Bouteilles de soda vides et chèvres aux foulards colorés, une nouvelle vie pour des rapatriés burundais
Bouteilles de soda vides et chèvres aux foulards colorés, une nouvelle vie pour des rapatriés burundais
Centre de transit de Mabanda, Burundi, 29 novembre (HCR) - Quand le moment est venu de quitter le camp de réfugiés de Mtabila, en Tanzanie, pour rentrer au Burundi, Peregi Nyandwi se serait bien gardé d'oublier ses trois lapins de compagnie : c'est son bien le plus précieux.
Pour l'heure, assis au centre de transit du HCR proche de la frontière d'où il regagnera son village, le garçonnet de huit ans s'essaie à gratter la guitare que son frère de 19 ans a construite et à laquelle il tient tant. L'enfant s'interrompt pour exhiber l'un de ses lapins qui se débat, tiré par la peau du cou d'un panier de plastique vert.
Ce que ces réfugiés rapatriés - qui ont jusqu'à la fin de l'année pour regagner le Burundi - choisissent d'emporter avec eux dit tout de la façon dont ils conçoivent leur nouvelle existence une fois rentrés chez eux.
Maguelone Arsac participe à l'accueil de ces réfugiés dont, depuis la fin octobre, le HCR, l'Organisation internationale pour les migrations et d'autres partenaires organisent le rapatriement. Elle observe qu'ils rapportent tout ce qu'ils possèdent, notamment ce à quoi ils attachent le plus de valeur.
Quelle n'a pas été un jour la surprise de cet agent des services communautaires du HCR de voir que nombre d'entre eux tenaient en cage des hamsters - ces rongeurs étant destinés à agrémenter les repas, contrairement aux lapins de compagnie de Peregi Nyandwi. D'autres rapatriés étaient chargés d'ananas.
Un homme accompagné de six membres de sa famille s'en était expliqué : « C'est très énergétique : comme on ne savait pas exactement ce qui était prévu, nous avons emporté tous les ananas que nous avons pu. »
À son grand soulagement, tous les rapatriés ont reçu un repas chaud et des soins, pour ceux qui en avaient besoin ; enfin, une bonne nuit de sommeil les attendait avant que le HCR ne les achemine le lendemain vers leurs villages natals.
Les enfants ramènent des ballons de football faits de sacs en plastique compactés et solidement ficelés ; on les voit aussi descendre des autocars avec, au cou, des ampoules de lampes-tempête leur faisant d'énormes colliers.
Quant aux mères, elles conservent des bacs en plastique qui, bien qu'abimés ou cassés, rendent encore service. Les caisses remplies de bouteilles de plastique vides, dont les petits commerces à venir sauront tirer parti, ne manquent pas.
Les rapatriés rapportent toutes leurs richesses, par exemple des ustensiles confectionnés avec d'anciens bidons d'huile alimentaire, voire des éléments des maisons qui les abritaient dans les camps de réfugiés et ont été démantelées.
Pour sa part, quand on lui a demandé pourquoi rapporter un lot de portes en bois défraîchies, Athanase Nduwimana, rapatrié de 43 ans accompagné de sa femme et de ses sept enfants, a répondu sans hésiter : « Une fois chez moi, je vais construire une petite cuisine séparée de l'habitation principale. Elles iront très bien. »
Plus précieux encore, peut-être, pour ceux qui vivront de la terre au Burundi, est le bétail : dans des camions à part, vaches et cochons accompagnent les rapatriés - et aussi des chèvres ceintes de foulards de couleurs variées permettant à leur propriétaire de les reconnaître.
C'est ainsi que le révérend Prime Habonimana, pasteur d'une église chrétienne, rapporte un magnifique taureau noir, souvenir d'un programme lancé en 2004 par le HCR en Tanzanie : des bovins étaient offerts à des réfugiés s'engageant en contrepartie à faire don de leur premier veau à d'autres réfugiés.
Occupé à nourrir sa bête, le Révérend s'interrompt un instant pour dire combien celle-ci est précieuse : là où il se trouvait précédemment, le prix d'un accouplage était de 20 000 shillings tanzaniens (soit environ 12 dollars), une somme considérable pour un réfugié. Le taureau a pour nom Ziada, ce qui signifie « surplus » en kiswahili : son propriétaire a en effet vu dans le don du HCR quelque chose qu'il recevait en plus des choses ordinaires, en une sorte de bénédiction.
Pendant ce temps, le jeune Peregi, dans l'attente du retour de son aîné parti chercher pour la famille les rations distribuées par le HCR, continue de pincer les cordes de cette guitare que l'ingéniosité a fait naître d'un bidon d'huile en tôle.
Et il fredonne un cantique dont les paroles en kirundi signifient à peu près ceci : « Seigneur, nous te prions de toujours venir en aide à ton peuple ». Ce qui, dans ce lieu et à ce moment précis, se justifie tout à fait.
Kitty McKinsey, du centre de transit de Mabanda, au Burundi