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COMITE SPECIAL POUR LES REFUGIES ET LES APATRIDES : COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA QUARANTIEME SEANCE

COMITE SPECIAL POUR LES REFUGIES ET LES APATRIDES : COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA QUARANTIEME SEANCE
E/AC.32/SR.40

27 Septembre 1950
Présents
Président :M. LARSEN (Danemark)
Rapporteur :M. WINTER (Canada)
Membres :
BelgiqueM. HERMENT
BrésilM. PENTEADO
ChineM. CHA
Etats-Unis d'AmériqueM. HENKIN
FranceM. JUVIGNY
IsraëlM. ROBINSON
Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du NordSir Leslie BRASS
TurquieM. NURELGIN
VenezuelaM. PEREZ PEROZO
Observateurs :
ItalieM. MALFATTI
SuisseM. SCHURCH
Représentants d'institutions spécialisées :
Organisation internationale du travailM. WOLF
Organisation internationale pourM. WEIS
Les réfugiésM. KULLMAN
Représentants d'organisations non gouvernements :
Catégorie B et Registre
Comité consultatif mondial de la Société des AmisM. Colin BELL
Guilde internationale des coopératricesMlle ROSSIER
Comité de liaison des grandes associations internationales fémininesMlle ROSSIER
Ligue internationale des femmes pour la Paix et la LibertéMme BAER
Congrès juif mondialM. BIENENFELD
M. LIBAN
Secrétariat :
M. HumphreyDirecteur de la Division des droits de l'homme
M. GiraudDépartement juridique
M. HoganSecrétaire du Comité

TEXTES PROPOSES POUR UN PROJET DE CONVENTION RELATIVE AU STATUT DES REFUGIES (E/1618, E/1618/Corr.1, E/1818, E/AC.32/2, E/AC.32/6, E/AC.32/6/Corr.1, E/AC.32/7, E/AC.32/L.3, E/AC.32/L.40, E/AC.32/L.41 et E/AC.32/NGO/1) (suite)

Le Comité poursuit son examen du projet de convention figurant à l'Annexe I de son premier rapport E/1618)

Article 26 : Réfugiés résidant irrégulièrement dans le pays d'accueil

M. HERMENT (Belgique) fait observer qu'un disposition du genre de celle que contient l'article 26 doit forcément retenir l'attention des pays oui, comme la France, le Luxembourg ou la Belgique, sont particulièrement exposés à des entrées irrégulières. Il rappelle que le représentant de la France a indiqué, au commencement des débats, que 4 000 à 5 000 réfugiés entraient chaque mois irrégulièrement en France. Certes, le nombre des entrées clandestines sur le territoire belge ne s'élève guère qu'à 300 ou 400 par mois. Ces entrées irrégulières constituent cependant un véritable danger, tant du point de vue économique que du point de vue de la sécurité. C'est pour quoi il convient de réfléchir mûrement avant d'accepter la disposition figurant à l'article 26.

En tout état de cause, le représentant de la Belgique voudrait qu'il soit bien entendu que les mots « aux réfugiés qui entrent ou se trouvent sur leur territoire sans autorisation » ne s'appliquent pas aux réfugiés qui ont pénétré clandestinement sur un territoire, alors qu'une autorisation leur avait été refusée. D'autre part, il ne faudrait pas non plus que ces mots puissent s'appliquer à un séjour irrégulier qui aurait pu durer des mois ou même des années.

Le représentant de la Belgique se déclare toutefois prêt à accepter cette disposition, mais à condition qu'il soit bien entendu qu'il ne peut s'agir que d'un séjour très bref ; c'est-à-dire que les raisons qui pourraient être reconnues valables pour justifier une entrée irrégulière ou peut-être un séjour irrégulier de trois ou quatre jours ne seront jamais reconnues valables pour un séjour plus prolongé. Le représentant de la Belgique voudrait également qu'il soit bien entendu que, par le mot « sanction », on entend une peine d'internement. En effet, une mesure d'expulsion est également une sanction, et le Gouvernement belge ne voudrait pas que l'article 26 le prive du droit d'expulser un réfugié en résidence irrégulière.

Le représentant de la Belgique voudrait encore proposer deux légères modifications de forme : à l'avant-dernière ligne du premier alinéa de l'article 26, remplacer le mot « les » par le mot « des », avant le mot « raison » ; mettre un point virgule après le mot « pays », à la quatrième ligne du deuxième alinéa, et supprimer le point virgule après le mot « admission », à a cinquième ligne.

M. JUVIGNY (France) croit qu'une lecture attentive du texte de l'article 26 permet de donner satisfaction au représentant de la Belgique sur les points qu'il vient de soulever quant au fond.

Le représentant de la Belgique voudrait que les sanctions visées dans cet article et qui ne doivent pas être appliquées aux réfugiés entrent clandestinement dans un pays se bornent aux seules sanctions pénales. Or, c'est exactement ce qui est dit dans cet article. En effet, un sanction pénale, du moins suivant l'interprétation des législation latines de droit écrit, est une sanction prononcée par les tribunaux ; il ne s'agit pas de sanctions administratives. Or, pour autant que l'on considère la non-admission ou l'expulsion comme des sanctions, ce sont, dans la grande majorité des cas, des mesures d'ordre administratif, surtout lorsqu'elles sont appliquées dans un délai extrêmement bref.

D'autre part, le représentant de la Belgique voudrait que cette disposition ne s'appliquât point aux réfugiés clandestins qui se trouveraient sur le territoire depuis longtemps. Or, c'est exactement ce que dit le texte de l'article 26, où il est précisé : « aux réfugiés qui se présentent sans délai ».

M. WINTER (Canada) déclare que l'article 26 et les deux articles suivants ont été longuement étudiés par les autorités de son pays ; car la loi canadienne applique à l'entrée irrégulière des étrangers dans le territoire canadien des mesures d'arrestation et d'expulsion. Il est évident, comme l'ont dit les représentants de la Belgique et de la France qu'un certain contrôle doit s'exercer sur les entrées irrégulières. Son Gouvernement est toutefois prêt à accepter l'article en principe, étant donné que le Ministre de l'Immigration disposes du pourvoir discrétionnaire d'examiner chaque cas particulier et que l'article dispose que le réfugié doit fournir des raisons reconnues valables de son entrée ou de sa présence irrégulière.

M. HERMENT (Belgique) admet le bien-fondé de l'interprétation que vient de donner le représentant de la France, mais voudrait qu'il soit pris acte de l'interprétation que les autorités belges désirent donner à cet article.

En ce qui concerne la présence irrégulière d'un réfugié sur un territoire, le représentant de la Belgique fait observer qu'on peut imaginer le cas d'un réfugié se trouvant depuis un certain temps en territoire étranger et qui serait découvert par une autorité de ce territoire. Ce réfugié pourrit, immédiatement après avoir été découvert, se présenter aux autorités locales pour leur exposer les raisons qui l'ont amené à se réfugier sur ce territoire. Dans ces conditions, ce texte n'écarterait pas nécessairement l'hypothèse d'un séjour clandestin prolongé.

M. JUVIGNY (France) tient à apporter une autre précision. Le représentant de la Belgique a également émis l'hypothèse que les mots « sans autorisation » pourraient s'appliquer à l'attitude d'un réfugié qui, ayant fait une demande et s'étant vu refuser l'autorisation de séjourner dans le pays, persiste cependant à vouloir le faire. A ce propos, le représentant de la France fait observer que l'alinéa 2 de l'article 26 apporte tout éclaircissement nécessaire, en précisant que le statut des réfugiés entrés clandestinement dans le pays d'accueil doit être « régularisé ». Le cas de ces réfugiés doit donc faire l'objet d'une instruction. Si, à la suite de cette instruction, il est décidé, pour des raisons diverses, de ne pas admettre un réfugié, et si cette personne persiste à vouloir demeurer sur le territoire, elle ne tombe plus sous le coup de l'article 26, mais sous le coup du droit commun national, c'est-à-dire que les sanctions prévues par la législation intérieure lui seront appliquées.

Dans cas conditions, les craintes formulées par le représentant de la Belgique se trouvent dissipées par la combinaison des dispositions des alinéas 1 et 2 de l'article. 26. Lorsqu'on parle de réfugié « qui entrent ou se trouvent sur leur territoire sans autorisation », il s'agit bien de personnes qui, par suite de pressions extérieures, ont dû rentrer ou sont entrées clandestinement dans certains pays. Le cas de ces personnes ayant fait l'objet d'un examen, elles dont, soit accueillies, soit refoulées. Si elles sont refoulées, étant bien entendu qu'elles ne seront pas envoyées dans le pays qu'elles ont fui, si l'on prend à leur égard une mesure particulière telle que l'envoi dans un camp, elles ne tombent plus sous le coup de l'article 26.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) estime que le représentant de la Belgique est victime d'un malentendu car il n'y rien dans le paragraphe 1 qui indique qu'un réfugié peut rester dans un pays pendant un certain temps, et n'est pas tenu de se présenter « sans délai » avant d'être découvert par les autorités. M. Henkin interprète les mots « sans délai » comme signifiant que le réfugié doit se présenter lui-même aux autorités dès qu'il a pénétré dans le pays.

M. JUVIGNY (France) estime qu'il est encore une autre raison d'admettre cette interprétation comme évidente, dans l'état actuel de l'article 26. En effet, le premier alinéa de cet article fait allusion à un acte volontaire. Une personne qui se présente aux autorités d'un pays après avoir franchi clandestinement ses frontières, fait un acte volontaire. Au contraire, si l'on se place dans l'hypothèse envisagée par le représentant de la Belgique, il n'y a plus d'acte volontaire ; car c'est l'autorité de police qui a découvert le réfugié se trouvant en situation irrégulière et qui l'amène aux autorités. Dans ce cas, le réfugié en question ne saurait plus bénéficier de l'article 26.

