Note sur la protection internationale (Présentée par le Haut Commissaire)
Note sur la protection internationale (Présentée par le Haut Commissaire)
A/AC.96/567
Introduction
1. Le Haut Commissaire a exposé les principaux faite nouveaux survenus jusqu'au 31 mars 1979 en matière de protection internationale dans le rapport qu'il a présenté à l'Assemblée générale à sa trente-quatrième session par l'intermédiaire du Conseil économique et social (document E/1979/95). Dans ce rapport, il appelle l'attention sur un certain nombre de faite positifs, mais il mentionne aussi des problèmes qui suscitent des préoccupations. Ces derniers concernent plus particulièrement les difficultés qu'ont les personnes en quête d'asile à trouver un pays de refuge permanent, ou même temporaire, le refoulement de réfugiés vers des pays où ils ont des raisons de craindre la persécution et l'adoption de mesures injustifiées et arbitraires d'expulsion et de détention prises à l'encontre de réfugiés. Des faits nouveaux plus récente sont encore venue confirmer l'importance vitale de la protection internationale, et ont montré que cette fonction devait être exercée dans la contexte de la solidarité et de la coopération internationales.
Faite nouveaux récents
2. Dans une région donnée, on a assisté à une recrudescence des difficultés touchant l'asile que rencontrent les réfugiés quittant leur pays d'origine par mer. Plusieurs Etats de la région ont cessé d'observer le principe de l'octroi de l'asile temporaire et ont pris des mesures concrètes pour empêcher les bateaux transportant des personnes en quête d'asile de pénétrer dans leurs eaux territoriales. Les personnes en quête d'asile qui ont réussi à entrer sur le territoire ont été renvoyées en haute mer et, exposées à de graves dangers; elles ont connu d'extrêmes difficultés et ont, dans bien des cas, perdu la vie. Dans cette même régionales personnes en quête d'asile arrivant aux frontières terrestres, se sont vu refuser l'admission; quant à celles qui étaient déjà entrées sur le territoire national, la politique appliquée a consisté à les renvoyer dans leur pays d'origine. L'exercice de la fonction de protection du Haut Commissaire - fonction qui lui a été confiée par la communauté internationale a été entravé par le fait que les Etats de cette région n'ont pas adhéré aux principaux instruments internationaux relatifs aux réfugiés.
3. Chacun sait, bien entendu, que l'octroi de l'asile, même temporaire, risque d'imposer une lourde charge aux Etats qui, du fait de leur situation géographique, sont aux prises avec des arrivées nombreuses, et même massives, de personnes en quête d'asile. Les problèmes que rencontrent les pays de premier asile sont toutefois de ceux dont on reconnaît qu'ils intéressent la communauté internationale tout entière et la principe du « partage des charges » a été très largement admis au niveau mondial, et au niveau régional également. Il faut évidemment que ce principe du « partage des charges » trouve son expression concrète dans des situations de réfugiés déterminées, et l'une des préoccupations constantes du Haut Commissaire consiste à faire en sorte que des dispositions appropriées soient prises pour alléger le fardeau des pays de premier asile; à cet effets il s'efforce de rechercher des possibilités de réinstallation, d'offrir protection et entretien aux réfugiés en attendant leur réinstallation et, le cas échéant, d'aider à élaborer des projets d'installation sur place. S'il est compréhensible que les pays de premier asile puissent, devant certaines situations de réfugiés, considérer que ce système du « partage des charges » constitue un arrangement insuffisant, tant du point de vue de la rapidité avec laquelle il est appliqué que du point de vue de sa portée effective, cette façon de voir ne justifie cependant pas que l'on méconnaisse le principe du non-refoulement ou que l'on refuse d'admettre temporairement des réfugiés si ce refus risque de porter un très grave préjudice aux intéressés. Ces questions ne sont pas de celles qui se prêtent à la négociation.
4. Il convient de noter que, dans d'autres régions du monde, des réfugiés se sont aussi, dans certains cas, vu refuser l'asile, ou ont été renvoyés dans leur pays d'origine contrairement au principe du non-refoulement, ou encore ont été soumis à des mesures d'expulsion dans des circonstances que ne justifie pas l'article 32 de la Convention de 1951 sur les réfugiés, ou bien ont été maintenus arbitrairement en détention pendant de longues périodes.
