Les solutions doivent être politiques. Pour mettre fin à certains des plus graves conflits que nous observons actuellement, il faut à mon avis deux éléments, à savoir des acteurs pouvant être reconnus comme des médiateurs honnêtes, et la capacité de réunir autour d'une même table tous les pays ayant une influence sur les belligérants. Nous ne verrons d'amélioration véritable que si ceux qui financent, arment et soutiennent les parties à chaque conflit d'aujourd'hui surmontent leurs divergences et intérêts conflictuels, pour reconnaître que chacun perd dans la guerre et s'accorder sur la voie commune de mettre fin au bain de sang.
Excellence, Mesdames et Messieurs,
Les gens sont également de plus en plus obligés d'abandonner leurs maisons à cause des interactions entre les effets de la croissance démographique, de l'insécurité alimentaire et énergétique et de la rareté de l'eau, et le changement climatique, problème crucial de notre temps, accélère toutes ces tendances.
La désertification, la sécheresse, les inondations et les catastrophes naturelles de plus en plus graves amplifient les vulnérabilités et affectent des dizaines de millions de personnes chaque année. À la fin de cette année, lorsque les gouvernements vont se réunir à Paris, il sera indispensable qu'un accord significatif et universel soit conclu sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre et d'autres questions connexes. Toutefois, cet accord à lui seul ne suffira pas. Les États doivent également tenir compte de la multiplication des migrations et des déplacements liés au changement climatique, et prendre des mesures proactives pour relocaliser les populations à risque dans des zones sûres.
Je remercie vivement les Gouvernements suisse et norvégien pour avoir dirigé l'initiative Nansen au cours des trois dernières années. Ce processus consultatif innovant, conduit par les États, a permis d'identifier les pratiques efficaces et les principes clés de la satisfaction des besoins éventuels de protection des personnes déplacées à travers les frontières par les effets du changement climatique, cas qui n'est prévu par aucune norme internationale existante. La semaine prochaine, la réunion mondiale de l'initiative Nansen, qui aura lieu ici à Genève, devra valider l'Agenda de protection sur la meilleure voie à suivre. J'encourage les États à accorder pleinement leur appui à sa mise en oeuvre. Évidemment, le HCR est prêt à apporter sa contribution à ce processus.
Distingués délégués,
Avec l'augmentation des déplacements et l'accroissement des besoins humanitaires, le Sommet humanitaire mondial de 2016 ne peut que venir à point nommé, et nous devons soutenir M. Stephen O'Brien, Coordonnateur des secours d'urgence, dans sa détermination à ne pas permettre que ce Sommet soit technocratique et axé sur les processus. Une réponse humanitaire efficace étant indispensable pour la sécurité et le bien-être du monde, nous ne saurions nous permettre de rater cette occasion.
Sont inscrites au programme du Sommet humanitaire mondial, un certain nombre de questions importantes que le HCR soutient fermement, entre autres, la manière de promouvoir l'obligation de rendre compte aux personnes que nous essayons d'aider et l'urgence de trouver des solutions aux situations de déplacement prolongées. La protection doit être au centre de l'action humanitaire qui suppose la participation effective des populations touchées, l'utilisation de leurs capacités et l'appui aux communautés dans lesquelles elles vivent. Pour moi, le Sommet humanitaire ne devrait pas ignorer deux autres éléments. Le premier est le lien entre l'aide humanitaire et l'aide au développement, dont je viens de parler.
Le second est la nécessité impérieuse de mettre en place un système humanitaire plus inclusif, qui prend mieux en compte le caractère universel des valeurs qui guident notre travail, et nous permet d'unir les capacités de tous les acteurs humanitaires dans la réponse. Nous devons sortir de la situation actuelle où diverses organisations de cultures différentes travaillent quelquefois parallèlement, sans coordination effective, ce qui entraîne des défaillances et des chevauchements, et ne peut que causer du tort à ceux que nous essayons d'aider.
Il est évident qu'une communauté humanitaire véritablement universelle n'est pas possible si le point de vue d'une partie du monde est érigé en « modèle pour tous ». Pour dépasser le système multilatéral actuel, qui est essentiellement une création occidentale, et mettre en place un partenariat plus universel, nous devons nous concentrer sur un élément déjà présent, mais souvent négligé, à savoir notre base commune de valeurs humanitaires reconnues dans toutes les cultures.
La protection des réfugiés est un excellent exemple qui montre que les valeurs humanitaires sont universelles, même si elles sont exprimées quelquefois de différentes manières. Toutes les grandes religions épousent les valeurs et les principes qui sous-tendent la protection des réfugiés, à savoir témoigner de la compassion et de la générosité envers les personnes dans le besoin, accueillir chez soi un étranger persécuté, et même les premiers équivalents de la notion de non-refoulement.