M. HERMENT (Belgique) ne voit pas pourquoi, dans ces conditions, il faudrait maintenir les mots « ou se trouvent » car ils impliquent que les réfugiés sont déjà sur la territoire.

Le PRESIDENT cite à titre d'exemple l'hypothèse où un réfugié entre dans un pays sans être autorisé à y rester pendant les trois mois qui précèdent son embarquement. Il et tout à fait possible que ce réfugié ne soit pas en mesure d'obtenir dans un délai de trois mois, les papiers dont il a besoin pour partir, et à l'expiration de cette période, il sera, en vertu du paragraphe 1 de l'article 26, dans la situation d'une personne qui se trouver sur le territoire sans autorisation, et il devra en ce cas se présenter sans délai aux autorités.

M. WINTER (Canada) estime que le paragraphe 1 ne concerne évidemment que les actes volontaires des réfugiés, comme l'a dit le représentant de la France. Si le réfugié se présente involontairement aux autorités, c'est-à-dire uniquement après avoir été arrêté, il relèvera naturellement de la législation du pays.

M. SCHURCH (Suisse) indique que la législation fédérale suisse contient une disposition analogue au principe énoncé dans le premier alinéa de l'article 26, c'est-à-dire qu'un réfugié ayant franchi clandestinement la frontière pour des raisons reconnues valables n'est pas punissable. En outre, la législation fédérale suisse ne considère pas comme punissable la personne qui lui prête assistance, si ses mobiles sont honorables. Cette dispositions présente une certaine importance pour les organes des oeuvres bénévoles d'aide aux réfugiés.

L'article 26 ne renferme aucune disposition semblable, et le représentant de la Suisse considère qu'il y aurait lieu de combler cette lacune. En effet, il se peut fort bien qu'en droit interne, on considère l'aide apportée à une étranger franchissant illégalement la frontière comme une infraction indépendante, qui subsiste même si le réfugié n'est pas punissable.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) remercie l'observateur de la Suisse d'avoir fait constater la présence d'une lacune possible dans la rédaction de l'article. Il ne croit pas que la Commission ait envisagé la question, et il ne propose pas de remanier le texte de l'article, de façon à le compléter ; mais il estime qu'il conviendrait de prendre acte des commentaires de l'observateur de la Suisse dans le compte rendu de la séance, et il espère que les pays en tiendront compte.

M. JUVIGNY (France) s'associe aux observations formulées par le représentant des Etats-Unis d'Amérique.

Le PRESIDENT estime que si le Comité accepte les propositions de l'observateur de la Suisse, le Comité de rédaction pourrait être saisi de cette proposition.

M. PEREZ-PEROZO (Venezuela) préfère la proposition des représentants des Etats-Unis et de la France, tendant à pendre acte des commentaires de l'observateur de la Suisse dans le compte rendu de la séance.

M. JUVIGNY (France) précise que ce n'est pas parce qu'il veut s'opposer à l'insertion d'une mention quelconque dans le texte de la Convention qu'il s'est associé à la proposition du représentant des Etats-Unis d'Amérique.

Cependant, une telle insertion demanderait une étude extrêmement attentive.

Il s'agit là d'une question entièrement nouvelle, et le problème de la responsabilité pénale des personnes morales est, en France, un problème extrêmement délicat qui fait l'objet d'une jurisprudence parfois discordante. Dans ces conditions, toute disposition prise en la matière ne manquerait pas de poser, dans ce pays, des problèmes d'interprétation particulièrement difficile

C'est pourquoi le représentant de la France n'a pas proposé formellement son insertion dans le texte de la Convention.

Il souligne, d'autre part, que, si cette idée était retenue, il faudrait distinguer deux formes d'assistance prêtée par les oeuvres d'aide aux réfugiés. Il est tout à fait d'avis qu'une oeuvre d'assistance ne doit pas être pénalisés parce qu'elle a aidé un réfugié qui s'est présenté à elle. C'est là, en effet, un devoir d'humanité qu'il faut admettre. Mais l'assistance aux réfugiés peut aller au delà du territoire national, et certaines oeuvres d'assistance pourraient se transformer, dans certains cas, en de véritables organisations de passage clandestin de frontière. Le représentant de la France se demande s'il serait de l'intérêt des réfugiés eux-mêmes que de telles organisations, dont l'activité pourrait tomber sous le coup de lois beaucoup plus générales, existent à l'intérieur des territoires nationaux.

Pour toutes ces raisons, et étant donnée les multiples problèmes d'ordre juridique qui ne manqueraient pas de se poser, le représentant de la France considère qu'il suffit de mentionner ce problème dans le compte rendu de la séance, en espérant que les gouvernements s'inspireront des vues très généreuses de la législation fédérale suisse on la matière.

Le PRESIDENT pense que si le Comité estime suffisant de prendre acte des commentaires de l'observateur de la Suisse dans le compte rendu de la séance, il pourra s'en tenir là.

Il en est ainsi décidé.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) déclare que le Comité est spécialement tenu d'examiner les commentaires des gouvernements non représentés. Toutefois, il ne partage pas l'avis du Gouvernement chilien sur l'article 26 (E/AC.32/L.40, page 52) ; car, à son avis, cet article n'aurait pour les réfugiés aucune conséquence défavorable, et il n'y a pas de mal à le faire figurer dans la Convention même s'il ne s'applique pas de la même façon dans tous les pays.

Le Comité décide de renvoyer le texte de l'article 26 au Comité de rédaction.

Article 27 : Expulsion et refoulement du réfugié résidant régulièrement au pays d'accueil.

Le PRESIDENT signale que le paragraphe 1er de l'article traite du fond de la question, le paragraphe 2 de la procédure et le paragraphe 3 du délai accordé aux réfugiés, pour se faire régulièrement admettre dans un autre pays. Il propose donc d'examiner les paragraphes un à un.

M. WINTER (Canada) déclare que son pays pourra difficilement admettre l'article 27, qui est incompatible avec les dispositions de la loi sur l'immigration et de la loi sur l'opium et les stupéfiants. La loi sur l'immigration prévoit l'expulsion des déments et autres indésirables du même genre, et la loi relative à l'opium et aux stupéfiants rend cette mesure obligatoire. Dans la pratique, la législation a été amendée pour tenir compte de trois considérations : d'abord, le pays d'origine de l'étranger peut refuser de la recevoir après son expulsion ; ensuite, la sanction risque d'être hors de proportion avec le délit ; enfin, la déportation dans un autre pays risque de mettre en péri la vie de la personne déportée. L'article 28 traite de ce troisième cas. Si l'on vie de la personne déportée. L'article 28 traite de ce troisième cas. Si l'on se place au point de vue du projet de Convention, on peut bien entendu estimer que les réfugiés qui se sont rendus coupables de délits passibles d'expulsion ne résideront plus régulièrement au Canada ou seront passibles d'expulsion pour des raisons de sécurité national conformément au paragraphe 1 de l'article 27. Si l'on n'admet pas cette interprétation, le Gouvernement canadien hésitera à accorder aux réfugiés des privilèges dont les étrangers ordinaires ne jouissent pas.

La question est d'une grande importance car elle se pose à propose d'un grand nombre d'autres articles du projet de Convention. Pour le Canada, il existe deux catégories de réfugiés ; d'une part, ceux qui sont entrés dans le pays pour un court laps de temps, ne sont pas naturalisés et sont traités sur le même pied que les autres étrangers, d'autre part, les immigrants. Le Gouvernement canadien désire accorder un traitement satisfaisant à cette deuxième catégorie de réfugiés, mais il estime impossible de leur accorder un traitement meilleur qu'aux immigrants venant de pays tels que le Royaume-Uni, les Etats-Unis d'Amérique ou la France. Le Canada tient à ce que les réfugiés s'assimilent à la collectivité nationale et ne demeurent pas des éléments isolés ; une fois admis, ils reçoivent le statut de personnes résidant régulièrement dans le pays et jouissent le tous les droits et privilèges des Canadiens, mais n'ont aucun droit ni privilège spécial.

Il ne fait pas oublier non plus que si l'on accorde aux réfugiés des privilèges spéciaux, on risque fort de créer, chez les autres personnes résidant dans le pays où ils ont cherché refuge, une certaine hostilité à jour égard. Or, il faudrait éviter cette conséquence.

Le Comité de rédaction pourrait discuter du sons de l'expression « ordre public ».

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) avoue que sa délégation continue à s'inquiéter de l'emploi du terme « ordre public », en partie à cause de son imprécision et en partie parce qu'elle craint que ce terme n'embrase une notion trop vaste. Il ne pense pas que lorsque l'article a été rédigé, l'intention des auteurs ait été d'empêcher que des réfugiés puissent être expulsés pour la plupart des motifs relevant de la législation applicable aux étrangers en général. Toutefois, ces auteurs auraient dû préciser leur intention de façon explicite, et le représentant des Etats-Unis croit que l'on pourrait trouver une meilleure formule.

M. HERMENT (Belgique) croit qu'il n'est pas possible de définir cette notion « d'ordre public ». Les autorités nationales elles-mêmes ne sauraient la préciser. Cela peut évidemment comporter certains dangers ; c'est cependant une garantie qui doit être laissée aux gouvernements contractants. En effet, si un réfugié est condamné à une peine assez grave, sa présence peut être jugée indésirable. D'autre part, il se peut également que l'activité d'ordre politique d'un réfugié soit jugée indésirable pour des raisons « d'ordre public ».

Le représentant de la Belgique pense que si le Comité essaie de définir cette expression, il n'aboutira à aucun résultat. Cependant, il demande qu'elle soit conservée dans l'article 27. Cette expression figure d'ailleurs dans de nombreux traités de droit international, et son interprétation a toujours été laissée à la discrétion des Etats contractants.

M. JUVIGNY (France) souligne que cette notion, bien qu'ayant fait l'objet de thèses fort longues, n'est pas encore définie de façon précise.