5. Devant ces faite inquiétants, il importe que les gouvernements réaffirment les règles et principes fondamentaux établis dans le domaine humanitaire pour assurer la protection des réfugiés et des personnes en quête d'asile. Il faut aussi s'employer d'urgence à mieux donner effet à ces principes grâce à l'adoption de mesures de mise en oeuvre nécessaires au niveau national. Il convient de rappeler que l'impact de ces mesures dépasse leur portée immédiate, et qu'elles servent par conséquent à renforcer et à consolider l'ensemble des principes régissant la protection internationale.
Problèmes particuliers
6. En ce qui concerne l'asile, il est de la plus haute importance que les gouvernements prennent les mesures administratives voulues pour faire en sorte que toutes les personnes qui cherchent asile à leurs frontières soient admises temporairement, de façon que leur demande puisse être examinée. Ces mesures sont particulièrement essentielles lorsque le refus d'admission temporaire peut avoir des conséquences très graves - et parfois irréparables - pour celui qui cherche asile.
7. Lorsque le statut de réfugié est l'un des critères dont dépend l'octroi de l'asile, il est d'autant plus nécessaire que les demandes soient examinées conformément à des procédures appropriées de détermination du statut de réfugié. L'expérience récente a montré une nouvelle fois que les droits fondamentaux des réfugiés - notamment le droit à la protection contre le refoulement - peuvent n'être pas respectés parce que le réfugié n'a pas été identifié comme tel. S'il est encourageant de noter qu'à la suite des conclusions formulées par le Comité exécutif à ses vingt-huitième et vingt-neuvième sessions, un certain nombre de gouvernements ont élaboré des procédures en vue de la détermination de cc statut ou envisagent activement de le faire, l'accélération de cette évolution présenterait une importance particulière au stade actuel. Cette accélération témoignerait concrètement do la volonté de la communauté internationale de faire en sorte que les demandes d'asile et les demandés visant l'octroi du statut de réfugié soient traitées avec tout le sérieux qu'elles méritent et d'éviter les situations où des réfugiés sont exposés au danger parce que leur demande tendant à obtenir la reconnaissance du statut do réfugié n'a pas été examinée convenablement. Le Haut Commissaire espère sincèrement qu'il sera en mesure de rendre compte de nouveaux progrès à cet égard dans l'avenir proche.1
8. A un moment où les droits fondamentaux des réfugiés sont menacés ou ont été gravement violés dans différentes régions du monde, il est nécessaire que la communauté internationale réaffirme les normes de traitement définies dans les instruments internationaux de base relatifs aux réfugiés. Le Haut Commissaire avec l'appui du Comité exécutif, a continué d'encourager de nouvelles adhésions à la Convention de 1951 et au Protocole de 1967. Le nombre d'Etats parties à la Convention et/ou au Protocole atteint d'ores et déjà 78, mais le rythme des nouvelles adhésions n'est pas encore assez rapide et, dans diverses régions du monde où de très gros problèmes de réfugiés se posent, ces derniers continuent, de manquer de la protection fondamentale minimum que leur offrent ces instruments. Compte tenu des faits nouveaux intervenus récemment, la Haut Commissaire estime que de nouvelles adhésions à la Convention et au Protocole par un nombre appréciable d'Etats de différente continents s'imposent aujourd'hui avec une extrême urgence.
Progrès et tendances positives
9. Malgré les divers éléments négatifs dont il a été fait mention plus haut, il ne faut cependant pas perdre de vue un certain nombre de tendances positives plus encourageantes dans le domaine de la protection internationale. Dans deux situations déterminées de réfugiés en Afrique et en Asie, le rapatriement librement consenti - solution la plus souhaitable à leurs problèmes a pu être assuré à grande échelle. De nombreux Etats ont continué de suivre des pratiques libérales et humanitaires pour l'octroi de l'asile temporaire et durable et d'attacher une très grande importance au respect du principe du non-refoulement. Plusieurs Etats envisagent activement aujourd'hui d'établir des procédures pour la détermination du statut de réfugié. En ce qui concerne la Convention do 1951 et le Protocole de 1967, deux nouveaux Etats ont adhéré à ces instruments depuis la vingt-neuvième session du Comité et plusieurs autres envisagent activement d'y adhérer aussi.