Dans un monde où plus de deux tiers des réfugiés sont musulmans, il est important de reconnaître que rien dans la Convention de 1951 n'est étranger aux traditions islamiques et textes juridiques anciens. L'esprit humanitaire est profondément ancré dans la Zakat, troisième pilier de l'islam, qui oblige chaque musulman à donner l'aumône aux pauvres et aux nécessiteux.
De toute évidence, bon nombre de principes majeurs du droit international humanitaire ont, d'une manière générale, leurs équivalents dans d'autres cultures. Dans l'islam, les hadiths du Prophète comprennent l'obligation d'épargner les non-combattants, de traiter humainement les prisonniers de guerre et de respecter certaines limites dans la conduite de la guerre.
Je pense qu'il est possible d'élargir cette base commune pour construire un système tenant compte de la diversité d'expression et de perspectives, un système permettant plus d'ouverture et une collaboration systématique au service des personnes prises en charge, guidé par les principes d'humanité, de neutralité, d'impartialité et d'indépendance.
Mesdames et Messieurs, Distingués délégués,
Parlant des valeurs, j'aimerais encore faire quelques observations. La crise de réfugiés en Europe met en lumière les valeurs humaines montrant qui nous sommes - en tant qu'individus et en tant que sociétés - et comment est-ce que nous répondons aux défis. Elle a montré la nécessité de préserver les principes fondamentaux de tolérance, de respect de la diversité et de la solidarité avec les personnes nécessiteuses, car ce sont ces principes, et non l'étroitesse d'esprit rétrograde liée à la xénophobie, qui nous permettront de gérer certains des défis actuels et futurs auxquels la société humaine fait face.
Pour relever ces défis, un rapport positif entre le monde occidental et le monde musulman est essentiel. Il est extrêmement urgent de lutter contre l'islamophobie et de réduire l'attrait qu'exercent les idéologies extrémistes sur les jeunes. Cette dernière exigence n'est pas qu'une question d'opérations militaires, elle est surtout une bataille de valeurs. Dans cette bataille, une Europe qui défend ses valeurs fondamentales de tolérance et d'ouverture, en accueillant les réfugiés de toutes les religions, affaiblirait les arguments des groupes extrémistes. Toutefois, en rejetant les réfugiés musulmans à cause de leur religion, elle fournirait à ces acteurs le meilleur outil de propagande souhaité pour attirer de nouveaux disciples pour le terrorisme.
Tous nos pays et communautés deviennent des sociétés multi-religieuses, multi-ethniques et multiculturelles, une évolution qui est non seulement inévitable mais aussi souhaitable. La mise en place et le maintien de sociétés tolérantes et ouvertes, capables de répondre positivement aux peurs et anxiétés, est un processus lent et délicat qui nécessite d'importants investissements, tant des gouvernements que de la société civile. Toutefois, la diversité nous enrichit et comporte des avantages dépassant de loin le coût de ces investissements.
Les événements ayant eu lieu ces derniers mois en Europe illustrent cette bataille - de la compassion contre la peur et de la tolérance contre la xénophobie. Si nous avons été profondément touchés par les citoyens européens qui sortaient par milliers pour aider et
accueillir les réfugiés, nous avons aussi été choqués par l'hostilité et la violence de certains actes et slogans ayant accueilli les personnes fuyant les guerres aux endroits où elles pensaient être en sécurité. La résistance exprimée par une bonne partie de la population nous inquiète.
En tant que Haut Commissaire pour les réfugiés et citoyen du monde, je pense qu'il est possible de gagner cette bataille de valeurs, qui est aussi notre bataille commune. Les actes de gentillesse, posés par des millions de personnes dans les communautés d'accueil à travers le monde, continuent de nous montrer, jour après jour, que la tolérance et la solidarité sont profondément ancrées dans le coeur de l'humanité. Ces valeurs sont nos outils les plus solides et notre meilleure protection face aux défis à venir.
Distingués délégués,
Servir comme Haut Commissaire pour les réfugiés a été pour moi un énorme privilège, mais, avec votre permission, je voudrais qu'au lieu de nous attarder sur le passé, nous parlions du chemin qui reste à parcourir. J'ai l'intime conviction que l'avenir du HCR repose essentiellement sur quatre piliers : le personnel, la base élargie de partenariat, l'aptitude constante à la réforme et à l'innovation, et la force du mandat de protection.