Pour ce qui et des observations formulées par le représentant du Canada, il estime que les dispositions de l'article 27 y parent, au moins implicitement. En effet, l'article 27 prévoit que « les Etats contractants n'expulseront un réfugié résidant régulièrement sur leur territoire que pour des raisons de sécurité nationale ou d'ordre public et en vertu d'une décision rendue selon la procédure prévue par la loi » : Or la loi canadienne à laquelle le représentant du Canada a fait allusion prévoit l'expulsion d'office des étrangers condamnés pour les délits qu'elle définit. Dans ces conditions, les tribunaux ont la possibilité de prononcer à titre complémentaire, une peine d'expulsion : il s'agit là d'une décision judiciaire qui entre dans le cadre de l'article 27. Il se peut également que la loi canadienne autorise ou même oblige l'administration à tirer les conséquences de cette peine, sans intervention des tribunaux ; dans ces cas-là, la compétence de l'administration est liée, et il s'agit encore d'une « décision rendue en vertu de la procédure prévue par la loi ».

Si l'on se place sur le plan des faits, il est évident que les auteurs de l'article 27 n'ont pas voulu que ces dispositions favorables aux réfugiés puissent couvrir des infractions de droit commun réprimées pénalement, ou conférer à des délinquants de droit commun, parce qu'ils sont des réfugiés, des droits que n'ont même pas les nationaux. Le représentant de la France estime que si l'on ne cherche pas à forcer le sens des dispositions de l'article 27, les craintes exprimées par le représentant du Canada ne sont pas fondées.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) déclare que l'explication du représentant de la Belgique n'a pas dissipé ses appréhensions, mais les a au contraire aggravées à cause des exemples qu'il a donnée. Il semble que l'on puisse s'abriter derrière l'expression « ordre public » pour se débarrasser d'un réfugié sous prétexte que, pour une raison ou pour une autre, il est indésirable. L'orateur se demande s'il suffirait de dire simplement « pour les raisons prévues par la loi pour l'expulsion des étrangers ».

M. PEREZ-PEROZO (Venezuela) ne tient pas à engager une discussion sur la définition de l'expression « ordre public ». Comme les représentants de la France et de la Belgique l'on fait observer, elle figure déjà dans plusieurs instruments internationaux et est généralement acceptée ; on la trouve, par exemple, dans les Convention de 1933 et 1938 et à l'article 29 de la Déclaration universelle des droits de l'homme.

Dans son pays, tout au moins, il y a un lien direct entre la notion « d'ordre public » et le maintien de la paix et de la stabilité de l'Etat. Si cette paix de cette stabilité sont menacées, le Gouvernement peut, pour des raisons d'ordre public, prendre diverses mesures, par exemple : suspendre l'application de certaines garanties constitutionnelles, interdire les réunions publiques ou imposer des restrictions à la liberté de circulation. En ce cas, ces mesures s'appliqueraient aux étrangers aussi bien qu'aux nationaux et on ne pourrit ni ne devrait faire exception pour les réfugiés. En réalité, on peut interpréter la mention qui st faite de l'ordre public au paragraphe 1er de l'article 27 comme un avertissement donné aux réfugiés d'avoir à s'abstenir de toute activité politique dirigée contre l'Etat. Il importe essentiellement de la maintenir.

Les exemples cités par le représentant du Canada relèvent du droit commun. Des sanctions pénales ont été prévues pour certains délits et l'on ne saurait accorder aux réfugiés le privilège d'un législation spéciale, pour la simple raison qu'ils sont réfugiés.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) estime que, pour les réfugiés, les motifs d'expulsion ne doivent pas être plus étendus que pour les autres étrangers, mais qu'ils doivent être exactement les mêmes. Il est difficile au Gouvernement du Royaume-Uni d'accepter les paragraphe 1 et 2 de l'article 27 et il lui semble à la fois possible et souhaitable de les remplacer par un texte, voisin de celui de l'article 9 du projet de Pacte relatif aux droits de l'homme. En adoptant une rédaction de ce genre, en donnerait un commencement d'exécution à la proposition du représentant des Etats-Unis tendant à assurer aux réfugiés le même traitement qu'aux étrangers en général ; ce texte garantirait qu'il ne sera procédé à aucune expulsion si ce n'est en application de la législation et de la procédure établies, et il fournirait toutes les garanties nécessaires.

M. WINTER (Canada) appuie la suggestion du représentant du Royaume-Uni, qu'il était d'ailleurs lui-même sur le point de faire. L'article 9 du projet de Pacte relatif aux droits de l'homme est plus explicite que l'article 27 et contient, pour les réfugiés, des garanties que l'article 27 ne prévoit pas.

Répondant au représentant du Venezuela, il signale que les motifs d'expulsion sont définis de façon claire et formelle dans la loi canadienne sur l'immigration et que les cas individuels ne relèvent pas du droit commun.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) se demande s'il serait bon de remplacer cet article de la convention par un article du projet de Pacte relatif aux droits de l'homme. Lorsqu'il a déclaré précédemment que les réfugiés ne doivent être expulsés que pour des raisons identiques à celles qui motivent l'expulsion d'autres étrangers, il a voulu dire que ces raisons doivent être conformes à celle qui sont prévues par la législation en vigueur. Ce qu'il craint surtout, c'est que l'on donne à l'expression « ordre public » un sens beaucoup plus étendu que celui qu'elle semble avoir en apparence. A son avis, les réfugiés ne doivent pas être expulsés pour des motifs qui ne soient pas définis par la loi, ni pour les raisons de maladie ou d'indigence ; ils ne doivent être expulsé que pour avoir commis des crimes ou délits qui doivent être définis de façon aussi précise que possible. De même l'expulsion de réfugiés doit être interdit pour des motifs prévus par une législation qui autoriserait l'expulsion pour des raison telles que la maladie ou l'indigence. L'orateur estime que l'on doit s'efforcer d'élaborer un texte d'article qui tiendrait compte de ces considérations.

M. GIRAUD (Secrétariat), rappelant que l'on a suggéré au cours du débat de traiter les réfugiés comme les étrangers, fait remarquer que d'après le droit international actuel, les étrangers ne jouissent d'aucune garantie. Le droit international n'impose pas aux Etats l'obligation de n'expulser les étrangers que pour des raisons prévues par la loi. Un Etat peut agir de la sorte en vertu de son pouvoir discrétionnaire, parce qu'il estime que l'étranger est indésirable.

Si certains Etats donnent des garanties aux étrangers, ce n'est pas parce que le droit international les y oblige.

M. PEREZ PEROZO (Venezuela) pense que si le représentant des Etats-Unis doute qu'il convienne d'employer l'expression « ordre public » ; il voudra bien peut-être expliquer l'expression assez voisine « public emergency » utilisée aux Etats-Unis d'Amérique.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) déclare que le terme « national emergency » s'applique à une situation proclamée telle par le Chef de l'Etat.

Il précise que la délégation des Etats-Unis ne s'est pas opposée à l'emploi du terme « ordre public » à l'article 2, bien qu'elle n'en ait pas parfaitement compris la portée. Toutefois, l'emploi de ce terme à l'article 27 est différent ; en effet, imposer aux réfugiés l'obligation générale de se conformer aux mesures prises en vue du maintien de l'ordre public n'est pas du tout la même chose qu'autoriser leur expulsion pur des raisons d'ordre public, si tout indésirable est considéré comme compromettant l'ordre public. C'est seulement lorsque ce terme est appliqué au cas particulier de l'expulsion que le représentant des Etats-Unis est hostile à son emploi.

M. WEIS (Organisation internationale pour les réfugiés) déclare que la question de l'expulsion est de la plus haute importance pour les réfugié. Dans les conventions antérieures, on s'est servi de l'expression « ordre public » et, quelle que soit la définition qui en a été donnée, l'orateur estime qu'en pratique, elle a général généralement tendu à restreindre les cas d'expulsion des réfugiés par rapport aux autres étrangers.

Plusieurs représentants out dit qu'il n'y avait pas de rasions d'accorder de privilèges spéciaux aux réfugiés. Au contraire, le représentant de l'Organisation internationale pour les réfugiés estime qu'il y a de fortes raisons de la faire, la principale étant que l'étranger qui possède une nationalité effective peut, en cas d'expulsion, retourner dans le pays dont il a la nationalité tandis que pour le réfugié, qui n'a pas d'autre pays où se rendre, c'est une question de vie ou de mort.

L'expression « selon la procédure prévue par la loi », que l'on trouve au paragraphe premier de l'article 27, s'applique à des procédures généralement juridiques mais aussi administratives qui s'accompagnent de certaines garanties, les quelles sont énoncées au paragraphe 2. Les termes employés dans le projet de Pacte relatif aux droits de l'homme indiquent nettement que ces garanties doivent être prévues par la loi. L'article 27 doit être rédigé de façon plus explicite ; l'article 9 du projet de Pacte a une portée très générale mais il faut qu'une convention relative aux réfugiés soit élaborée de façon plus précise et donne une interprétation d'expressions telles que les mots « procédure » et « garanties ».

M. ROBINSON (Israël) constate que, depuis le commencement des débats du Comité à Lake Success jusqu'à une date toute récente, on n'a pas eu tendance à assimiler les réfugiés aux étrangers mais que cette tendance commence maintenant à se faire sentir de manière insidieuse. On voudrait accorder aux réfugiés le minimum de droits concédé aux étrangers. Cependant, il n'est certainement pas contraire à la justice de prendre aussi en considération le fait qu'aucun pays n'est disposé à accepter les réfugiés comme nationaux alors que les étrangers peuvent retourner dans le pays dont ils ont la nationalité.

Le question fondamentale est de savoir si le Comité propose de placer l'expulsion des réfugiés sur le même plan que l'expulsion des autres étrangers quels qu'ils soient. Une fois cette question réglée, il s'en posera une autre, à savoir : sur quels points le réfugiés doit-il être assimilé aux étrangers et sur quels points doit-on faire une distinction ? L'article 27 énonce trois motifs pour les quels les Etats contractants pourront envisager d'expulser des réfugiés. En premier lieu, dans la mesure où un Etat a le droit d'exiger que toutes les personnes qui résident sur son territoire aient une bonne conduite, il est fondé, sous certaines réserves, à assimiler les réfugiés aux autres étrangers. Il y a lieu de faire observer que l'article 2 demande aux réfugiés de se conformer aux lois et règlement du pays dans lequel ils se trouvent.