10. Dans l'exercice de ses fonctions de protection internationale, le Haut Commissaire a été très encouragé par les mesures que des gouvernements ont prises au niveau régional. A cet égard, la Conférence sur la situation dos réfugiés en Afrique, tenue à Arusha, dans la République Unie de Tanzanie, du 7 au 17 mai 1979, a présenté une importance primordiale. La Conférence a réaffirmé plusieurs principes fondamentaux concernant le traitement des réfugiés et des personnes en quête d'asile, notamment le principe du non-refoulement, le principe de l'octroi de l'asile temporaire et le principe de la solidarité internationale et du « partage des charges » dans la cas des pays de premier asile. La Conférence a reconnu aussi l'importance qui s'attache aux procédures de détermination du statut de réfugié ainsi qu'à d'autres moyens appropriés d'identifier les réfugiés; elle a reconnu en outre qu'il fallait faciliter les déplacements de réfugiés, particulièrement pour leur permettre de faire des études, de recevoir une formation professionnelle ou de se réinstaller. Le rapport et les recommandations2 de la Conférence d'Arusha ont été approuvés par la seizième Conférence au sommet des chefs d'Etats et de gouvernements de l'organisation de l'unité africaine, qui s'est réunie à Monrovia (Libéria) du 17 au 20 juillet 1979. Le Haut Commissaire estime que les travaux de la Conférence constitueront un facteur important de l'amélioration de la situation juridique des réfugiés en Afrique et contribueront encore à renforcer les principes établis pour le traitement des réfugiés au niveau mondial.
11. Le nombre des réfugiés en Amérique centrale a sensiblement augmenté et, du même coup les gouvernements ont manifesté leur volonté de leur accorder asile et de leur fournir une assistance matérielle.
12. Le Haut Commissaire s'est vivement félicité des diverses initiatives prises au sein du Conseil de l'Europe en vue de résoudre plusieurs problèmes déterminés qui se sont posés dans le domaine de la protection internationale, notamment en ce qui concerne l'asile, les procédures de détermination du statut de réfugié et le transfert des responsabilités touchant la délivrance de documents de voyage conformément à la Convention de 1951. Le Haut Commissaire tient à exprimer sa satisfaction devant la coopération étroite qui s'est établie entre le Secrétariat du Conseil de l'Europe et le Haut Commissariat à propos de ces diverses questions.
13. A sa vingt-neuvième session, le Comité a reconnu l'importance des efforts tendant à diffuser plus largement les principes régissant les droite des réfugiés. Le Haut Commissaire voit dans cette diffusion un élément essentiel du soutien des efforts menés depuis toujours dans le domaine de la protection internationale. Le Haut Commissariat a multiplié ses activités tendant à assurer la plus large diffusion de la législation en la matière. Un exposé do ces activités et un programme d'action futur sont présentés au Comité à sa présente session.3
Conclusion
14. Le Haut Commissaire pense que l'on a assisté depuis quelques années à un net progrès en matière de protection internationale. L'expérience des derniers mois a cependant servi à concentrer l'attention sur l'ampleur des tâches qui restent à accomplir. Ces tâches appellent un effort exceptionnel de la part du HCR, et le Haut Commissaire est persuadé qu'il peut compter sur le plain appui du Comité exécutif et de la communauté internationale pour le mener à bien.
1 Pour une description de la situation actuelle, voir Note sur les procédures de détermination du statut de réfugié en vertu des instruments internationaux (A/AC.96/INF.152 et A/AC.96/INF.152/Add.1).
2 Pour le texte des recommandations, voir le document A/AC.96/INF.158.
3 Voir document A/AC.96/INF.159 sur la diffusion de la législation relative aux réfugiés.