Tout d'abord le personnel du HCR. Je me suis senti extrêmement honoré de travailler avec les femmes et les hommes qui constituent le coeur et l'âme de cette Organisation. Leur force, leur ingéniosité et leur ferme engagement n'ont jamais cessé de m'impressionner. Pendant les missions que j'ai effectuées, j'ai rencontré des centaines de collègues travaillant dans des circonstances extrêmement difficiles, exposés à l'insécurité et aux risques accrus pour leur santé, et souvent séparés de leurs familles pour des périodes prolongées. Je suis profondément touché par les sacrifices consentis par bon nombre d'agents pour servir les personnes prises en charge. Je voudrais, une fois de plus, exprimer ma profonde solidarité avec les familles des collègues ayant perdu la vie en s'acquittant de leurs missions. Le HCR doit continuer à faire tout ce qui est possible pour protéger son personnel, en faisant toujours de la sécurité de celui-ci sa principale priorité.
Avec 82 % de collègues travaillant sur le terrain, un tiers d'agents recrutés au plan international subissant la rotation chaque année et plus de la moitié du personnel travaillant dans des lieux d'affectation difficiles, l'avenir de l'Organisation dépend surtout de notre capacité à gérer efficacement les ressources humaines, à anticiper sur les besoins futurs de personnel et à accorder un appui solide au bien-être du personnel. La mise en oeuvre avec succès de notre nouvelle Stratégie de gestion des ressources humaines sera essentielle pour veiller à ce que ces actions puissent être menées.
Toutefois, certains de nos efforts peuvent être remis en cause par des décisions affectant l'ensemble du système des Nations Unies, qui ne tiennent pas suffisamment compte des besoins spécifiques d'organisations basées sur le terrain comme le HCR. L'examen de la rémunération par la Commission de la fonction publique internationale est un important outil de réforme comportant un ensemble de propositions positives. Plusieurs mesures de réduction de coûts concernant la mobilité et la présence sur le terrain en zones reculées sont cependant contre-productives et menacent notre aptitude à nous acquitter de notre mandat dans les endroits les plus importants, notamment dans de nombreux endroits dangereux. J'encourage donc vivement les États membres à examiner les changements proposés concernant la mobilité, en particulier dans des lieux d'affectation difficiles où les familles ne sont pas autorisées. C'est par la réforme interne et une productivité accrue qu'on peut réduire le poids des dépenses de personnel dans une organisation, y compris au sein des Nations Unies, et non en réalisant des économies pouvant remettre en cause la mobilité et rendre le travail dans des endroits dangereux moins attractif.
Le deuxième élément important pour l'avenir du HCR est son engagement en matière de partenariat. En 2014, nous avons travaillé avec plus de 900 partenaires à travers le monde, gérant plus de 40 % de nos dépenses. La majorité des 720 partenaires ONG, avec lesquels nous travaillons, sont des organismes nationaux, habituellement parmi les premiers à répondre aux crises, dont la bonne connaissance des capacités et des priorités locales constituent un atout précieux. Nous travaillons aussi étroitement avec d'autres principaux partenaires comme le PAM, l'UNICEF et l'OIM pour améliorer l'assistance aux personnes prises en charge. Après avoir signé l'année dernière la Note conjointe sur les situations mixtes, l'OCHA et le HCR ont réalisé en 2015 des progrès remarquables sur la mise au point des modalités de coordination pratiques et basées sur le terrain.
Je remercie tous nos partenaires pour la coopération solide et constructive que nous avons entretenue au cours des années écoulées. Le HCR reste profondément engagé à continuer de renforcer ces partenariats, par les nouveaux accords-cadres, le suivi du dialogue de 2012 sur le partenariat stratégique et le meilleur appui possible, à travers le Modèle de coordination pour les réfugiés et les groupes sectoriels que nous dirigeons, ainsi que les initiatives de formation et de renforcement des capacités.
Pour ce qui est du troisième point concernant la réforme et l'innovation, le HCR met en oeuvre depuis des années un programme ambitieux de réformes, en réduisant le poids des dépenses administratives et du personnel, et en accordant la priorité à la souplesse et à la capacité de servir. Évidemment, la réforme n'est jamais un processus achevé, mais une manière constante d'être, et nous resterons dans cette voie, car elle est importante pour notre aptitude à servir.