En second lieu, il faut se rappeler que les notions de sécurité nationale et d'ordre public sont interprétées différemment dans les divers pays. Toutefois, prises au sens étroit, ces deux nations ne fournissent aucun argument permettant de traiter les réfugiés autrement que les étrangers ordinaire.

Le troisième cas est différent, et il y a lieur ici d'établir une distinction très nette le traitement à accorder aux étrangers en générale et le traitement à accorder aux réfugiés. On est aujourd'hui arrivé à un stade où, dans la législation sociale, on peut parler de « cas sociaux » et le grand problème est de savoir qui est responsable des « cas sociaux » que présentent les réfugiés. Pou les étrangers, c'est leur pays ; mais les réfugiés n'ont pas de pays. Si les réfugiés ne sont pas ressortissants, au sens politique du terme du pays où ils résident ils en sont cependant ressortissants au sens moral. L'orateur estime que les pays doivent accepter les réfugiés comme des être humains, avec toutes les infirmités et les faiblesse inhérentes à la condition humaine, et les traiter en conséquence lorsqu'ils ont contrevenu aux lois du pays.

La question des garanties à accorder aux réfugiés est une de celles qui ont provoqué de graves conflits avec les législations nationales. Le représentant d'Israël partage le sentiment du représentant de l'Organisation internationale pour les réfugiés, mais il croit que les pays n'accepteront pas de reviser les textes législatifs ou administratifs en vigueur à seule fin de les adaptent au cas particulier des réfugiés. Il faut prendre les pays tels qu'ils sont, et le Comités doit se résoudre à accepter la situation en espérant que les pays où la loi est respectée agiront de leur mieux envers les réfugiés. Le seul genre de garanties que l'on puisse obtenir ce n'est pas celles qui e entraîneraient la modification du régime administratif ou de la constitution des pays mais simplement l'extension des garanties existantes.

L'orateur suggère donc de réunir en un seul les paragraphe 1 et 2 de l'article 27 et de traiter en même temps l'importante question des motifs d'expulsion et celle de la procédure, de dresser une liste des motifs d'expulsion et d'énoncer les dispositions nécessaires relatives à la procédure prévue par la loi. Même alors quelque chose serait encore dû aux réfugiés ; il est impossible de ne pas prévoir qu'ils demeureront toujours dans uns situation plus défavorable que les étrangers. Le solution, c'est le paragraphe 3 de l'article 27 qui l'apporte. Le règle y serait énoncée de façon claire et précise : on prendrait en considération, no la situation d'étrangers, mais celle de réfugiés ; et c'est à eux que des garanties seraient accordées. Si le Comité arrive à un accord sur les idées fondamentales, le Comité de rédaction pourra élaborer un nouveau texte d'article d'où toute ambiguïté sera supprimée.

M. JUVIGNY (France) dit qu'il a été très sensible au brillant exposé du représentant d'Israël.

Il concède au représentant des Etats-Unis que la notion d'ordre public peut évoquer des souvenirs désagréables, puisque c'est à partir de cette notion que s'est exercé le pouvoir absolument discrétionnaire de certains Etats totalitaires non seulement vis-à-vis des réfugiés et des étrangers, mais aussi de leurs propres nationaux.

Cependant, dans les pays gouvernés par le principe de la suprématie de la loi, il s'est dégagé une jurisprudence judiciaire et administrative que permet aux juristes et même à l'opinion publique de savoir ce que l'on entend par « ordre public ». Ainsi, en matière d'expulsion, la législation qui s'applique aux étrangers en France prévoit expressément une procédure d'appel devant une Commission d'appel siégeant auprès du Ministre de l'Intérieur. Cette procédure purement administrative n'est nullement discrétionnaire, car les étrangers peuvent, le cas échéant, comme les nationaux, s'adresser aux tribunaux d'appel compétents en matière administrative. La notion d'ordre public a donc été précisée et limitée. Le maintien de l'expression « ordre public » auquel le Gouvernement français est attaché pour certaines raisons, ne constitue pas un risque pour les réfugiés. A la vérité, ceux-ci sont, au regard de la notion d'ordre public, placée dans la même situation que celle où se trouvent les Français devant le pouvoir de police, qui s'exerce dans certains cas sur la base de la même notion.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) constate que, contrairement à l'impression qu'il avait eue au cours des précédentes discussions du Comité, l'expression « ordre public » que, dans la législation britannique et américaine, équivaut plus ou moins à « public policy », n'est pas interprétée de la même façon dans certains autres pays.

Il semble, d'après ce qu'a dit le représentant du Venezuela, que dans son pays, l'expression « ordre public » s'apparente, pas son sens, à ce que l'on appelle aux Etats-Unis « national emergency ». Ce représentant peut être assuré qu'aux yeux de la délégation américaine, l'expression « sécurité nationale » englobe les cas de « national emergency ». Il n'est absolument pas question d'éliminer la possibilité de recourir à l'expulsion dans des circonstances analogues à celles qu'envisage le représentant de Venezuela. On a argué du fait que les disposition législatives relatives à l'ordre public s'appliquent aussi bien aux nationaux qu'aux étrangers. Il y a cependant une énorme différence : contrairement aux étrangers, les nationaux ne peuvent être expulsés pour de tels motifs. L'orateur a été heureux d'apprendre que, si vague qu'elle puisse être, la notion d'ordre public ne saurait donner lieu à des abus, tout au moins en France, en Belgique et au Venezuela. Il ne manquera pas de courtoisie jusqu'à faire remarquer que d'autres pays pourraient fort bien donner à ce terme une application moins libérale, mais se bornera à signaler qu'il importe dans un instrument juridique de définir avec précision les notions juridiques.

Il propose donc le texte suivant que, espère-t-il, pourra être accepté par les pays dont la législation repose sur la notion d'ordre public ; ce texte tient compte de la distinction établie avec beaucoup de compétence par le représentant d'Israël entre les divers motifs d'expulsion :

« Les Etats contractants n'expulseront un réfugié résidant régulièrement sur leur territoire que pour des raisons définies par la loi, se rapportant à la sécurité nationale ou fondées sur la perpétration d'actes illégaux ».

Cette formule permettrait d'expulser un réfugié qui aurait commis un crime grave mais ne viserait pas ce que le représentant d'Israël a appelé les « cas sociaux ».

Le PRESIDENT déclare que les mots « ou fondées sur la perpétration d'actes illégaux » ne le satisfont pas entièrement. Le fait de circuler de circuler à bicyclette du côté interdit de la chaussée constitue un acte illégal tout comme le plus grave des crimes. Il vaudrait peut-être mieux remplacer l'expression « ordre public » par « sécurité publique », terme vague également, qui ne viserait pas les cas extrêmes pour les deux parties, mais n'engloberait pas à la fois, comme le fait la rédaction proposée par le représentant des Etats-Unis, les délits extrêmement graves et les peccadilles, ce qui autoriserait l'expulsion d'un réfugié qui aurait commis le plus léger délit.

M. WEIS (Organisation internationale pour les réfugiés) croyait que le représentant des Etats-Unis avait proposé de combiner son texte et celui de l'article 9 du projet de Pacte relatif aux droits de l'homme, où il est prévu qu'un réfugié ne peut être expulsé que pour des délits reconnus comme constituant des motifs d'expulsion. Il est peur probable que le fait de circuler à bicyclette sur un trottoir puisse constituer, dans un pays quelconque, un motif légal d'expulsion.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) regrette de n'avoir pas précisé davantage sa pensée : il ne voulait nullement dire, bien entendu, que n'importe quel délit constituerait un motif d'expulsion. Il voulait, au contraire, apporter une double garantie en stipulant, d'abord que les motifs d'expulsion doivent être des motif reconnus valables par la loi, et ensuite, que ce texte ne vise pas les personnes dont le cas relève de la législation sociale.

En ce qui concerne la proposition du Président, l'orateur précise qu'aux Etats-Unis d'Amérique, la notion de « sécurité publique » est étroitement liée à celle de « sécurité nationale », et ne peut par conséquent englober des délits, même aussi graves que le vol.

Le PRESIDENT pense que la formule proposée par le représentant des Etats-Unis rendrait toute expulsion impossible dans certains pays. D'un autre côté, dans les pays où les expulsions sont du ressort exclusif du Ministre de la Justice ou de l'autorité équivalente, et où il a aucune autre disposition juridique, un réfugié faisant l'objet d'un arrêté d'expulsion n'aurait absolument aucun recours. Dans les pays où les expulsions n'accompagnent pas automatiquement divers châtiments, le Ministre de la Justice doit décider dans chaque cas particulier si le châtiment d'un crime doit être doublé de l'expulsion.

M. HERMENT (Belgique) fait remarquer qu'en Belgique, l'expulsion est un pouvoir du roi, et que la loi ne spécifie pas dans quels cas il doit y avoir expulsion.

Il se demande si cette discussion n'est pas animée d'un esprit de méfiance vis-à-vis des gouvernements ; car enfin, les Etats qui ont signer et ratifier la Convention auront certainement l'intention d'accorder un régime assez favorable aux réfugiés.

M. Herment insiste pur que l'on ne change pas cette notion d'ordre public admise depuis longtemps. Si le Comité spécial s'écartait de la jurisprudence et de l'interprétation établies, loin d'améliorer la situation, il risquerait de l'aggraver. Il faut laisser aux gouvernements le pouvoir d'expulsion, et cela même dans des c s que l'on ne peut prévoir, car il est des circonstances imprévisibles. Sans cela, ce texte ne sera accepté qu'avec de nombreuses réserves qui ôteront toute valeur à cet article.

M. JUVIGNY (France) craint que la proposition du représentant des Etats-Unis d'Amérique n'ait en partie pour objet de chercher une solution à un faux débat.

En effet, il y a des législations qui, parmi les motifs d'expulsion, prévoient explicitement les menaces ou atteintes à l'ordre public. Or, le Comité ne veut certes pas faire changer les dispositions législatives nationales dans un domaine aussi important, surtout à l'époque actuelle.

Par conséquent, quelle soit la formule adoptée, la notion d'ordre public réapparaîtra nécessairement pour ceux des pays de droit écrit ou elle est traditionnellement accepté. Toute autre formule qu'on pourrait chercher à élaborer risque donc de demeurer illusoire.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) estime que, puisqu'il semble que dans certains pays, la loi prévoit qu'un étranger peut être expulsé pour des raisons d'ordre public, la seule solution aux difficultés du Comité serait de conserver le texte actuel du paragraphe 1 de l'article 27, et peut-être d'y ajouter un certain nombre d'exclusions précises, en stipulant par exemple qu'un réfugié ne pourra être expulsé pour indigence ou maladie.

Le PRESIDENT considère que, puisque ces exclusions sont déjà prévues dans le projet de Pacte des droits de l'homme, le Comité aurait tour de laisser entendre aux Gouvernements signataires du projet de Convention qu'il les soupçonne de vouloir se dérober aux dispositions du Pacte.

Les termes employés dans le paragraphe 1 de l'article 27 figurent déjà dans les Conventions antérieures, et le Président a l'impression que les Gouvernements répugneraient à en accepter de tout différents. Les critiques qu'il a entendues ne l'ont pas convaincu de la nécessité de modifier certains termes auxquels ont fini par s'attacher des traditions, ainsi que des interprétations courantes dans les tribunaux, et qui, à sa connaissance, n'ont jamais donné lieu à des critiques ni à des discussions publiques.

M. JUVIGNY (France) est disposé à admettre que l'on insère quelques tempéraments dans l'article 27, dans le sens indiqué par le représentant des Etats-Unis d'Amérique.

Il tient cependant à rappeler au Comité que si l'on insère des tempéraments et si on limite la portée de la clause en question à deux ou trois catégories de cas, certains juristes interpréteront le texte a contrario et en déduiront la possibilité d'expulser pour toutes les raisons, sauf celles qui sont ainsi stipulées. Ce n'est certes pas le but visé. D'ailleurs, il est toujours mauvais de laisser la possibilité d'interpréter a contrario.

D'autre part, si un pays a vraiment l'intention d'expulser des réfugiés parce que ceux-ci constituent charge pour charge pour la communauté du fait de leur état de santé par exemple, ce pays sera nécessairement appelé, s'il ratifie la Convention, à formuler des réserves à l'égard de l'article concernant l'assistance publique. Evidemment, présenter des réserves sur l'article 18 n'équivaut pas stricto sensu, à présenter des réserves sur l'article 27, bien que la frontière entre les deux catégories de réserves ne soit pas très précise.

Enfin, le représentant de la France estime que, si vague qu'elle soit, la notion d'ordre public correspond, du moins dans les jurisprudences de certains pays, à des garanties plus grandes pour les réfugiés que celles que pourrait donner une rédaction hâtive qui ne prévoirait pas tous les cas et qui, d'autre pat, se prêterait à une interprétation a contrario.

Le PRESIDENT constate que le paragraphe 1, qui a été à diverses reprises adopté dans d'autres Convention et qui vient à nouveau d'être étudié par les Gouvernements, n'a suscité de la part de ces Gouvernement que deux observations. La seule réponse que l'on puisse faire à l'observation du Canada (E/AC.32/40, page 53) est que les termes « ordre public » s'appliqueraient sans aucun doute à l'expulsion d'étrangers condamnés en vertu de la Loi sur l'opium et les stupéfiants. Etant donné le dommage public que cause le commerce des stupéfiants, on ne saurait opposer la moindre objection à cette interprétation. Le seul autre commentaire est celui du Gouvernement australien (E/1703/Add.7, page 3) qui objecte qu'en restreignant les motifs d'expulsion de sécurité nationale à l'ordre public, on risque de garantir aux réfugiés un traitement de faveur. Or ce traitement de faveur est exactement ce que le Comité entendait obtenir. Le Comité est précisément d'avis que le réfugié ne doit pas être expulsé, par exemple, pour des motifs de déficience mentale ou physique. Les deux observations formulées ne constituent donc pas une raison suffisante pour éveiller la méfiance des Gouvernements à l'égard des intentions du Comité en modifiant des termes qui ont rendu de grands services depuis 1920.

M. ROBINSON (Israël) constate que la discussion s'est rétrécis au point d'aboutir à une séparation très nette entre ce que l'on pourrait appeler l'élément conservateur et les partisans d'un remaniement du paragraphe 1. Parlant au nom de ces derniers, il pense que l'on pourrait parer à l'objection formulée par le représentant de la France en mentionnant l'article 20. Ce qu'il s'agit de savoir, c'est s'il convient de prévoir une garantie excluant les cas relevant de la législation sociale, et si l'article 20 fournirait cette garantie. C'est affaire d'interprétation, mais M. Robinson estime qu'une telle référence préciserait d'une manière suffisamment nette l'intention du Comité.

C'est pourquoi il suggère au Comité d'accepter à titre provisoire le libelle actuel du paragraphe 1 et d'inviter le Comité de rédaction à chercher un texte permettant d'exclure les cas relevant de al législation sociale.

M. JUVIGNY (France) est disposé à accepter l'addition à l'article 27 d'un nouvel alinéa traitant des « cas sociaux », dont il a été fait mention au cours du débat.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) pense que le Comité devrait pouvoir se ranger provisoirement aux avis combinés des représentant d'Israël et de la France, et laisser au Comité de rédaction le soin de rechercher une rédaction satisfaisante.

M. HERMENT (Belgique) estime que le Comité devrait décider tout d'abord si cet article doit ou non être modifié. Si le Comité décidait que cet article doit être maintenu dans sa forme actuelle, il serait encoure utile de la renvoyer au Comté de rédaction.

La PRESIDENT, répondant à une question de M. WEIS (Organisation internationale pour les réfugiés), indique que les termes « procédure prévue par la loi » qui figurent et au premier et au deuxième paragraphes de l'article 27, seront étudiés lorsque le Comité abordera l'examen du deuxième paragraphe.

M. CHA (Chine) estime que le Comité est en mesure de trancher plusieurs questions, à savoir : celle de savoir s'il convent de réunie en un seul, les premier et deuxième paragraphes, ce que le représentant du Royaume-Uni propose de faire afin de pouvoir reprendre les termes de l'article 9 du projet de Pacte des droits de l'homme ; puis, les question soulevées à propos des termes « ordre public » et « procédure prévue par la loi ». La délégation chinoise pourrait accepter la proposition tendant à réunir en un seul les deux premiers paragraphe, si la majorité du Comité y tient. Toutefois, M. Cha préférerait voir retenir a notion d'« ordre public », qui est très importante en Chine, où les moeurs et les coutumes, non seulement diffèrent sensiblement de celles d'autres pays, mais diffèrent encoure d'un région à l'autre. M. Cha lui-même est originaire d'un région montagneuse où les maris ont à parcourir de grandes distances pour se rendre à leur travail, ce qui fait qu'il s ne peuvent rendre visite à leur épouses qu'une fois tous les trois ans. Les femmes restent, en général, extrêmement fidèles à leur mari absent, et si l'une d'elles venait à recevoir la visite d'un étranger cela causerait un grand scandale. La notion d'ordre public présente une importance en fonction de telles particularités des circonstances et des coutumes.

La notion de « procédure prévue par la loi », familière à quiconque est au fait du droit coutumier anglo-américain, peut être acceptée sans difficulté par la délégation chinoise.

M. JUVIGNY (France) fait observer que l'intervention du représentant de la Chine souligne combien peuvent être différentes les diverses interprétations données de la notion d'« ordre public ». En effet, l'exemple cité par le représentant de la Chine relèverait, en France, de ce que l'on appelle le droit privé.

Le PRESIDENT pense que tout le monde admettra qu'étant donné les différences de coutumes, ce qui dans un pays serait affaire d'ordre public ne le serait pas dans un autre. C'est ainsi que la distillation clandestine de spiritueux n'est, dans certains pays, qu'un problème fiscal, alors que, dans d'autres, elle constitue un problème d'ordre public. Il se peut encoure, pour reprendre l'exemple cité par le représentant du Canada, qu'il y ait des pays - le Président pour as part, espère qu'il n'en est rien - où l'on considère que, si quelqu'un croit devoir s'intoxiquer au moyen de stupéfiants, c'est strictement son affaire. Il serait donc impossible de donner, des questions d'ordre public, une définition précise et valable pour tous les pays.

Il semble que le Comité pourrait accélérer le cours de ses travaux en renvoyant la question au Comité de rédaction, en condition qu'il soit bien entendu, non seulement que l'article fera l'objet d'une seconde lecture, aussi que la première lecture est simplement ajournée, de sorte que les représentant auront l'occasion d'examiner deux fois la question à fond.

M. PEREZ PEROZO (Venezuela), tout en acceptant la suggestion du Président, estime qu'il convient de trancher par un vote la question de savoir s'il faut conserver les termes « ordre public ». Si la question est laissée à la discrétion du Comité de rédaction, et si celui-ci décide de supprimer les termes en question, la discussion actuelle risquerait de se répéter en deuxième lecture.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) est d'avis que l'inclusion ou l'exclusion des termes « ordre public » devrait être laissée entièrement à la discrétion du Comité de rédaction. Si, en raison du vote, le Comité de rédaction recevait pour directive d'employer les termes en question, cela l'empêcherait de chercher, et peut-être de trouver, une solution satisfaisante ne comportant pas l'emploi de ces termes.