Par ailleurs, nous devons bien saisir le pouvoir de l'innovation pour nous mettre à l'âge numérique. Nous travaillons sur beaucoup d'initiatives pour améliorer la qualité de l'éducation chez les réfugiés, par la technologie mobile ; fournir de l'énergie aux communautés de réfugiés, par exemple par des micro-réseaux ; utiliser le balayage de l'iris pour l'enregistrement et l'assistance en espèces en faveur de familles de réfugiés vulnérables ; et accroître la communication dans les deux sens avec les réfugiés, par les réseaux sociaux et des téléphones intelligents. Toutefois, l'innovation va au-delà de la technologie pour exiger que des gens soient formés et qu'ils puissent comprendre comment identifier de nouvelles approches appropriées aux nouveaux besoins. Des systèmes financiers souples sont aussi indispensables pour des partenariats solides avec le secteur privé, notamment des entités comme IKEA, Facebook, UPS et Google.
Dans 20 ans, le HCR et le monde humanitaire seront très différents. L'avenir sera déterminé par notre disposition à changer et à nous adapter, à condition que ce changement ait lieu dans le même cadre de valeurs organisationnelles, à savoir le respect des principes humanitaires, de la dignité humaine, de la diversité et des droits humains.
Distingués délégués,
Pour conclure, permettez-moi de dire quelques mots sur le mandat de protection du HCR. Comme il y a près de 65 ans, lorsque le HCR était fondé, la Convention de 1951 demeure nécessaire aujourd'hui. Elle a été complétée et renforcée par des instruments régionaux comme la Convention de l'OUA de 1969 sur les réfugiés en Afrique ou la Déclaration de Carthagène de 1984 et son suivi, les efforts de l'Union européenne pour mettre en place un Système européen commun d'asile, la jurisprudence des juridictions nationales et internationales et une doctrine riche en matière de protection émanant des Conclusions du Comité exécutif. Aujourd'hui que nous avons atteint le niveau de déplacements forcés le plus élevé dans l'histoire, l'institution de l'asile doit demeurer sacro-sainte et être respectée comme l'une des expressions les plus profondes d'humanité, surtout de nos jours où elle est gravement remise en question dans bon nombre de régions du monde. J'ai l'intime conviction que la meilleure manière de procéder est une coopération internationale véritable et un partage équitable de la charge. En effet, si un Protocole doit être rédigé pour compléter la Convention de 1951, il doit porter sur la solidarité internationale et le partage de la charge.
La crise actuelle de réfugiés a aussi montré, plus que tout, qu'il est essentiel de garantir les principes de protection internationale et de préserver le mandat légal, fermement établi du Haut Commissaire, d'intervenir auprès des gouvernements pour le compte des réfugiés et des personnes relevant de la compétence du HCR. N'oublions pas que la tâche qui nous a été confiée est de protéger les non-citoyens qui, malheureusement et bien souvent, sont considérés comme indésirables aux endroits vers lesquels ils fuient.
Depuis que l'Organisation existe, elle n'a jamais éprouvé autant de difficultés pour exercer son mandat, soit à cause de l'ampleur des déplacements, soit à cause de la complexité du contexte dans lequel elle travaille. Il y a eu des tentatives visant à remettre en cause la validité de la Convention de 1951 ou à diluer la responsabilité du HCR pour la protection des réfugiés, notamment pour les « compartimenter». Récemment, la mode a consisté à dire que le statut juridique importe peu et que les actions de la communauté humanitaire doivent se focaliser exclusivement sur la vulnérabilité. Pour y répondre, je peux simplement dire que, pour les réfugiés, le statut juridique est le principal facteur de vulnérabilité. Être pauvre chez soi n'est pas la même chose qu'être pauvre dans un pays étranger. N'est pas fortuit, le fait que ceux qui traversent aujourd'hui la Méditerranée orientale soient des réfugiés syriens et non des Turcs, Jordaniens ou Libanais pauvres. Cette réalité ne vaut pas uniquement pour les réfugiés, car tout le monde sait que la cause profonde de vulnérabilité chez les Rohingya est leur apatridie et le manque de statut légal dans leur propre pays.
Au moment où je me prépare à quitter mes fonctions à la fin de cette année, je remercie les États membres pour leur coopération, leurs efforts constants en vue de se conformer aux principes de protection des réfugiés et leur respect de l'intégrité du mandat du HCR. Après tout, c'est vous, les États membres, qui avez rédigé la Convention de 1951 et le Statut du HCR. Je voudrais aussi vous lancer un appel : Faites tout ce qui est possible pour préserver l'inviolabilité de l'asile ; continuez à accorder la protection aux personnes qui viennent vers vous pour rechercher la sécurité face à la guerre et à l'oppression ; enfin accordez le même appui, dont j'ai bénéficié de votre part, à mon successeur dans ses efforts visant à s'acquitter des responsabilités confiées en vertu du mandat au Haut Commissaire pour les réfugiés.
Merci beaucoup.