Le PRESIDENT déclare, lui aussi, qu'il est préférable de ne pas donner de directives au Comité de rédaction.

M. JUVIGNY (France) reconnaît que le Président est guidé par le souci de laisser au Comité plénier ainsi qu'au Comité de rédaction toute la souplesse désirable. Cependant, il ne semble pas opportun, étant donné la date limite que le Comité s est assignée pour l'achèvement de ses travaux, de provoquer plusieurs discussions sur cette question. C'est pourquoi le représentant de la France estime qu'il serait bon d voter immédiatement sur la double question de savoir, d'abord s'il convient d'ajouter un nouvel alinéa dans lequel seraient indiqués les cas relevant de la législation sociale qui ne doivent pas 'être considérés comme entrant dans la notion d'« ordre public », étant entendu qu'il appartiendra au Comité de rédaction de déterminer quels sont ces cas. Ensuite s'il faut maintenir les mots « ordre public » dans le premier alinéa de l'article 27. M. Juvigny considère qu'en prenant des décisions sur ces deux questions, le Comité plénier guider utilement les travaux du Comité de rédaction.

M. GIRAUD (Secrétariat) fait observer que les cas relevant de la législation sociale sont traitées dans un article spécial. Il est possible qu'un Etat fasse des réserves au sujet de cet article quoi qu'il en soit, M. Giraud ne croit pas que les cas « sociaux » relèvent de la notion d'« ordre public ».

M. JUVIGNY (France) partage l'opinion du représentant du Secrétariat, et précise qu'il n'avait admis cette possibilité que pour prévoir l'hypothèse où certaines législations feraient centrer les cas « sociaux » dans la notion d'« ordre public ». Il ajoute qu'il n'en est pas ainsi dans la législation française, et rappelle que la France a accueilli dernièrement un nombre important de réfugiés faisant partie du « reliquat insoluble ».

M. HERMENT (Belgique) se proposait de parler dans le même sons que le représentant de la France. C'est pourquoi il ne voit pas la nécessité d'inclure un tel paragraphe dans l'article 27.

Le PRESIDENT craint que le Comité n'envisage d'introduire dans une Convention internationale une disposition qui semble laisser entendre que les cas relevant de la législation sociale sont d'ordre public. Faire des réserves formelles à l'égare des termes « sécurité nationale » et « ordre public » risquerait de constituer un dangereux précédent.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) considère que, puisque le Comité semble, de toute évidence, unanime à estimer que des motifs d'ordre social ne sauraient justifier des mesures d'expulsion, la seule question qui reste à trancher est celle de savoir s'il convient de les exclure expressément, ou de laisser les comptes rendus des séances du Comité indiquer cette interprétation d la notion d'« ordre public » d'eux-mêmes. Selon M. Henkin, c'est le Comité de rédaction qui devrait prendre cette décision.

Le PRESIDENT met aux voix la proposition visant à introduire dans le paragraphe 1 de l'article 27 des réserves formelles concernant les cas relevant de la législation sociale.

Cette proposition est rejetée par 5 voix contre 2, et 4 abstentions.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique), expliquant son abstention, dit qu'à son avis, il n'appartient pas au Comité de décider comment le Comité de rédaction doit exprimer une idée sur laquelle l'accord général s'est fait. Selon lui, la question n'aurai pas où être mise aux voix, et le Comité de rédaction a toujours le droit de rechercher une formule exprimant les intentions du Comité.

M. WINTER (Canada) pense, lui aussi, qu'aucun vote n'aurait du intervenir.

Le PRESIDENT précise que rien n'empêche le Comité de rédaction et les membres du Comité qui assisteront à ses délibérations de présenter toutes les propositions qu'il leur plaira.

M. HERMENT (Belgique) avait cru comprendre que ce vote enlevait précisément au Comité de rédaction la possibilité d'insérer un tel alinéa.

M. GIRAUD (Secrétariat) précise qu'il conviendrait toutefois de savoir quelle serait la politique suivie. En effet, quand on expulse un étranger indigent, on le renvoie dans son pays d'origine. Dans le cas d'un réfugié, il ne saurait en 'être question.

Le PRESIDENT explique que le Comité de rédaction ne sera pas formellement chargé de trouver une formule excluant les cas relevant de la législation sociale, mais que tout membre qui voudrait soulever la question pourra le faire. Le résultat du vote qui vient d'avoir lieu n'est pas autre chose qu'une directive.

M. HERMENT (Belgique) croyait que le Comité de rédaction ne pouvait se saisir d'un article que lorsque celui-ci lui était expressément renvoyé pour être rédigé à nouveau.

M. ROBINSON (Israël) juge que le résultat du vote n'est pas concluant ; en effet, tous ceux qui, comme lui-même, ont voté contre la proposition, l'ont fait, non parce qu'ils désiraient ne pas exclure les cas « sociaux », mais parce qu'ils pensaient que ces cas étaient déjà amplement exclus par les termes de l'article 27 ou de l'article 20. Tant qu'il restera dans l'esprit des partisans de la proposition le moindre doute quant à la question de savoir si les articles 20 et 27 garantissent l'exclusion des cas « sociaux », la question pourra toujours être soulevée au Comité de rédaction.

Le PRESIDENT espère que le Comité voudra bien se rallier à la thèse du représentant d'Israël. A son avis, le travail du Comité s'est heureusement ressenti du fait que, par le passé, les directives que le Comité a données au Comité de rédaction n'ont jamais été exagérément formelles.

M. HERMENT (Belgique) se range à l'avis du Président.

Le PRESIDENT propose de renvoyer au Comité de rédaction la question soulevée à propos des termes « ordre public », sans voter à ce sujet en Comité. Il propose en outre que le Comité passe à l'examen du paragraphe 2 de l'article 27, qui prévoit un recours contre les arrêtés d'expulsion.

Il en est ainsi décidé.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) dit que, comme le Président les observation du Royaume-Uni sur le paragraphe 2 de l'article 27 (E/AC.32/L.40, page 56), l'expulsion d'étrangers dépend, dans le Royaume-Uni, de la décision personnelle du Secrétaire d'Etat. Toutefois, ce dernier est directement responsable devant le Parlement, qui est prompt à critiquer toute apparence de rigueur. L'opinion publique, elle aussi, est perpétuellement sur le qui-vive. Un étranger menacé d'un arrêté d'expulsion peut communiquer avec ses amis, ses conseillers juridiques, et avec des membres du Parlement, qui peuvent faire des représentation en son nom ; il peut aussi se rendre au Ministère de l'Intérieur. Si l'étranger est détenu, ce qui bien entendu serait rarement le cas, il ne pourra évidemment se rendre en personne au Ministère de l'Intérieur, mais il pourra user de toutes les autres méthodes permettant de faire des représentations. Il pourra également invoquer l'habeas corpus

Le paragraphe 2 présente une difficulté, parce qu'il stipule que l'étranger ou ses représentants doivent comparaître personnellement devant le Secrétaire d'Etat. Toutes les méthodes permettant de faire des représentation lui sont accessibles, aux termes du droit anglais, sauf celle qui a été choisie dans le projet de convention.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) est convaincu que la procédure de représentations à laquelle a fait allusion le représentant du Royaume-Uni ne commence pas à l'échelon du Secrétaire d'Etat, bien que la décision définitive puisse être prise par lui. Il est compréhensible que le Secrétaire d'Etat en ne puisse accorder une entrevue personnelle à tous les réfugiés menacés d'expulsion ; mais, étant donné la portée des termes « autorité compétente », peut-être serait-il possible à quelque autre autorité compétente d'accorder audience au réfugié. Si une telle interprétation se révèle acceptable pour le Royaume-Uni, il se peut qu'elle réponde également aux besoins des réfugiés d'autres pays. Si, en revanche, il était impossible de s'arranger ainsi, la délégations des Etats-Unis voudrait que l'on supprimât le membre phrase « conformément aux lois et procédures en vigueur dans le pays », si ce membre de phrase peut être interprété comme signifiant « sauf lorsque les lois et procédures en vigueur dans la pays prévoient qu'aucune audience ne sera accordée ». Si le membre de phrase en question n'a pas cette dernière signification, il pourrait être conservé, dans l'espoir d'aboutir à un compromis.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) pense que le Comité de rédaction aboutirait peut-être à un tel compromis s'il s'inspirait des passages correspondants du projet de Pacte relatif aux droits de l'homme.

Le PRESIDENT approuve la suggestion du représentant du Royaume-Uni.

M. JUVIGNY (France) demande que le Comité de rédaction tienne compte de l'observation formulée par le Gouvernement de la France, et remplace les mots « conformément à » par les mots « compte tenu de ».

Le PRESIDENT considère que l'on pourrait prendre acte, dans le rapport du Comité, de l'observation du Gouvernement autrichien, que se rapporte également au paragraphe 2.

Il est décidé de renvoyer le paragraphe 2 de l'article 27 au Comité de rédaction.

Le PRESIDENT constate que les observations des Gouvernements du Chili et du Royaume-Uni portent en partie sur le paragraphe 3.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) indique que le Gouvernement du Royaume-Uni critique plutôt la libelle que le fond du paragraphe 3. Il est évident que si le titre de voyage d'un réfugié qui peut être renvoyé dans un autre pays est presque arrivé à expiration, on ne saurait lui accorder les mêmes délais, pou trouver un autre pays acceptant de le recevoir, qu'à un réfugié dont le titre de voyage est encore valable pour longtemps. Il s'agit uniquement d'une question de rédaction.

Il est décidé de renvoyer le paragraphe 3 de l'article 27 au Comité de rédaction.

Article 28 : Défense d'expulsion et de refoulement sur les frontières des territoires où la vie ou la liberté du réfugié est menacée.

Le PRESIDENT attire l'attention sur les observations du Gouvernement du Royaume-Uni relatives à l'article 28 (Doc. E/AC.32/L.40, page 55).

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) déclare qu'il n'entend pas revenir sur les résultats acquis lors de la première session. La difficulté est simplement que le Gouvernement du Royaume-Uni ne sait pas exactement ce qu'il doit faire dans le cas où un réfugié trouble l'ordre public dans le Royaume-Uni. Il ne fait pas allusion aux crimes ordinaires, mais à des activités comme l'incitation au désordre. Dans ces, sans qu'il y ait déclaration d'état de siège, la présence d'un réfugié pourrait cependant être jugée très indésirable. Le Gouvernement du Royaume-Uni n'a aucunement l'idée d'agir avec rigueur dans des cas de ce genre ; et de fait, il espère que la simple existence du pouvoir d'expulser le fauteur d troubles pourrait servir à retenir celui-ci dans des limites raisonnables. Toute l'aide concevable serait fournie à ce réfugié pour lui permettre d'entrer dans un autre pays, et on irait même jusqu'à l'aider à obtenir un permis d'entrée. Bien entendu, on ne tromperait pas les autres pays ; on leur expliquerait la situations sans rien leur en cacher ; mais il pourrait arriver qu'un tel individu se sente plus a son aise dans un autre pays. Toutefois, pour prévoir le cas où tous ses efforts pour obtenir la permission pour un réfugié d'entrer dans un autre pays se révéleraient infructueux, une disposition qui rendrait illégale l'expulsion de ce réfugié pourrait être une source d'embarras. Bien entendu, on n'userait pas du pouvoir d'expulser l'étranger si cela devait mettre sa vie en danger, mais si les persécutons qui l'attendent dans son pays d'origine ne sont pas très graves, le gouvernement du pays où il s'est réfugié pourrait se sentir un peu plus enclin à l'y renvoyer, à supposer qu'il refuse d'amender sa conduite et puisse trouver un autre pays d'accueil.

L'orateur se demande si d'autres gouvernements éprouvent la même difficulté. La Gouvernement du Royaume-Uni n'a pas encoure pris de décision définitive, mais il pense que ce serait une mesure grave que de se priver entièrement du pouvoir d'expulser un réfugié dans ces circonstances particulières. Il ne faut pas oublier que l'article 2 impose au réfugié certains devoirs à l'égard du pays d'accueil.

M. ROBINSON (Israël) pense que le problème soulevé par le représentant du Royaume-Uni est très réel. Il s'agit de l'individu socialement dangereux, qui a encore juridiquement droit à sa liberté. A ce qu'il comprend, d'après la législation du Royaume-Uni, un tel individu, une fois qu'il a purgé sa peine de prison, conserve intact son pouvoir de faire encore du mal.

L'orateur se demande si la solution ne serait pas d'introduire, dans l'article 28, une disposition analogue à la deuxième phrase du paragraphe 3 de l'article 27. Il comprend que le Gouvernement du Royaume-Uni sera dans l'impossibilité d'accepter une telle proposition si sa législation ne prévoit pas la « mesure d'ordre interne » à laquelle l'article 27 fait allusion ; mais même dans ce cas, ce serait une solution pour les autres pays qui se trouvent en face du même problème.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) est certain que le représentant du Royaume-Uni ne désire pas porter atteinte au principe de l'article 28. Il pense qu'il serait très fâcheux de laisser entendre dans le texte de cet article qu'il pourrait y avoir des cas, même tout fait exceptionnels, où un homme pourrait être envoyé à la mort ou au devant de persécutions.

Le représentant du Royaume-Uni pourrait peut-être trouver une tournure de phrase qui, tout en reconnaissant le principe de l'article 28, s'appliquerait aux cas exceptionnels dont il a parle, mais l'orateur est heureux qu'aucune propositions formelle n'est été présentée. Il ne voit pas d'inconvénient à accepter la suggestion du représentant d'Israël, bien qu'elle semble inutile, étant donné que tous les droits auxquels les gouvernements ne renoncent pas explicitement à l'article 8 sont réservés, sans qu'il soit nécessaire de la dire.

M. SCHURCH (Suisse) indique que son Gouvernement a toujours suivi le principe énoncé dans cet article et qu'il n'a raison de modifier sa manière d'agir. Cependant, le Gouvernement suisse désire se réserver le droit, dans des cas tout à fait exceptionnels, d'expulser un étranger indésirable, même si ce dernier n'a pas la possibilité de se rendre dans un pays autre que celui d'où il s'est enfui, étant donné que le Gouvernement fédéral pourrait se trouver facilement dans une situation où il n'aurait pas d'autre moyen de se débarrasser d'un étranger qui s'est gravement compromis.

En cutter, il suppose que cet article n'implique pas qu'un réfugié que se présente aux autorités à la frontière d'un pays doit admis uniquement parce qu'il ne peut pas être refoulé dans un pays où sa vie serait menacée. Il croit comprendre que l'article 28 ne concerne que les réfugiés résidant régulièrement dans un pays et non ceux qui demandent à y être admis ou qui y ont pénétré clandestinement. Un afflux extraordinaire de réfugiés en Sise pourrait mettre les autorités fédérales dans l'impossibilité de les accepter tous, malgré leur désir d'en recevoir le plus possible.

M. ROBINSON (Israël) pense que l'idée qui est à la base de l'article 28 est que dans certaines circonstances ; le pire qui puisse arriver à un réfugié est d'être refoulé dans son pays d'origine. Le gouvernements doivent pouvoir chercher uns solution dans les cas où un individu trouble l'ordre public ; mais ils ne doivent pas le renvoyer dans le pays où la mort l'attende. La Comité pourrait peut-être trouver un autre moyen de mettre cet individu dans l'impossibilité de nuire à le société.

Il existe un malentendu manifeste dans l'esprit de l'observateur suisse en ce qui concerne l'application de l'article 28, Au cours des débats de la première session, on a décidé que l'article 28 visait à la fois les réfugiés résidant régulièrement dans un pays et ceux auxquels on donne asile pour des raisons humanitaires. Apparemment, le Gouvernement helvétique est disposé à accepter les dispositions de l'article en ce qui concerne les réfugiés en résidence régulière, mais non pas en ce qui concerne ceux qui ont pénétré illégalement sur son territoire et auxquels il a donné asile. L'orateur craint que le Gouvernement helvétique ne vienne à constater que son interprétation est contraire l'opinion générale qui a prévalu au sein du Comité lorsque celui-ci rédige cet article.

M. WEIS (Organisation internationale pour les réfugiés) se bornera à ajouter aux remarques du représentant d'Israël que l'article 28 signifie exactement ce qu'il dit. Il impose un devoir négatif en interdisant l'expulsion d'un réfugié sur les frontières de certains territoires, mais n'impose pas l'obligation d'autoriser le réfugié à élire résidence.

M. JUVIGNY (France) considère que toute possibilité, même dans des circonstances exceptionnelles, de refouler un véritable réfugié, c'est-à-dire une personne qui répond aux définitions soigneusement pesées de l'article 1, vers son pays d'origine, est non seulement une meure absolument inhumaine, mais est contraire à l'objet même de la Convention.

Il suffit de se reporter à la définition du réfugié, figurant à l'article 1, pour voir combien, même dans un texte juridique, des éléments d'ordre psychologique sont entrés en ligne de compte. Prendre ces éléments en considération dans une définition d'une part, et permettre la possibilité même exceptionnelle, de refouler un réfugié, dans son pays d'origine, d'autre part, constitue, de toute évidence, une pratique absolument contradictoire.

L'orateur ne voudrait pas inciter les membres d'un comité technique à sortir du domaine du droit. Toutefois, il tient à dire qu'il n'est pas de pire catastrophe, pour un individu qui est parvenu, au prix de maintes difficultés, à quitter un pays où il est soumis à des persécutions, que de se voir renvoyé dans ce pays, sans parler des représailles que l'y attendent.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) accueille avec satisfaction la déclaration du représentant de la France, étant donné que l'article 28 s'applique particulièrement aux pays dans lesquels il est facile d'entrer illégalement. Son seul but est d'empêcher le refoulement d'un réfugié vers un pays dans lequel il craint d'être exposé à la fois aux persécution qu'il a fuies et à des représailles pour sa tentative d'évasion. Etant donné que les Etats-Unis d'Amérique ne se trouvent pas dans une situation géographique de nature à leur faire recevoir de nombreuses personnes entrant illégalement sur leur territoire, l'appui donné par les représentants de la Belgique et de la France à la rédaction actuelle de l'article est particulièrement bienvenu.

Le PRESIDENT rappelle au Comité que le Danemark est également un pays de premier accueil et qu'il est facile d'atteindre en barque à rames l'une de ses 485 îles, dont les côtes ont une longueur énorme. Cependant, il estime que même si les travaux du Comité n'aboutissaient qu'à ratification par un certain nombre de pays du seul article 28, on n'aurait pas perdu son temps. Personnellement, il regretterait qu'on apportât des changements à la rédaction, mais il suggère de laisser au Comité de rédaction le soin de décider s'il convient de rechercher un compromis qui pare aux objections du représentant du Royaume-Uni sans porter atteinte au principe, où s'il convient d'adopter la suggestion du représentant d'Israël.

Il en est ainsi décide.

Article 30 : Coopération des autorités nationales avec les Nations Unies.

Le PRESIDENT, constatant que le Comité a réglé à la séance précédente, le cas de l'article 29, attire son attention sur l'article 30 et sur les observations que les Etats-Unis ont présentés à son sujet (Doc. E/AC.32/L.40, page 57).

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) estime qu'en rédigeant l'article 30, le Comité a hésite à énoncer de façon trop précise l'obligation pour les Etats contractants de coopérer avec le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugié. Toutefois, étant donné que le Conseil économique et social a reconnu le lien nullement négligeable qui unit les dispositions de la Convention et les attributions du Haut-Commissaire, cette hésitation n'est pas justifiée. Le paragraphe 6 du Préambule au projet de Convention relative au statut des réfugié, tel qu'il a été approuvé par le Conseil (Doc. E/1818), est ainsi conçu :

« Considérant que le Haut-Commissaire pour les réfugiés devra veiller à l'application de la présente Convention, et que la mise en oeuvre effective de cette Convention dépend de l'entière collaboration des Etats avec le Haut-Commissaire, et dans une large mesures, de la coopération internationale ».

M Henkin espère que ce lien sera reconnu lorsque l'Assemblée générale approuvera le statut du Haut-Commissariat,

L'amendement proposé dans observations des Etats-Unis est donc destiné à retirer ce ton hésitant à l'article 30. Il est nécessaire d'apporter une légère modification à l'amendement tel qu'il figure dans le document E/AC.32/L.40, étant donné qu'au cours des délibérations du Conseil, il a été suggéré qu'il ne convention pas de parler du successeur d'un fonctionnaire qui est sur le point d'entrer en fonctions. Les mots : « ou avec toute institution qui lui succédera », figurant dans l'amendement qu'il est propose d'apporter au paragraphe 1 de l'article 30, doivent dans être remplacés par les mots « avec toute autre institutions », et les mots « ou à toute institutions des Nations Unies institutions compétente ». Ces modifications feront disparaître l'impression que la longévité du Haut-Commissariat est mise en doute, et plus, sil a convention reste longtemps en vigueur, les Etats contractants auront la faculté de désigner tout autre office de leur choix pur présenter les rapports dont il est question au paragraphe 2.

M. ROBINSON (Israël) appuie l'amendement des Etats-Unis, à condition qu'il soit soumis à un nouvel amendement si l'Assemblée générale modifie le mandat du Haut-Commissaire.

M. JUVIGNY (France) ne voit aucun inconvénient à accepter la rédaction que vient de proposer le représentant des Etats-Unis d'Amérique. Toutefois, à son avis, il serait préférable de dire : « dans la forme demandée », au lieu de : « dans la forme prescrit », cette dernière formule pouvant évoquer quelque pouvoir du Haut-Commissaire vis-à-vis des Etats. Or, il s'agit seulement d'obtenir des Etats une présentation suffisamment uniforme des renseignements fournis par eux pour que le travail du Haut-Commissaire en sot facilite.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) trouve parfaitement acceptable la suggestion du représentant de la France. Le mot « prescrite » a été employé parce qu'il figurait dans le texte original de l'article 30. On peut laisser la question au Comité de rédaction.

M. HERMENT (Belgique) trouve que la formule : « Les Etats contractants s'engagent à coopérer pour la surveillance de l'application des dispositions de cette Convention » n'est pas très heureuse et suggère de dire par exemple : « s'engagent à faciliter la tâche du Haut-Commissariat ».

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) suggère de laisser également au Comté de rédaction le soin de régler cette question.

L'ensemble de l'article 30 est renvoyé au Comité de rédaction.

Article 31 à 40

M. ROBINSON (Israël) estime qu'en ce qui concerne les articles 31 à 40, on pourrait peut-être s'écarter de la procédure normale qui consiste à faire examiner ces articles d'abord par le Comité, ensuite par le Comité de rédaction, puis de nouveau par le Comité, car ces clauses ne portent pas sur le fond même de la Convention ; ce ne sont en effet que les clauses habituelles qui figurent plus ou moins régulièrement dans toutes les conventions internationales.

De l'avis de M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique), la proposition du délégué d'Israël ne peut soulever d'objections, sauf en ce qui concerne les articles au sujet desquels des observations ont été présentées, ce qui est notamment la cas de l'article 36.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) exprime l'espoir que les Comité voudra en premier lieu examiner l'article 31 au sujet duquel le Gouvernement britannique a présente des observations.

Le PRESIDENT, devant la demande du délégué britannique, estime que le Comité devrait examiner l'article 31 séance tenante.

Il en est ainsi décidé.

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) explique le sens des observations que son Gouvernement a présentées au sujet de l'article 31 : le Gouvernement du Royaume-Uni préférerait que la rédaction de cet article s'inspirât de ce principe qu'un Etat que ratifie la Convention ou qui y adhère est déjà en mesure d'appliquer ses dispositions. L'orateur n'a pas d'autres observations à présenter et il ne croit pas utile d'insister dès maintenant sur l'adoption d'un nouveau texte, mais il tient à attirer l'attention des membres sur cette question, à laquelle son Gouvernement attache beaucoup d'importance.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) est d'avis qu'à cet égard une décision du Comité ne présenterait aucune utilité ; car la question devra de toute façon être examinée de nouveau par l'Assemblée générale. Le même problème se pose à propos de chaque projet de convention internationale.

Le Comité décide de renvoyer les article 31, 32 et 33 au Comité de rédaction.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) rappelle qu'au moment où l'article 34 a été rédigé, le Comité avait pensé que le Conseil économique et social serait au sein de l'Organisation des Nations Unies, l'ultime instance à laquelle il incomberait d'examiner le texte du projet de convention. Mais puisqu'il n'en sera pas ainsi, l'orateur ne voit pas très bien quel sens auraient les termes « ... à la signature de tous les Etats Membres des Nations Unies et de tout Etat non membre auquel le Conseil économique et social aurait adressé une invitation à cet effet ». Cette formule suscitera de nombreuses questions inutiles, et on se demandera quels pays doivent être invités et quels pays ne doivent pas l'être.

Le PRESIDENT propose de remplacer les mots qui ont soulevé des objections e la part du délégué américain par les mots « à la signature de tout Etat qu'il soit ou non membre des Nations Unies ».

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) estime que cette suggestion va trop loin dans l'autre sens. Il préférerait les termes « à la signature de tout Etat ».

Sir Leslie BRASS (Royaume-Uni) ne voit pas d'objections à la suggestion du représentant des Etats-Unis, mais estime qu'il faut prévoir un délai permettant d'examiner la question plus à fond et de consulter le Secrétariat.

Le Comité décide de renvoyer les articles 34 et 35 au Comité de rédaction.

M. JUVIGNY (France) croyait qu'il avait été convenu que l'examen de l'article 36 serait différé jusqu'à toutes les autres dispositions de la Convention eussent été examinées. Il convient de s'en tenir à cette décision, ne serait-ce que pour gagner du temps.

Le PRESIDENT croit comprendre que le représentant de la France propose le renvoi de l'article 36 jusqu'à fin des débats sur toutes les autres clauses du projet de convention, pour que l'on puisse ainsi savoir s'il y a lieu de prévoir des réserves.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) s'associe à la suggestion du représentant de la France et ajoute que les membres du Comité devraient, dans l'intervalle, examiner le problème de la rédaction de l'article 36.

Le PRESIDENT exprime le même avis.

Il en est ainsi décidé.

M. HERMENT (Belgique) pense qu'en fixant - dans l'article 37 - à deux le nombre des Etats qui doivent avoir adhéré à la Convention pour qu'elle entre en vigueur, on risque de limiter le nombre des adhésions. D'autre part, on risque de perdre ainsi un argument pour parvenir à un nombre d'adhésions supérieur. Il rappelle que trios Etats seulement avaient ratifié la Convention de 1938 et il propose de porter à six le nombre des ratifications ou adhésions nécessaire pour la mise en vigueur de la Convention.

M. GIRAUD (Secrétariat) craint que le chiffre de six ne soit trop élevé. Ainsi la Convention risque de n'entrer en vigueur que trop tare ou pas du tout. Pour autant qu'il s'agit de la présente Convention, il serait déjà utile qu'elle pût être appliquée, même si deux Etats seulement y ont adhéré.

Le PRESIDENT n'est pas hostile à la proposition représentant de la Belgique ; mais il est d'avis que cette question revêt une certaine importance politique, et qu'elle relève par suite de la compétence de l'Assemblée générale plutôt que de celle du Comité.

M. ROBINSON (Israël) se range à l'avis du Président.

M. JUVIGNY (France) propose d'indiquer, dans le rapport du Comité, qu'un certain nombre de membres estiment préférable, dans l'intérêt même des réfugiés, de fixer à un chiffre plus élevé le nombre minimum de ratifications ou d'adhésions nécessaire pour la mise en vigueur de la Convention.

M. HERMENT (Belgique) précise qu'il est intervenu à ce sujet sur les instructions expresses de son Gouvernement, qui ne veut pas devenir parti à la Convention si elle n'est ratifiée que par deux Etats.

M. GIRAUD (Secrétariat) signale qu'un Etat adhérer en stipulant que son adhésion ne sera valable qui si certains Etats déterminés ou un certain nombre d'Etats y ont également adhéré. Une telle clause est d'un usage si courant qu'il n'est pas même nécessaire d'en prévoir expressément l'emploi dans la Convention.

M. JUVIGNY (France) signale qu'une autre solution - dont il n'est d'ailleurs pas partisan - consisterait à laisser en blanc le nombre des ratifications requises et à spécifier dans le rapport du Comité spécial qu'en raison de l'importance politique revêt cette question, c'est à l'Assemblée général elle-même qu'il incombe de la trancher.

Le PRESIDENT est d'avis que, l'article 37 n'ayant donné lieu à aucune observation, excepté celles que le délégué belge a formulées au cours de la présente séance, la question peut être résolut comme suit : on maintiendrait le texte actuel de l'article, mais on ferait figurer une note à ce sujet dans le rapport du Comité, ainsi que l'a propose le représentant de la France.

Il en est ainsi décidé.

Après un échange de vues sur une divergence entre les versions françaises de l'article 39 dans le document E/1618 et dans le document E/AC.32/L.40 respectivement.

Le Comité décidé de renvoyer les articles 38, 39 et 40 au Comité de rédaction.

M. WINTER (Canada) se demande, à propos de l'addition éventuelle de la clause dite fédérale, si le Comité désire réellement adopter une telle clause.

M. HENKIN (Etats-Unis d'Amérique) rappelle que le Comité s'est déjà prononcé sur cette question qui n'est d'ailleurs plus de sa compétence, puisqu'elle doit être renvoyée à l'Assemblée générale.

Le séance est levée à 18 h. 05.